Oscars 2014 : 12 Years a Slave et Gravity dominent le palmarès

Posté par vincy, le 3 mars 2014

Il aura été difficile de départager les deux favoris de la 86e Cérémonie des Oscars (voir le palmarès intégral).

On pourra dire que 12 Years a Slave a gagné la récompense suprême, en plus du prix du meilleur scénario / adaptation et du meilleur second-rôle féminin. Trois statuettes pour 9 nominations. Bon ratio. C'est aussi la première fois qu'un producteur noir - le réalisateur Steve McQueen - gagne l'Oscar du meilleur film. La seconde fois qu'un scénariste noir emporte un Oscar lié à l'écriture d'un film (la première fois ne date que de 2009 avec Precious). La victoire de Lupita Nyong’o dans la catégorie du meilleur second-rôle féminin s'inscrit aussi dans les annales de l'événement : ce n'est que la 14e actrice noire à obtenir un Oscar et elle rejoint le club fermé (seulement 15) des comédiens oscarisés dès leur premier film. Enfin c'est également le deuxième Oscar du meilleur film pour Fox Searchlight, après Slumdog Millionaire. Et le premier Oscar pour Brad Pitt, coproducteur du film.

Gravity a gagné au volume. 7 Oscars (sur 10 nominations) : une invasion mexicaine. Le film rentre dans le cercle des films les plus récompensés (ils n'étaient que 25 à en avoir gagné autant ou plus). Alfonso Cuaron devient le premier cinéaste latino-américain à être consacré meilleur réalisateur. Il gagne aussi un deuxième Oscar dans la foulée en partageant celui du meilleur montage. Un an après l'Oscar du meilleur film pour Argo, Warner Bros continue d'être le seul grand studio à aligner blockbusters et films primés par l'Académie.

Parmi les autres faits notables :
- 3 Oscars pour Dallas Buyers Club dont celui du meilleur acteur à Matthew McConaughey, la star du moment, et du meilleur second-rôle masculin, Jared Leto, le revenant.
- 3 Oscars pour l'Australie à travers Cate Blanchett (meilleure actrice) et Catherine Martin (décors et costumes pour Gatsby le magnifique). Blanchett gagne ainsi son 2e Oscar (le premier était pour un second-rôle) et rejoint ainsi les 21 autres comédiens qui ont gagné dans les deux catégories. C'est aussi la seconde actrice à être oscarisée dans un film de Woody Allen, 36 ans après Diane Keaton dans Annie Hall
- La France repart avec l'Oscar du meilleur court métrage animé (Mr. Hublot)
- L'Italie assoit son pouvoir sur la catégorie du meilleur film en langue étrangère : La Grande Bellezza est le 14e film italien à remporter la statuette (le cinéma français est 2e avec 12 Oscars). Le cinéma italien n'avait pas gagné cet Oscar depuis La vita è bella en 1999.
- Enfin, avec la victoire de La Reine des neiges, Disney Animation gagne son premier Oscar dans la catégorie meilleur long métrage d'animation (qui existe depuis 13 ans). Le film a aussi ramené l'Oscar de la meilleure chanson dans son escarcelle.

Les deux grands perdants de la soirée sont évidemment Le Loup de Wall Street et American Bluff, qui repartent les mains complètement vides.

1922. Alain Resnais. 2014. Fin.

Posté par vincy, le 2 mars 2014

alain resnaisL'un des plus grands cinéastes français de ses cinquante dernières années, Alain Resnais, né le 3 juin 1922 à Vannes, est mort le 1er mars 2014 à Paris à l'âge de 91 ans. Appelant à des funérailles nationales comme Fellini en avait reçu de l'Italie, Gilles Jacob, président du Festival de Cannes, a réagit sur tweeter : "Alain n'est plus, nous sommes orphelins: le cinéma français, le cinéma tout court. Il a passé sa vie à chercher et à trouver. Il est vivant."

Il voulait être comédien. Il est devenu un Maître du cinéma européen. Il commence comme monteur, juste après la seconde guerre-mondiale. Dans les années 40 et 50, il réalise des courts et moyens métrages documentaires : Van Gogh, Gauguin, Guernica et en 1956, Nuit et brouillard, premier film de référence sur les camps de concentration.

