Et si on regardait… Bullitt

Posté par vincy, le 20 avril 2020

C'est ce soir, à 20h55, sur France 5 et on vous recommande vivement de regarder Bullitt, cette pépite du film noir datant de 1968. L'histoire en elle-même a peu d'importance (d'ailleurs Robert Vaughn avoue n'avoir jamais vraiment bien compris le scénario): Le lieutenant de police de San Francisco, Frank Bullitt, est chargé par un politicien ambitieux, Walter Chalmers, de protéger Johnny Ross, gangster dont le témoignage est capital dans un procès où est impliqué l'homme politique. Malgré les précautions prises par Bullitt et ses hommes, Ross est grièvement blessé et décède des suites de ses blessures sur son lit d'hôpital. Bullitt mène alors l'enquête pour retrouver les meurtriers.

Mais voilà, une histoire banale, adaptée du roman Un silence de mort (Mute Witness) de Robert L. Fish, devient là un film dont une seule séquence l'a fait entrer dans le mythe hollywoodien.

Une course-poursuite d'anthologie, qui est toujours étudiée en école de cinéma. Il faut dire que les stars s'effacent au profit des voitures. Seules les belles mécaniques sont les héroïnes de cette longue scène haletante à travers les rues de San Francisco. On comprend en voyant le montage de cette montée en puissance pourquoi Frank P. Keller a reçu l'Oscar du meilleur montage. En utilisant les lignes droites et les pentes des collines de la ville, pour mieux s'échapper dans les faubourgs, on visite la ville, pieds au plancher, avec une Ford mustang et une Dodge qui se toisent des phares. Cela file entre 120 et 180 km/h, avec un seul point de vue: celui du pilote, comme dans un jeu vidéo. Trois semaines de tournage pour 10 minutes et 50 secondes de vroum-vroum (le son n'a pas été négligé). Pas de truquage, mais des faux raccords et quelques répétitions de plans pour remplir et faire la transition.

Au volant (pas tout le temps, pour des questions d'assurances), on retrouve la star, pilote accompli et producteur du film, Steve McQueen. C'est l'autre bonne raison de revoir le film. Au sommet de son glam, l'acteur joue à la perfection sa nonchalance, cette cool-attitude un brin décalée qui le rend singulier dans ce monde de pourris. Ce flic rebelle a été inspiré par l'inspecteur Dave Toschi, chargé de l'affaire du Zodiac, tueur en série des années 1960 (à San Francisco) qui deviendra un sujet récurrent pour le cinéma et la télévision. De Brad Pitt (Ocean's 11) à Ryan Gosling (Drive évidemment), nombreux sont les stars contemporaines qui ont été influencées par son jeu basé sur le mouvement et le minimalisme.

Aujourd'hui, il reste de tout cela, le look de Steve McQueen: imper, bottes, veste avec coudières, lunettes noires, col roulé bleu... le comble du chic. Ce policier anti-conformiste colle bien à l'époque. Le réalisateur britannique (ça a son importance) Peter Yates en fait un ingrédient innovant dans le polar, entre Nouvel Hollywood et Série noire venue du polar pulp américain. C'est le début du héros individualiste, à la fois justicier, vengeur et citadin (loin des westerns) qui vont nous donner quelques années plus tard des films avec Delon, Belmondo, Eastwood ou encore Bronson.

A ses côtés, on croise Robert Vaughn, magnifique d'ambivalence dans le personnage du sénateur Walter Chalmers, Jacqueline Bisset, sublime maîtresse qui ne sert pas que de faire-valoir, et dans un petit rôle de chauffeur de taxi, l'immense Robert Duvall.

Enfin, troisième bonne raison, et pas des moindres: la musique jazzy et chaude de Lalo Schifrin, aux accents un peu plus pop. Entre cordes, flûtes et cuivres, le thème groovy, avec guitare basse traduit parfaitement le pont entre deux époques et deux genres, à la fois rétro et hype (pour l'époque).

Amazon contre-attaque avec une série de projets

Posté par vincy, le 16 janvier 2020

STRATÉGIE

Netflix a le vent en poupe. Disney + a été brillamment lancé. On en oublierait presque qu'Amazon Studios et Amazon Prime video dans cette concurrence exacerbée des plateformes.

