Adam Driver et Rihanna poussent la chansonnette dans Annette

Posté par vincy, le 18 mars 2017

Amazon Studios distribuera en Amérique du nord Annette, le drame rempli de musique de Leos Carax, avec Adam Driver et surtout, surprise!, Rihanna en vedettes. Annoncée en novembre (lire notre article sur le projet de Leos Carax), Rooney Mara a abandonné le projet, à cause d'autres engagements incompatibles avec le tournage du film. Les producteurs cherchent une remplaçante selon Variety.

Ce premier film en anglais de Carax, avec des chansons originales du groupe Sparks, est donc le dernier pari en date du groupe Amazon, fort de ses trois récents Oscars (Manchester by the Sea pour l'acteur et le scénario, Le client pour le film en langue étrangère). Le nouveau venu hollywoodien mise aussi cette année sur le prochain film de Todd Haynes, Wonderstruck, avec Julianne Moore et Michellle Williams, la comédie de Kumail Najiana, plébiscitée à Sundance, The Big Sick, et le prochain film de Marc Webb, The Only Living Boy in New York.

Le tournage d'Annette doit débuter ce printemps à Los Angeles et dans plusieurs autres endroits dans le monde. La coproduction est elle-même internationale avec Arena Films (France), Vega (Suisse), Eurospace (Japon) et Wrong Men (Belgique).

Adam Driver, qui est passé de Star Wars à Jim Jarmusch, de Jeff Nichols à Martin Scorsese, sera à l'affiche dans les prochains mois de Logan Lucky de Steven Soderbergh et de Star Wars: Episode VIII - The Last Jedi de Rian Johnson.

Après un gros break cinématographique, Rihanna sera sur les écrans cet été avec Valérian et la Cité des Mille Planètes de Luc Besson, et l'été suivant, en 2018, l'une des cambrioleuses de Ocean's Eight de Gary Ross.

Cannes 70 : la comédie musicale sur le tapis rouge

Posté par cannes70, le 17 mars 2017

70 ans, 70 textes, 70 instantanés comme autant de fragments épars, sans chronologie mais pas au hasard, pour fêter les noces de platine des cinéphiles du monde entier avec le Festival de Cannes. En partenariat avec le site Critique-Film, nous lançons le compte à rebours : pendant les 70 jours précédant la 70e édition, nous nous replongeons quotidiennement dans ses 69 premières années.

Aujourd'hui, J-62.

C’était il y a quelques semaines : Damien Chazelle devenait le plus jeune cinéaste à recevoir un Oscar du meilleur réalisateur pour La La Land, juste après avoir égalé le record de 14 nominations et gagné 6 Golden Globes (réalisation, scénario, musique…). Médiatisé au-delà du possible, le film cartonne au box-office et va même faire chanter certains spectateurs dans les salles avec une ressortie en version karaoké !

Alors, bien sûr, La la land n'était pas à Cannes (il a fait l’ouverture de Venise), contrairement au premier film de Damien Chazelle (Whiplash) sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs. Pourtant, il sonne certes comme un hommage aux classiques américains du genre, mais il est surtout sous l'influence d'un film souvent cité par le réalisateur lui-même : Les parapluies de Cherbourg de Jacques Demy. Qui, lui, avait été sacré Palme d’or du Festival de Cannes 1964. Le genre de la comédie musicale qui semblait un peu tombé en désuétude revient donc sur le devant de la scène. En fait, ce n’est pas vraiment la première fois, et c’est d’ailleurs à Cannes que la comédie musicale a plusieurs fois fait son retour.

A noter d'ailleurs que le premier film musical "palmé" sur la Croisette, c'est Orfeu Negro de Marcel Camus, présenté en 1959. Cette année-là, cette adaptation d'une pièce de Vinícius de Moraes, qui revisite le mythe d'Orphée et Eurydice sur fond de Bossa Nova, l'emporte devant Les 400 coups de Truffaut, ou Hiroshima mon amour d'Alain Resnais.

Mais revenons-en à 1964. Le Festival de Cannes est donc "enchanté" par Les parapluies de Cherbourg : les dialogues en chanson de Jacques Demy ont été mis en musique par Michel Legrand, et en fait on y entend peu la voix des acteurs principaux (Catherine Deneuve, Nino Castelnuovo) qui sont doublés par de véritables chanteurs. La comédie musicale qui est souvent dans l’imaginaire fantaisiste est ici ancrée dans le réel : au début des années 60, un jeune homme doit partir faire la guerre en Algérie et quitter une jeune-fille enceinte avant d’être mariée…

Catherine Deneuve est l’actrice au parcours unique dans le genre de la comédie musicale au Festival de Cannes : après Les parapluies de Cherbourg en 1964, elle va chanter et danser dans Dancer in the dark du danois Lars Von Trier en compétition officielle en 2000. Le Palmarès sera au diapason : Palme d’or pour le film, doublé d’un prix d’interprétation de meilleure actrice pour Björk, personnage principal qui chante et compose chansons et musiques. Là encore, film musical rime avec drame, les épreuves les plus tragiques de l’héroïne Björk sont supportée par son amour des comédies musicales qu’elle se chante et danse dans sa tête.

