Jean Desailly défaille définitivement (1920-2008)

Posté par vincy, le 13 juin 2008

lapeaudouce.jpgCes dernières années, le comédien, ex pensionnaire de la Comédie Française et ancien directeur de théâtre (Hébertot, Edouard VII et Madeleine), Jean Desailly, était surtout connu comme un homme de scène, le partenaire immuable de Simone Valère, à la ville comme sur les planches. Un couple de soixante ans qui ne s'est marié que tardivement  : "Grâce à Dieu, nous n'avons jamais connu le chômage. Voilà pourquoi nous avons vécu dans le péché" s'amusaient-ils.

Il avait commencé comme dessinateur publicitaire, empoché le premier prix de comédie dès sa première année de conservatoire puis appris sur le tas son métier, au sein de la troupe amateure La Roulotte. Dès l'après guerre, il préféra le cinéma à la Comédie Française, qui le renvoya. Il intégra alors la compagnie d'un autre couple célèbre, les Renaud-Barrault.

 Au cinéma, en 1946, il fut dans l'immense succès La symphonie pastorale,  de Jean Delannoy, avec Michèle Morgan. Une palme d'or. On le retrouve en Marivaux chez Guitry dans Si Versailles m'était conté. Il retrouve Morgan dans Les Grandes manoeuvres, de René Clair. Delannoy, lui, le reprend pour Maigret tend un piège, avec le vieux Gabin et la jeune Girardot et Le baron de l'écluse, avec le plus vieux Gabin et la jeune Presle.

Dans les années 60, il croise pour la première fois Jean-Paul Belmondo. Chez Melville dans Le Doulos. Dix ans plus tard, ils seront réunis dans L'héritier, de Philippe Labro, puis dans Le professionnel, de Georges Lautner, où il incarnera le ministre. Le cinéma n'étant pas son métier principal, il acceptera d'y faire des apparitions, des seconds rôles, donnant ainsi la réplique à Henry Fonda, Anthony Quinn ou Alain Delon, même le temps d'une scène. Il jouait ainsi les bourgeois, les hommes à particules, les fonctionnaires en uniformes. Sa voix posé, grave, élégante l'a souvent rendu narrateur (Les Rois maudits, en série télévisée des années 70)...

Un acteur de cinéma de second plan, sans aucun palmarès, et pourtant un immense acteur. Seul François Truffaut lui offrit un rôle digne de son talent. Dans La peau douce (1964, photo), il incarne un éditeur connu, marié et d'apparence sage. Mais il y est irrésistiblement attiré par la sensuelle et délicieuse Françoise Dorléac. On le comprend. Cette tragédie amère et amoureuse, tout en silences impalpables et en tension tactile, est le film qu'il faut revoir pour apprécier ce qui restera de Jean Desailly : son amour du jeu.

Martyrs, appel au rassemblement !

Posté par geoffroy, le 13 juin 2008

martyrs.jpgSuite à l'avis de la commission de classification recommandant d'interdire aux mineurs de moins de 18 ans le film Martyrs, de nombreuses voix se sont élevées pour dire avec force leur stupéfaction, leur colère et leur inquiétude. Ecran Noir est solidaire et soutient dans ce combat le réalisateur Pascal Laugier. Nous ne sommes que trop conscients des risques d'une telle interdiction pour la production à venir d'un cinéma de genre déjà peu prolifique dans notre pays. Il ne faudrait pas que cet avis, sans doute validé par la Ministre de la Culture Christine Albanel, fasse en quelque sorte jurisprudence et plombe ainsi les velléités de réalisateurs qui ne demandent qu'à exprimer leur talent. L'incompréhension est de mise au vu de l'incroyable succès des films horrifiques espagnols un peu partout dans le monde. A ce titre, nous soutenons la démarche du cinéaste Fernando De Azevedo et son appel au rassemblement ce vendredi à 14h30, place du Palais royal.

Ci-joint la lettre du réalisateur :

Cher Amis, techniciens, journalistes, réalisateurs, scénaristes, acteurs, producteurs, distributeurs... A tous ceux qui aiment le cinéma dans tous les genres !! Depuis le 30 mai, la commission de classification a interdit aux moins de 18 ans le film "Martyrs". C'est une honte, j'ai vu ce film, il n'y a aucune scène pornographique !! Martyrs est un film qui m'a bouleversé comme l'ont fait un certain nombre d'oeuvres, de "Massacre à la tronçonneuse" au récent "Ring". La violence que l'on voit dans ce film n'est jamais gratuite, elle sert un propos, elle nous questionne sur la vie, l'esprit, le corps après la mort. Pascal Laugier a su mettre en scène l'au-delà avec un sens visionnaire tout à fait bouleversant.
Si le ministère de la culture ne change pas d'avis, Martyrs deviendra le premier film français d'horreur interdit aux moins de 18 ans. Rappelons que le -18 ans, aujourd'hui encore, est une extension de la loi X et, dans le contexte de frilosité actuel des exploitants, il représente une marque infamante qui équivaut à la mort programmée du film !!!! C'est si vrai que, initialement prévue le 18 juin, la sortie du film a été purement et simplement annulée.
Interdire, c'est INTERDIRE POUR DEMAIN ! C'est pousser les producteurs et les distributeurs à ne plus développer de films de genre, c'est empêcher les scénaristes et réalisateurs de créer ce qu'ils désirent. En clair, c'est favoriser l'autocensure, c'est tenter d'éradiquer un genre cinématographique qui avait déjà du mal à avoir sa place sur les écrans Français. J'ai grandi avec ces films, ils m'ont dérangé, bouleversé et j'ai appris grâce à eux... Ce film doit EXISTER !!
Je veux que les artistes de ce pays restent encore libres de choisir. C'est par cette liberté que se créeront des oeuvres fortes, indépendantes, insoumises... Alors, que faire ? Que dire ? Rester chez soi ?
Aujourd'hui, si on ne voit pas, ça n'existe pas ! Il faut PHYSIQUEMENT faire quelque chose ! Je me lance !!!
Manifestons contre cette censure qui ne dit pas son nom, le Vendredi 13 juin (Belle date !), à 14H30, place du Palais Royal, face au ministère de la culture. Métro Palais Royal, Musée du Louvre.
Venez nombreux, pour demander au Ministre de la Culture de reconsidérer l'avis de la Commission, pour donner à "Martyrs" un visa assorti d'une interdiction aux moins de 16 ans, accompagné d'un avertissement sur la violence d'images jamais gratuites au service d'un propos dérangeant. Pour que ce film existe et soit distribué comme une oeuvre à part entière...
Paris, le 7 juin 2008
Fernando De Azevedo
Réalisateur