Posté par MpM, le 24 mai 2013
Cher Jafar,
Les manuscrits ne brûlent pas. Tu connais cette phrase de Mikhaïl Boulgakov ? Dans Le maître et Marguerite, elle est prononcée par le Diable, mais peut être interprétée comme l'affirmation de la liberté d'expression face à l'autorité totalitaire.
Ton compatriote Mohammad Rasoulof, en choisissant cette citation comme titre de son nouveau long métrage, annonce donc la couleur avant même le générique de début.
Et de fait, le film est un brûlant pamphlet sur les atteintes à la liberté d'expression commises par le gouvernement iranien. Le coeur du film est une histoire vraie : en 1995, Téhéran avait ordonné au chauffeur du bus conduisant 21 poètes à un festival en Arménie de précipiter le véhicule dans le vide. Les artistes avaient été sauvés par les hasards du destin, et s'étaient vus ordonner de ne rien révéler. Le cinéaste Mohammad Rasoulof imagine que l'un de ces artistes décide de raconter la tentative de meurtre dans un roman.
S'ensuit un film construit comme un thriller qui raconte comment l'émissaire du pouvoir met tout en oeuvre pour retrouver les différentes versions du manuscrit et empêcher la fuite de l'information. On y assiste tour à tout à des scènes d'intimidation, de menace, de torture et de meurtre, le tout avec l'aval de l'état.
Tu l'auras compris, Les manuscrits ne brûlent pas est un film choc et révoltant qui dénonce sans fard les exactions commises à l'encontre des artistes et de tous ceux qui, plus généralement, veulent exprimer une opinion critique à l'égard de leur gouvernement. Par peur d'éventuelles représailles, aucun membre de l'équipe de tournage n'est crédité au générique. Mohammad Rasoulof assume seul la paternité du film et se dresse tel David contre Goliath face aux autorités de son pays.
Bien sûr, le cinéaste a tourné dans la plus parfaite clandestinité et sans la moindre autorisation. C'est aussi en secret que le film a été envoyé au festival de Cannes qui a décidé de le montrer dans sa section Un certain regard.
Plus frontalement que tu ne le faisais dans Closed curtain, mais avec la même force narrative, Mohammad Rasoulof porte un regard ultra critique sur les méthodes iniques des représentants de la loi en Iran et notamment sur le "programme de répression des intellectuels" qui justifie toutes les exactions.
Il garde malgré tout une petite note d'espoir : il n'est jamais possible pour un gouvernement de verrouiller à 100% les informations qui le dérangent. Dans le film, l'un des meurtres se fait ainsi sous le regard d'un témoin anonyme qui pourra à son tour raconter ce qu'il a vu. Dans la réalité, chaque spectateur ayant regardé Les manuscrits ne brûlent pas peut témoigner de l'absence de liberté d'expression en Iran et de la volonté secrète de l'état de bâillonner, si ce n'est d'éliminer, les artistes qui lui déplaisent.
Tu es mieux placé que quiconque pour le savoir, mais lorsque le cinéma permet de dénoncer les injustices et de porter à la connaissance du public les dysfonctionnements d'une société, contrecarrant de fait la volonté d'opacité et de secret de l'état, il ne fait au fond rien d'autre que ce pour quoi il a été créé : témoigner, partager et faire réfléchir.
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Posté par MpM, le 23 mai 2013
Cher Jafar,
Aujourd'hui je voudrais te parler d'un sujet moins grave que d'habitude, mais symptomatique de notre époque. Beaucoup de gens l'ignorent, mais, pendant plus de 30 ans, des jeunes de la France entière ont eu la chance de venir à Cannes et d'y décerner l'un des plus jolis prix qu'on puisse imaginer, celui de la Jeunesse. En parallèle, d'autres jeunes (une quarantaine chaque année) étaient invités pour quelques jours, juste pour profiter des films, des rencontres avec les artistes et de l'ambiance unique du festival.
Peux-tu imaginer ces cinéphiles à peine sortis de l'adolescence qui découvraient à Cannes la fine fleur de la cinématographie mondiale ? Qui voyaient le premier film thaïlandais, roumain ou iranien de leur vie ? Qui avaient une révélation face à un cinéma d'auteur, exigeant, en un mot brillant, dont ils ignoraient peut-être tout auparavant ?