Le groupe a annoncé cette semaine une multitudes de deals et de projets, afin de se rappeler à nos mémoires. Les patrons affirment qu'ils ne jouent pas dans la même cour que ses concurrents. D'abord parce que Amazon a ouvert ce service de SVàD pour fidéliser les acheteurs du géant du commerce en ligne. C'est une prime de fidélisation. Il ne s'agit pas d'aller chercher des abonnés mais bien de satisfaire les consommateurs d'Amazon. Ensuite, les films produits par Amazon Studios sont aussi distribués en salles afin de valoriser la marque.

Les objectifs d'Amazon sont bien centrés sur l'acheteur en ligne. Ainsi, pour l'international, le studio favorise les productions locales où Amazon est fortement implanté, à l'instar de l'Inde, du Brésil ou de la France. Six des dix séries "originales" actuellement en productions sont destinées aux marchés étrangers.

C'est dans ce contexte, que le groupe a annoncé plusieurs projets cette semaine, et pas des moindres.

BRAD PITT ET PLAN B

La société de production de Brad Pitt, Plan B, a signé un deakl exclusif pour la télévision avec Amazon. Au programme un thriller crée par Brian Watkins, Outer Range, la série de Barry Jenkins, The Undergound Railroad, adaptation du best-seller de Colson Whitehead, avec Thuso Mbedu et Aaron Pierre, un drama inspiré de la BD de Brian K. Vaughan, Paper Girls.

LORD OF THE RINGS

La plus grosse production audiovisuelle hors cinéma a révélé ses têtes d'affiche. La série de J.D. Payne etPatrick McKay, basée sur les romans de J.R.R. Tolkien, mettra en scène Robert Aramayo, Owain Arthur, Nazanin Boniadi, Tom Budge, Morfydd Clark, Ismael Cruz Córdova, Ema Horvath, Markella Kavenagh, Joseph Mawle, Tyroe Muhafidin, Sophia Nomvete, Megan Richards, Dylan Smith et Charlie Vickers. Le tournage débutera en février.

EUROPE

STXfilms et Amazon Prime Video ont signé un pacte pluriannuel pour que les films de STX soient diffusés en France sur la plateforme d'Amazon.  Ce deal concerne aussi le Royaume-Uni et l'Italie pour la SVàD. STX a récemment produit et distribué des films comme Hustlers, Countdown, 21 Bridges ou encore The Upside, le remake d'Intouchables.

STEVE MCQUEEN

Le réalisateur de 12 Years a Slave a signé avec Amazon pour sa série en 6 épisodes, Small Axe, avec Michael Wards, Letitia Wright, John Boyega, Malachi Kirby, Shaun Parkes, Rochenda Sandall  Alex Jennings et Jack Lowden , mais aussi pour une série SF, Last Days, qui mixe intelligence artificielle, colonisation de mars et la terre en train de mourir.

JACK REACHER

Amazon a officialisé le lancement d'une série autour de Jack Reacher, personnage imaginé par l'écrivain Lee Childs et déjà incarné sur grand écran par Tom Cruise. Le feu vert a été donné à Nick Santora, qui sera scénariste et showrunner du projet. La première saison sera la transposition du premier roman de la saga littéraire, The Killing floor.

DIEGO LUNA ET GAEL GARCIA BERNAL

La nouvelle maison de production des deux acteurs/réalisateurs mexicains, La corriente del Golfo, s'était déjà engagée avec Amazon pour leur premier projet, autour de Cortès et Moctezuma. Finalement Amazon a décroché un droit de premier regard sur tous leurs projets. Ce qui ouvre Amazon au marché latino-américain, largement dominé par Netflix.

LES FRÈRES RUSSO

Priyanka Chopra Jonas et Richard Madden seront le duo sexy de Citadel, la série d'Anthony et Joe Russo. Ce thriller aura la particularité d'avoir plusieurs versions "locales", en Italie, en inde et au Mexique. Citadel est la version américaine de ce multiple récit, et servira de "flagship" à l'univers imaginé par les réalisateurs de Captain America et des deux derniers Avengers.

Un film sur Steve McQueen en préparation

Posté par vincy, le 10 septembre 2019

Il est apparu furtivement dans Once Upon a Time in Hollywood de Quentin Tarantino. C'est d'ailleurs l'un des acteurs modèle dont parle le personnage de Leonardo DiCaprio. On le voit ami de Sharon Tate. Et c'est justement ça qui intéresse Hollwyood. Le "King of Cool" a fait l'objet d'un livre Steve McQueen: The Life and Legend of a Hollywood Icon, de Marshall Terrill, et son adaptation attise le buzz à Hollywood.

