Confinement: le streaming en pleine forme, la chronologie des médias obsolète

Posté par vincy, le 2 avril 2020

Les confinés que nous sommes passent de plus en plus de temps sur les écrans (4h29 quotidiennement en mars de consommation télévisuelle, soit 44 minutes de plus qu'en mars 2019). La SVod explose.

La dernière semaine de mars, en France, 5 millions de confinés étaient branchés sur une plateforme, contre 2,7 millions il y a un an. En une semaine, le nombre de programmes regardés est passé de 14,8 millions à 18 millions, avec, en tête, la 3e saison (plutôt réussie) d'Elite sur Netflix et la dernière saison de The Walking Dead sur OCS. Netflix est le grand vainqueur de cette période : l'application a été téléchargée deux fois plus dans le monde, ses séries occupent toutes les places du Top 10 des consultations, les souscriptions ont doublé au minimum, s'accaparant les deux tiers de la consommation de Svod. Des séries comme Peaky Blinders, Stranger Things, Messiah, Riverdale occupent le terrain jusque dans les recherches Google. Et l'arrivée de la 4e saison de La Casa de Papel cette semaine va dynamiter les compteurs.

Dans le contexte, et en l'absence de salles de cinéma, il était urgent que la chronologie des médias s'adapte en France. Car, on le voit bien, hormis les feuilletons quotidiens sur les grandes chaînes nationales, les créations françaises sont inexistantes. Alors même que la vidéo à la demande profite elle aussi d'une forte croissance grâce à des initiatives comme La Toile ou des plateformes de niche comme La Cinetek, Queerscreen, Tënk ou Bref cinéma. D'autant que Canal + a du arrêter la gratuité mardi : on n'évite aucune guéguerre en France. Les chaînes concurrentes (TF1, M6) et des ayant-droits se sont plaints de cette opération destinée à valoriser les contenus de Canal (dont d'excellentes séries françaises comme Baron noir, Hippocrate, Le bureau des légendes ou la deuxième saison de L'amie prodigieuse qui commence se soir) en période de confinement au détriment de leurs intérêts (fortement fragilisés depuis le début de la crise sanitaire qui touche le pays).

Sorties anticipées en vod

Hier soir, le Conseil d’administration du CNC a finalement décidé la mise en place de nouvelles mesures pour faire face à cette période exceptionnelle.

La loi d'urgence sanitaire du 23 mars a donné la possibilité au président du CNC, Dominique Boutonnat, d’accorder des dérogations aux films encore en salles le 14 mars pour des sorties anticipées en vidéo à la demande. 25 demandes ont été déposées dans ce sens selon le Film Français, 11 selon Le Monde. Aux Etats-Unis, où il n'y a pas de chronologie des médias, les poids lours de l'hiver ont déjà été mis en ligne. Dernier en date, La Reine des neige 2 qui a avancé sa diffusion en vod de trois semaines.

Restait à savoir ce qu'il advenait des films qui devaient sortir après la date de confinement (18 mars, 25 mars, ...). Le CNC a officialisé la dispense de remboursement des aides du CNC, conditionnés à leur sortie en salles. Autrement dit, si tous les ayant-droits sont d'accord pour diffuser le film en vidéo à la demande, et non pas en salles de cinéma, les producteurs et distributeurs pourront toucher ces aides tout en évitant une exploitation au cinéma. C'est un premier pas en avant, qui montre que la chronologie des médias n'est plus si sacrée.

Souveraineté, exception culturelle et soft power

Alors que Disney + débarque le 7 avril et que le gouvernement parle de souveraineté nationale à tout bout de champs, il serait temps de faire prévaloir l'exception culturelle française, notion un peu oubliée, pour que les confinés, prisonniers chez eux, aient un accès simple et efficace, ôté de toute logique dogmatique à un contenu le plus varié possible. Mettre à disposition dans les foyers dès maintenant des films récents n'est pas à l'ordre du jour pour l'instant. On peut au moins sauver certains films prévus en début de printemps dans les salles, qui ont peu de chance de pouvoir lutter contre l'inflation de sorties lors du déconfinement, en les proposant à un public naturellement captif. Il s'agit de montrer les œuvres et d'assurer des recettes pour des productions qui risquent de n'avoir ni l'un ni l'autre quand les cinémas seront rouverts.