Tu te doutes que ce prix, mis en place par le ministère de la jeunesse, a été à l'origine de nombreuses vocations. On en croise chaque année sur la Croisette, des anciens du Prix de la jeunesse, revenus en tant que journalistes, producteurs, attachés de presse, réalisateurs... Sans compter tout ceux qui ont attrapé le virus pour toujours, sans en faire leur métier, et qui le transmettront à leur tour à leur entourage.
Chaque année, en dix jours, le prix a fait plus pour l'éducation à l'image et l'ouverture des esprits que toutes les campagnes un peu artificielles que peuvent organiser les politiques. Ne serait-ce qu'en aidant les plus jeunes à s'interroger sur le monde à travers des films qui ont changé pour toujours leur perception de l'existence... Lorsque l'intelligence et la curiosité gagnent du terrain, c'est toujours une victoire sur la peur, l'obscurantisme et l'intolérance. À notre époque, on ne devrait pas se permettre de négliger ça.
Pourtant, le prix de la jeunesse n'est plus. Supprimé sans fleurs ni couronnes. Laissant orphelins tous ceux dont il a changé la vie, et frustrant la nouvelle génération qui n'aura pas la chance d'en profiter.
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Posté par MpM, le 22 mai 2013
Cher Jafar,
Je sais comme cela te tient à cœur que chacun puisse tourner librement les films qu'il souhaite et les montrer le plus largement possible. Sur le sujet, tu aurais sûrement beaucoup d'idées à échanger avec Mahamat-Saleh Haroun, présent en compétition à Cannes avec son film Grigris.
Le cinéaste tchadien se bat contre l'invisibilité du cinéma africain en Afrique comme dans le reste du monde. "Je pense que c'est important que l'Afrique soit présente à Cannes" a-t-il déclaré lors de la conférence de presse de Grigris. "Et il faut que l'on se batte pour faire des films importants, qui soient présents dans les grands rendez-vous cinématographiques. Le cinéma a besoin d'Afrique, et l'Afrique a besoin de ces rendez-vous importants comme Cannes. Il faut que notre présence soit vraiment banalisée."
Il a également lancé un appel aux réalisateurs africains eux-même, les invitant à prendre les choses en mains : "Il n'y a pas de circuits de distribution, il n'y a pas de visibilité dans notre propre continent. Donc il revient à chaque cinéaste africain digne de ce nom de donner une visibilité à l'Afrique, en étant dans un grand rendez-vous cinématographique (...) On ne peut pas en permanence invoquer l'absence de financements, parce qu'à un moment, il arrive aussi que peut-être les cinéastes peuvent avoir une part de responsabilité. Je me dis que le coup de tête, il faut aussi pouvoir le donner soi-même, avant de dire qu'il faut qu'en permanence quelqu'un puisse nous donner un coup de pouce".
Un discours courageux et volontaire, qui te parle, j'en suis sûre, toi qui arrives à faire des films même quand on te l'interdit, même en étant assigné à résidence. Car le cinéma c'est aussi cela, un droit que l'on s'arroge coûte que coûte, un besoin insidieux, une nécessité qui se situe au-delà des autorisations et des questions matérielles. Filmer pour exister et surtout filmer pour ne pas mourir.
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Posté par MpM, le 20 mai 2013
Cher Jafar,
Tu sais que le monde du cinéma ne t'oublie pas ? Depuis mercredi, tu es même à l'honneur sur les murs du Palais des festivals à Cannes ! C'est dans le cadre de l'exposition "les dessins de la liberté" qui réunit des dessins de presse du monde entier.
Dessins qui sont vendus aux enchères aujourd'hui au profit de Cartooning for Peace. Créée en 2008 par Kofi Annan et Plantu, cette association combat toute forme d’intolérance et rassemble des dessinateurs chrétiens, juifs, musulmans, agnostiques et athées.Environ 80 dessins humoristiques sur le thème du cinéma et de la liberté artistique ont ainsi été retenus pour la vente.