En 1959, il réalise son premier long métrage, Hiroshima mon amour, suivit de L'Année dernière à Marienbad en 1961. Les récits sont déstructurés, la poésie omniprésente. Il devient l'un des représentants du Nouveau cinéma, brisant les codes narratifs classiques. Mais, contrairement à de nombreux cinéastes, il n'écrit pas ses scénarios. Cela ne l'empêche pas d'être considéré comme un grand auteur, changeant de style, de genre, film après film, jusqu'à déconcerter ou dérouter les cinéphiles avec un cinéma très expérimental où la peinture, la bande dessinée, la musique, la peinture et le théâtre pouvaient déconstruire un film artistiquement, le transformant parfois en concept.

En 18 films, il fait appel aux plus grands pour lui écrire ses films, de Marguerite Duras à Alain Robbe-Grillet, de Jorge Semprún à Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui, en passant par Jean-Michel Ribes. Derrière les artifices et parfois même un formalisme factice ou trop stylisé, Resnais savait valoriser ses comédiens, les fidèles comme les vedettes, avec un cadrage parfait, sans faute, et un montage précis. Qu'il évoque la mort ou le rêve,  la difficile appréhension de la vie ou l'art, l'impossible harmonie permanente des couples ou le conditionnement des classes (principalement la bourgeoisie), Resnais était le cinéaste de la mélancolie mais aussi de la joie, de la jeunesse et de l'envie. Celle d'aimer, de boire, de chanter, de se risquer sur des territoires inexplorés. Il était un aventurier du 7e art. Un curieux capable d'adapter les thèses d'un biologiste (Mon oncle d'Amérique), un fait divers réel (Stavisky)  ou une pièce d'Henry Bernstein (Mélo).

Avant-gardiste jusqu'au bout

Malade, Resnais, chevelure blanche et lunettes noires, n'était pas au dernier Festival de Berlin, où son ultime film, Aimer, boire et chanter, a remporté le prix Alfred Bauer, qui récompense, ô ironie!, les cinéastes avant-gardistes. Son producteur Jean-Louis Livi, qui venait d'annoncer que le cinéaste préparait son prochain film, a officialisé son décès. Il n'y aura plus de prochain film. Thierry Frémaux, directeur général du Festival de Cannes, s'en est désolé sur l'antenne de France Info : "Ce n'est pas tant qu'Alain Resnais est mort, c'est qu'il n'y aura plus de films d'Alain Resnais". Resnais tire sa révérence avec une oeuvre inclassable, iconoclaste, audacieuse et théâtrale, un hymne à la vie, comme tous ses récents films, chacun bravant la Mort.

Du nouveau roman à la comédie musicale, de la fantaisie au drame, le cinéaste puisait son inspiration dans des "vaudevilles" où le mouvement disparaissait au profit d'une mise en scène figée. Mais chaque plan devenait un tableau. Chaque scène se transformait en photographie. Rien n'était naturaliste, ni même naturel. Comme si l'art devait métamorphoser la réalité, comme si l'esprit était plus fort que les mots.

Cinéaste du rêve. Réalisateur de l'irréel. Il était le témoin, hors-champs, et racontait ce qu'il voyait, à sa manière, usant d'astuces populaires comme une chanson de variété (On connaît la chanson) ou une case de bande dessinée (I Want to Go Home) pour traduire les inconscients embrouillés des personnages.

Il y a un mystère Resnais. L'homme était fantomatique. L'artiste, incontestablement, était singulier. Un joueur. Il avait abordé le cinéma avec des oeuvres romantiques (et cérébrales) puis politiques (Muriel ou le Temps d'un retour, La guerre est finie) mais avait rapidement bifurqué vers la comédie et parfois l'absurde (Mon oncle d'Amérique, Smoking / No smoking, Les herbes folles) et même le délire d'une nuit d'ivresse (Providence). Resnais était aussi un voyageur. Il se transportait dans d'autres mondes (comme les héros des "comics" qu'il affectionnait tant). Sa vie était finalement un roman.

