Festivals et sorties de films: la Chine absente pour cause de virus

Posté par redaction, le 17 février 2020

Le coronavrius - aka COVID-19 - commence à produire son effet dans le cinéma. Ce virus potentiellement mortel né dans la région de Wuhan, en Chine, à la fin de l'année 2019, a entraîné une forme de paralysie économique dans l'Empire du milieu. Il était circonscrit à la Chine, avant de se propager progressivement dans le monde. Les liaisons aériennes avec la Chine sont suspendues. Et les manifestations culturelles commencent à être impactées.

Si, à Vesoul, capitale du cinéma asiatique en Europe le temps d'une semaine, les salles sont pleines, et les invités comme le public ne portent aucun masque, le président du jury n'a pas pu se déplacer. Le tibétain Pema Tseden n'a pas pu venir. Même s'il avait pu prendre un avion, une mise en quarantaine de deux semaines lui aurait été imposée. On l'a appris quelques jours avant le début du festival. D'autres invités chinois ont également annulé leur voyage dans l'Est de la France, notamment l'autre cinéaste tibétain Sonthar Gyal et la réalisatrice chinoise Wang Jing, qui a envoyée une petite vidéo pour parler de son film (et sa déception ne pas venir en France).

La Berlinale qui commence demain, avec son European Film Market qui attire des professionnels du monde entier, a commencé à prendre des mesures sanitaires et a mis à contribution différents instituts et hôpitaux. L'EFM a déjà enregistré plus de soixante annulations, principalement des professionnels chinois qui n'ont pas reçu l'autorisation de voyager et l'incapacité à obtenir un visa. La Chine présente cette année 3 longs et un court métrage, en plus d'une conversation avec Jia Zhangke, qui vient montrer son dernier documentaire dans le festival allemand.

Le festival de cinéma de Hong Kong a annoncé il y a quatre jours qu'il décalait ses dates aussi bien pour le festival que pour le marché du film. Normalement prévu fin mars, le festival, l'un des plus importants en Asie, aura lieu fin août. Toute l'industrie du cinéma semble à l'arrêt. Il est trop tôt pour savoir si le festival de Shanghai en juin aura bien lieu aux dates prévues. Mais la Chine, deuxième marché cinématographique du monde en recettes, a mis sous cloche le 7e art. Les sorties sont annulées semaines après semaines, y compris celles des blockbusters américains. Les équipes de James Bond ont tout annulé: la première à Pékin comme la sortie du film. Disney a fermé ses parcs de Hong Kong et Shanghai, et reporté la sortie chinoise de Mulan, pourtant calibré pour le marché national. Les studios hollywoodiens ont interrompu leurs voyages professionnels avec la Chine, Hong Kong et Macau.

Depuis le 24 janvier, les salles de cinéma chinoises sont fermées et le box office est dans le coma (aucune recette engrangée). Aucune date de réouverture n'est prévue. Durant les fructueuses fêtes du nouvel an chinois (20 à 30% des recettes annuelles), les exploitants ont perdu environ 200-250M$ de recettes.

Malgré tout, certains studios de tournage ont rouvert pour éviter de mettre trop de gens en chômage technique.  Le gouvernement chinois a promis des aides financières pour éviter des faillites dans le secteur. Reste que de nombreuses productions ont été reportées sans date de reprise. Et de nombreux cinémas indépendants pourraient fermer. Pour limiter la casse, un studio, Huanxi Media, a décidé de diffuser sa dernière production, Lost in Russia sur Internet, provoquant la fureur des exploitants. Les plateformes de type Netflix ont d'ailleurs été les premières à réagit en avançant des dates de diffusion de certains films: les Chinois restant chez eux, la demande est importante.

L'impact commence à se propager à Taiwan et en Corée du sud, qui voit son box office et les tournées promotionnelles ralentir voire abandonner. A Singapour, les films chinois ont été privés de sortie.

Le virus a infecté 70000 malades et tué au moins 1775 personnes, parmi lesquels le réalisateur Chang Kai, qui travaillait pour Hubei Film Studio.

Tribune : Vers un label “Animation” ?

