A peine le Festival du film de Busan terminé, malgré les menaces qui pèse sur lui (lire notre article du 17 août dernier), c'est un autre scandale politico-cinématographique que révèle le quotidien national Hankook Ilbo. Le président sud-coréen Park Geun-hye aurait créé une liste noire d'artistes qui ne soutiendraient pas son gouvernement.
Ainsi les cinéastes Park Chan-wook (Old Boy, Mademoiselle), Kim Jee-woon (Age Of Shadows) et Ryoo Seung-wan (Veteran), ou encore les acteurs Song Kang-ho (Snowpiercer), Kim Hye-soo (Coin Locker Girl) et Park Hae-il (The Host) se retrouvent dans un document d'une centaine de pages comprenant 9473 artistes. La liste du Président aurait été envoyée au ministre de la Culture, des Sports et du Tourisme en mai 2015, accompagnée d'une requête: ces artistes ne devront pas recevoir de soutiens financier et logistique.
Tout cela a fait évidemment grand bruit. Le député et ancien poète Do Jong-hwan a rendu public des transcriptions de conversations au Conseil des Arts de Corée du Sud, où, clairement, l'existence de la liste noire est connue.
Bataille politique
Les artistes ainsi pointés du doigt par le Président ont en commun d'avoir protesté contre le gouvernement après le scandale du naufrage du ferry Sewol (ce même scandale qui menace actuellement les dirigeants du Festival de Busan), ou d'avoir soutenu le rival du Président, Moon Jae-in, lors de la campagne électorale en 2012, ou encore d'avoir soutenu le maire de Séoul, Park Won-soon, lors de son élection en 2014.
Le gouvernement a répliqué à travers l'agence de presse officielle Yonhap en expliquant que cette liste n'était qu'un agrégat de documents douteux compilés ensemble à partir d'autres documents déjà rendus publics. Par ailleurs, dans un pays où le cinéma est une industrie prospère et un motif de fierté nationale, ce même gouvernement a rappelé que ces artistes avaient, malgré tout, reçu des aides publiques.
Les partis d'opposition ont demandé une enquête et souhaitent en faire une arme politique pour destituer un Président très contesté.
Le BIFFF a su comme à son habitude trouver des films de zombies divers et avariés (dans une station de ski en Autriche, en film d'animation à Séoul...), mais, cette année encore, les meilleurs thrillers sont marqués par le savoir-faire et l'excellence de la Corée du Sud.
Les débutants livrent d'ailleurs des films très aboutis et maitrisés. The Deal, premier film de Son Yong-ho qui dans un premier tiers de bobine semble s'inspirer de The Chaser (un tueur en série qui doit révéler l'emplacement des corps de ses victimes aux policiers...) mais dont le sujet se déroule trois ans plus tard : un proche d'une victime entreprend une vengeance contre le tueur qui est en prison (un moyen de le faire sortir et de le kidnapper pour le tuer...), avec une conclusion qui fait débat sur l'application de la peine de mort.
The phone de Kim Bong-joo, également un premier film, joue avec les codes du polar avec une variante de science-fiction : une bizarrerie temporelle où un veuf reçoit un appel téléphonique de sa femme un an après jour pour jour qu'elle soit retrouvée assassinée, il va alors enquêter pour faire en sorte qu'en parlant avec elle au téléphone elle évite d'être tuée un an auparavant...
Voici trois autres films coréens très différents les uns des autres mais avec une même exigence autant visuelle que narrative. Encore une fois on pourrait d'ailleurs se dire que puisqu'il n'y a pas d'équivalent en France et qu'il serait bon de distribuer ces films en salles de cinéma...
Veteran, réalisé par Ryoo Seung-wan : C'est lui le spécialiste du film d'action sud-coréen depuis longtemps avec par exemple No blood no tears, Arahan, Crying first, The Unjust (tous directement en dvd, sauf The city of violence qui a eu une sortie en salles). Un flic aussi habile pour se battre qu'intègre en toutes circonstances va enquêter contre un puissant dirigeant d'entreprise chez qui un syndicaliste aurait été retrouvé 'suicidé'...
Le film est généreux avec deux longues séquences d'ouverture pour en même temps présenter les membres de l'équipe de police et le début de l'intrigue, surtout l'occasion de deux séquences d'action (bagarre contre plusieurs dans un garage, arrestation à plusieurs d'une bande dans un port) à la fois drôles et spectaculaires avant de rentrer dans le vif de l'histoire. Tout à fait le genre de film qui rend jaloux et envieux ceux qui ont œuvré à Taken 3 ou Die Hard 4...
The exclusive : beat the devil's tatoo, réalisé par Roh Deok : Derrière ce titre en anglais improbable il y a une réalisatrice (son deuxième film, à 36 ans), car oui en Corée du Sud il y a des femmes qui dirigent des polars ! Elle confronte deux univers qui font des enquêtes : la police et la télévision. Un reporter se fait virer de sa chaine mais va tout de même voir un témoin qui avait téléphoné pour une info à propos d'un serial-killer. Il revient avec une lettre manuscrite du tueur inconnu qui y confesse ses crimes : le voila de nouveau réembauché avec ce scoop diffusé à l'antenne.
Les policiers qui enquêtaient dans une autre direction veulent en savoir plus sur sa source mais, petit problème, il s'agît d'une méprise qui n'a rien à voir avec l'individu recherché. Trop tard, la machine médiatique et policière est lancée et son erreur devient impossible à révéler tandis que le véritable tueur va continuer ses crimes... Le film est plus centré sur le fonctionnement des médias mais il contient aussi sa part de scène d'action (dont un duel brutal impliquant une troisième personne pendue...). Pour qui a trouvé le temps bien long devant Zodiac ou Spotlight...