Dans le film Catherine Deneuve accompagne Björk dans deux séquences musicales : Cvalda dans l’usine quand le bruit des machines devient un rythme qui devient une chorégraphie, et My favourite things à la chorale durant les répétitions d’un spectacle joyeux (chanson qui sera reprise larmoyante de désespoir par Björk seule dans sa cellule de prison). Dans Dancer in the dark, chaque séquence chantée et dansée est une échappatoire joyeuse et résignée pour supporter un moment réel pénible, et juste ensuite survient un nouveau drame encore plus tragique…

Après Dancer in the dark, souvenez-vous quel a été le film d’ouverture choisi l’année suivante ? Encore une comédie musicale !  Moulin Rouge de Baz Luhrmann est bien plus virevoltant, avec quantité de reprises de chansons pop (David Bowie, Elton John, Police…), mais son finale n’en reste pas moins (encore) la mort d’une histoire d’amour...

C’est en 2007 que la comédie musicale fait un beau retour en compétition à Cannes avec Les chansons d’amour de Christophe Honoré qui réunit Alex Beaupain à la composition des musiques et Chiara Mastroianni, la fille de Deneuve, à l'écran aux côtés de Ludivine Sagnier, Lous Garrel et Clotilde Hesme. Cette fois, il y a moins de chorégraphie mais tout autant de chansons qui forment des dialogues sur le trouble amoureux (et le deuil) entre un garçon qui aime deux filles dans un ménage à trois qui se complique quand il est lui-même aimé par un autre garçon… Le film repart bredouille, mais Christophe Honoré sera de retour en 2011 avec Les bien-aimés, présenté en clôture.  Un autre film musical dans lequel on retrouve... Catherine Deneuve. Comme pour boucler la boucle.

Cannes fera connaître dans quelques semaines quels seront les films qui seront sélectionnés pour cette 70 édition, mais, ici, on peut déjà vous pronostiquer que la comédie musicale fera de nouveau l’événement lors du Festival... 2018 : en effet, Léos Carax travaille en ce moment sur son prochain film Annette (avec Adam Driver et une actrice encore inconnue en remplacement de Rooney Mara et de Rihanna initialement attachées au projet) qui « sera envoûtant, noir et cruel, mais aussi drôle et joyeux et saura s’inscrire dans la riche histoire d’amour entre le cinéma, la musique et les voix » d’après ses propres mots. Gilles Jacob (ex président du Festival de Cannes) est déjà emballé par le scénario qu’il a lu : « Je pense que ça va être quelque chose ! Can't wait ». Nous non plus.

Kristofy d'Ecran-Noir

Festival 2 Valenciennes 2017 : The Young Lady divise, Les Mauvaises herbes cartonne

Posté par wyzman, le 17 mars 2017

Jour 2. Fictions. Après le carton de Sage femme hier soir, la compétition Fictions continue avec de nouvelles pépites. Si l'an dernier, La Saison des femmes et Chala : Une enfance cubaine ont reçu les honneurs du Festival 2 Valenciennes, cette année, il semble impossible de faire un quelconque pronostic. Les plus pragmatiques diront que c'est parce que seule la moitié des films en compétition a été vue quand les autres argueront que même à ce stade, des tendances devraient se dessiner.

Deuxième film projeté, De toutes mes forces de Chad Chenouga n'a pas manqué de faire réagir les dizaines de festivaliers présents pour l'unique projection. Insouciant, Nassim perd sa mère et se retrouve placé dans un foyer. Malgré la bienveillance de la directrice de l'établissement, le jeune homme alors en première tente de naviguer entre deux vies auxquelles il n'appartient pas complètement. Jeu d'équilibriste, De toutes mes forces passe ainsi de la chronique de la jeunesse parisienne à un drame profond et tangible sur les travers du système et la difficulté qu'ont certains à réaliser leurs rêves. A la fois naïf et dur, De toutes mes forces impressionne par la performance de Yolande Moreau et la révélation Khaled Alouach, un acteur à suivre de près.