Il a déjà fait l'objet de nombreux projets, jamais réalisés, notamment par James Gray et Steven Soderbegh. Wonderfilm Media a acquis les droits du livre qui raconte notamment comment la star a croisé la destinée de Charles Manson. En refusant un script de Manson, McQueen aurait été l'une des cibles de la famille Manson lors du carnage qui coûta la vie de Sharon Tate, alors épouse de Roman Polanski.

Marshall Terrill a été longtemps obsédé par Steve McQueen, écrivant Steve McQueen: Portrait of an American Rebel, (1993), The King, McQueen and the Love Machine: My Secret Hollywood Life with Elvis Presley, Steve McQueen and the Smiling Cobra, (2002), Steve McQueen: The Last Mile (2006), Steve McQueen: A Tribute to the King of Cool (2010), Steve McQueen: The Life and Legacy of a Hollywood Icon (2010), Steve McQueen: Le Mans in the Rearview Mirror (2017) et Steve McQueen: The Salvation of an American Icon (with Greg Laurie) (2017).

Il a aussi produit trois documentaires sur l'acteur: An American Rebel: Steve McQueen en 2007, Steve McQueen: The Man & Le Mans en 2015, et Steve McQueen: American Icon en 2017.

Steve McQueen, né le 24 mars 1930 et mort le 7 novembre 1980, a été l'un des plus grands acteurs hollywoodiens avec des films comme Les Sept Mercenaires (1960), La Grande Évasion (1963), Le Kid de Cincinnati (1965), La Canonnière du Yang-Tse (1966), qui lui vaut sa seule nomination à l'Oscar, L'Affaire Thomas Crown (1968), Bullitt (1969), Guet-apens (1972), Papillon (1973) et La Tour infernale (1974).

Robert Vaughn (1932-2016), un acteur si spécial nous quitte

Posté par vincy, le 11 novembre 2016

Robert Vaughn, né le 22 novembre 1932 à New York, est mort des suites d'une leucémie le 11 novembre 2016, quelques jours avant son 84e anniversaire. Encore un qui n'aura pas survécu à l'élection de Donald Trump. Vaughn était très engagé politiquement, songeant même à une carrière au sein du parti Démocrate.

Acteur majeur du cinéma américain, même s'il a surtout hérité de second-rôles, il a été une star du petit écran. Diplômé de journalisme, il a poursuivi ses études dans le théâtre. Il a même obtenu un diplôme de communication à l'Université en 1970, alors que sa carrière était déjà bien lancée au milieu des années 1950.

Robert Vaughn sera remarqué dans Ce monde à part en 1959, avec Paul Newman, puis dans Les Sept Mercenaires en 1960, aux côtés de Yul Brynner et de Steve McQueen. Avec Ce monde à part, il décroche une nomination à l'Oscar du meilleur second-rôle masculin. Il hérite surtout du personnage de Napoleon Solo dans la série puis dans les films Des agents très spéciaux, qui le rendirent populaire. Il retrouve Steve McQueen dans le cultissime Bullitt de Peter Yates (1968) où il incarne le douteux sénateur Walter Chalmers. Robert Vaughn est aussi de l'aventure Jules César, de Joseph L. Mankiewicz, avec Marlon Brando, et du casting de stars de La Tour Infernale, film référence dans le genre catastrophe (où il croise de nouveau Steve McQueen). On passera sur L'invasion des soucoupes volantes (avec Christopher Lee) et le nombre incalculable de séries B qui ont dilué son talent (Superman 3, Delta Force, L'Attaque des morts-vivants). Heureusement, on peut aussi percevoir son talent pour la dérision dans S.O.B., comédie américaine de Blake Edwards, avec Julie Andrews et William Holden.

Sa gueule si reconnaissable l'avait souvent conduit à être du côté des salauds ou des pas nets. C'est d'autant plus regrettable qu'il était très doué pour la comédie et son éclectisme, du film de guerre au film SF en passant par le mélo, révélait un acteur brillant sachant manier l'ambigüité.

La télévision aura été plus généreuse. Elle lui a permit d'incarner plusieurs présidents américain (Franklin D. Roosevelt, Harry S. Truman, Woodrow Wilson). Il a également été le jury numéro 9 de Douze hommes en colère au théâtre au Royaume Uni en 2013. Jusqu'à cette date là, il n' avait jamais quitté les plateaux ou la scène. So Long, Robert.

