L’instant Court : James Bond…au service de la publicité

Posté par kristofy, le 19 octobre 2012

Comme à Ecran Noir on aime vous faire partager nos découvertes, alors après le clip Charmer de la chanteuse Aimée Mann, voici l’instant Court n° 88.

La semaine prochaine arrive le tant attendu nouveau James Bond : c’est le 23e film (50 ans après la sortie du premier), c’est le 3e joué par Daniel Craig qui est le 6e acteur de ce personnage… James Bond est un évènement entouré de chiffres, à commencer par son matricule d’agent secret 007. Mais James Bond c’est aussi d’autres chiffres avec plein de zéros : les millions des publicités.

Dans la franchise James Bond, le placement-produit est intégré au maximum dans les films et les plus grandes marques s’intéressent au personnage pour faire leur publicité. Par exemple le champagne Bollinger est partenaire depuis 1973 dans Vivre ou laisser mourir avec Roger Moore, mais la voiture de 007 n’est pas toujours une Aston Martin. BMW fut la voiture de James Bond dans trois films entre 1995 et 1999 ; l’image BMW apparaît17 minutes dans Demain ne meurt jamais, soit 15% de la durée du film !

Ce nouveau film Skyfall contient donc des pubs pour les voitures Aston Martin et les avions Virgin Atlantic, le champagne Bollinger, le soda Coca Cola zero, la bière Heineken, les costumes Tom Ford, les bijoux Swarovski… Le film est distribué par Sony Pictures Releasing et les diverses filiales de Sony y sont beaucoup représentées avec les ordinateurs Sony Electronics, les téléphones Sony Mobile, et aussi le générique chanté par Adèle dont les disques sont distribués par Sony Music Entertainment. Ces sponsors apparaissent dans le film contre un chèque d’environ 10 millions de dollars. Ces différents placements de produits ont apporté environ 150 millions de dollars pour Meurs un autre jour

La grande nouveauté de Skyfall qui va faire hurler les puristes de James Bond est sa boisson, c’en est fini de sa célèbre "vodka-martini au shaker, pas à la cuillère" (et du cocktail "vesper" dans Casino Royale car désormais il préfère boire une bière Heineken ! On pourra considérer James Bond comme un porte-manteau vendu au marketing, mais ce n’est pas nouveau. En réalité la marque Heineken est partenaire de 007 depuis GoldenEye en 1995, mais sa présence s’est fait de plus en plus imposante. Dans les spots publicitaires de la bière, on voyait jouer les personnages annexes comme John Cleese (Q) lors de la sortie de Meurs un autre jour (alors qu'il faisait la promotion de Schweppes pour Permis de tuer), ou les Bond girls Eva Green pour la sortie de Casino Royale et Olga Kurylenko pour celle de Quantum of Solace. L’image du héros James Bond était en quelque sorte protégée, mais ce n’est plus le cas. Cette année le montant du chèque a été augmenté pour que désormais 007 Daniel Craig joue dans une publicité Heineken et que aussi en plus il boive une bière dans le film Skyfall…

Voici donc une publicité pour Coca Cola, un exemple de film publicitaire qui joue avec les codes de James Bond et notamment la narration qui reprend les clichés d’une poursuite typique de 007 :

Crédit photo : image modifiée, d’après un extrait du film Coke 007.

Saint-Jean de Luz 2012 : trois questions à Thierry Neuvic

Posté par redaction, le 19 octobre 2012

Après avoir tourné avec Clint Eastwood (Au-delà) et Guy Ritchie (Sherlock Holmes : jeux d'ombre), le comédien Thierry Neuvic est annoncé dans le projet d'adaptation de la bande dessinée Tanguy et Laverdure (dans le rôle de Tanguy). Actualité chargée pour le comédien qui avait malgré tout pris le temps de venir au Festival international des Jeunes réalisateurs de Saint-Jean de Luz pour participer au jury présidé par Audrey Fleurot. L'occasion pour une rencontre informelle sur une terrasse ensoleillée, quelques heures seulement avant la cérémonie de clôture et l'annonce du palmarès...