Par la suite, les festivaliers ont eu le plaisir de découvrir The Young Lady, adapté du roman de Nikolai Leskov, La Lady MacBeth du district. Drame passionné et passionnant sur une femme qui tente de s'émanciper à une époque où on la réduit trop souvent à l'état d'objet, The Young Lady est porté par une Florence Pugh plus fascinante que jamais et qui n'est pas sans rappeler Natalie Dormer période The Tudors. Cruel et percutant, le film de William Olroyd n'a pas manqué de diviser. Parce que le scénario laisse entrevoir toutes les options que les personnages ont, nombreux été ceux à être incommodés par la noirceur de l'ensemble. Néanmoins, le film dispose d'une photographie et d'une mise en scène particulièrement incroyables qui relèvent d'être notées.

Enfin, comment ne pas évoquer Les Mauvaises herbes de Louis Bélanger ? Comédie dramatique, le film raconte les péripéties d'un acteur criblé de dettes qui se retrouve à cultiver du cannabis avec un ermite grognon et une jeune technicienne ultra sensible. Pêchu et imprévisible, Les Mauvaises herbes est sans aucun doute la comédie la plus caustique de cette septième édition du Festival 2 Valenciennes. Entre son trio d'acteurs principaux absolument bluffant et ses répliques déjà culte et qui s'enchaînent à une vitesse folle, on ne sait plus où donner de la tête. Plus encore, sous ses airs de film de potes, Les Mauvaises herbes traitent de sujets sérieux tels que le coming-out, la filiation et l'addiction. Un beau moment de cinéma !

Un amour impossible entre Virginie Efira et Niels Schneider

Posté par vincy, le 17 mars 2017

Catherine Corsini va réunir deux des acteurs francophones - une Belge et un Québécois - les plus tendance du moment, dans Un amour impossible, adaptation de l'auto-fiction de Christine Angot publiée en 2015. Virginie Efira et Niels Schneider incarneront respectivement la mère et le père du personnage principal de l'histoire. Le Film français révèle que le tournage débutera le 1er juin, produit par Chaz productions (qui vient de sortir Jours de France cette semaine) et ultérieurement distribué par Le Pacte.

Virginie Efira vient d'être nommée au César de la meilleure actrice pour Victoria tandis que Niels Schneider a été récompensé par le César du meilleur espoir masculin pour Diamant noir.

Catherine Corsini et Laurette Polmanss on adapté le roman de Christine Angot (Prix Décembre 2015), qui se déroule de 1958 à nos jour et raconte l'amour inconditionnel entre une mère et sa fille. A Châteauroux, fPierre séduit en effet Rachel mais refuse de l'épouser. Il accepte cependant d'avoir un enfant avec elle, Christine, qu'elle devra élever seule. A l’adolescence, Pierre reconnaît officiellement sa fille, qui, fascinée par ce qu’il lui fait découvrir, s’éloigne de sa mère. Bien plus tard, Rachel apprend que Pierre viole Christine depuis des années (histoire que la romancière a raconté dans L'inceste, 1999).

Le tournage se déroulera à Châteauroux, Reims, Strasbourg, Paris, Nice et Gérardmer.

Christine Angot vient d'adapter Un amour impossible au Théâtre de l'Odéon, avec une mise en scène de Célie Pauthe et Maria de Medeiros et Bulle Ogier dans les rôles de la fille et de la mère. La pièce se joue jusqu'au 26 mars.

C'est la deuxième fois qu'un de ses romans est porté à l'écran, après le très beau Pourquoi (pas) le Brésil? en 2004, réalisé par Laetitia Masson.

Cannes 70 : Joyeux anniversaire, Isabelle Huppert !

Posté par cannes70, le 16 mars 2017

70 ans, 70 textes, 70 instantanés comme autant de fragments épars, sans chronologie mais pas au hasard, pour fêter les noces de platine des cinéphiles du monde entier avec le Festival de Cannes. En partenariat avec le site Critique-Film, nous lançons le compte à rebours : pendant les 70 jours précédant la 70e édition, nous nous replongeons quotidiennement dans ses 69 premières années.

Aujourd'hui, J-63.


Plus que nulle autre actrice, grâce à ses choix éclectiques et sa curiosité indéfectible qui la pousse à s'intéresser aux cinéastes ambitieux, qu'ils soient déjà établis ou simplement prometteurs, Isabelle Huppert possède un lien très fort avec le Festival de Cannes. Elle apparaît dans plus d'une quarantaine de films passés sur la Croisette, dont près d'une vingtaine en compétition officielle, d'Aloïse de Liliane de Kermadec en 1975 à Elle de Paul Verhoeven en 2016. Et c'est probablement loin d'être fini !