Memories of the sword, réalisé par Park Heung-sik : La Corée du Sud, c'est aussi tout un pan de films de sabres en costumes, celui-ci est un peu la réponse coréenne aux voltiges de Tigre et dragon, aux combats du Secret des poignards volants, aux chorégraphies de Yuen Woo-ping dans Kill Bill 1&2, à l'esthétisme de The assassin... Une jeune fille qui n'a pas encore 20 ans mais est déjà experte en arts-martiaux dédie sa vie à venger l'assassinat de ses parents, mais elle ignore des secrets sur ses origines. En même temps se trame un complot politique pour prendre le pouvoir sur le trône...
On y retrouve la star Lee Byung-hun (révélé avec A bittersweet life, Le bon la brute et le cinglé, J'ai rencontré le Diable, puis GI Joe, Terminator genisys...), Jeon Do-yeon (à Cannes dans Secret sunshine, The housemaid...) et la jeune Kim Go-eun (à Cannes l'année dernière avec Coin locker girl) dans des combats virtuoses en suspension ou avec des ralentis. Les décors et costumes sont majestueux, le film est à la fois spectaculaire pour l'action et émouvant dans sa résolution. Tant de somptuosité donne la larme à l’œil...
Le 34ème BIFFF (Bruxelles International Fantastic Film Festival) se déroulera du 29 mars au 10 avril: chaque année Bruxelles se transforme en capitale du fantasy, thriller, science-fiction, zombies et autres films du genre mais-pourquoi-est-il-si-méchant-? dans une ambiance festive.
L’invité d’honneur du BIFFF qui deviendra Chevalier de l’Ordre du Corbeau (l’hommage du festival) est d’ailleurs un des plus gros fans de ce type de films et l'un des réalisateurs les plus fantasques de ces dernières années (des religieux tortionnaires dans Red State, un homme mutilé en morse dans Tusk…) : Kevin Smith viendra présenter en avant-première Yoga Hosers (après le festival de Sundance en janvier). En vedette les actrices Harley Quinn Smith (sa fille) et Lily-Rose Depp (la fille de Johnny Depp et Vanessa Paradis, qui font d’ailleurs une apparition dans le film). Elles avaient toutes deux fait leur première apparition au cinéma dans le film précédent du cinéaste, Tusk. Elles reprennent leurs rôles dans Yoga Hosers, cette fois-ci centré sur elles : les deux amies seront invitées à une soirée plutôt démoniaque...
Parmi les autres invités il y aura l’espagnol Javier Luiz Caldera (Grand prix du BIFFF 2013 pour Ghost Graduation) avec son nouveau film Anacleto, Agente Secreto(un genre de Kingsman), le coréen Ryoo Seung-wan (No Blood No Tears et Arahan c’était lui) avec ses polars Veteranet The Unjust, l’autrichien Hartl Dominik pour Attack of the Lederhosenzombies, la réalisatrice taïwanaise Hsieh Lingo et son angoissant The Bride, l’actrice chinoise Bai Ling pour le film parodique ABC’s of Superheroes…
Les films asiatiques seront encore une fois très nombreux et prestigieux: Ghost Theater de Hideo Nakata, Tag et aussi The Virgin Psychics les derniers films de Sono Sion, Yakuza Apocalypse de Takashi Miike, The Strange House de Danny Pang, Memories of the sword avec Lee Byung-hun, le succès chinois Monster Hunt, les thrillers coréens The Deal de Son Young-ho, The Exclusive : Beat the Devil’s Tattoo de Roh Deok, The Phone de Kim Bong-joo, The Tattooist de Lee Seo, la curiosité The Beauty Inside de Baek Jong-yeol, le film d’animation Seoul Station de Yeon Sang-ho, l’adaptation du manga japonais I am a Hero par Shinsuke Sato…
Les films espagnols seront aussi bien présents avec El Cadaver de Anna Fritz de Hector Hernandez Vicens, El Desconocido de Dani de la Torre, Segon Origen de Carles Porta, Summer Camp de Alberto Marini... Et bien d'autres films en provenance d'Argentine, du Méxique, de Suède... Du côté français, la production de films fantastiques étant assez faible, on se contentera de The End de Guillaume Nicloux (avec Gérard Depardieu, qui était au festival de Berlin et qui ne sortira qu'en vidéo à la demande en France) et, gloups, Les Visiteurs:la Révolution (avec Christian Clavier et Jean Réno de retour dans les couloirs du temps)... C'est dire le niveau de fantaisie dans l'Hexagone.
Chaque jour des films très attendus feront l’évènement : 31 de Rob Zombie (qui a secoué le festival de Sundance), The Invitation de Karyn Kusama, Hardcore Henry(filmé en caméra subjective façon fps), The Wave du norvégien Roar Uthaug, Into the Forest avec Ellen Page et Evan Rachel Wood, aussi Green Room de Jeremy Saulnier (découvert à Cannes puis Deauville) et The Survivalist de Stephen Fingleton (que nous avions rencontré à Dinard)... Le BIFFF s'ouvrira avec Orgueil et Préjugés et Zombies et pour la clôture le tout nouveau Alex de le Iglésia, Mi gran noche.
Et pour vous mettre en appétit de ce BIFFF 2016 en voici un avant-goût :
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34e édition du Brussels International Fantastic Film Festival
Du 29 mars au 10 avril 2016, au Palais des Beaux-Arts à Bruxelles
Infos et programmation sur le site de la manifestation