Viola Davis dans le prochain film de Steve McQueen

Posté par vincy, le 16 octobre 2016

Un sacré trio en perspective. La romancière et scénariste de Gone Girl, le réalisateur de 12 Years a Slave et la star de la série How to Get Away With Murder. Widows est l'adaptation de la minisérie britannique des années 1980 (2 saisons de six épisodes) où des épouses de cambrioleurs se retrouvent veuves après un braquage qui a mal tourné. Elles décident alors de continuer le business. En 2002, un remake américain avait déjà été fait, avec Brooke Shields et Rosie Perez.

Gillian Flynn devrait être en charge du script de ce thriller, aux côtés du réalisateur Steve McQueen. Selon Variety, Jennifer Lawrence a été approchée pour jouer l'une des quatre veuves mais son emploi du temps trop chargé l'a conduite à passer son tour. En revanche, Viola Davis est en négociations finales.
L'actrice sera l'une des oscarisables de l'année avec son rôle dans Fences de et avec Denzel Washington, adaptation d'une pièce de théâtre pour laquelle elle a gagné le Tony Award de la meilleure actrice en 2010. Vue récemment dans Suicide Squad, elle est entrée dans l'histoire en étant la première à remporter le Screen Actors Guild Award de la meilleure actrice dans une série télévisée dramatique l'an dernier (exploit réédité cette année). Viola Davis a aussi été nommée à l'Oscar de la meilleure actrice pour La Couleur des sentiments en 2012.

Charlie Hunnam et Rami Malek dans le remake de « Papillon »

Posté par vincy, le 4 août 2016

Charlie Hunnam (futur Roi Arthur chez Guy Ritchie) et Rami Malek (révélé avec la série Mr. Robot) formeront le duo du remake de Papillon. Hunnam reprendra le rôle tenu par Steve McQueen dans le film de Franklin J. Schaffner (scénarisé par Dalton Trumbo) en 1973. Malek reprendra le personnage incarné par Dustin Hoffman.

Rappel des faits.
A l'origine Papillon est un livre: l'autobiographie romancée de l'ancien bagnard Henri Charrière, dit Papillon à cause de son tatouage réalisé durant ses années dans la section spéciale de la Marine, publiée en 1969. Après avoir été accusé d'un meurtre (qu'il a toujours nié), il a été condamné aux travaux forcés à perpétuité au bagne de Guyane, en 1931. Après une tentative d'évasion ratée, il réussit à s'évader en 1944, avec quatre autres compagnons et refait sa vie au Venezuela. Le succès de son livre conduira donc à un film qui sera un carton en salles avec, à l'époque, 53M$ de recettes. Le film tient la tête du box office nord américain durant la saison de Noël 1973 et devient le 4e hit de l'année après L'Exorciste, L'Arnaque, American Graffiti et devant le James Bond Vivre et laisser mourir. En France, il sort en 1974 et séduit 3,85 millions de spectateurs, soit le 9e succès de l'année.

Le tournage du remake commencera en septembre. Le danois Michael Shoer (R; Northwest; La chambre d'en face) réalisera le film scénarisé par Aaron Guzikowski (Prisoners, Contrebande), qui promet une version moderne du récit.

Le convoi de la peur: un tournage d’enfer et une restauration éclatante

Posté par vincy, le 4 août 2015

La sortie de la reprise restaurée de Sorcerer aka Le Convoi de la peur mérite d'être soulignée. Ce film de William Friedkin, méconnu, pour ne pas dire oublié, est un bijou dans son genre. Adaptation du roman de Georges Arnaud, Le salaire de la peur, qui a donné l'excellent film d'Henri-Georges Clouzot (Palme d'or ET Ours d'or en 1953), Le Convoi de la peur est une oeuvre scindé en trois parties presque distinctes: la présentation de quatre "criminels" au Mexique, à Jérusalem, à Paris et dans le New Jersey que rien ne relie a priori ; le quotidien de ces quatre hommes dans un pays d'Amérique latine où la dictature militaire et l'exploitation des gisements de pétrole par une compagnie étrangère dictent leur loi ; le périple dangereux des quatre hommes à bord de deux camions pour transporter de la nitroglycérine sur 300 kilomètres.