Ça commence avec Toscan


Après des apparitions déjà marquantes dans Les Valseuses de Bertrand Blier et Dupont Lajoie de Yves Boisset, elle devient réellement familière du grand public avec deux films «cannois» : La Dentellière de Claude Goretta et un an plus tard Violette Nozière de Claude Chabrol qui lui a permis de remporter son premier prix d'interprétation mais surtout de débuter une belle amitié cinématographique avec son réalisateur. La shampouineuse et la parricide auxquelles elle prête ses taches de rousseur imposent une présence à part. Ces deux personnages montrent deux facettes bien différentes. De la fragilité dans le premier (un registre plutôt abandonné depuis), une force qui n'appartient qu'à elle dans le deuxième et que l'on retrouvera dans la suite de sa filmographie, avec de multiples variantes et évolutions.

Cette union avec Cannes est la conséquence directe de la première rencontre majeure de son parcours de comédienne, sa double histoire avec le producteur Daniel Toscan du Plantier, professionnelle autant que personnelle, évoquée dans l'ouvrage Toscan ! de Jean-Marc Le Scouarnec, récemment publié aux éditions Séguier, qui revient notamment sur la profondeur de leur lien. «Avant beaucoup d'autres, avant même le tournage de La Dentellière, Toscan a effectivement pressenti quelque chose en moi. […] Il a eu cette confiance dans la jeune actrice que j'étais». Elle prend de l'assurance à son contact. «Ma timidité, on en a longtemps rigolé avec Daniel […] Je n'étais pas très consciente des codes de représentation vestimentaire qu'une jeune actrice devait afficher. Pour autant, ma timidité disparaissait dans la sphère qui m'était la plus familière au fond : comme actrice j'ai été très tôt prête à toutes les audaces».

Gilles Jacob témoigne : «Toscan a beaucoup fait pour la carrière d'Isabelle. […] Les premières années, elle a souvent tourné grâce à lui. Il était le catalyseur : il montait des projets autour d'elle, il cherchait des rôles qui pouvaient lui convenir». Le terme Pygmalion, souvent évoqué pour définir leurs rapports, ne plaît guère, on le comprend aisément, à l'actrice : «Daniel aimait bien dire que c'était autant les producteurs qui faisaient les actrices que les actrices qui faisaient les producteurs. C'est grâce à moi qu'il a rencontré Pialat, que Chabrol est venu chez Gaumont. Le relation ne fonctionnait pas que dans un sens. Il s'est trouvé à la croisée de certains projets parce qu'ils arrivaient par moi. Le terme de Pygmalion est réducteur, et pour moi et pour lui. C'est compréhensible que notre alliance […] ait pu mener à ce genre de cliché facile, obsolète et rétrograde». Lors d'un hommage à la cinémathèque de Toulouse en 2003, elle évoquait ainsi sa mémoire : «Ce qui me manque le plus quand je pense à lui, et j'y pense plusieurs fois par jour, c'est son intelligence profonde et sa compréhension des choses et des êtres».

Une exigence de romanesque


Dans les interviews qu'elle a accordées tout au long de sa carrière, elle s'est surtout exprimée sur l'exercice de son métier, peu sur des sujets personnels. Ce qui ressort notamment est son rejet des rôles trop réalistes et sa méfiance du naturalisme. «Les sujets où je ne vois pas la possibilité d'introduire une dimension un peu mythologique me gênent» disait-elle déjà dans le numéro double de mai 1981 des Cahiers du cinéma. Au Figaro, le 14 mai 2001, elle explique avoir refusé Funny Games pour des motifs similaires : «Il n'y avait aucun romanesque, aucun espace fictionnel où les acteurs puissent s'échapper. Pour moi, l'acteur doit voir une part d'imaginaire où il puisse vivre. La plupart des films ont un scénario qui vous nourrit et vous protège. Funny games, c'était la reproduction brute et brutale de la réalité».

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Festival 2 Valenciennes 2017 : Sage femme et A voix haute font sensation

Posté par wyzman, le 16 mars 2017

Lancée lundi dernier, la 7ème édition du Festival 2 Valenciennes achevait hier sa compétition Documentaires. Outre les sacres de  L'Opéra de Jean-Stéphane Bron (Prix de la Critique) et de La jeune fille et son Aigle d'Otto Bell (Prix du Public), ce sont le Prix des Etudiants et le Grand Prix que l'on retiendra avant tout. Le premier a été attribué à A voix haute - La Force de la parole, superbe documentaire centré sur des orateurs du 9-3 tandis que le second (Finding Phong) traite brillamment de la transsexualité d'une jeune femme vietnamienne.

Mais outre la remise des prix adressés aux documentaires, la cérémonie d'ouverture de la compétition Fictions a également été l'occasion de rendre un hommage on ne peut plus dynamique et surprenant au cascadeur Michel Carliez (Fanfan la Tulipe, Ne le dis à personne) et à l'acteur François Berléand (Le Transporteur, Les Choristes). Présentée par Nathalie Corré, cette cérémonie d'ouverture s'est terminée sur la présentation et la projection du film Sage femme de Martin Provost.