Posté par redaction, le 22 janvier 2020

Voici une chronique en forme de tribune, diffusée samedi dernier lors de l’émission Longtemps je me suis couché de bonne heuresur les ondes de Radio libertaire. Ce texte fort et précis de Francis Gavelle rejoint nos préoccupations concernant les films d’animation exigeants, qu’ils soient destinés à un public adulte tel que Ville neuve de Félix Dufour-Laperriere, ou à un public plus familial comme c’est le cas de L’Extraordinaire voyage de Marona, et qui dans les deux cas semblent sacrifiés sur l’autel du marché dès lors qu’ils atteignent les salles (d’autres moins chanceux encore n’y ont eux jamais accès). Nous partageons donc, au sens le plus fort du terme, cet appel vibrant à une action claire et définie en faveur de l’animation d’art et d’essai.

Pour évoquer ce film magnifique qu’est L’extraordinaire voyage de Marona, ce récit touchant de la vie d’une petite chienne, au doux pelage noir et blanc, et de ses trois maîtres successifs, je ne reviendrai pas sur l’élégance graphique du design “personnages” de Brecht Evens, auteur-phare de la bande dessinée contemporaine ; je ne reviendrai pas non plus sur cette virtuosité visuelle inspirée, et bien loin des habituelles performances démonstratives d’un certain cinéma d’animation mainstream qui confond salle de cinéma et parc d’attractions ; de la même manière, je ne reviendrai pas sur le message humaniste sincère, dénué d’opportunisme, qui précise que “le bonheur est une petite chose, presque rien” et que, loin de constituer là une attitude de résignation, il finit par interroger le spectateur, petit ou grand, sur la tendance de sa propre espèce – l’espèce humaine – à vouloir toujours plus, dans une angoissante “course contre soi-même”, ainsi que le biologiste Konrad Lorenz nommait, en 1973, dans son essai Les huit péchés capitaux de notre civilisation, cette “incapacité manifeste des hommes modernes à rester seuls en face d’eux-mêmes, ne serait-ce qu’un moment” et à “(n’accorder) plus d’importance qu’à la réussite (…) qui permet de vaincre les autres dans une contrainte impitoyable du dépassement.” Non, je ne reviendrai pas sur tout cela, ni sur la délicate partition de Pablo Pico, dont le titre Les souvenirs, avec reprise du thème principal et citation des thèmes secondaires, peut se lire comme un résumé musical du film.

Non, mais je m’interrogerai… Je m’interrogerai sur l’échec que va subir, en salles, ce long métrage, artistiquement ambitieux, émotionnellement sensible, et bénéficiant d’une presse assez unanimement élogieuse. Est-il ainsi suffisant, à longueur de colonnes, de la presse généraliste à la presse spécialisée, de constamment s’esbaudir devant la réussite économique et créatrice de ce milieu de l’animation hexagonale, qui, en termes de volume de production (cinéma + séries TV) serait –paraît-il – passée de la 3e place mondiale à la 2e, derrière le Japon, mais devant, désormais, les Etats-Unis. En dehors des hourras cocardiers et des indicateurs statistiques de performances, chers aux financeurs publics et privés et aux forums de coproduction type “Cartoon Movie”, la belle affaire !

Ne serait-il pas davantage pertinent de s’interroger sur la difficulté, pour des œuvres plus singulières, à trouver leur place dans les salles, et, en premier lieu, auprès des exploitants – j’évoque plutôt là le secteur de l’art et essai – frileux (pas forcément sans raison, par rapport aux attentes qu’ils peuvent supposer de leur public) à les programmer sur leurs écrans : ainsi, L’extraordinaire voyage de Marona sera sorti le 8 janvier dernier sur uniquement trois salles parisiennes, dont le Studio des Ursulines (salle à la fois dédiée au cinéma d’animation et au cinéma “jeune public”), et ne connaît déjà plus à la date de cette chronique radiophonique qu’une programmation épisodique d’une séance par jour, ou d’une séance un jour sur deux, ou d’une séance un jour par semaine. Bien sûr, on peut noter que le film connaîtra sans doute une deuxième vie cinématographique, à travers les précieux dispositifs d’éducation à l’image que sont “école et cinéma”, “collège et cinéma” et “lycéens et apprentis au cinéma” ; mais, ceci posé, comment parvenir, auparavant, jusqu’aux spectateurs et s’imposer dans leurs choix de sortie ciné, quand on a déjà disparu des écrans, et qu’en amont on ne bénéficie, évidemment pas, de la force de frappe promotionnelle d’un blockbuster animé hollywoodien ?