Le Convoi de la peur c'est donc l'itinéraire de quatre "mercenaires" prêts à tout pour se casser du trou paumé où ils ont fuit leur passé: Roy Scheider, Bruno Cremer, Francisco Rabal et Amidou. Le premier a participé à un braquage qui a mal tourné et devient la cible de la mafia new yorkaise, à ses trousses. Le deuxième a ruiné son entreprise et ne peut pas échappé aux poursuites pénales. Le troisième a tué de sang froid un homme. Le quatrième est responsable d'un attentat meurtrier. Cremer et Amidou d'un côté, Scheider et Rabal de l'autre vont rivaliser pour amener la matière explosive et instable à travers une jungle hostile, avec en récompense un paquet de cash qui peut les amener vers la liberté.

Un casting démissionnaire

Nous sommes en 1975 quand William Friedkin songe à ce film. Il vient d'enchaîner deux énormes succès, French Connection et L'Exorciste. Il a deux films en tête: Le Triangle des Bermudes et Le convoi de la peur, dont le scénario sera écrit en quatre mois. Avec le scénariste Walon Green (La horde sauvage), il cherche à se détacher du roman, en mélangeant le film de genre avec un style littéraire proprement sud-américain, le réalisme magique (Cent ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez est alors l'un des livres les plus lus dans le monde depuis sa parution en 1967). Clouzot a accepté, sans enthousiasme, de lui céder les droits cinématographiques.

Le film coute cher (tournage en Israël, à Paris, à New York et en Equateur), il faut donc des stars. Friedkin veut Steve McQueen, Lino Ventura, Marcello Mastroianni et Amidou. Le script est écrit pour eux. Rien ne va se passer comme il le faut. McQueen finalement se rétracte.  Il vient d'épouser Ali MacGraw et ne souhaite pas passer des mois à l'étranger, à moins qu'elle n'ait un rôle dans le film. .

La production craint un tournage coûteux, avec ses prologues aux quatre coins de la terre et son action principale perdue en Equateur, mais aussi dangereux : « Tu te feras assassiner, ton équipe se fera assassiner, et personne ne voudra assurer ton film », le prévient Lew Wasserman, exécutif d’Universal alors qu’une guerre civile éclate dans le pays. Friedkin refuse, et avouera plus tard qu'il avait tort. Suite à cette désaffection, Ventura commence à émettre quelques doutes. Ils seront renforcés quand Marcello Mastroianni décline finalement l'offre. Catherine Deneuve, alors compagne de l'acteur italien, vient de mettre au monde leur fille Chiara. Hors de question que la famille aille vivre en Equateur, alors que le pays plonge dans une guerre civile sous l'emprise d'une dictature militaire. Le château de carte s'écroule. Robert Mitchum ne veut pas plus aller se morfondre dans la jungle équatoriale.

Apocalypse Now aux Antilles

Mais pour 12 millions de $ de l'époque, il faut de la star. Et un partenaire. Le Convoi de la peur va ainsi être coproduit par Universal et Paramount, un premier cas exceptionnel dans l'Histoire (et qui sera un modèle pour les années 2000). Petite ironie de l'histoire, la Paramount appartient alors à un énorme conglomérat pétro-chimique, Gulf+Western, qui a des sites en République dominicaine. Et voilà que le dangereux Equateur disparaît de la production pour être remplacé par une île des Antilles.

Roy Scheider est alors proposé par Universal. Mais l'acteur se souvient que Friedkin ne l'avait pas enrôlé pour L'Exorciste. Il accepte sans joie. Lino Ventura abandonne alors le navire, remplacé par Cremer, totalement inconnu hors de France.  Et Rabal complète alors l'affiche.

Sorcerer, titre original du film, est finalement une prophétie qui s'annonce juste. Un sale sortilège.  Le cinéaste est réputé colérique et perfectionniste. l'ambiance est insupportable. De nombreux producteurs exécutifs et collaborateurs sont évincés ou se cassent du tournage: épuisement, malaria, drogue, etc.... La lumière changeante des tropiques rallongent les jours de productions pour que le cinéaste obtienne une continuité lumineuse. Rien que la scène sur le pont branlant au dessus des rapides demande trois mois de prises de vue chaque matin avec des camions qui ne cessent de tomber à chaque prise. Et finalement, elle sera faite au Mexique. Le budget double quasiment: 22,5 millions de $ au final.