Et c'est toujours mieux que de laisser les Français face à une offre principalement américaine.

Ce n'est pas une question de souveraineté, mais de soft power. Les références culturelles et les habitudes de la demande se forgent d'abord dans l'offre. Pourquoi pas les sagas de Pagnol, les comédies avec Louis De Funès ou les Tontons flingueurs. Mais le cinéma et la télévision française peuvent aussi montrer qu'ils peuvent rivaliser avec des productions étrangères. Même si personne n'oserait ici Sex Education (Netflix), Game of Thrones (OCS) ou les Vikings (Amazon).

On en revient à l'audace et à l'écriture, mais c'est un autre débat.

Et si on lisait… un scénario inédit de Spike Lee

Posté par vincy, le 1 avril 2020

Premier à soutenir la décision d'un report du Festival de Cannes, Spike Lee, président de la prochaine édition, a trouvé un moyen de vous divertir en période de confinement. Il a mis en ligne la cinquième version du scénario d'un film qu'il n'a jamais réalisé, Jackie Robinson.

Cela ravira les fans de baseball. Le projet a longtemps traîné depuis 1996. A l'époque, Lee voulait refaire équipe avec Denzel Washington, avec qui il avait tourné Malcolm X. Il s'agit de l'histoire des Brooklyn Dodgers, équipe new yorkaise légendaire de 1883 à 1957 (avant de migrer à Los Angeles, où elle est devenue mythique). Mais Denzel Washington se trouvait trop vieux pour le rôle et le film fut abandonné.

Il s'agit là encore d'un biopic sur le joueur Jackie Robinson (1919-1972), premier afro-américain à avoir joué dans une équipe de baseball nationale en 1947, devenu l'un des plus grands joueurs de ce sport dans les années 1940-1950. Il a été élu au Temple de la renommée du baseball en 1962, dès sa première année d'éligibilité. En 1999, il est nommé dans l'Équipe du siècle. Surtout, le numéro 42 que portait Robinson est retiré du baseball, honneur unique, de l'ensemble des franchises de baseball de la MLB le 15 avril 1997. Depuis 2004, la Ligue dédie le 15 avril à la mémoire de Robinson avec le « Jackie Robinson Day ».

Jackie Robinson a été la vedette d'un musical, The First, en 1981, sur Broadway, mais aussi dans un téléfilm pour HBO en 1996, Soul of the Game, et surtout en 2013, dans le film 42, incarné par Chadwick Boseman.

Bon, et pour finir, vous avez remarqué que Mookie, le personnage principal de Do the Right Thing (1989), film culte de Spike Lee, aporte un maillot avec le numéro 42?

Et si on regardait… Charlot musicien

Posté par MpM, le 1 avril 2020

Non, ce n'est pas un poisson ! En ce premier jour d'avril, nous vous proposons de renouer avec le cinéma burlesque et joyeux de Charlie Chaplin, époque 1916 ! Effet madeleine garanti avec ce court métrage de 25 minutes mettant en scène le célèbre personnage de Charlot en vagabond violoniste et un peu justicier qui distribue des coups de bâton aux méchants et sauve la jolie héroïne.

Comme toujours chez Chaplin, la comédie recouvre une réalité sociale violente, entre misère et exploitation, qui finit systématiquement par se retourner contre les exploiteurs, au profit des plus faibles. Charlot tient ainsi tête à une troupe de musiciens patibulaires, bien décidés à lui voler sa maigre recette, puis à une bande de "bohémiens" (pardon pour les clichés du début du XXe siècle) responsables de l'enlèvement de la jolie jeune fille qu'il a rencontrée. S'en suivent une succession de gags qui fonctionnent à la perfection, malgré les années et l'habitude.