Car, au-delà du film précité, du cinéma “jeune public” et des seuls longs métrages hexagonaux, comment  ne pas se désoler – et quel que soit son propre point de vue critique sur les films – des non-rencontres “œuvre/public” ayant frappé, l’année dernière, Ville Neuve, de Félix Dufour-Laperrière, ou Buñuel après l’âge d’or, de Salvador Simó. Même un film comme J’ai perdu mon corps, avec son exceptionnel parcours en festivals (Cannes, Annecy), son achat par Netflix et sa présence parmi les cinq derniers nommés pour l’Oscar du long métrage d’animation n’a guère réussi à dépasser, d’après le site JP’s Box-Office, la barre des 157.000 entrées – certes, nombre de films d’auteur en prise de vues réelles se satisferaient de ce chiffre, mais là n’est pas le questionnement.

Ces films sont-ils donc condamnés à devenir des “films de festivals”, vus par les seuls festivaliers, comme vont très possiblement le rester Away, du Letton Gints Zilbalodis, étrange ballade contemplative en forme de jeu vidéo, primé en 2019 à Annecy, ou Bombay Rose, de l’Indienne Gitanjali Rao, mélo aux allures kitsch autour d’une impossible histoire d’amour entre une hindoue et un musulman, présenté aussi bien à Venise qu’à Toronto l’année passée ? A ce jour, en effet, sans doute échaudé par l’accueil quasi inexistant réservé aux films d’animation d’auteur préalablement sortis, aucun distributeur ne semble s’être positionné sur ces deux œuvres – à noter, Bombay Rose, tourné en prise de vues réelles, aurait sans doute déjà trouvé preneur.

Alors, comment sortir de ce cercle vicieux et éviter que ne se reproduise ce même schéma pour, par exemple, les films à venir d’Alain Ughetto (Interdit aux chiens et aux Italiens), de Simone Massi (Trois enfances) ou de Florence Miailhe (La traversée) ? Faut-il suggérer aux institutions représentatives du milieu de l’animation (SPFA, AFCA) de porter auprès des instances régulatrices du cinéma (le CNC) le projet d’un label “Animation” qui, à l’identique des labels “Art et essai”, “Jeune public” ou “Patrimoine”, inciterait les salles à s’engager, moyennant soutien en contrepartie, sur une programmation à caractère durable et équitable de ce cinéma d’animation d’auteur qui peine à exister malgré les pépites qu’ils façonnent – hier aussi, Jasmine ou Le garçon et le monde – et a besoin de nouveaux leviers réglementaires, pour croire dans un futur qui ne l’assigne pas à la pire des niches cinéphiles qui soit : le “film de festival”.

Si cette modeste chronique peut être un premier minuscule caillou posé sur la voie de cet indispensable chantier de réflexion, elle n’aura alors pas été tristement vaine.

Francis Gavelle
Chronique radiophonique du 18 janvier 2020
(Longtemps, je me suis couché de bonne heure, Radio Libertaire, 89.4 Mhz)

Hommage : Anna Karina au Reflet-Médicis et sur Arte

Posté par vincy, le 17 décembre 2019

Anna Karina en 7 films. C'est le programme hommage qui aura lieu dès demain, le 18 décembre, au Reflet Médicis, 3/7, rue Champollion à Paris et organisé par le cinéma, Carlotta, Les écrans de Paris et Les Acacias distribution.

A l'occasion du décès de l'actrice, la télévision n'a pas daigné repassé l'un de ses films, hormis Arte qui a déprogrammé sa soirée de mercredi, le 18 décembre. La chaîne diffusera Pierrot le fou de Jean-Luc Godard (1965) avec Jean-Paul Belmondo, à 22h45, suivi du documentaire Anna Karina, souviens-toi, signé par son époux Dennis Berry (2017), avec en bonus un Blow up spécial Anna Karina sur arte.tv.