Star Wars l'éclipse

« Ce film devait être mon chef-d’œuvre. J’avais l’impression que tous mes autres films n’avaient été qu’une préparation de celui-ci » confie Friedkin dans ses mémoires. « J’étais devenu comme Fitzcarraldo, l’homme qui veut construire un opéra dans la jungle brésilienne », résume-t-il. La folie emporte ceux qui reste. Friedkin, au passage, perd 25 kilos, atteint de malaria et sombre en dépression.

Mais au final, tout le monde est satisfait du résultat. Manque de chance, les critiques ne sont pas du même avis et le public ne suit pas. Il faut dire que depuis une semaine un certain Star Wars est sur les écrans.

Pour le réalisateur, point de doute: c'est son meilleur film. Et la version restaurée permet de revoir ou découvrir ce qui, en effet, est un grand film.

Hybride, audacieux: le film est un choc

Le Convoi de la peur est à la fois une oeuvre politique et un film sous haute tension, un récit humain désespéré et une aventure sans issue. Friedkin s'amuse aussi bien avec les genres qu'avec le rythme. La première partie est tournée comme un thriller d'espionnage international avec ses quatre séquences d'ouverture qui justifient l'exil des personnages. L'atmosphère est très "seventies" mais avec un attentat terroriste, une course poursuite qui finit mal, une meurtre de sang froid et un suicide brutal. L'ellipse est maligne. Sans transition, le scénario nous immerge directement, en deuxième partie, dans un pays sud-américain, pauvre. Peu importe comment ces quatre maudits sont arrivés là. Ils y (sur)vivent. Friedkin décrit alors la vie dans un bout du monde où militaires et polices font la Loi, où une multinationale exploite le pétrole et le peuple pour enrichir ses actionnaires et le régime. C'est une partie de transition qui est à la fois une critique virulente d'un nouveau colonialisme et d'un lien étroit et malsain entre le capitalisme et l'autorité. C'est aussi le prétexte de réunir les quatre hommes. Sans qu'il y ait beaucoup d'action, le cinéaste impose une sorte d'atmosphère pesante, où tous étouffent dans leur prison à ciel ouvert, loin de chez eux. On comprend alors très bien l'aspiration de chacun: se barrer de ce cloaque. Retrouver une forme de liberté, à défaut de retrouver leur honneur, leurs proches ou leur vie d'avant. Ils sont piégés.

Et s'ouvre alors le troisième chapitre, au petit matin, avec deux camions, Lazarus et Sorcerer. Jusque là le film était un brillant exercice de style, assez audacieux, avec une narration peu classique, se laissant le temps de présenter ses personnages, leurs motifs, et leur psychologie, et ce, sans trop de dialogues. A partir de là, on change de registre: 300 kilomètres sur des routes de montagnes périlleuses (avec éboulements et piste friable) et de jungle répulsive (arbre gigantesque en travers de la route, pont branlant tenant par quelques cordes). Le spectateur est rapidement scotché. Pas besoin d'effets numériques: le bon vieux cinéma est affaire de montage et de musique (ici, celle de Tangerine Dream, avec ses accentuations électro typiques de l'époque est angoissante à souhait). Nous sommes à leurs côtés, dans leur galère. Et la fameuse séquence du pont à cordes, sous des tornades de pluie (artificielle) est un monument en soi: Friedkin multiplie par deux la scène avec pour chacun des camions, leur enjeu dramatique et leur morceau de bravoure.

De manière sensationnelle, Le Convoi de la peur s'amène alors vers l'épilogue. Des quatre hommes, il n'en restera qu'un. Mort accidentelle, d'autant plus bête après ce qu'ils ont traversé, folie quasiment hallucinogène. Le dernier tronçon de route, dans un cadre lunaire et fantasmagorique, est saisissant. La traversée des enfers où les morts rodent tels des fantômes. Tous sont atteint. Et même le survivant n'aura que peu de répit. La conclusion est hors-champs. Mais on devine la cruauté de la situation. Sans issue.

Le Convoi de mort est arrivé à destination.

12 Years a Slave triomphe aux Independent Spirit Awards

Posté par vincy, le 2 mars 2014

A la veille des Oscars, 12 Years a Slave a quasiment tout raflé aux Independent Spirit Awards. Film, Réalisateur, second-rôle féminin, scénario, image : on voit là un avant-signe de ce que pourrait être la cérémonie des Oscars.

Pour une fois, les Spirit Awards ont été assez consensuels, répétant les palmarès des critiques, des Golden Globes et des différentes guildes : Blanchett, McConaughey et Leto font là encore figures de favoris pour les Oscars.