EN : Comment avez-vous réagi lorsque l’on vous a demandé d’être membre du jury ? Aviez-vous des craintes, des appréhensions ?
Thierry Neuvic : J’ai un peu hésité, car je trouve toujours difficile de porter un regard sur le film des autres. C’est quelque chose de subjectif. Et ça pouvait aussi être intéressant de regarder ces films avec un groupe de gens qui font ce métier-là, qui ont un regard plus aiguisé sur les choses. Même si c’était un exercice difficile, je ne l’avais jamais fait et toute expérience est bonne. Une appréhension ? Ne pas pouvoir expliquer ce que l’on a pensé ou vu, de ne pas avoir les arguments qu’il faut. Mais il n’y a pas vraiment de crainte. La vraie crainte, c’est d’affronter les réalisateurs ou les acteurs qui lorsqu’ils figurent dans un film sont demandeurs d’un avis. C’est une position qui n’était pas évidente, mais tout s’est finalement bien passé.

EN : Quelles sont vos impressions sur le festival ?
TN : Je ne connaissais pas ce festival ni cette région, et j’ai toujours fortement appréhendé la foule, lors de festival plus lourds, où règne une certaine hystérie. Ici j’étais ravi, c’est un festival à taille humaine, familial, où les films en compétition restent le seul enjeu. De plus j’aime beaucoup cette région, on y ressent une certaine nostalgie et un climat très amical. Je pense que tous les festivals devraient ressembler à celui-là.

EN : Par rapport à la thématique du festival, et de ses jeunes réalisateurs, qu’est-ce qui vous attire dans ce nouveau cinéma, aussi bien français qu’étranger ?
TN : Il y a eu pas mal de films légers, contrairement aux films plutôt dramatiques livrés habituellement. « Jeunes réalisateurs » ne veut donc pas forcément dire « drame ». Pourtant ça connote quelque chose, si toute une génération est autant ancrée dans le drame, c’est que ça dépeint un univers en particulier.  Il y a un constat du monde qui n’est pas très coloré. C’est cela que les films représentent, et c’est bien que ce soit exprimé, car ça dénote un peu l’humeur des temps.

Lire l'interview dans son intégralité

Propos recueillis par Yanne Yager

Lumière 2012, Jour 3. Voyage d’Angleterre en Italie en passant par Paris

Posté par Morgane, le 19 octobre 2012

Aujourd'hui au programme du Festival Lumière à Lyon, Cléo de 5 à 7, Kes et Sciuscia. France, Angleterre et Italie. 1962, 1969, 1946. Voyages dans le temps autour de l'Europe. On peut tout de même trouver un point commun à ses trois films : ils font partie des premières réalisations de trois grands cinéastes : Vittorio De Sica, Agnès Varda ou bien encore Kenneth (qui ne signe pas encore Ken) Loach.

Sciuscia (1946) de Vittorio De Sica est un film poignant contant la vie de deux jeunes garçons, dans la Rome de la seconde guerre mondiale, injustement envoyés en prison. À travers ce film, Vittorio De Sica dénonce les conditions de détention affreuses, la justice arbitraire, l'instrumentalisation des enfants et les difficultés lourdes de cette époque qui pèsent sur chaque famille. À travers ce prisme, le cinéaste pointe tout de même le doigt et l'attention du spectateur vers l'amitié entre deux jeunes garçons (cireurs de chaussures) qui, pour s'en sortir, doivent se serrer les coudes, mais...

Vittorio De Sica et ce film appartiennent au mouvement cinématographique du néoréalisme italien (dont Rome, ville ouverte de Roberto Rossellini est l'un des plus connus) qui nait après la seconde guerre mondiale. "L’expérience de la guerre fut déterminante pour nous, raconte De Sica. Nous ressentions le besoin de planter la caméra au milieu de la vie réelle, au milieu de tout ce qui frappait nos yeux atterrés. Nous cherchions à nous libérer du poids de nos fautes, nous voulions nous regarder en face, et nous dire la vérité, découvrir ce que nous étions réellement, et chercher le salut." Mais De Sica ne veut pas uniquement dresser un portrait, un constat terrible, il cherche à faire réagir les Italiens en leur tendant un miroir en face duquel ils ne pourront se dérober, celui de leur conscience. Car au-delà du constat, le cinéaste accuse l'Italie d'injustices et de traitements quasi inhumains que le pays a infligé à une grande partie de la population et principalement aux enfants.