Comédie dramatique pur jus, le nouveau film du réalisateur de Séraphine et Violette raconte les péripéties d'une sage-femme (Catherine Frot) dont la vie est bouleversée par le retour de Béatrice (Catherine Deneuve), la maîtresse de son défunt père. Film subtil sur la vie, la mort et le deuil, Sage femme donne raison aux bons vivants et encourage tous les autres à profiter de tout ce qu'ils possèdent. En somme, une belle leçon de vie portée par deux actrices dont le talent n'est plus à démontrer mais à l'impressionnante complicité. Et si Catherine Frot est toujours aussi remarquable de justesse, les répliques offertes à Catherine Deneuve font de cette co-production Curiosa Films, France 3 Cinéma et Versus Production un véritable must-see. Parmi les meilleures pépites, on retiendra "Avec le temps, je me dis que les enfants c'est quand même pratique : c'est là, ça remplit un vide" et "Tu sais que t'es belle quand tu t'encanailles toi !"

Cannes 70 : Nicolas Winding Refn, de Copenhague à la Croisette

Posté par MpM, le 15 mars 2017

70 ans, 70 textes, 70 instantanés comme autant de fragments épars, sans chronologie mais pas au hasard, pour fêter les noces de platine des cinéphiles du monde entier avec le Festival de Cannes. En partenariat avec le site Critique-Film, nous lançons le compte à rebours : pendant les 70 jours précédant la 70e édition, nous nous replongeons quotidiennement dans ses 69 premières années.

Aujourd'hui, J-64.

Si ses trois derniers films ont été sélectionnés en compétition officielle, Nicolas Winding Refn n'est pourtant pas un habitué de Cannes - ou en tout cas, il ne l'était pas avant Drive. Le Danois a en effet passé une quinzaine d'années en étant totalement ignoré de la Croisette, avant que tous les regards se tournent (brièvement) vers lui. Retour sur la carrière du cinéaste danois.

10 ans sous les radars français

Comme il l'explique dans le documentaire portant ses initiales, NWR avait le choix entre intégrer une des écoles de cinéma les plus prestigieuses du Danemark ou réaliser son premier film. Le choix a été rapide, et Refn a décidé de réaliser Pusher. On y suit caméra à l'épaule un dealer qui tente de s'en sortir : un film à petit budget, une plongée dans les bas fonds de Copenhague grâce à laquelle Refn obtiendra un succès critique unanime en France ... 10 ans après sa sortie.

Mais il n'a pas attendu d'être encensé en dehors de son pays pour continuer sa carrière, au contraire : en 1999 sort Bleeder, que nous n'avons pu découvrir qu'il y a quelques mois sur grand écran. Un récit que l'on sent autobiographique, où se mêlent amour dévorant du cinéma et attrait irrésistible pour la violence. Dans le rôle principal, une révélation qui n'avait qu'un second rôle dans Pusher : Mads Mikkelsen, qui aura l'incroyable carrière que l'on connaît quelques années plus tard. Refn lui, après ce deuxième film, quitte le Danemark, direction Los Angeles (oui, déjà !) pour y tourner Inside job avec le fameux John Turturro. Un film qu'il produit avec sa propre compagnie de production, Jan Go Star.

Mauvaise idée : ce sera un tel bide que la compagnie va déposer la clé sous la porte, et lui se retrouve endetté. Pourtant, artistiquement, le long-métrage est loin d'être un échec : il est imparfait, certes, mais nous révèle une nouvelle facette de son auteur. On avait découvert sa violence refoulée dans son premier film, ses obsessions dans le deuxième, ici un nouveau style visuel commence à s'affirmer. On quitte la caméra-épaule à la Mean Streets des deux films précédents pour se poser, ralentir un peu, plonger le protagoniste dans des couleurs de plus en plus vives, en accord avec la psyché troublé du personnage incarné par John Turturro. Un style encore balbutiant, imparfait, mais qui annonce la suite qui sera haute en couleur !

Mais après cet échec cuisant au box-office, deux commandes suivront. Avec Pusher 2 et Pusher III, Refn ne se contente cependant pas de réitérer la recette du premier. Les trois films ont des styles qui n'ont rien à voir entre eux et s'intéressent à trois hommes différents, qui ont en commun d'être plongés dans de sérieux ennuis. Dans le deuxième, c'est le personnage au départ secondaire de Tonny (Mads Mikkelsen) qui est au centre du film - et l'acteur trouve là son premier grand rôle. La paternité, thème qu'on ne retrouvera plus chez le réalisateur, est au centre du film : Tonny, fraîchement sorti de prison, essaie maladroitement de plaire à son père mafieux tout en devenant lui-même papa.