Au Reflet Médicis, on pourra voir son premier film de réalisatrice Vivre ensemble [Mercredi, vendredi, lundi à 15h40. Jeudi, samedi à 21h20, Mardi à 11h30] ; La religieuse de Jacques Rivette [Mercredi, vendredi, lundi à 17h30, Dimanche à 15h40] ; et 5 films de Godard: Alphaville de Jean-Luc Godard [Mardi à 19h30, Samedi à 11h40], Pierrot le fou, sous-titré en anglais [Mercredi, vendredi, lundi à 20h10, Jeudi, samedi, mardi à 15h40, Dimanche à 18h15], Une femme est une femme, sous-titré en anglais [Jeudi, samedi, à 19h30, Dimanche à 20h20, Lundi à 11h40], Le petit soldat, autrefois censuré [Jeudi, samedi, mardi à 17h40, Dimanche à à 22h10], et Made in USA [Mercredi, vendredi, lundi à 22h10]

Cannes investit dans un pôle cinéma et confirme un musée du festival

Posté par vincy, le 23 novembre 2019

Le Festival de Cannes n'est pas pour tout de suite. Mais, avant les élections municipales, le marie David Lisnard, a confirmé un plan de transformation ambitieux pour la ville, y compris pour le palais des Festivals, surnommé le Bunker.

Pour 500M€, le projet "Cannes on Air" va améliorer de nombreux sites, dont 62M€ pour le Palais, qui disposera d'une nouvelle salle sur le toit (500 sièges) convertible en espace d'accueil, et rénovera le Salon des Ambassadeurs, un peu désuet, où se tiennent de nombreuses réceptions.

L'ambition du maire est d'attirer des sociétés de production et de post-production en adéquation l'éventuelle création d'un studio (sur une friche industrielle de près de 6 hectares), avec un pôle créatif des arts visuels et numériques, une université dédiée au cinéma, à la TV, aux jeux vidéos et à la création web (1200 étudiants dès 2020, 16 diplômes). Ce campus s'installera dans le parc technologique Bastide Rouge, situé à l'ouest de la ville, près de l'aéroport Mandelieu, dans le quartier de La Bocca. Bastide Rouge, qui coûtera au total 80M€, et comprendra également la cité des entreprises baptisée CréaCannes et un espace de coworking.

Cannes s'engage du coup à la construction d'une double voie protégée reliant La Bocca au palais des Festivals (5 kilomètres) avec un tram-bus et des pistes cyclables.

Enfin, un nouveau multiplexe va voir le jour. Cineum Cannes disposera de 12 écrans et de 2426 fauteuils. Il ouvrira en juin prochain au cœur de cette technopole. Le bâtiment a été conçu par l'architecte Rudy Ricciotti (MuCEM à Marseille) et l'exploitation a été confiée à deux locaux, Les Arcades et L’Olympia, réunis au sein de la Compagnie cinématographique de Cannes (CCC).

Enfin, le maire a confirmé la création d'un Musée - tant attendu  (on en parle depuis 2006!) - autour de l'histoire du cinéma et du festival de Cannes est désormais au programme. L'ouverture est désormais prévu en 2025 et fera l'objet d'un appel aux plus grands architectes. Il devrait se situer près derrière le Suquet (Vieux Cannes), à proximité du Studio 13, à 20 minutes à pieds du Palais. Le coût est estimé à 200M€ et la fréquentation évaluée à 500000 visiteurs par an. Le musée sera dédié au patrimoine cinématographique, aux effets spéciaux et au futur du cinéma et au Festival de Cannes, avec un centre d'archives. Christine Aimé, ancienne responsable presse du festival, est sur le dossier, désormais responsable du service du patrimoine.

Autrement dit, Cannes veut devenir un pôle cinématographique comprenant toute la chaîne du cinéma: une "Silicon Valley de l’audiovisuel sur la Côte d’Azur avec Cannes pour épicentre" selon ses mots. Et tout le cinéma français semble derrière lui pour constituer cette filière économique et créative.

