Vesoul 2020 : Regard sur le cinéma tibétain et hommage à Ronit Elkabetz

Posté par kristofy, le 11 février 2020

La ville de Vesoul, en Haute-Saône, devient comme chaque année le temps d'une large semaine une capitale asiatique : du 11 au 18 février le 26e Festival International des Cinémas d'Asie de Vesoul vous ouvre ses portes avec 84 films en provenance de 24 pays, dont 40 films inédits accompagnés d'autant d'invités. Comme toujours, on y met en lumière des cinématographies parfois raresn du continent asiatique au sens géographique, du proche à l'extrême orient : Afghanistan, Bangladesh, Chine, Corée, Inde, Indonésie, Iran, Japon, Kazakhstan, Liban, Myanmar, Philippines, Sri Lanka...

Cette année le FICA de Vesoul va mettre particulièrement à l'honneur le Tibet, avec pour la première fois une rétrospective sur ce cinéma: l'ensemble des films du réalisateur Pema Tseden (qui est d'ailleurs le seul a avoir gagné deux fois le Cyclo d'Or à Vesoul) et ceux de Sonthar Gyal, en plus de découvertes.

Les deux autres pays mis en avant seront Israël par le biais d'un hommage particulier à l'actrice Ronit Elkabetz, et le Japon avec notamment des films d'Akira Kurosawa et le meilleur de l'animation récente avec Les enfants du temps, Le mystères des pingouins, ou encore Millennium actress.

Une nouvelle fois le Festival sera riche de multiples sections, avec une compétition documentaires, une thématique "Liberté, Egalité, Créativité", qui sera l'occasion de voir ou revoir une vingtaine de classiques éclectiques tels Conte des chrysanthèmes tardifs de Mizoguchi Kenji (1939), Le Héros de Satyajit Ray (1966), Dunia de Jocelyne Saab (2005), Taxi Téhéran de Jafar Panahi (2015)...

Il y aura en avant-première Hotel by river de Hong Sang-so, le délicat et sensible Wet season d'Anthony Chen, ou le nouveau film de Pema Tseden, Balloon.

Enfin, la compétition internationale de 9 films (encore sans distributeur en France) sera arbitrée par le jury, présidé par Jay Jeon (directeur du Festival International du Film de Busan en Corée), lui-même entouré de Yuliya Kim (directrice du Festival International du Film d’Almaty au Kazakhstan, et productrice), Joji Alonso (productrice aux Philippines) et Ariel Schweitzer (critique, en Israël).

La compétition:

  • Hava, Maryam, Ayesha, de Sahraa Karimi (Afghanistan)
  • Saturday Afternoon, de Mostofa Sarwar Farooki (Bangladesh)
  • Changfeng Town, de Wang Jing (Chine)
  • A Bedsore, de Shim Hye-jung (Corée du sud)
  • Just Like That, de Kislay (Inde)
  • Among the Hills, de Mohammad Reza Keivanfar (Iran)
  • Mariam, de Sharipa Urazbayeva (Kazakhstan)
  • John Denver Trending, de Arden Roz Condez (Philippines)
  • Children of the Sun, de Prasanna Vithanage (Sri Lanka)

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26e Festival des Cinémas d'Asie de Vesoul

Du 11 février au 18 février 2019
Informations pratiques sur le site de la manifestation

3 raisons d’aller voir Tharlo, le berger tibétain

Posté par kristofy, le 3 janvier 2018

Tharlo est un berger tibétain qui mène une existence paisible dans la montagne, éloigné des réalités du monde. A l’aune de ses quarante ans, il est convoqué par les autorités locales. Les nouvelles directives du gouvernement imposent la possession d’une carte d’identité pour tous les citoyens de la République Populaire de Chine. Pour la première fois, Tharlo descend en ville. Sa découverte du monde urbain, et sa rencontre avec une jeune coiffeuse, vont bouleverser son existence…