Grande oeuvre de Vittorio De Sica, Sciuscia annonce déjà le grand chef d'oeuvre du réalisateur deux ans plus tard, Le voleur de bicyclette.

Restons dans le monde de l'enfance avec Kes (1969) de Ken Loach. Le film est présenté par Jean-Pierre Darroussin (photo) avec flegme et nonchalance. Pour lui, c'est un film d'après mai. "En France, on a vécu mai 68, en Angleterre beaucoup moins, mais ils ont vécu une révolution culturelle. Mai 68 n'a pas eu lieu en Angleterre mais c'est une époque de mouvement. 1989, chute du Mur de Berlin et 1969, dissolution des Beattles". Kes est le troisième long-métrage de Ken Loach et c'est "une source fondatrice. C'est dans ce film que son talent se révèle. Film très sensoriel, on le ressent au niveau de l'inconscient. Dans ce film, Ken Loach parle de lui. En tant que fils d'ouvrier, il sent que le monde ne lui appartient pas, qu'il faut le conquérir." Ici, c'est la famille qui est oppressante, voire aliénante. Plus tard dans sa filmographie, c'est la société qui tiendra ce rôle.

Kes est l'histoire d'un jeune garçon, Billy Casper, souffre-douleur de son frère, délaissé par sa mère et peu entouré à l'école. Dans un monde qui ne lui correspond pas, Billy trouve un échappatoire en apprenant à dresser un jeune faucon. Comme l'a dit à juste titre Jean-Pierre Darroussin, Kes est un film qui relève énormément du ressenti. L'histoire parmi tant d'autres d'un gamin malmené par la vie dans l'Angleterre de cette époque. Pourtant, Ken Loach nous touche profondément avec cette figure de gosse paumé qui ne demande qu'à se sentir un peu aimé et soutenu. Billy et son faucon c'est un grand cri de désespoir d'une jeunesse délaissée au bord du chemin. David Bradley (l'interprète de Billy que l'on ne verra malheureusement plus sur grand écran ensuite) est impressionnant par sa justesse mêlant à merveille cette timidité de l'enfant qui ne veut pas déranger mais cherche une petite place pour lui et ce petit côté voyou qu'il a endossé pour pouvoir survivre. Une interprétation sans fausse note aucune et un film majeur de la filmographie de Ken Loach.

Un pas de géant nous transporte dans l'univers de Cléo de 5 à 7 (1962) d'Agnès Varda, à deux pas de la Nouvelle Vague. C'est Thierry Frémaux qui prend le micro pour nous présenter ce film restauré cette année même par le CNC et Agnès Varda. Il en profite pour nous rappeler qu'Agnès Varda n'appartient pas officiellement à la Nouvelle Vague mais qu'elle a beaucoup travaillé autour de la bande de Truffaut, Godard, Rohmer, Chabrol et Rivette... et ça se voit à travers ses images.

Corinne Marchand endosse le rôle d'une jeune chanteuse qui attend des résultats d'analyse et s'angoisse, persuadée d'avoir une maladie grave et d'en mourir bientôt. On suit littéralement (90 minutes de film pour 90 minutes dans la vie de Cléo, de 5 à 6h30 et non de 5 à 7) Cléo pas à pas déambulant dans les rues de Paris, torturée par cette attente. C'est tour à tour auprès de sa gouvernante, de son amant, de son musicien, de son amie puis d'un soldat rencontré au hasard d'un chemin qu'elle s'épanche, ouvre son coeur et laisse sortir sa peur. Tous tentent de la rassurer, de lui ouvrir les yeux.

Mais Cléo de 5 à 7, c'est avant tout une fable sur le temps qui passe, l'histoire d'une femme admirée pour sa beauté qui réalise petit à petit que celle-ci s'envole avec les années et ouvre alors les yeux sur le monde qui l'entoure, réalisant ainsi que la vie peut être toute autre. Film d'une femme (peu nombreuses à être réalisatrices à cette époque, pas beaucoup plus nombreuses aujourd'hui non plus malheureusement) sur une femme. Film qui sent étrangement bon les années 60 et nous transporte dans un Paris d'un autre temps.