En 2073, la Terre est surpeuplée, aussi le gouvernement décide d’instaurer une politique d’enfant unique, appliquée de main de fer par le Bureau d’Allocation des Naissances, sous l’égide de Nicolette Cayman. Confronté à la naissance de septuplées, Terrence Settman décide de garder secrète l’existence de ses 7 petites-filles. Confinées dans leur appartement, prénommées d’un jour de la semaine, elles devront chacune leur tour partager une identité unique à l’extérieur, simulant l’existence d’une seule personne : Karen Settman. Si le secret demeure intact des années durant, tout s’effondre le jour où Lundi disparait mystérieusement…
Un scénario qui aime surprendre. La première chose qui frappe le spectateur, c'est l'inventivité du pitch. Cette dystopie cauchemardesque n'est que le cadre d'un formidable film "choral" où sept femmes/sœurs jumelles très différentes par leur personnalité doivent faire face à la disparition de l'une d'entre elles, puis d'une deuxième, d'une troisième... Ce qui vaut de multiples interrogations, pistes tortueuses, et surtout une flopée de rebondissements et de surprises. On ne s'ennuie jamais car Seven Sisters veut déstabiliser le spectateur avec une série d'incertitudes. Ajoutons à cela un environnement despotique et cruel, fascisant pour tout dire, et l'histoire devient vite passionnante. Seule l'issue, un double duel (Glenn Close contre Noomi Rapace et un autre qu'on ne divulguera pas) résoudra ce récit où même les héroïnes meurent. Ce qui est assez rare et d'autant plus trippant.
Une actrice qui aime étonner. Les sept sœurs sont toutes incarnées par Noomi Rapace. Depuis Millénium, on sait l'actrice très à l'aise dans les genres (thrillers, action, SF, ...). Pas étonnant alors de la voir faire des cascades improbables, se battre à poings nus ou à coup de portes de frigo, tirer avec un flingue sans être ridicule. Seven Sisters lui permet également de montrer l'étendue de son registre en interprétant sept femmes aux personnalités et looks très différents. Un cadeau pour une comédienne, rendu possible grâce à la magie des effets spéciaux. Cette multiplicité lui offre l'occasion d'occuper l'écran de bout en bout. Charismatique et crédible, Noomi Rapace a trouvé ici sans aucun doute le film qui correspond le mieux à son talent: une femme forte, émancipée, indépendante et résistante.
Un thriller-SF comme on aime. Un scénario sans temps morts et une actrice idoine ne suffisent pas à faire un bon film. Tommy Wirkola, jusque là réputé pour ses films de zombies (Dead Snow) et son ratage fantasy (Hansel et Gretel), a, semble-t-il, été bien plus inspiré par ce thriller futuriste. Il maîtrise parfaitement les méandres du script, réussit la composition des séquences avec sa comédienne démultipliée et surtout, à quelques rares exceptions, ne s'égare jamais dans les scènes d'action, en faisant au plus sobre quant à l'unité de temps et de lieu. Le découpage n'est pas frénétique et le rythme reste pourtant soutenu. Alternant explications qui font avancer le récit, présentation psychologique des personnages, et poursuites/combats/meurtres, le cinéaste réalise un divertissement "à l'ancienne" de haute volée où le spectateur n'est jamais pris pour un décérébré.
Adrien Brody honoré par un Leopard Club Award. Mathieu Kassovitz (qui viendra pour le premier film de Samuel Jouy, Sparring) récompensé par un Excellence Award. A ces deux acteurs, s'ajoutent Michel Merkt (Prix du producteur indépendant), Jean-Marie Straub (Léopard d'or d'honneur) et Nastassja Kinski parmi les hommages rendus cette année. Le 70e Festival de Locarno a révélé ce mercredi 12 juillet le programme des festivités.
Lynch, Huppert, Ruiz...
En compétition on retrouve notamment pas mal de productions et coproductions françaises: 9 doigts de F.J. Ossang, As Boas Maneiras de Juliana Rojas et Marco Dutra, Charleston d'Andreï Cretulescu, Good Luck de Ben Russell, Madame Hyde de Serge Bozon, avec Isabelle Huppert et Romain Duris, Mrs. Fang de Bing Wang et Wajib de Annemarie Jacir. A côté de ces films, ont note la présence de Denis Côté (Ta peau si lisse), Xu Bing (Qing Ting Zhi Yan), John Carroll Lynch (Lucky, avec David Lynch), une œuvre posthume de Raul Ruiz (La telenovela Errante), Jim McKay (On the Seventh Day), Travis Wilkerson (Did You Wonder Who Fired Gun?), Aaron Katz (Gemini) ou encore Germano Maccioni (Les astéroïdes - Gli asteroidi, avec Pippo Delbono)
Paradis, Ardant, Argento...
Pour cette édition anniversaire, le cinéma français sera très présent avec Olivier Assayas et Sabine Azéma à la présidence de deux jurys, mais aussi Samuel Benchetrit, Vanessa Paradis et Vincent Macaigne (Chien), Fanny Ardant transgenre (Lola Pater), Noémie Lvovsky et Mathieu Amalric (Demain et tous les autres jours qui ouvrira la prestigieuse programmation de la Piazza Grande), Paul Hamy et Pascal Greggory (9 Doigts) et Jean-Pierre Léaud (36 fillette). Parmi les autres stars attendues Albert Serra, Francesca Comencini, Irrfan Khan et Golshifteh Farahani (The Song of the Scorpions), Vincent Pérez et le cultissime Dario Argento. Locarno a aussi obtenu la comédie indépendante The Big Sick, véritable phénomène à Sundance, et succès inattendu au box office américain cet été dans les circuits art et essai.
Côté diversité, Locarno présentera deux blockbusters Atomic Blonde avec Charlize Theron et le thriller SF de Netflix, What Happened to Monday? avec Noomie Rapace. De Cannes, seul Good Time des frères Safdie a été retenu pour la Piazza Grande.
D'hier à aujourd'hui
Dans la section Cinéastes du présent, on notera le sud coréen Kim Dae-hwan (The First Lap), le japonais Ryutaro Ninomiya (Sweating the Small Stuff), la française Narimane Mari (Le fort des fous) et l'américain Dustin Guy Defa (Person to Person).
Enfin, est-ce pour la francophilie affirmée de cette édition? Mais la Rétrospective 2017 sera consacrée à Jacques Tourneur, disparu il y a 40 ans: "un réalisateur qui n’est encore pas reconnu à la hauteur de son talent. Tourneur a souvent tourné des films classifiés comme « série B », des films qui nous semblent aujourd’hui plus incisifs, plus visionnaires et plus actuels que leurs aînés. Car le réalisateur a toujours su mêler dans son travail l’imaginaire puissant des récits de genre et une poésie visuelle unique, héritée sans doute de sa double identité, européenne et américaine."