L'amour comme seul moteur

Et justement rien de plus emblématique que ce film qu'il réalise en 1983, avec pour la première fois Sabine Azéma devant sa caméra : La vie est un roman est l'histoire de ce comte Forbek (comment ne pas y voir un double du cinéaste) qui propose une expérience pour vivre un état de bonheur permanent, à condition d'être enfermé, totalement, "déconditionné" en oubliant son passé, rééduqué en sélectionnant tout ce qui est harmonieux. Tout ce beau schéma s'écroule avec l'intrusion de l'amour et de la passion. Si tous ses films sont formellement différents, chacun d'entre eux raconte la même chose : cette quête perpétuelle de la jeunesse, cette envie permanente d'être aimé et d'aimer.

Alain Resnais quitte le monde réel. Il laisse derrière lui une oeuvre qu'on analysera longtemps dans les écoles de cinéma. Son palmarès est impressionnant : Oscar du meilleur court métrage (Van Gogh), trois César du meilleur film (Providence, Smoking / No Smoking, On connaît la chanson), deux César du meilleur réalisateur (Providence, Smoking / No Smoking) et six autres nominations dans cette catégorie, deux fois Prix Jean Vigo (Les statues meurent aussi, Nuit et brouillard), Lion d'or à Venise (L'Année dernière à Marienbad), Lion d'argent de la meilleure mise en scène à Venise (Coeurs), trois fois Prix Louis-Delluc (La guerre est finie, Smoking / No Smoking, On connaît la chanson), Grand prix du jury à Cannes (Mon oncle d'Amérique) et Prix exceptionnel du jury pour Les Herbes folles et l'ensemble de son œuvre, deux fois Ours d'argent à Berlin pour la meilleure contribution artistique (Smoking / No Smoking et pour On connaît la chanson et l'ensemble de sa carrière).

D'abord marié avec Florence Malraux, la fille d'André Malraux, il partageait depuis la fin des années 80 la vie de Sabine Azéma, qu'il a épousée en 1998.

Insatiable jouisseur, le promeneur aimait la vie, la légèreté et la grâce. Discret et modeste, il rappelait que "Faire des films c'est bien mais voir des films c'est encore mieux".

12 Years a Slave triomphe aux Independent Spirit Awards

Posté par vincy, le 2 mars 2014

A la veille des Oscars, 12 Years a Slave a quasiment tout raflé aux Independent Spirit Awards. Film, Réalisateur, second-rôle féminin, scénario, image : on voit là un avant-signe de ce que pourrait être la cérémonie des Oscars.

Pour une fois, les Spirit Awards ont été assez consensuels, répétant les palmarès des critiques, des Golden Globes et des différentes guildes : Blanchett, McConaughey et Leto font là encore figures de favoris pour les Oscars.

On notera que La vie d'Adèle, qui n'est pas oscarisable, a été récompensé par le prix du meilleur film étranger. Trois autres films cannois ont été honorés : Fruitvale Station, Mud et Nebraska.

Palmarès

Meilleur film: 12 Years a Slave
Meilleur réalisateur: Steve McQueen (12 Years a Slave)
Meilleur acteur: Matthew McConaughey (Dallas Buyers Club)
Meilleure actrice: Cate Blanchett (Blue Jasmine)
Meilleur second rôle masculin: Jared Leto (Dallas Buyers Club)
Meilleur second rôle féminin: Lupita Nyong’o (12 Years a Slave)
Meilleur documentaire: 20 Feet From Stardom
Meilleur scénario: John Ridley (12 Years a Slave)
Meilleure image: Sean Bobbitt (12 Years a Slave)
Prix John Cassavetes: This Is Martin Bonner
Meilleur film étranger: La vie d'Adèle
Prix Robert Altman: Mud
Meilleur premier film: Fruitvale Station
Meilleur premier scénario: Bob Nelson (Nebraska)
Meilleur producteurs: Toby Halbrooks et James M. Johnston
Meilleur montage: Nat Sanders (Short Term 12)