On notera que La vie d'Adèle, qui n'est pas oscarisable, a été récompensé par le prix du meilleur film étranger. Trois autres films cannois ont été honorés : Fruitvale Station, Mud et Nebraska.

Palmarès

Meilleur film: 12 Years a Slave
Meilleur réalisateur: Steve McQueen (12 Years a Slave)
Meilleur acteur: Matthew McConaughey (Dallas Buyers Club)
Meilleure actrice: Cate Blanchett (Blue Jasmine)
Meilleur second rôle masculin: Jared Leto (Dallas Buyers Club)
Meilleur second rôle féminin: Lupita Nyong’o (12 Years a Slave)
Meilleur documentaire: 20 Feet From Stardom
Meilleur scénario: John Ridley (12 Years a Slave)
Meilleure image: Sean Bobbitt (12 Years a Slave)
Prix John Cassavetes: This Is Martin Bonner
Meilleur film étranger: La vie d'Adèle
Prix Robert Altman: Mud
Meilleur premier film: Fruitvale Station
Meilleur premier scénario: Bob Nelson (Nebraska)
Meilleur producteurs: Toby Halbrooks et James M. Johnston
Meilleur montage: Nat Sanders (Short Term 12)

Les Critiques de New York récompensent American Hustle, La vie d’Adèle et Le vent se lève

Posté par vincy, le 3 décembre 2013

jennifer lawrence american hustleLe New York Film Critics Circle a lancé la salve des prix aux Etats-Unis, et donc le compte à rebours jusqu'aux Oscars.
Premier grand vainqueur, le nouveau film de David O'Russell, American Hustle (American Bluff en français), qui succède à Zero Dark Thirty. Le film remporte trois prix (film, second rôle féminin, scénario). Une razzia. Il sortira le 5 février en France.

Steve McQueen gagne le prix du meilleur réalisateur. Notons surtout que Robert Redford est honoré pour la première fois par les critiques de New York malgré ses 55 ans de carrière!

Mais c'est côté français qu'on peut se réjouir. Outre le prix de la meilleure image pour le chef opérateur Bruno Delbonnel (et son travail sur le film des Coen), c'est bien la Palme d'or d'Abdellatif Kechiche, La vie d'Adèle, qui repart avec le prix du meilleur film en langue étrangère. C'est quasiment un sans faute pour le Festival de Cannes puisque c'est la troisième Palme qui est consacrée à Gotham depuis 2008. De même le cinéma français ne se porte pas mal puisque deux films d'Olivier Assayas et le Haneke l'an dernier ont précédé le Kechiche.

Evidemment, l'autre fait notable est bien le triomphe du dernier film d'animation d'Hayao Miyazaki, Le vent se lève. Dorénavant, il est le seul cinéaste à avoir reçu trois fois ce prix.

Meilleur film : American Hustle de David O'Russell
Meilleur réalisateur : Steve McQueen (12 Years a Slave)
Meilleure actrice : Cate Blanchett (Blue Jasmine)
Meilleur acteur : Robert Redford (All Is Lost)
Meilleur second rôle féminin : Jennifer Lawrence (American Hustle)
Meilleur second rôle masculin : Jared Leto (Dallas Buyers Club)
Meilleur film en langue étrangère : La vie d'Adèle (France)
Meilleur film d'animation : Le vent se lève (Japon)
Meilleur scénario : American Hustle
Meilleure image : Bruno Delbonnel (Inside Llewyn Davis)
Meilleur premier film : Fruitvale Station
Meilleur documentaire : Stories We Tell

Steve McQueen réembauche Michael Fassbender pour son prochain film

Posté par vincy, le 11 octobre 2011

Et de trois. Après Hunger, primé à Cannes, et Shame, qui a valu le prix d'interprétation à Michael Fassbender au dernier festival de Venise, Steve McQueen reprend son acteur fétiche pour son prochain film, 12 Years a Slave. Chiwetel Ejifor interprétera le rôle principal.

McQueen a écrit le scénario avec John Ridley.

Inspiré d'une histoire vraie, le film suit le parcours de Solomon Northup, citoyen new yorkais enlvé à Washington en 1841 et sauvé d'une plantation de coton en Louisiane douze ans plus tard.

Solomon Northup avait raconté son aventure dans une autobiographie en 1853. Le livre est disponible sur Google Books.

Shame sort le 7 décembre dans les salles françaises.