Armé d'un bâton, de son esprit rusé et de sa grandeur d'âme, Charlot offre ainsi une belle revanche à tous les opprimés, et un formidable moment de cinéma à tous les cinéphiles confinés. Moment à partager en famille, évidemment, tant l'humour visuel et les situations à la fois burlesques et romanesques imaginées par Chaplin plaisent au jeune public !

Ce n'est donc pas un hasard si le film est disponible gratuitement sur Bref Cinéma jusqu'au 17 avril, au sein d'un programme de six courts métrages recommandé pour les enfants à partir de 6 ans, comprenant La Saint-Festin de Anne-Laure Daffis & Léo Marchand, Lisboa orchestra de Guillaume Delaperriere, L'hiver de Léon de Pascal Le Nôtre & Pierre-Luc Granjon, Le renard minuscule de Aline Quertain & Sylwia Szkiladz et Sientje de Christa Moesker.

La plate-forme de svod, éditrice de la Revue Bref consacrée à l'actualité du court métrage, propose également chaque semaine trois films en accès libre pour une durée de 7 jours. Le site, dont une nouvelle formule initialement prévue le 25 mars verra le jour après la fin du confinement, est par ailleurs disponible en illimité sur abonnement. Une belle idée pour occuper autrement cette période de vache maigre cinématographique...

Et si on binge-watchait… The Bold Type sur Amazon Prime Video

Posté par wyzman, le 31 mars 2020

Pour lutter contre l’ennui durant ce long confinement, Ecran Noir vous propose de (re)découvrir certaines séries passées ou encore sur vos écrans. Aujourd’hui, direction New York et les jeunes femmes de The Bold Type.

C’est une série féministe. Inspirée de la vie de Joanna Coles, l’ancienne rédactrice en chef du magazine Cosmopolitan et directrice des contenus des magazines Hearst (Elle, Marie Claire, Harper's Bazaar, etc.), The Bold Type suit les péripéties professionnelles et amoureuses de trois jeunes femmes... au sein du magazine féminin Scarlet. Il y a Jane, rédactrice en proie à de nombreux doutes ; Kat, community manager au grand coeur et enfin Sutton, intrépide assistante en pleine reconversion. Souvent présentée comme le Sex & the City des millennials, la série créée par Sarah Watson a le mérite de présenter d’innombrables personnages féminins forts et attachants. Si les situations ne sont pas toujours cohérentes, le trio d’actrices formé par Katie Stevens, Aisha Dee et Meghann Fahy, et épaulé par la géniale Melora Hardin (qui joue leur boss) est un argument de taille.

C’est une série qui questionne. Moins crue et plus pop que son ancêtre diffusée sur HBO, The Bold Type n’a pas pour autant peur de prendre des risques. Des injures raciales proférées en rue ou sur Internet à la peur d’un cancer du sein en passant par l’écart salarial, les violences faites au femme et la lesbophobie, The Bold Type brasse suffisamment large pour donner à voir “la vraie vie” des femmes du 21ème siècle sans prendre le risque de s’égarer. A coup d’intrigues où le bien commun et la morale sont questionnés, la série qui compte déjà 4 saisons (dont les 3 premières sont disponibles sur Amazon Prime Video) pousse à la réflexion. Chaque spectateur est ainsi amené à se demander quel type de collègue, d’ami, de citoyen ou simplement d’individu il est au fond. Une prise de conscience qui se veut foncièrement politique dans l'Amérique de Donald Trump.

C’est une série dont on ne se lasse pas. Et c’est précisément parce que tout le travail cathartique provoqué par The Bold Type est amené dans un si joli paquet que l’on ne peut que vous le recommander. Diffusée aux Etats-Unis sur la chaîne câblée Freeform appartenant à Walt Disney Television, The Bold Type ne souffre que d’un défaut : un casting très, trop sexy donc pas toujours crédible. Si l’identification passe difficilement par le physique, notons que les scénaristes ont fait un véritable travail au niveau des personnalités individuelles de leur trio principal mais également des personnages qui gravitent autour dès le début de la série. Plus encore, grâce à une bande-son très branchée (Selena Gomez, Billie Eilish, HAIM, Dua Lipa, etc.) et des intrigues où le poids des réseaux sociaux se fait sentir, la série se veut être un reflet précis de son temps. Que lui demander de plus ?