[J'accuse] Polanski sur la sellette, des séances annulées et des élus qui veulent censurer

Posté par vincy, le 19 novembre 2019

Après son exclusion des Oscars, Roman Polanski pourrait être évincé des organisations professionnelles françaises. Depuis les révélations de Valentine Monnier, qui accuse le cinéaste de l'avoir violée dans les années 1970 alors qu'elle avait 18 ans, le malaise se répand dans toute la profession. Cela n'empêche pas son dernier film, J'accuse de prendre la première place du box office cette semaine avec 376000 spectateurs en 5 jours, soit son meilleur démarrage en plus de 30 ans. Le film fait déjà quatre fois mieux que le résultat final de sa précédente réalisation, D'après une histoire vraie, et a également dépassé le box office total de La Vénus à la fourrure, sorti en 2013.

Reste que la polémique enfle. la Société civile des auteurs, réalisateurs et producteurs (ARP) a décidé d'instituer de nouvelles règles : tous membres condamnés ou poursuivis pour des infractions sexuelles conduiront à la suspension du réalisateur. "Quarante ans se sont passés entre la première affaire qui concerne Roman Polanski et aujourd’hui. Je pense que le monde a beaucoup changé en quarante ans. Les crimes sont les mêmes, mais la façon dont ils sont perçus a énormément changé" a déclaré le président de l'ARP, Pierre Jolivet. Clairement, il a précisé que Roman Polanski serait concerné par une suspension.

Le changement de statut sera proposé au vote lors de la prochaine assemblée générale; dont la date n'a pas encore été fixée.

Depuis la prise de parole d'Adèle Haenel, concernant le réalisateur Christophe Ruggia, qui devrait être prochainement exclu de la SRF, le milieu du cinéma tente de réagir pour lutter contre le harcèlement sexuel. Le nom de Polanski est autrement plus symbolique, de par sa notoriété et la multiplicité des affaires qui le visent. La SRF, justement, a, par la voix de Rebecca Zlotowski, membre du Conseil d'administration et co-créatrice du Collectif 5050, "aussi appelé, aux côtés d’autres organisations d’auteurs et du Collectif 5050, à des États généraux sur les questions des abus sexuels et des harcèlements dans notre industrie, dans le but d’aboutir à une charte, un code de conduite commun, et des mesures spécifiques." L'Académie des César refuse toujours de s'exprimer sur ce cas.

Cependant, pour l'instant, ce sont les exploitants qui sont en première ligne sur le front. L'avant-première de J'accuse au mythique Champo, un des rares cinémas dirigé par une femme, Christiane Renavand, a ainsi été annulée par une manifestation de féministes. D'autres militantes féministes ont fait interrompre puis annuler des séances à Rennes et à Saint-Nazaire ce week-end.

Censure politique en Seine-Saint-Denis

Et ce n'est pas fini puisque cet après-midi, nous avons appris que les élus d'Est Ensemble, intercommunalité qui regroupe 9 villes, ont ordonné, contre l'avis des cinémas, la déprogrammation de J'accuse dans les six sites qu'elle gère à Pantin (le Ciné 104), Bagnolet (le Cin'Hoche), Bondy (le Ciné Malraux), Bobigny (l'Ecran Nomade), Romainville-Noisy le Sec (le Trianon) et Montreuil (le Méliès). Cette décision fait suite à la réclamation de la maire socialiste de Bondy, Sylvine Thomassin, et a été soutenue par l'ensemble des groupes politiques: "On est effarées que l'administration des salles se permette une telle diffusion, sans demander ce que les politiques en pensent" a-t-elle expliqué. On est effaré que des élus se croient encore autorisé à interdire un film. Il s'agit d'un cas inédit de censure "officielle".

[Censure. Nom féminin, du latin censura. Examen préalable fait par l'autorité compétente sur les publications, émissions et spectacles destinés au public et qui aboutit à autoriser ou interdire leur diffusion totale ou partielle. (En France, les films doivent comporter un visa de censure, le visa d'exploitation, délivré par le ministre de la Culture après avis d'une commission.]

Le président d'Est Ensemble, le socialiste Gérard Cosme, a cependant communiqué qu'il "paraissait peu crédible et peu souhaitable que la programmation relève d'un comité d'élus ou même du président", choisissant ainsi "la liberté de programmation artistique" aux établissements. Un revirement radical, qui va à l'encontre du vote des élus qu'il préside donc. Sagement, il refuse donc de déprogrammer le film mais demande aux cinémas d'organiser "un débat en présence des associations et des élus qui le souhaitent et qui se sont exprimés en faveur de la déprogrammation". Or, les directeurs des cinémas n'ont pas attendus les élus pour débattre autour du film et du cinéaste.

