Le Festival des cinémas d’Asie de Vesoul célèbre en fanfare son 25e anniversaire

Posté par kristofy, le 5 février 2019

Le FICA de Vesoul va ouvre une nouvelle fois ses portes ce 5 février jusqu'au 12 février : cette année le Festival International des Cinémas d'Asie de Vesoul va fêter (déjà) son 25ème anniversaire et, pour l'occasion, il sera inauguré par le ministre de la Culture, Franck Riester.

Cette année le président du jury international est de réalisateur de Singapour Eric Khoo, deux fois sélectionné à Cannes et dont le dernier film était en salles La saveur des ramens en octobre dernier. En plus des nouveaux films en compétition et des diverses Vesoul va présenter dans une section Japonisme une quinzaine de films à (re)découvrir pour leur influence sur le 7e art, et rendre un hommage à l'immense actrice Hiam Abbass.

C'est le plus ancien festival asiatique, et le seul de cette ampleur. Il attire plus de 30 000 spectateurs dans ses multiples salles de projections, avec presque une centaine de films chaque année. Le FICA de Vesoul est ainsi devenu la première manifestation cinématographique asiatique de France, tant en nombre de films que de spectateurs, et même l'un des dix plus importants festival de cinéma en France. «Il a fallu s'adapter au terrain, tisser des liens de confiance, constituer une équipe... Car un festival, c'est aussi une équipe fidèle : les projectionnistes, les photographes, les chauffeurs, ceux qui s'occupent des plannings... Tous participent à l'âme du FICA. » expliquent les organisateurs.

À l'origine de la création de cette manifestation en 1995, Martine et Jean-Marc Thérouanne ont fait de ce festival un rendez-vous incontournable pour les amateurs de cinéma asiatique, des rives de la Méditerranée à la mer de Chine, de l'Océan indien aux steppes de Sibérie. Au fil de ces 25 éditions Vesoul a accueilli des cinéastes majeurs comme Kore-Eda Hirokazu, Hou Hsiao-Hsien, Im sang-soo, Brillante Mendoza, Wang Chao, Jia Zhang-Ke, Stanley Kwan, Wang Xioshuai, Garin Nugroho, Eugene Domingo, Jocelyne Saab, Tran Anh Hung...

La convivialité et l'esprit de découverte ont toujours animé le festival : pour l'ancien membre du jury Li Yang (et réalisateur de Blind shaft et Blind mountain): "C’est bien mieux que dans les grands festivals, ici il n’y a pas tout le cirque autour du show-business…". Selon Mohsen Makhmalbaf (invité d’honneur en 2009) "d’habitude, dans les festivals, il y a beaucoup de monde devant la porte pour voir passer les stars et peu à l’intérieur. Ici, c’est le contraire : les salles sont pleines! En général, c'est un signe qui ne trompe pas." La curiosité ancrée dans l'identité de Vesoul qui place la découverte et la singularité au cœur de ses programmations, en privilégiant les cinématographies atypiques tout comme des premiers films.

Inédits et invisibles

« Si l’une des missions du FICA de Vesoul est de mettre à l’honneur les films totalement inédits de futurs talents de demain dans les sections compétitives, elle est aussi de faire connaître et reconnaître des cinématographies peu ou mal connues. Proposer une rétrospective implique pendant plusieurs années l’étude de l’histoire du cinéma et de l’histoire du pays souvent intimement mêlées, le visionnement de centaines de films, des déplacements et des contacts sur place, l’aide à la restauration de certaines copies, la traduction et la création de sous-titres en français… » rappellent les fondateurs.

C’est une des spécificités du Festival de Vesoul : aller dénicher des films inédits, et même des films devenus invisibles. Les Cinémas d'Asie sont ici à découvrir au sens géographique : outre bien sûr les pays phares comme le Japon, La Chine, La Corée du Sud, etc ; on y a programmé des rétrospectives uniques en provenance du Skri-Lanka, de Georgie, des Philippines, du Vietnam, d'Indonésie par exemple. Autant de cinéphilies oubliées. Et le public répond présent de plus en plus nombreux chaque année. « Nous avons donné le goût du cinéma asiatique à des gens qui n'auraient jamais pensé aller voir ce genre de films »

600000 asiatophiles

Déjà 25 années que le Festival de Vesoul fait rayonner en France les diverses cultures asiatiques, et mêmes au delà de l'Europe où certaines rétrospectives sont demandées ailleurs. Certains films, restaurés, redeviennent même visibles dans leurs pays d'origine. Ces 25 années sont synonymes de 1600 films, 550 personnalités de cinéma invitées, 600000 spectateurs. Avant de souffler ces 25 bougies les créateurs du Festival Martine et Jean-Marc Thérouanne ont reçu fin 2018 le 23e Korean Cinema Award, qui honore chaque année une personnalité du monde du cinéma lors de la cérémonie d'ouverture du Festival de Busan en Corée du sud (le plus grand festival d'Extrême Orient), pour couronner une vie dédiée à la connaissance et au partage des cinémas d’Asie, et plus particulièrement du cinéma coréen.