The Bold Type, 3 saisons à découvrir ici.

Et si on regardait… The Migrating image

Posté par MpM, le 30 mars 2020

Il figurait parmi nos courts métrages préférés de l'année 2018 : The Migrating image de Stefan Kruse est désormais disponible en ligne ! L'occasion de (re)découvrir cette oeuvre importante qui, à partir de photographies et de vidéos trouvées sur les réseaux sociaux ou utilisées par des organismes publics, explore la manière dont sont perçus et représentés les migrants et réfugiés et interroge cette surproduction d'images autour de leurs drames intimes.

Avec une voix off d’une extrême simplicité, Stefan Kruse décortique tour à tour les pages Facebook des passeurs qui affichent paquebots de luxe et autres mers caribéennes, les films de propagande institutionnels qui misent sur l’émotion en présentant les gardes côtes comme des super-héros ou les vidéos faites par les médias pour alimenter leurs différents supports, jusqu’à des films en 360 degrés pour la page Facebook du journal ou de la chaîne.

Dans cette profusion d’images, chacune raconte (comme toujours) sa propre histoire,  au service de celui qui prend ou diffuse ces vidéos, plus que de celui qu’elles mettent en scène. C’est particulièrement saisissant dans les images prises en parallèle au Danemark, d’un côté par les défenseurs des migrants, et de l’autre par des groupes d’extrême-droite qui les rejettent, chacun pensant détenir une vérité absolue sur les réfugiés.

Sous ses airs faussement pédagogiques, le film amène ainsi le spectateur à prendre conscience de ce qui se joue dans chaque image montrée, et à comprendre la stratégie de communication qui accompagne à chaque étape ce que l’on appelle communément la « crise des réfugiés ». Peu importe si l’on donne de la réalité un aperçu parcellaire et orienté du moment que l’on remporte la guerre idéologique, celle des apparences ou tout simplement de l’audimat.

Le casting de « Contagion » réuni contre le coronavirus

Posté par kristofy, le 29 mars 2020

Le film Contagion de Steven Soderbergh de 2011 est l'un des films qui le plus (re)vu depuis l'apparition  du coronavirus : il raconte une pandémie qui se répand à toute vitesse sur la planète, les victimes contaminées se multiplient et meurent en quelques jours...

Dans son générique de fin après avoir déroulé la liste des noms des artisans ayant contribué au film on trouve cette prophétique indication qui a(vait) valeur d'avertissement : "it's not if, but when. Get ready at www.takepart.com/contagion".

Le lien internet redirige désormais vers le site web de l'université de Columbia où justement le casting du film vient de faire quelques vidéos de prévention contre ce virus Covid-19 : Matt Damon, Kate Winslet, Laurence Fishburne, Jennifer Ehle, Marion Cotillard. Les messages sont en anglais et  en espagnol, principalement destinés aux Etats-Unis, pays qui devient le plus gros épicentre de contagion : se laver les mains, éviter de sortir de chez soi, garder ses distances par rapport aux autres, suivre les consignes des autorités...

Le message de Marion Cotillard :

Le message de Kate Winslet :

Le message de Laurence Fishburne :

Le message de Jennifer Ehle :

Le message de Matt Damon :

Et si on regardait… Cinéma du réel

Posté par vincy, le 28 mars 2020

Le 42e Festival Cinéma du réel qui se tient traditionnellement mi-mars au Centre Pompidou n'a pas pu avoir lieu. Cela n'a pas empêché les jurys de rendre leurs verdicts et de récompenser plusieurs documentaires. Le Grand prix Cinéma du réel a été décerné à El ano del descubrimineto (L'année de la découverte, photo) de l'espagnol Luis Lopez Carrasco, qui a aussi reçu le prix (ex-aequo) des bibliothèques.