Dans le cadre de la projection du film de Polanski, deux débats étaient prévus au Méliès: "Choisir de voir ou non le dernier Polanski ?", avec les associations féministes Nous Toutes et Collage Féminicide et "L'Affaire Dreyfus et l'antisémitisme d'hier et d'aujourd'hui" avec la Ligue des Droits de l'Homme. Adèle Haenel avait elle-même initié et milité pour des débats encadrant le film.

Avant l'annulation de la déprogrammation, le directeur artistique du Méliès, Stéphane Goudet s'était exprimé sur Facebook pour alerter ceux qui ne prennent pas la mesure d'une telle censure: "Nous demandons dès à présent à nos élus la liste des cinéastes dont nous n'aurons plus le droit de programmer les films et la définition de leurs critères. Un comité de vérification de la moralité des artistes programmés est-il prévu, puisque la liberté individuelle des spectateurs n'est pas suffisante ? L'interdiction doit-elle être étendue aux délits, et si oui lesquels ? Nous souhaitons également savoir quel sort sera réservé aux écrivains et peintres condamnés pour crimes dans les bibliothèques d'Est Ensemble. Selon toute vraisemblance, les livres de Céline et Althusser, les DVD de Max Linder, Brisseau, voire Woody Allen (plus besoin ici de décision de justice), les disques de Michael Jackson et les ouvrages sur Le Caravage et Gauguin devraient être retirés des rayonnages."

Lire aussi : Voir ou ne pas voir « J’accuse »

Pathé Gaumont : travaux au Gaumont Opéra et reprise du réseau Ciné Alpes

Posté par vincy, le 4 octobre 2019

L'un des navires amiral des Cinémas Pathé Gaumont va fermer temporairement. Le Gaumont Opéra Capucines va lancer une grande phase de travaux dès la mi-octobre. La rénovation de ce complexe de 2100 fauteuils dans le centre de Paris se doublera de l'installation du siège de Pathé, aujourd'hui situé près des Champs-Elysées. Le nouvel établissement sera rebaptisé Pathé Opéra et doté d'une librairie, d'un café et de nouvelles salles plus confortables.

Un essoufflement de la fréquentation

Le circuit disposera encore du Gaumont Opéra Premier, lui aussi bientôt renommé Pathé Opéra Premier (6 salles) dans le cadre de la cession des cinémas Gaumont à Pathé, actée en 2017. Le Gaumont Opéra Français ayant fermé en décembre dernier. Dans le secteur, il y a aussi un UGC (4 salles). Le Gaumont Opéra a longtemps été le Paramount Opéra, de 1927 à 2007. Il dispose de 7 salles. En 2018, l'ensemble du pôle Opéra a accueilli 980000 spectateurs (-10% par rapport à 2017). Depuis le début de l'année, amputé d'un complexe, les Gaumont Opéra demeurent parmi les 20 multiplexes les plus fréquentés de France avec 650000 spectateurs (en baisse de 5% par rapport à la période équivalente).

Un réseau complémentaire

Par ailleurs, Pathé va acquérir le circuit cinématographique CinéAlpes. Le groupe est entré en négociations exclusives avec sa propriétaire. Le réseau comprend 13 salles (soit 17920 places et 105 écrans). Ciné Alpes est surtout présent à Dijon (Quetigny), Brest, Clermont-Ferrand et Aubière, Macon, Nevers, Tours, Aurillac et Mouans-Sartoux. Il y a trois projets en cours (Dijon, Le Creusot, Brest), soit 20 salles de plus et plus de 3300 fauteuils.

Autant dire que Pathé va s'implanter dans des villes où le groupe est complètement absent. Ce qui devrait faciliter l'avis de l'autorité de la concurrence... Aurélien Bosc, Président des Cinémas Pathé Gaumont, rappelle que "ces deux sociétés ont une démarche semblable autour de l'expérience spectateur en investissant dans les nouvelles technologies et en particulier dans des salles IMAX Laser".