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25e Festival des Cinémas d'Asie de Vesoul

Du 5 février janvier au 12 février 2019
Informations pratiques sur le site de la manifestation

Cannes 2009 : Qui est Lou Ye ?

Posté par MpM, le 13 mai 2009

cnz_louye.jpgAvec Lou Ye, un parfum de souffre et de censure se lève sur la croisette. Ce réalisateur chinois d’une quarantaine d’années joue en effet à cache-cache avec les autorités de son pays depuis qu’en 2000 son deuxième long métrage Suzhou River, une histoire d’amour onirique, a été interdit sur le territoire chinois. Présenté au festival de Rotterdam, le film a néanmoins remporté le Grand prix, attirant l’attention de la critique internationale sur ce nouveau cinéaste de la 6e génération (qui recouvre les cinéastes postérieurs à 1989 et aux évènements de Tien An Men, comme Jia Zhang-ke ou Wang Chao).

On retrouve ensuite Lou Ye en compétition à Cannes, et même avec une certaine constance : Purple butterfly (une fresque retraçant le conflit sino-japonais des années 30, avec Zhang Ziyi) en 2003, Une jeunesse chinoise (Summer Palace) en 2006 (qui aborde directement les affrontements de la Place Tian An Men) et Nuit d’ivresse printanière (Spring fever) cette année. Ce dernier, qui relate la relation homosexuelle secrète d’un homme marié, est annoncé comme une œuvre extrêmement sensuelle, voire crue. Il a été tourné dans le plus grand secret, clandestinement, à Nanjing et monté en France.

En effet, en brisant le tabou de Tian An Men, Une jeunesse chinoise a valu au réalisateur une interdiction de tourner en Chine pendant cinq ans. Ces dernières années, une sanction similaire avait été infligée entre autres à Yu Lik-wai (All tomorow’s parties) et Li Yang (Blind shaft), allant à l’encontre des affirmations selon lesquelles les autorités chinoises se montreraient plus "tolérantes" envers la création artistique… Reste à vérifier si surfer sur une réputation de cinéaste maudit et une bonne dose de polémique ne finit pas par desservir le travail du cinéaste.

Vesoul : Record de fréquentation pour la 15e édition du FICA

Posté par MpM, le 18 février 2009

VesoulPour son 15e anniversaire, le Festival des cinémas d’Asie a une nouvelle fois battu son record de fréquentation avec 26 000 spectateurs, soit une progression de plus de 8% par rapport à l’édition précédente. Pour Jean-Marc Thérouanne, délégué général de la manifestation, ces chiffres confirment "le statut de première manifestation cinématographique asiatique de France" du FICA, "tant en nombre de films [75] que de spectateurs". Le Festival des cinémas d’Asie de Vesoul, qui est par ailleurs le plus ancien d’Europe, se classe ainsi parmi les "dix premières manifestations cinématographiques de France".

L’engouement du public et des professionnels pour Vesoul s’explique sans conteste par le choix minutieux apporté à la sélection des films (souvent rares ou inédits, et globalement peu diffusés) mais aussi par l’ambiance chaleureuse et familiale qui règne au Majestic, lieu unique où ont lieu à la fois les projections, les rencontres et les soirées festives. Bavarder avec Mohsen Makhmalbaf au détour d’un couloir, croiser Hou Hsiao-Hsien dans la rue, danser en compagnie de la star taïwanaise Van Fan… peu d’autres festivals parviennent à ce point à supprimer les barrières entre personnalités et festivaliers, jusqu’à créer de véritables liens entre tous ces individus qui ont en commun leur amour du cinéma.

"On a l’impression que les gens ici sont tous de la même famille", confirme Li Yang, réalisateur de Blind shaft et Blind mountain, membre du jury international. "C’est bien mieux que dans les grands festivals, ici il n’y a pas tout le cirque autour du show-business…" D’ailleurs, ceux qui y ont goûté une fois refusent rarement de revenir. "J’aurais pu juste envoyer mes films", explique par exemple Jocelyne Saab, invitée dans le cadre d’un hommage aux réalisatrices libanaises, et membre du jury en 2008. "Mais j’ai arrêté un début de tournage pour venir car Vesoul est un lieu où je me retrouve. Le regard que Martine et Jean-Marc Thérouanne portent sur ces pays d’Asie est très joli, parfaitement exempt de clichés. Je me sens à nouveau naïve comme une élève à qui ils apprennent plein de choses." Même Mohsen Makhmalbaf, l’invité d’honneur 2009, qui est un grand habitué des festivals, a avoué être épaté : "d’habitude, dans les festivals, il y a beaucoup de monde devant la porte pour voir passer les stars et peu à l’intérieur. Ici, c’est le contraire : les salles sont pleines ! En général, c'est un signe qui ne trompe pas."

Fort de cette reconnaissance, il ne reste plus au FICA qu’à entamer une réflexion en profondeur sur le moyen de faire face à cette affluence (de nombreuses séances affichent complet) sans perdre ni son âme, ni son unité. Une augmentation de la capacité des salles ou l’allongement de la durée du Festival, afin de favoriser les multi-diffusions, sont deux des pistes possibles pour cette manifestation qui, à 15 ans, n’est encore qu’au tout début de son existence !