Tharlo est un film précieux : si officiellement c'est un film chinois, il s'agit surtout d'un cinéaste originaire du Tibet. La probabilité de découvrir une oeuvre portée par le souffle de là-bas est tellement rare qu'il faut se laisser emmener. Son réalisateur Pema Tseden a eu une préférence ici pour les plans fixes et le noir et blanc. Mais il ne faut surtout pas craindre quelque chose de trop contemplatif ou de trop aride. Au contraire ce style apporte à cette histoire une certaine universalité : c'est de toute beauté et ça renforce les scènes drôles (oui, il y a de l'humour). Tharlo est un personnage de candide venu de la campagne qui (nous) révèle malgré lui une certaine corruption de rapports de force (être fiché, avoir de l'argent...) des grandes villes. L'histoire est simple: un berger à la vie simple se rend en ville pour faire une carte d'identité qu'il n'a jamais eu et dont il n'a jamais eu besoin. Pour cela, il ira chez une photographe puis chez la coiffeuse qui l'emmènera pour la nuit au karaoké et vers des rêves d'ailleurs, surtout après être devenu riche de liasses de billets...

Tharlo est un film primé : il avait été sélectionné au Festival de Venise (section Orrizonti) à l'automne 2016 avant d'être en compétition début 2017 au Festival International des Cinémas d'Asie de Vesoul, et d'y être primé du Cyclo d'or. Le jury de Vesoul était alors - composé des cinéastes de Nan Triveni Achnas (Indonésie), Euthana Mukdasanit (Thaïlande), Mania Akbari (Iran), et du coréen Im Sang-soo - avait été impressionnés par "ce portrait d'une vie triviale solitaire, par ses qualités cinématographiques, son traitement délicat de la définition de l'identité à travers son personnage principal". Tharlo a reçu aussi diverses récompenses comme le grand prix au Tokyo Filmex, et diverses nominations aux Golden Horse Awards et aux Asia Pacific Screen Awards.

Tharlo est un film qui vous fera une forte impression : pour son réalisateur Pema Tseden « Tharlo est le reflet de l’actuelle génération de Tibétains. Cette histoire montre à quel point ils sont confus et désorientés. Le film a été tourné en noir et blanc comme si la rugosité des images traduisait la situation et l’ambiance de ce vaste territoire du Tibet et l’état d’esprit de Tharlo », c'est en fait son 6ème film. De lui Jia Zhangke a dit « grâce à Pema Tseden, je me sens moins seul »...

Au Quai Branly, les horizons perdus de l’Himalaya en 9 films

Posté par Claire Fayau, le 25 décembre 2010

Quitte à avoir froid, si on se dépaysait? Partons sur les traces des explorateurs du Toit du  Monde pour retrouver  Priscilla Telmon dimanche 26 décembre à 16h au Musée du quai Branly pour une projection-table ronde en présence de Marie-Madeleine Peyronnet (confidente et secrétaire d’Alexandra David-Néel), Jeanne Mascolo de Filippis (réalisatrice) et Irène Frain.

Les films ou extraits suivants seront  diffusés :

- projection du documentaire Alexandra David-Néel, du Sikkim au Tibet interdit de Jeanne Mascolo de Filippis et Antoine de Maximy (MK2 – France - 50’- 1993)

- extraits de Voyage au Tibet interdit de Priscilla Telmon (MK2 – France – 75’ – 2008)

Priscilla Telmon dédicacera son livre "Himalayas" à la librairie du Musée le 29 décembre à partir de 14h30.

Côté cinéma, du 26 décembre au 01 janvier, le musée nous offre un cycle de 9 films, réunissant de grands classiques (Horizons perdus de Capra, Kundun de Scorcese, ou le plus récent Himalaya, l’enfance d’un chef) et un film inédit en France (Richard Gere is my hero).

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Programme sur le site du Musée du quai Branly

J.O. de Pékin : médaille d’or pour les amateurs tibétains, la France toujours à la traîne