Les Cinémas Pathé Gaumont sont leaders de l'exploitation cinématographique en France, aux Pays-Bas et en Suisse. Ils sont également présents en Belgique et en Tunisie. À fin 2018, Les Cinémas Pathé Gaumont exploitent un total de 108 cinémas pour 1116 écrans, accueillant 63,4 millions de spectateurs. Avec l'ajout de Ciné Alpes, ce sont 4,196 millions de spectateurs qui s'ajouteront aux résultats du groupe.

Parasite bientôt en version doublée en français dans les multiplexes

Posté par vincy, le 11 juillet 2019

"Il y a quelques mois, Bong Joon Ho essayait de nous expliquer pourquoi #Parasite n’avait aucun potentiel en dehors de Corée. Merci au million de spectateurs français qui lui ont prouvé le contraire." Relayant ce message de Bong Joon ho sur twitter, le distributeur de Parasite, Palme d'or 2019, peut se réjouir.

Avec 1,11 million d'entrées mardi soir, le film de Bong Joon Ho est devenu le plus grand succès coréen en France (et le premier millionnaire en entrées). Il faut même remonter à 2005 pour trouver un tel succès pour un film venu d'Extrême-Orient. C'est aussi la Palme d'or la plus populaire depuis Entre les murs en 2008.

Logiquement The Jokers a annoncé qu'il travaillait actuellement une version doublée en français, chose très rare pour un film non anglophone. La sortie est calée pour début août, et qui va permettre au film, toujours dans le top 10 des entrées, de conquérir un public plus large, notamment dans les territoires où la vost est rarement diffusée. En ciblant les multiplexes, Parasite en VF pourrait viser les 2 millions de spectateurs.

En Corée du sud, Parasite a déjà récolté 71M$, et se classe déjà 3e du box office annuel.

Le cinéma La Clef met la clé sous la porte

Posté par vincy, le 8 juillet 2019

Cela fait 15 mois que le cinéma indépendant La Clef lutte pour exister. Le cinéma parisien a annoncé hier "que l'aventure se termine". "Le Conseil Social et Économique de la Caisse d’Épargne d’île de France a décidé de mettre fin aux discussions" concernant le projet. "La complexité du projet dans son financement, les exigences posées pour la vente - que nous acceptions, auraient nécessité un délai supplémentaire qui ne nous a pas été accordé. Nous regrettons sincèrement ce choix mais il relève du droit du vendeur" expliquent les exploitants.

Le propriétaire du bâtiment - le Comité Social et Economique (instance qui remplace le Comité d’entreprise et dirigé par les syndicats majoritaires CGC et CFDT ) de la Caisse d'Epargne Ile-de-France - a finalement décidé (une fois de plus) de tuer ce cinéma indépendant qui était aussi un lieu d'échange culturel.

Malgré les soutiens et les partenaires engagés, la campagne de crowdfunding et le travail du collectif Laissez-nous la Clef, rien n'aura suffit. Et cette fois la Clef baisse le rideau. Rien ne dit que le CSE de la Caisse d'Epargne conserve l'activité culturelle du bâtiment dans un quartier où le prix du mètre carré avoisine les 13000 euros.

Seul cinéma associatif de la Capitale, La Clef disposait de deux salles de 120 et 65 places, tout en organisant de nombreuses manifestations. Il avait diffusé ses derniers films le 15 avril 2018.

La Fête du cinéma 2019 fait carton plein

Posté par wyzman, le 4 juillet 2019

Si l’on en croit la Fédération nationale des cinémas français (FNCF), l’édition 2019 a attiré plus de 3,4 millions de spectateurs.

Gros chiffres et vague de chaleur

Dans son communiqué, la FNCF explique ainsi que la fréquentation de cette 35e édition de la Fête du cinéma qui s’est déroulée du 30 juin au 3 juillet était en hausse de 28% par rapport à l’édition 2018. Comprenez par là que s’ils étaient 3,4 millions à se presser au cinéma cette année, ils n’étaient « que » 2,7 millions en 2018.

Plusieurs facteurs expliquent cette excellente santé de la Fête du cinéma. A commencer par les fortes chaleurs qui ont réconcilié les spectateurs de l’Hexagone avec les salles climatisées. Ajoutons à cela les présences à l’affiche des blockbusters Toy Story 4, Aladdin, Men In Black: International, X-Men : Dark Phoeni ainsi que des cannois Parasite, Le Daim et bien évidemment Rocketman. N’oublions pas de mentionner les avant-premières exceptionnelles d’Anna de Luc Besson organisées par Pathé et la sortie du très attendu Spider-Man: Far From Home et le tour est joué.