Au palais, tu apparais sous le coup de crayon tendre de Plantu dans un panneau consacré à l'Iran. Sur les deux dessins, la pellicule symbolise l'évasion sous la forme de tapis volant et d'ailes dans le dos. Ce qui est à la fois joli et ironique : dans ton cas, la pellicule peut aussi être vue comme une entrave : c'est bien parce que tu tournes des films que tu as été condamné. Une idée révoltante, insoutenable, d'un autre temps.
Depuis longtemps, Cannes défend toutes les formes de liberté d'expression. On l'oublie parfois à cause des paillettes et des montées des marches glamour, mais les artistes persécutés ont toujours trouvé leur place ici, à l'époque soviétique comme à celle de la censure chinoise. C'est pourquoi tu te devais d'être là, ne serait-ce qu'en esprit.
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Posté par MpM, le 19 mai 2013
Cher Jafar,
Il y a à Un Certain Regard un film qui te plairait, L'image manquante de Rithy Pan.
Je crois que tous les deux, vous avez du cinéma une vision commune : tu as toujours fait des films pour témoigner sur la situation actuelle de ton pays, lui effectue depuis la fin des années 80 un gigantesque travail de mémoire sur les exactions du régime khmer rouge. L'oeuvre de toute une vie, qui se poursuit aujourd'hui avec un documentaire plus intime sur l'expérience que le cinéaste fit lui-même du régime de Pol Pot dans sa jeunesse.
C'est comme un flot de souvenirs qui s'écoule sur fond de documents d'archives et de reconstitution des scènes d'époque avec de petites figurines d'argiles (ingénieux procédé imaginé par Rithy Pan pour pallier l'absence d'images). Les temps heureux avant l'arrivée des khmers rouges, puis l'exil, les camps de rééducation, la faim, la misère, la mort... On est comme emporté dans ce tourbillon d'événements, de règles, de slogans, d'injustices et d'horreur.
Au hasard, une mère dénoncée par son fils de neuf ans et exécutée froidement, des cadavres qui s'entrechoquent dans une fosse commune, une petite fille qui meurt de faim sous le regard d'autres enfants... Un monde où presque tout est interdit et d'où l'humanité disparaît peu à peu.
On est tout simplement bouleversé par ce document unique qui raconte des événements insoutenables et trouve malgré tout la force de redonner espoir en l'être humain. Parce que nombreux furent ceux qui ont résisté, même avec leurs pauvres moyens. Que les survivants de la terreur khmer ont gardé leur part d'humanité. Qu'au final, c'est Pol Pot qui a perdu.
Et en regardant ce document inestimable qui se double d'une véritable proposition cinématographique, on se dit que c'est exactement à ça que sert le cinéma, et que tous les Rithy Pan du monde doivent continuer à tourner, coûte que coûte. Toi y compris.
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Posté par MpM, le 18 mai 2013
Cher Jafar,
De quoi parlait-on aujourd'hui sur la Croisette ? De cinéma ? Des réalisateurs soumis à la censure ? De l'exception culturelle ?
Pas vraiment. Aujourd'hui, tout le monde n'en avait que pour la pluie... Au moins, c'est politiquement correct, ça n'engage à rien, et personnellement je n'ai rencontré aucun festivalier qui émette un avis divergent sur la question
Je te sens désemparé... Rassure-toi, deux autres infos ont fait le buzz, et elles avaient même un rapport direct avec le festival : d'un côté le vol de 775 000 euros de bijoux Chopard (fournisseur officiel de la Palme d'or) et de l'autre les coups de feu tirés pendant le grand journal vendredi. Certains journaux ont supprimé de vrais articles cinéma pour parler de ces deux affaires.
Peut-être pas si anodin que ça en a l'air... Vois-tu, c'est même assez représentatif d'un certain état d'esprit régnant sur la Croisette.
Parfois, on peut avoir l'impression que la France, réputée dans le monde entier pour tant aimer le cinéma, a généré une sorte de monstre médiatique qui le dépasse, à l'affût de tout ce qui brille, ce qui flatte l'égo ou fait appel aux bas instincts du citoyen. Un festival du fait divers people ou sensationnaliste où la créativité, l'intelligence, en un mot, l'art, sont juste bons à faire une brève en bas de page, entre le spectaculaire et l'anecdotique.
