L’immense acteur suisse Bruno Ganz - Nosferatu, Les ailes du désir, L’éternité et un jour, La chute, The house that Jack built... - est mort. Il avait 77 ans.
Parmi les nombreux prix reçus, le comédien avait été désigné acteur de l'année par le magazine allemand Thater Heute en 1973 avant de recevoir le Prix du cinéma suisse (2000), le prix David di Donatello (César italien) pour Pain, tulipes et comédie la même année, le European Film Award pour l'ensemble de sa carrière en 2010, un Léopard pour toute sa carrière, à Locarno, en 2011 et une Golden Kamera au Festival de Berlin en 2014, où il dispose d'une étoile sur le Boulevard des stars.
Bruno Ganz, né le 22 mars 19411 à Zurich est mort dans cette même ville le 16 février 2019. Il a fait sa carrière dans toute l'Europe et aux Etats-Unis, faisant de lui le comédien germanophone le plus connu dans le monde durant plusieurs années. Avant-gardiste sur les planches, il savait incarner au cinéma les personnages les plus complexes. On l'a vu dans des univers parfois radicaux, souvent exigeants, chez Jeanne Moreau, Eric Rohmer, Wim Wenders, Peter Handke, Werner Herzog, Volker Schlöndorff, Jerzy Skolimowski, Alain Tanner, Théo Angelopoulos, Lars von Trier, Bille August, Arnaud des Pallières, Barbet Schroeder, Sally Potter mais aussi chez Jonathan Demme, Francis Ford Coppola, Atom Egoyan, Ridley Scott ou Stephen Daldry.
Nosferatu, Fantôme de la nuit de Werner Herzog (1979)
Kalus Kinski et isabelle Adjani dans cette adaptation du Dracula de Bram Stoker. Herzog a voulu faire un film où le vampire annonce une révolution qui menace les Bourgeois. Si le film n'est pas une performance majeure de Bruno Ganz, sa place dans le 7e art en fait un film important de sa carrière.
Les ailes du désir de Wim Wenders (1987)
Il avait déjà tourné avec Wenders (L'ami américain, 1977), et il le retrouvera dans Si loin, s proche en 1993). mais c'est bien en ange déchu dans cet hymne à Berlin et à l'amour que Bruno Ganz trouve l'un de ses plus grands rôles, transcendant le désir d'aimer, capable de renoncer à ses ailes et de quitter son beau monde en noir et blanc. Dans ce poème mélancolique et existentiel, Bruno Ganz navigue entre deux mondes, celui du spirituel, invisible, et le réal, souvent dramatique. La dure condition humaine dans une ville divisée et meurtrie.
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L'éternité et un jour de Théo Angelopoulos (1998)
Palme d'or, Ganz interprète un écrivain en fin de vie qui fait son dernier voyage entre souvenirs du passé, visions oniriques et paysages embrumés. C'est sans doute le film qui lui ressemble le plus puisque la frontière est au cœur du sujet. L'artiste sans frontières trouve ici un personnage errant qui transmet, où le lien à l'autre est ce qui reste d'essentiel. On vit sans le brouillard avec la seule certitude de mourir. Angelopoulos et Ganz tourneront aussi La poussière du temps en 2008, dernier film achevé du cinéaste. Encore une histoire de quête et d'errance, et toujours ces frontières mentales et géographiques qui nous contraignent.
Pains, tulipes et comédie de Silvio Soldini (2000)
Dans u. registre plus rare, Bruno Ganz a aussi fait des comédies et des romances. Ce film italien, énorme succès dans le pays mais aussi joli hit à l'export, le montre sous un jour différent. Ce n'est certainement pas son plus grand film mais en homme amoureux et romantique d'une femme décidée à changer de vie, il dévoile un charme rarement aussi bien utilisé.
La chute de Oliver Hirschbiegel (2004)
Son rôle le plus emblématique: Adolf Hitler. Ou plutôt le crépuscule du dictateur. Autant dire une performance (jusque dans le ton de la voix), puisque le comédien ne renie jamais l'aspect monstrueux du tyran tout en lui insufflant un humanisme réaliste (ce qu'on reprochera au film). Le film est considéré comme l'un des meilleurs du cinéma allemand de ces trente dernières années. En 2016, Un Juif pour l’exemple de Jacob Berger, histoire vraie autour du meurtre d’un marchand de bétail juif que des paysans ont assassiné pour offrir son corps comme cadeau d’anniversaire à Hitler.
Le couteau dans la tête de Reinhard Hauff (1978)
Il s'agit de son film préféré. Le rôle qu'il a tant aimé, celui d'un biogénéticien qui perd la mémoire (mais pas les sens). Un thriller sur le réapprentissage, qu'il porte sur ses épaules, en tant que victime soupçonnée de fricoter avec les terroristes. Rien à voir avec un autre thriller, plus complotiste, Un crime dans la tête (2004), où cette fois-ci il est complice des criminels.