Dans le détail, ce sont donc 979.000 spectateurs comptabilisés le dimanche 30 juin et 1,14 million rien que le mercredi 3 juillet. Dans son communiqué, la FNCF remercie bien évidemment ses différents ambassadeurs (Marilou Berry, Frédéric Chau, Hafsia Herzi et Raphaël Personnaz entres autres) ainsi que tous les distributeurs qui ont participé à l'opération. Pour rappel, cette 35e édition était notamment l’occasion de gagner des voyages à Hollywood, au Festival de Cannes 2020, au Warner Bros. Studio Tour de Londres ou encore un an de cinéma grâce au fameux « Fauteuil Gagnant » !

Oscars 2020 : Le CNC modifie les conditions d’éligibilité des candidats français

Posté par wyzman, le 3 juillet 2019

Cette année, la France ne va pas manquer de candidats sérieux pour la représenter dans la catégorie meilleur film en langue étrangère des Oscars 2020. Mais avant de se lancer dans l’éternel casse-tête du "Qui nous représentera ?", le CNC (Centre national du cinéma et de l'image animée) est en train d’opérer quelques changements afin d’élargir le nombre de candidats possibles.

Une exploitation bouleversée

Selon le média américain Variety, le CNC serait en train de modifier ses critères d’éligibilité. Jusqu’ici, pour qu’un film puisse représenter la France aux Oscars de l’année suivante, il fallait qu’il ait été exploité en salle sur plusieurs dizaines d’écrans avant le 30 septembre. Avec son nouveau système, un film français pourra déposer sa candidature dès lors qu’il aura connu une exploitation en salle (même limitée) avant le 30 septembre. Si certains détails doivent encore être peaufinés, ces sorties limitées pourraient être de l’ordre d’au moins 6 projections sur une durée d’au moins sept jours, confie une source au magazine américain.

En plus d’offrir de nouvelles possibilités d’exploitations aux différents acteurs du secteur cinématographique, ces modifications laissent la possibilité à des films dont la sortie est prévue à l’hiver d’avoir leur chance. Car il convient de rappeler qu’auparavant, les films présentés à la Mostra (Venise), au TIFF (Toronto) ou au Zinemaldia (Saint-Sebastien) se retrouvaient systématiquement hors-course pour les Oscars. Voilà pourquoi personne ne semblait plus surpris de voir les films sélectionnés au Festival de Cannes toujours présents dans la shortlist. Pour rappel, 7 des 10 derniers candidats français ont été présentés sur la Croisette !

D’autres changements à venir

Petit bouleversement pour les exploitants de salles, la nouvelle éligibilité des candidats français pour les Oscars n’est pas le seul sujet d’interrogations. Et cela notamment parce que le CNC pourrait bien surprendre la presse en dévoilant les noms des nouveaux membres de la Commission chargée de la sélection de notre représentant. Pour assurer un meilleur équilibre, il se dit de plus en plus fort que Thierry Frémaux, l’actuel délégué général du Festival de Cannes et président de l’Institut Lumière de Lyon, devrait annoncer prochainement qu’il quitte son siège.

En attendant, le premier semestre désormais écoulé, certains candidats semblent déjà très sérieux. Il y a tout d’abord Les Misérables de Lady Ly qui fait la part belle aux violence policières et dont la sortie en salle est prévue pour le 20 novembre. Malheureusement, l’achat des droits américains par Amazon Studios pourrait faire grincer des dents le comité de sélection comme ce fut au cas au moment de l’annonce, à Cannes.

Ce qui laisse le champ un peu plus libre pour Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma. Le film visible dès le 18 septembre au cinéma évoque le désir ardent et la passion amoureux de deux femmes respectables au 18e siècle. Mais le François Ozon n’a pas dit son dernier mot. Dans le déjà sorti Grâce à Dieu, le cinéaste s’intéresse au combat des victimes d'abus sexuels sur mineurs dans l’Eglise avec pour source d’inspiration, l’affaire Barbarin.