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Posté par MpM, le 17 mai 2013
Cher Jafar,
Aujourd'hui, l'Iran est à l'honneur sur le tapis rouge. Le film de ton compatriote Asghar Farhadi, intitulé Le passé, est présenté en compétition officielle, avec montée des marches et honneurs de la presse. Il se déroule à Paris, avec des acteurs français (Bérénice Béjo, Tahar Rahim...) et un acteur iranien, Ali Mosaffa.
C'est une histoire familiale, très ténue, avec des secrets et des révélations. J'ai envie de dire : un film très francais, et même bourgeois. Hormis le fait que Berenice Bejo ne porte pas de foulard et a un amant, il pourrait presque plaire au gouvernement de ton pays. D'ailleurs, Asghar Farhadi a déclaré à la presse qu'il venait d'obtenir une autorisation de distribution. "L'histoire se déroule ailleurs qu'en Iran, donc il a été accepté", a-t-il expliqué.
Qu'en sera-t-il de l'autre film présenté en compétition aujourd'hui, A Touch of sin de Jia Zhang-ke ? Au premier regard, on se demande comment il pourrait passer la censure chinoise en s'attaquant à la corruption des élites, au mirage économique qui pressure tout le monde et à l'exaspération des individus, prêts à tout pour briser le cercle vicieux de la misère. Pas des thèmes très flatteurs pour le régime, tout ça...
Sur le Twitter chinois (Weibo), après avoir vu la bande annonce, les internautes ont exprimé leurs craintes de voir le film censuré, voire interdit... Mais Jia Zhang-ke assure que non. Il a même obtenu l'autorisation de son pays avant de venir à Cannes, et a été en partie financé par des capitaux chinois. Les temps changeraient-ils ?
"On entre maintenant dans une ère en Chine où on est soi-même son propre média. Il y a beaucoup de discussions sur ce qui se passe dans le pays par le biais du twitter chinois", affirme le cinéaste, qui semble y déceler une volonté de conciliation du régime. Selon lui, les spectateurs chinois pourront découvrir A touch of sin exactement dans la même version que les festivaliers cannois.
De quoi reprendre un peu espoir ?
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Posté par MpM, le 16 mai 2013
Cher Jafar,
Pendant la cérémonie d'ouverture de cette 66e édition, il a été beaucoup question d'un sujet qui te tient particulièrement à cœur : la liberté d'expression. Gilles Jacob a rappelé une nouvelle fois que Cannes a vocation à être une "terre d'accueil". Pour les cinéastes, et par extension pour tous ceux qui se battent pour avoir le droit d'émettre librement des opinions.
En l'occurrence, ce sont des dessinateurs de presse qui sont à l'honneur cette année, avec une exposition de dessins humoristiques autour du cinéma. Comme le souligne Gilles Jacob : "en programmant un ensemble où vibre un appel à l'indocilité, le festival n'a pas craint de prendre le risque qu'on l'applique à lui-même ! " Joli clin d'oeil.
Mais un homme qu'une telle propension à l'autodérision doit faire rêver, c'est Zaid Doueri, le réalisateur libanais de L'attentat. Lui ne s'est moqué de personne, et subit malgré tout les foudres de son pays et de la Ligue arabe dans sa globalité.
Son crime ? Avoir tourné son film en partie en Israél avec des acteurs israéliens, ce que proscrit le bureau de boycottage d'Israël. L'attentat, d'après le best-seller de l'écrivain algérien Yasmina Khadra, sur un médecin arabe israélien découvrant que sa femme est l'auteur d'un attentat suicide à Tel-Aviv, a donc été interdit dans les 22 pays membres de l'organisation.
La ministre française à la Francophonie, Yamini Benguigui, est déjà montée au créneau pour défendre Zaid Doueri et le film est attendu en France le 29 mai. On garde donc espoir qu'il connaisse la carrière qu'il mérite.
Mais il faut t'avouer que sur la croisette, cette censure déguisée ne fait pas vraiment le buzz. Peut-être les journalistes ont-ils la tête trop farcie des frasques de la jeunesse américaine obsédée par les fringues et les starlettes vue dans The Bling Ring de Sofia Coppola ? Le pire, c'est que le film trouve un étrange écho chaque soir au moment de la montée des marches, quand le monde entier se focalise... sur une poignée de stars et les robes de marque qu'elles portent.