On aussi été primés: Makongo d'Elvis Sabin Ngaibino (Prix international de la Scam, Prix des bibliothèques), Chronique de la terre volée de Marie Dault (Prix de l'Institut français), le premier film Ontem Havia Coisas Estranhas no céu (Hier, il y 'avait des choses étranges dans le ciel) de Bruno Risas (Prix Loridan-Ivens), les courts métrages Back to 2069 et Don't Rush, tous deux de d'Elise Florenty et Marcel Türkowsky (Prix du court métrage), le court This Means More de Nicolas Gourault (Prix du court métrage Tënk, Prix des détenus de Bois d'Arcy), Il n'y aura plus de nuit d'Eléonore Weber (Prix des jeunes), L'âge d'or de Jean-Baptiste Alazard (Prix du patrimoine de l'immatériel) et Maria K. de Juan Francisco Gonzalez (Prix du public "Première fenêtre").

Si le Festival n'a pas pu avoir lieu physiquement, on peut voir une grande partie de ses sélections de chez soi.

Sur Tënk
La plateforme (sur abonnement) dédiée au documentaire d’auteur propose trois programmations successives autour de Cinéma du réel. On peut y découvrir une grande partie des films primés. Par ailleurs, partir du 27 mars, elle proposera Dans la chambre de Vanda de Pedro Costa, film qui a déjà 20 ans, ainsi que trois films de Mosco Boucault (tous projetés durant le festival), et à partir du 3 avril, deux films de l’édition 2020.

Sur Mediapart
Mediapart accueille les 13 films de la sélection Première Fenêtre, une programmation de premiers gestes documentaires venus de réalisatrices et réalisateurs émergents. Le public pourra voter sur la plateforme de Mediapart pour son film préféré jusqu’à la fin du festival.

Sur Festival Scope
La plateforme dédiée aux festivaliers à travers le monde propose l’accès gratuit aux films de la sélection française, en version sous-titrée en anglais. Si la plupart des séances sont déjà complètes, quelques un sont encore accessibles gratuitement.

Sur UniversCiné
A partir du 24 mars, dans la continuité du festival, UniversCiné offre sur un corner dédié de son portail un large choix de films de la programmation hors compétition et du palmarès 2019, ainsi que des éditions précédentes.

Et si on regardait… Thee Wreckers Tetralogy

Posté par MpM, le 27 mars 2020

Sorti en salles le 4 mars dernier, le programme Thee Wreckers Tetralogy regroupant 4 courts métrages du réalisateur Rosto a vu comme beaucoup d'autres son exploitation stoppée net par la fermeture des salles de cinémas dix jours plus tard. Excellente nouvelle : à l'occasion de la fête du court métrage, son producteur Autour de Minuit le propose exceptionnellement en vidéo à la demande jusqu'au 31 mars !

Pour les amateurs du cinéma si singulier de celui qui nous a quittés prématurément en mars 2019, comme pour ceux qui le découvriront à cette occasion, c'est une chance inestimable de se plonger dans l’univers si cohérent et foisonnant de l’artiste, peuplé de créatures à la fois humaines et monstrueuses. L’occasion rêvée d’entrer dans son oeuvre tentaculaire composée de films sélectionnés dans les plus grands festivals internationaux (Cannes, Ottawa, Clermont-Ferrand), mais aussi du roman graphique Mind my Gap et de la musique de son groupe The Wreckers, elle aussi disponible en ligne.

La tétralogie réunit quatre films tournés entre 2008 et 2018 (No place like Home, Lonely bones, Splintertime, Reruns, auxquels s’ajoute le documentaire Everything is different Nothing has changed)) qui mettent en scène les membres de The Wreckers dans un trip rock halluciné racontant la mort du groupe originel puis sa renaissance sous une forme virtuelle, Thee Wreckers. Chaque film commence où se termine le précédent, dans un esprit de cadavre exquis mental qui mêle cauchemars éveillés, fantômes, illusions, souvenirs et regrets.

On est ainsi face à une introspection intime dans les méandres d’un passé foisonnant, doublée d'un voyage hypnotique aux confins des “mondes rêvés” de Rosto, cet ailleurs fantomatique et punk où se projette son inconscient, et auxquels la combinaison de différentes techniques (prise de vues réelles, animation en volume, animation 3D) confère une esthétique reconnaissable entre mille. C’est tout simplement passionnant, brutal et sidérant, conduisant le spectateur à cesser de s’interroger sur ce qu’il voit pour profiter pleinement de l’intensité d’une expérience unique. Et pour prolonger la découverte, Autour de Minuit propose d'autres films de Rosto ainsi que des bonus sur sa chaîne youtube.