Si Mikkelsen brille, Refn est lui aussi excellent : quelques scènes mémorables préfigurent même des films qu'il ne fera que bien plus tard, comme la scène d'introduction baignée dans le rouge ou une scène de braquage magistrale. Pusher III va lui être un huis-clos et se concentrer sur la journée de Milo, chef mafieux que l'on retrouvait dans les deux opus précédents. : une journée qui commence avec une fête d'anniversaire et finit par par une éviscération. Une journée normale au pays de Refn, qui est encore à une poignée de longs-métrages du Festival ...

Le dyptique Bronson / Valhalla Rising : la confirmation


Bronson et Valhalla Rising sortent à moins d'un an d'intervalle. Le style tranche avec la trilogie Pusher : on quitte toute trace de naturalisme pour se plonger dans des atmosphères hors du temps, minutieusement cadrées.

Bronson commence ainsi par le protagoniste s'adressant à des spectateurs. Sur scène, il raconte sa vie, se travestit, s'énerve ... En fait, toute la vie de Bronson est un spectacle. Connu comme le "prisonnier le plus violent d’Angleterre", le protagoniste a passé plus de trente ans en isolement et s'est fait médiatiquement connaître outre-manche pour ses fresques, relatées dans le film. Bronson, c'est tout d'abord le premier grand rôle de Tom Hardy, qui se plonge totalement dans la peau du personnage (en témoignent ses kilos de muscles, ses mimiques ou même sa moustache en ... poils du vrai Bronson).

Pour Refn, c'est la première partie d'un diptyque en hommage à Kubrick : ici, il revisite Orange Mécanique. En effet, il développe le thème du libre-arbitre au sein d'un environnement carcéral, met en scène la violence avec grandiloquence, et présente un anti-héros s'épanouissant dans l'art. C'est aussi visuellement que le rapprochement est frappant : nombre de travellings accompagnent le protagoniste dans ses mouvements. Il faut dire qu'au niveau de la mise en scène, Refn livre encore une prestation irréprochable, jouant avec les couleurs, les ruptures de tons et des moments d'ultra-violence, le tout sublimé par une musique aux touches électro. Un résultat d'autant plus impressionnant que le film a été produit pour une somme dérisoire : 250000 $, selon des sources concordantes.Difficile d'imaginer un si petit budget ; en tout cas, le film a été bien très bien accueilli par la critique, et connut un petit succès grâce au bouche à oreille - peut-être aussi grâce à l'importance qu'a pris Tom Hardy dans le paysage cinématographique ces dernières années.

Valhalla Rising, lui, n'a pas su trouver son public, et la critique a été moins enthousiaste. Il faut dire que le long-métrage est plutôt aride, décrivant l'arrivée du christianisme dans les régions scandinaves aux IXe-Xe siècles,  puis le départ de vikings vers un nouveau monde. Un film parfois gore, avec en son centre un Mads Mikkelsen borgne et muet mais toujours aussi bon. Un film paradoxalement contemplatif et très violent (une violence sale, crasseuse), une expérience cinématographique assez unique en son genre, souvent décrite comme le "2001 du film de viking" (ce qui est certes très précis). Un film qui s'améliore à chaque vision. Dans une interview, Refn expliquait que pratiquement personne n'était venu pour la conférence de presse à la Mostra de Venise, où le film était présenté hors compétition. Son film suivant par contre sera acclamé, et en tout point opposé à celui-ci.

Drive : la consécration


Drive est paradoxalement le film le moins personnel de Refn et celui qui est souvent utilisé pour le définir. En soi, ce n'est qu'une série B réalisée à Hollywood pour un relatif petit budget (15 millions de dollars). Pourtant, le film va devenir un micro-phénomène de société lors de sa sortie, notamment grâce à sa bande originale mêlant des chansons nostalgiques façon eighties' (comme Nightcall de Kavinsky) et des morceaux de Cliff Martinez, auparavant connu pour ses nombreuses collaborations avec Steven Sodherberg. Ryan Gosling lui va faire des émules dans son rôle de cow-boy moderne et mutique - la voiture a remplacé le cheval.

Le film est présenté à Cannes en 2011, où il reçoit le prix de la mise en scène. Drive est une série B, dans dans le sens classique, positif, du terme. A partir d'un scénario plutôt simple, adapté du romancier James Sallis, Refn livre un film utilisant tous les moyens pour se renouveler dans sa mise en scène. Ce n'est pas tant les poursuites en voiture qui semblent l'intéresser (il y en a d'ailleurs très peu, bien que vraiment réussies) que la figure masculine du personnage (anonyme) de Gosling : sans attaches, sans famille, pouvant aussi bien être nonchalant que subir des accès/excès de violence.