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Posté par MpM, le 15 mai 2013
Cher Jafar,
Ca y est, la 66e édition du Festival de Cannes va commencer. Comme chaque année, journalistes, producteurs, cinéastes et distributeurs venus du monde entier vont s’y presser, dans l’espoir de découvrir la pépite ultime. Tout le monde sera là, comme on dit. Tout le monde, sauf toi. Pourtant, comme le soulignaient les militants des droits de l’homme à Berlin en février dernier, tu devrais y être. Définitivement.
D’autant que tu as une longue histoire avec Cannes, qui t’a offert la consécration internationale en 1995 pour ton premier long métrage, Le ballon blanc. Tu as ensuite gagné bien des prix (dont un léopard, un ours et un lion), mais c’est Cannes qui t’a offert le premier : la Caméra d’or. Tout un symbole…
Cannes t’a aussi soutenu dans le conflit qui t’oppose au régime iranien : en 2010, tu es officiellement invité à faire partie du jury. En 2011, Ceci n’est pas un film est présenté hors compétition. Dans les salles, une place reste symboliquement vide, avec ton nom dessus. Et puis le silence… En 2012, un panneau interroge même : "où est Jafar Panahi ?"
Cette année, nous t'avons retrouvé. A Berlin, ton film est en compétition. Toi, tu restes à Téhéran. Interdiction de sortir du territoire...
Alors, c’est décidé, nous t'emmenons à Cannes. Puisque tu ne peux pas faire le déplacement, nous te raconterons chaque jour le festival tel que tu aurais dû le vivre. A travers les films qui, comme les tiens, parlent du monde dans lequel nous vivons. Qui sait, peut-être y trouveras-tu des échos à ta propre vie, à ton propre combat. Une manière comme une autre de te souvenir que tout cela n’est pas complètement vain.
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Posté par MpM, le 11 mars 2013
Le scandale continue. Après la lourde condamnation qui a frappé Jafar Panahi en 2010, le contraignant à une vie de reclus, et lui interdisant surtout de tourner, c'est au tour de son collaborateur de longue date Kambuzia Partovi et de l'actrice Maryam Moghadam (notre photo) d'être privés de leur liberté de mouvement après avoir participé à son dernier projet, Pardé (Closed curtain). En effet, le gouvernement iranien vient de saisir leur passeport, les empêchant de continuer à promouvoir le film dans les festivals internationaux, comme ils le firent en février dernier à Berlin.
Téhéran s'était déjà officiellement plaint du fait que le film ait reçu l'Ours d'argent du meilleur scénario lors de la Berlinale. "Nous avons protesté auprès des organisateurs du Festival, avait déclaré le responsable du cinéma iranien et vice-ministre de la culture Javad Shamaqdari selon l'agence de presse ISNA. "Nous pensons qu'ils devraient rectifier leur comportement. Tout le monde sait qu'il faut une permission pour tourner un film et l'envoyer à l'étranger. Faire ce genre de film est illégal, mais jusqu'à présent, la République islamique a fait preuve de patience à l'égard de tels actes."
Depuis l'annonce de l'existence de Pardé (qui fait suite à un premier long métrage également tourné en secret, Ceci n'est pas un film), on craint les conséquences pour Jafar Panahi et pour ceux qui l'ont aidé. A Berlin, Kambuzia Partovi avait laissé entendre qu'il s'attendait à des représailles, sans savoir lesquelles. "Nous ne savons pas quelles seront les conséquences [de cette transgression]", avait-il déclaré. "Nous ne pouvons pas prévoir ce qui va arriver. Nous sommes dans l'attente."
Une attente qui se poursuit, puisqu'il est difficile de savoir si les autorités iraniennes en resteront là. D'une part, elles savent que le sort de Jafar Panahi et plus généralement des artistes iraniens importe à l'opinion internationale : veulent-elles vraiment risquer une nouvelle mobilisation d'envergure en brisant le statu quo qui avait fini par s'instaurer ? D'autre part, le régime ne peut pas non plus donner l'impression qu'il se laisse bafouer impunément... D'où la crainte d'une action (graduée ?) dans les semaines à venir. D'autant que Pardé, lui, poursuit sa carrière. Il fera notamment la clôture du 37e festival international de Hong Kong le 2 avril prochain.
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