Et si on regardait… la Fête du court métrage !

Posté par kristofy, le 26 mars 2020

La nouvelle édition de La Fête du court-métrage prévue du 25 au 31 mars c'est maintenant, et c'est un des rares événements qui n'a pas été annulé et qui s'est vite adapté à la pandémie du coronavirus. C'est toujours gratuit et pour tous, mais ça sera sur internet. Rendez-vous sur le portail.lafeteducourt.com pour y visionner, après inscription, autant de films que vous vous voudrez quand vous voudrez, sans sortir de chez vous.

Tout comme le court-métrage qui est le format de film le plus protéiforme, l'organisation de cette manifestation a évolué au fil des années. A l'origine c'était Le Jour le plus Court initié en 2011 à l'initiative du CNC et de l'Agence du court métrage (le 21 décembre, puis durant plusieurs journées un peu avant). Depuis 2016, c'est devenu La Fête du court-métrage (sur plusieurs jours en décembre puis pendant une semaine en mars), toujours sur le même principe : mieux faire connaître le court-métrage au plus grand nombre, en salles de cinéma, au jeune public, à travers des thématiques ou de rencontres...

Cette année encore il y a un programme très riche: les courts incontournables devenus des classiques, huit programmes pour les plus jeunes, une thématique particulière - "Iici et maintenant" -, soit au total plus de 190 films courts à découvrir !

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La Fête du court métrage du 25 au 31 Mars 2020
www.lafeteducourt.com

Et si on regardait… Un chant d’amour

Posté par vincy, le 25 mars 2020

Pour public averti.

Objet rare et donc précieux. Un chant d'amour est l'unique film de Jean Genet (1910-1986), écrivain, poète et dramaturge . Et cinéaste. En 1950, il réalise un court métrage, qui rassemble toutes ses obsessions et tous ses fantasmes, sa poésie et son érotisme.

Le film est visible à partir du portail Open Culture et via You Tube.

Il s'agit d'un film de voyeur. Une prison. Des hommes enfermés dans leur solitude et leurs désirs. Un gardien qui joue de son statut, un brin sadomasochiste sur les bords. La sexualité est à la fois frontale - osée même -, et florale. Phallique et onirique.

La photo noir et blanc sublime cette atmosphère mystérieuse, virile, sensuelle. Un homme danse bite à l'air. Un autre fouraille un slip avec sa main. On inhale de la fumée par un trou entre deux murs. On fait ouvrir la bouche en grand pour y placer un pistolet. Les métaphores psychanalytiques, de la masturbation à la domination, se mélangent aux images de sexes ardents masculins et de rêves évanescents romantiques. Autant de chimères qui se marient aux pulsions.

Car, aussi tendre que désespéré, Un chant d'amour dévoile surtout la souffrance de ces hommes, dans une poésie visuelle qui ne cache rien de leurs tourments. Genet magnifie le mâle dans ce lyrisme brut, avec un montage très découpé et des visages expressifs, hérités du cinéma muet. Il s'agit d'un film sans paroles. Ponctué par des séquences chorégraphiques contemporaines. Passant de la réalité à l'illusion. L'image est l'écrit.

C'est sans aucun doute pour cela qu'il est réussit. La beauté des corps et le sordide du décor ne font qu'un, renvoyant l'homosexualité dans une forme de clandestinité, de secret assumé, de consentement tacite mais inavouable.

Cette passion entre voyous, tendue comme une érection sous un jean, attirante comme des lèvres entrouvertes, douloureuse comme la sentence que l'on craint, est en effet un chant d'amour aux jeux interdits et à l'homoérotisme. Mais pas seulement: à la liberté. Car derrière l'envie de baiser, il y a aussi l'espoir de le faire à l'air libre, dans la forêt, loin des barreaux qui condamnent les invertis.