Posté par MpM, le 13 août 2008

surmonterlapeur.jpgPendant qu’une partie de la planète se passionne béatement pour la capacité de ses représentants sportifs à courir, nager ou ramer plus vite que les autres, une poignée de résistants essaie de dénicher des talents dans des domaines malheureusement non reconnus pas le comité olympique. Deux jours avant la fameuse cérémonie d’ouverture des Jeux, mise en scène par Zhang Yimou, ancien cinéaste rebelle désormais acquis au pouvoir en place, quelques journalistes étrangers ont ainsi pu découvrir à Pékin le film Surmonter la peur (Leaving fear behind) tourné au Tibet dans le plus grand secret entre novembre 2007 et mars 2008. Ses auteurs, Dhonpup Wang chen, paysan du Tibet occidental, et Golog Jigme, moine, ont interrogé leurs concitoyens sur la domination chinoise au Tibet, les Jeux olympiques de Pékin et le Dalaï Lama. En tout, ils ont réalisé 108 interviews à l’aide d’une petite caméra vidéo. Dans la version finale du film, une vingtaine de Tibétains témoigne, presque tous à visage découvert malgré les risques encourus, sur l’oppression et la discrimination dont ils font l’objet, la détérioration et la marginalisation de leur langue et de leur culture, la sédentarisation forcée, le manque de liberté religieuse, les promesses non tenues du gouvernement chinois, etc.

Si l’existence de ce film n’a pas été tellement relayée dans les médias occidentaux, c’est sûrement qu’il y avait une actualité bien plus foisonnante du côté de la profusion (ou de l’absence) de médailles olympiques. Les deux cinéastes amateurs, eux, ont été arrêtés le 26 mars dernier, soit quinze jours après avoir envoyé les cassettes du film en Suisse, et croupissent toujours dans les prisons chinoises. C’est un cousin de Dhondup Wangchen, Gyaljong Tsetrin, exilé du Tibet depuis 2002, qui s’est chargé de monter le film. Il a également créé "Filming for Tibet" afin de le produire et de le diffuser. Rendant du même coup au cinéma son énorme pouvoir de témoignage, de transmission et de dénonciation.

Selon Tibet Info, Dhondup Wangchen et Golog Jigme ont été arrêtés le 26 mars 2008. Dhondup Wangchen (37 ans) a été vu pour la dernière fois détenu à Guangsheng Binguan à Xining (Qinghai), et Golog Jigme dans un centre de détention de la ville de Lingxia (Gansu).

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Extrait du film sur Dailymotion : http://www.dailymotion.com/playlist/xlo2i_Channel_Zero_tibet-leaving-fear-behind/video/x6dgk8_documentaire-tibet-leaving-fear-beh_news

7e Art au Tibet

Posté par vincy, le 31 mars 2008

extrait de kundun

Parfois, le cinéma peut aider à comprendre les événements qui nous entourent. Le documentaire est le genre qui s'approche le plus de la vérité historique. La fiction romance par définition, déforme par exigence narrative, mais reflète aussi les émotions et rappelle les faits tout en nous "transportant". Dans un petit ou un grand véhicule, si je peux me permettre la métaphore.

Les moines bouddhistes tibétains se battent pour que leur culture et leur langue résistent à l'invasion économique et démographique chinoise. Ce n'est pas une question d'indépendance frontralière. Cela fait logntemps que les grandes puissances, y compris l'Inde, se sont résignées à voir le territoire du Tibet au sein de la Chine. Le Tibet représente, par ailleurs, un enjeu stratégique et énergétique vital : défense naturelle contre l'Inde et le Pakistan, réservoir d'eau douce, source du Mékong et du Yang Tsé Kiang...

Il est urgent, évidemment, que le dialogue se fasse pour faire coexister pacifiquement les Tibétains et le reste de la Chine. Or, le danger est que les Tibétains, comme les Ouygours et les Tadjiks, soient "parqués" dans leur province sans possibilité d'émancipation, d'évolution, de progrès. Tandis que les trains amènent des Chinois pouvant prospérer, que le gouvernement finance des cache-misères (rénovation du patrimoine pour les touristes, construction de centre culturel folklorique), les peuples n'ont d'autres choix que de mourir dans l'extrême pauvreté ou se soulever violamment.

Le cinéma occidental s'est penché quelques fois sur les origines de ce Tibet "maoisé". Avec Brad Pitt dans 7 ans au Tibet. Avec le somptrueux Kundun de Martin Scorsese, véritable opéra sur une musique de Philip Glass. Il y a aussi le documentaire Ce qu'il reste de nous, des canadiens François Prévost et Hugo Latulippe. Bref on est loin de l'abominable homme des neiges et de Tintin au Tibet...