Crédit photo : Martine (présidente) et Jean-Marc Thérouanne (délégué général) sur scène lors de la soirée de clôture ; Marie-Pauline Mollaret

Vesoul : Trois questions à Li Yang

Posté par MpM, le 15 février 2009

li yangLe réalisateur chinois de Blind shaft et Montagnes oubliées (Blind moutain) fait partie du jury international du festival de Vesoul. Aux côtés de la présidente Fatemeh Motamed-Arya, de Jeffrey Jeturian et d'Indu Shrikent, il a la lourde tâche de remettre le cyclo d'or de cette 15e édition. L'occasion de revenir sur son oeuvre de cinéaste et sa vision du cinéma.

Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
L'an dernier, j'ai voulu faire un film sur les enfants qui quittent la campagne pour la ville et se retrouvent dans la rue, sans nulle part où aller. Le titre aurait pu en être "Blind exode"... mais le sujet a été censuré, donc je ne pourrai pas le faire. Du coup, j'ai trouvé un autre sujet et je suis en train d'écrire le scénario. Cette fois-ci, cela n'a rien à voir avec quoique ce soit de "blind" : trois fois, ça suffit ! Même si, comme il s'agit d'une histoire d'amour, j'aurais pu l'intituler Blind date... (il rit). Jusque-là, je m'intéressais aux problèmes sociaux, mais l'amour aussi est d'ordre social.

Qu'aimez-vous dans le cinéma ?
Je cherche une bonne histoire dans un bon film.Seule une belle histoire peut transmettre ce que le réalisateur veut dire au public. Mais bien sur, une belle histoire ne suffit pas : il faut aussi la bonne façon de la transmettre. Personnellement, j'aime les metteurs en scène européens en général, mais je n'ai pas d'idole en particulier. Ce qui m'a influencé, c'est la manière dont les films européens rendent compte de la réalité sociale. La nouvelle vague français, le néo-réalisme italien, des cinéastes allemands du renouveau comme Wenders ou Fassbinder... Si mes films ressemblent parfois à des documentaires, c'est pour raccourcir la distance qu'il y a entre le cinéma et le public, pour qu'il pense que les choses montrées à l'écran ont vraiment lieu dans la vie. C'est ce à quoi j'aspire, montrer la réalité.

Pensez-vous comme l'invité d'honneur Mohsen Makhmalbaf que le cinéma peut changer le monde ?
Non, je ne pense pas. Par contre, il peut faire réfléchir les gens. Créer de nouveaux regards sur les choses. Pour moi, un film, c'est avant tout un moyen de communication entre un réalisateur et un public.

Lire l'intégralité de l'interview de Li Yang

Vesoul : Mohsen Makhmalbaf reçoit le cyclo d’honneur

Posté par MpM, le 12 février 2009

Mohsen Makhmalbaf, Marzieh Meshkini et Hana MakhmalbafLa 15e édition du Festival des cinémas d’Asie de Vesoul s’est ouverte en présence d’un invité de marque, le réalisateur Mohsen Makhmalbaf (Le silence, Kandahar), chef de file avec Abbas Kiarostami de la nouvelle vague iranienne. Pour l’occasion, le fondateur de la Makhmalbaf Film House (école de cinéma et maison de production) s’est vu remettre un Cyclo d’or d’honneur pour l’ensemble de son œuvre. Il a tenu à partager ce prix (le 100e qu’il ait reçu dans sa carrière) avec son épouse Marzieh Meshkini et sa fille Hana (notre photo) qui sont également réalisatrices. Lors de la remise des prix, le cinéaste a expliqué les "deux voies pour échapper à la censure: faire des films à l'étranger ou mettre les autorités iraniennes sous pression en parlant de la censure." Cesnuré dans son pays, il se déifinit comme artiste sans frontière. Pour son dernier tournage, il a vécu un an en Afghanistan.

"En Iran, "le sexe, la violence et la politique sont censurés, c'est pourquoi les réalisateurs essayent de développer une nouvelle vague: le style poétique", explique Mohsen Makhmalbaf qui définit ce style comme "un cinéma symbolique qui parle des humains".

Cela explique peut-être pourquoi l’Iran est  bien représenté à Vesoul cette année. Car, outre cette prolixe famille, à qui une rétrospective est consacrée, on pourra également croiser dans les différentes salles du festival l’actrice iranienne Fatemeh Motamed Arya (Il était une fois le cinéma), star particulièrement populaire dans son pays, qui a accepté la lourde tâche de diriger le grand jury international. Elle est entourée d’Indu Shrikent, directrice d’Osian’s-Cinefan Festival of cinema de New Delhi, du réalisateur philippin Jeffrey Jeturian (Larger than life) et du cinéaste chinois Li Yang (Blind shaft, ours d’argent à Berlin en 2003). Ils devront déterminer lequel des 9 films en compétition succédera au Vieux barbier de Hasi Chaolu, cyclo d’or en 2008.

Crédit photo : Michel Mollaret