Et si le film est beaucoup plus classique dans son approche que pouvaient l'être ses autres films, il est lui aussi fait de contrepoints : à un moment d'attente succède une course-poursuite, à un baiser une décapitation à coups de pieds. C'est peut-être cela qui a plu au jury présidé par Robert De Niro : cette tension constante, rendant le film viscéral du début à la fin. Un film certes acclamé (il fera plus d'un million et demi d'entrées en France !), qui met Refn sur le devant de la scène, mais qui devient le point de référence dans sa filmographie, alors qu'il n'en est qu'un (excellent) détour.

Only god forgives et The Neon Demon : l'incompréhension


On ne peut pas dire que Only God forgives ait eu droit au même accueil que Drive à Cannes, trois ans plus tard : le film fut hué par une partie de la salle. Ceux qui s'attendaient à une suite de Drive on dû être déçus, puisque le film lui est opposé en tous points : Ryan Gosling est un personnage miné par l'impuissance, l'action y est plus rare (mais pas les excès de violence), les événements se situent en Thaïlande et Cliff Martinez a eu pour directive ... de ne pas faire du Cliff Martinez . Pour autant, Only god forgives est dans la droite lignée des autres films de Refn. Tout comme Valhalla Rising, il s'agit d'une expérience cinématographique avant tout, aux couleurs sublimes et aux cadres plus "kubrickiens" que jamais. Reprocher au film la finesse de son scénario serait aussi absurde que de faire le même reproche à Mad Max Fury Road : les deux films ont été fait pour être ressentis plus que réfléchis.

The Neon Demon a été encore plus loin dans la visée d'une expérience. Utilisant les codes de la mode pour en critiquer le système, Refn livre un film hypnotique, fascinant, esthétiquement plus poussé qu'aucun autre de ses long-métrages. Nous l'avons adoré (comme vous pouvez le lire ici et là), mais le film a été un échec commercial (en France, 150 000 entrées, soit 3 fois moins que Only God Forgives et 10 fois moins que Drive ; dans le monde, moins de 3 millions de dollars de recette pour un budget de 7 millions).

A Cannes, sans être hué, il n'a reçu aucun prix, à l'instar des films les plus intéressants de la compétition. Grâce à Cannes, Nicolas Winding Refn est tout de même devenu une personnalité connue, voire reconnue, dans le monde du cinéma. Il s'amuse d'ailleurs à jouer de son image, comme le prouvent ses initiales apposées dès les premières secondes du générique de The Neon Demon. NWR : désormais, un label, apposé sur des livres (L'art du regard), sur des documentaires sur lui-même ou sur des restaurations (récemment, La Planète des vampires de Mario Bava). Critiqué pour son ego, Refn ne fait pas l'unanimité mais il en est le premier ravi.

Pour le citer : "tu sais que tu as fait un grand film quand la moitié ont aimé, et l'autre détesté". Je n'aurais pas dit mieux !

Edito: Jours de l’espoir perdu

Posté par redaction, le 15 mars 2017

Il y aurait de quoi désespéré avec cette actualité! Allez c'est bientôt le printemps, dans un mois les films cannois seront connus. Et cette semaine quatre grands films sortent sur les écrans. Inégalement sans doute.

Mais leurs différences et leurs qualités méritent de se détourner des comédies françaises un peu faciles dont le pitch a été pioché dans les magazines féminins et des blockbusters américains où les effets visuels impressionnent plus que le récit.

Chacun à leur manière, James Gray, Aki Kaurismäki, Jérôme Reybaud et Julia Ducournau racontent une quête de soi. L'idée de trouver ou/et retrouver la part humaine et la part de paix qui se sont enfouies sous notre animalité et sous notre folie.

Dans son entretien avec Ecran Noir, l'acteur Sherwan Haji regrette que les médias ne fassent pas plus de place à l'amour et à la solidarité. On pourrait ajouter à la culture et aux progrès de la science. Cela peut d'ailleurs expliquer le succès de films comme Demain ou Intouchables.

Que ce soit l'obsessionnelle découverte d'un monde inconnu dans The Lost City of Z, la bienveillance par rapport à l'étranger dans L'autre côté de l'espoir, la rencontre curieuse des autres dans Jours de France ou la difficile acceptation d'être autre dans Grave, les films montrent que c'est en allant par-delà nos peurs - qui ne doivent pas guider notre avenir comme le rappelle le personnage de Sienna Miller dans le James Gray - qu'on peut se construire, s'enrichir et s'épanouir.