Vesoul 2014 : reprise d’une partie des films primés au Musée Guimet

Posté par MpM, le 2 mars 2014

On vous a beaucoup parlé de la 20e édition du Festival international des Cinémas d'Asie de Vesoul qui se tenait en février dernier. Pour tous ceux qui n'ont pas eu la chance d'assister à cette édition d’exception, l'auditorium du Musée Guimet de Paris propose du 5 au 7 mars l'occasion unique de découvrir certains des lauréats : 10 minutes de Lee Yong-seung (Corée du Sud), Summer's end de Kumakiri Kazuyoshi (Japon) et The Ferry de Shi Wei (Chine).

10 minutes10 minutes, déjà lauréat du prix FIPRESCI au Festival de Pusan en 2013, a reçu à Vesoul le Cyclo d'or et le coup de coeur du jury INALCO. Construit comme un quasi huis clos, le film suit le parcours de Kang Ho-chan, un étudiant rêvant de devenir producteur de télévision, dans l'administration où il est embauché comme stagiaire. Le récit très elliptique et la narration presque éparse donnent l'impression d'un film fuyant, fait de sensations et d'anecdotes.

Pourtant, un fil directeur émerge peu à peu de cette observation presque chirurgicale des relations professionnelles et familiales. L'ambivalence des rapports humains, l'absence de loyauté, les difficultés économiques et l'individualisme forcené sont notamment autant de thèmes effleurés par le cinéaste.
A voir le 5 mars à 12h15.

summer's endSummer's end, qui a été récompensé par le prix "Coup de cœur" du jury Guimet, est  l'adaptation élégante et feutrée du best-seller écrit par Setuchi Jakucho.

Il raconte comment une jeune femme gagne peu à peu sa liberté en s'affranchissant des différents hommes qui partagent sa vie. La mise en scène soignée et la beauté des images font oublier l'aspect parfois un peu statique du récit ainsi que ses quelques passages à vide.
A voir le 6 mars à 12h15.

The Ferry, prix du jury Emile Guimet, mais également prix NETPAC, raconte la relation ténue entre un vieil homme et son fils de retour au village pour les vacances.

En plus d'observer avec beaucoup de pudeur les liens qui se nouent entre les deux hommes, le film est un hymne à la solidarité et à la loyauté indéfectible. Une œuvre épurée d'une grande beauté formelle.
A voir le 7 mars à 20h30.

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Auditorium du Musée Guimet
6, place d'Iéna
75 016 Paris

Informations sur le site du Musée

L’instant Court : Castello Cavalcanti, réalisé par Wes Anderson

Posté par kristofy, le 1 mars 2014

Comme à Ecran Noir on aime vous faire partager nos découvertes, alors après le court-métrage vietnamien On duty with Shu Qi, voici l’instant Court n° 131.

Après avoir fait l’ouverture du Festival de Berlin, où il a reçu le Grand prix du jury, et une avant-première à Lyon, The Grand Budapest Hotel est maintenant dans les salles. Il s’agit du huitième long-métrage de Wes Anderson, qui de films en films continue de jouer avec ses mouvements de caméra géométrique tout en glissant de-ci de-là une référence à la France avec un dialogue ou une chanson…

Cette fois on voit au générique Mathieu Amalric (qui avant avait déjà prêté sa voix au doublage français de Fantastic Mr Fox) et Léa Seydoux qu’il avait déjà dirigée dans un court-métrage publicitaire, à retrouver ici. Le prologue du film A bord du Darjeeling Limited était un court-métrage déjà tourné dans un hôtel, à Paris avec Natalie Portman et Jason Schartzman, à revoir .

Wes Anderson a réalisé récemment un court-métrage en Italie (égalementpour la publicité d’une marque de luxe), au célèbre studio Cinecitta de Rome, avec à ses côtés le directeur de la photographie Darius Khondji. On y retrouve le fidèle acteur Jason Schartzman qui est cette fois un pilote de course automobile dans un petit village…

Voici donc Castello Cavalcanti réalisé par Wes Anderson :