Alors que nous baignons dans un torrent de fake news pas filtrées, le cinéma, à travers son sens de la fiction, n'a jamais semblé aussi près de la vérité en faisant de l'humain son matériau brut, de la nature humaine son inspiration. Chaque être devient ainsi une possible porte ouverte vers un inconnu incertain, désirable et mystérieux. Tout n'est pas perdu. Rien n'est vraiment grave. Les jours se suivent mais ne se ressemblent pas: il y a définitivement un autre côté à explorer et ça s'appelle l'espoir.

Netflix s’empare du dernier film inachevé d’Orson Welles

Posté par vincy, le 15 mars 2017

the other side of the wind orson welles john hustonAlors qu'Amazon affirme ses ambitions cinématographiques (Manchester by the Sea oscarisé deux fois, The Lost City of Z aujourd'hui sur les écrans et le prochain Leos Carax), Netflix vient d'acquérir les droits de The Other Side of The Wind, dernier film du réalisateur américain Orson Welles.

Tourné de manière sporadique entre 1970 et 1976, le film n'a jamais été terminé à cause d'un conflit entre le réalisateur et le financier derrière le projet, l'Iranien Mehdi Bushehri, beau-frère du Shah d'Iran. Ce n'est pas le seul film inachevé du cinéaste puisqu'on compte Don Quichotte, The Deep et Le marchand de Venise. Parfois ils ont été tournés et parfois montés, mais n'ont jamais connu de sortie en salles.

The Other Side of The Wind sera donc monté, restauré et ainsi achevé sous la supervision de l'un des producteurs de l'époque, Frank Marshall (Retour vers le futur, Indiana Jones, Jason Bourne, Sully entre autres) et avec l'aide du réalisateur, producteur et auteur polonais Filip Jan Rymsza ainsi qu'avec l'un des acteurs du film Peter Bogdanovich, engagé comme consultant.

Trois ans de négociations

Dans ce film, qui peut se voir comme un reflet autobiographique de la carrière de Welles, il avait choisi John Huston, un autre vénérable cinéaste pour incarner le personnage d'un réalisateur en perte de vitesse qui tente un retour. Le film raconte une soirée (prise par différents types de caméras selon le point de vue des invités et des paparazzis) dans la villa de Jake Hannaford, cinéaste non conformiste, à la veille de sa mort.

Le montage respecterale scénario écrit par Orson Welles et la Croate Oja Kodar, qui était également à l'affiche du film. Celle-ci était la dernière compagne du réalisateur. Malgré une levée de fonds importante il y a deux ans (un peu plus de 400000$, cinq fois que ce qu'il fallait), l'héritière a refusé de se séparer des négatifs du film, un temps stockés à Paris (lire aussi notre article du 11 novembre 2014).

Le gros chèque (enfin " la passion et la persévérance" selon le communiqué) de Netflix aura eu raison d'elle. Et désormais les bobines ont migré à Los Angeles. "C'est un travail de passion et un cadeau en héritage de l'un des plus grands réalisateurs de l'histoire" a sobrement expliqué le directeur des contenus de la plateforme mondiale Ted Sarandos.

Incapable de filmer en Thaïlande, Apichatpong Weerasethakul prospecte en Colombie

Posté par vincy, le 14 mars 2017

Apichatpong Weerasethakul pourrait tourner pour la première fois loin de sa Thaïlande. En Colombie plus précisément. Palme d'or en 2010, le cinéaste a confié quelques détails sur son projet au Hollywood Reporter. Il va effectuer un voyage de deux mois dans ce pays sud-américain afin de vouloir comprendre "la violence qui s'est développée ici et l'histoire de la colonisation", ce qui, selon lui, fait écho à son propre pays. Cette recherche devrait aboutir à un film, qu'il souhaiterait tourner sur place.

Il explique qu'il est actuellement contrarié par la censure et le climat politique de la Thaïlande, qui est régit par une Loi martiale depuis mai 2014. Il confie au journal professionnel américain qu'il est obsédé depuis un moment par l'Amérique latine. Alors qu'il présentait une rétrospective de son œuvre au Festival de Carthagène, en Colombie, la semaine dernière il a décidé d'expliquer et de justifier dans ce projet.

Amoureux de la jungle et de ses animaux, il voudrait s'affranchir de la vision occidentale de cette forêt tropicale, cette "romantisation" comme il la définit. Il accuse d'ailleurs les artistes occidentaux d'avoir influencé les auteurs, les cinéastes et les populations en montrant une jungle qui n'a rien à voir avec la réalité, mais qui est devenue dans les livres, les films et les esprits une sorte de vision unique de la jungle.

Devant l'impossibilité de filmer librement - la Loi en Thaïlande interdit d'évoquer ou critiquer la monarchie, la religion ou l'armée - il préfère aller filmer la réalité ailleurs. Les films en Thaïlande sont considérés comme de la propagande. De nombreux artistes sont menacés ou emprisonnés depuis le coup d'Etat militaire.