Millénium en trois volets au cinéma

Posté par vincy, le 20 mars 2009

Rien n'est simple. Au départ, les producteurs suédois, allemands et danois décident de produire la trilogie Millénium, adaptée des best-sellers de Stieg Larsson, de la manière suivante : un film, le premier tome, pour les salles de cinéma et trois fois deux épisodes pour la télévision, pour l'ensmble de la saga. UGC emporte les droits de diffusion du film pour une sortie le 13 mai 2009 en France et Canal +, il y a quelques semaines, acquiert les droits de diffusion de la série télévisée pour une programmation en octobre prochain.

UGC a ainsi grillé Pathé et EuropaCorp, sur les rangs. Surtout, la société française cherche à empêcher par tous les moyens que les producteurs scandinaves revendent les droits pour un remake américain. Car, d'une part, aucun distributeur américain ne s'est manifesté jusqu'à présent, attendant sans doute de voir si les romans allaient séduire le public états-unien ; d'autre part, le format imaginé au départ ne correspond pas à une manière d'exploiter un livre pour le cinéma. Le mélange grand écran-petit écran n'est pas dans leurs habitudes.

Il aurait pu en être autrement. Mais le grand manitou de la télévision suédoise, l'homme le plus puissant des médias scandinaves, s'est entêté avec son casting 100% suédois, son concept (1 film + 2 téléfilms) et ne s'attendait sûrement pas à un intérêt aussi vivace pour ce polar violent.

Or, le film cartonne en Suède et au Danemark et maintenant en Norvège, avec un total de 1,5 millions d'entrées. Et, surtout, refusé par Cannes - il ne correspondait pas aux critères d'exclusivité de plus en plus exigés par le Festival - il va devoir se lancer à l'assault de l'Europe, face à Anges & Démons, notamment, sans le coup de pouce marketing qu'aurait offert les marches du palais de la Croisette.

Yellow Bird et Swedish Television ont donc décidé aujourd'hui, de manière inattendue, de sortir les deux suites au cinéma. Ce qui va poser un problème pour ceux qui ont acheté les droits télévisés. Mais les producteurs assurent que les contrats ne seront pas retouchés. Le deuxième volet sortira en Suède en septembre et le troisième en novembre.

Les distributeurs étrangers vont donc désormais négociés pour les deux suites, mais surtout devront prévoir des sorties très "rapprochées". A moins que Canal + décale sa diffusion télévisée, UGC n'aura que cinq mois pour sortir les opus deux et trois. La télévision suédoise a préféré attendre mars 2010 pour diffuser la série de six épisodes (9 heures). Etrangement, elle sera disponible en DVD dans les pays scandinaves dès décembre.

A ce point d'improvisation et d'anarchie, on ne connaît qu'un équivalent : les chaînes de télé françaises capables de mélanger les saisons d'une série américaine en une soirée. ;-)

Forum de Monaco : l’heure de vérité

Posté par vincy, le 20 mars 2009

laura morante philippe bessonC'est sous la présidence de la "sublissima" Laura Morante, venue en voiture d'Italie, faute d'avions, que le 8e Forum International Cinéma & Littérature de Monaco s'est ouvert jeudi 19 mars au soir. Le film, Nixon / Frost, l'heure de vérité, de Ron Howard, portait le titre idéal pour définir les défis de demain que va affronter la manifestation.

Car d'un côté les éditeurs se sont organisés entre eux sur Paris en créant leur propre marché. De l'autre, les producteurs connassent de mieux en mieux le secteur du livre. Le Forum n'est donc plus le passage obligé pour faire ses emplettes ou des rencontres. Les agents littéraires pourraient donc s'engouffrer dans la brèche pour vendre les droits de leurs "poulains", d'autant que les auteurs se plaignent des contrats d'éditeurs, qui leur sont trop défavorables.

Ainsi, on entend aujourd'hui telle productrice parisienne célèbre révéler la supercherie d'un des contrats les plus observés, et d'un film très attendu cette année : supercherie au détriment de l'écrivain. On reste stupéfait devant telle auteure célèbre raconter comment un éditeur lui a spolié ses droits audiovisuels avant de déposer son bilan, et de ne jamais la rétribuer...

L'harmonie entre les deux secteurs n'est pas encore au rendez-vous. Il manque un circuit clair et transparent qui irait du diffuseur à l'auteur, sans l'opacité des intermédiaires.

Cela n'empêche pas le cinéma de se nourrir de littérature. Par exemple, Josée Dayan a acquis les droits du baiser de cinéma, d'Eric Fottorino. Mais la réalisatric, avec son franc parler, n'oublie pas de dire qu'il s'agit d'une solution économique. En France, il n'y a aucune volonté de financer des ateliers d'écriture ou du développement de scénario. Cela arrange aussi bien les réalisateurs qui cumulent avec les tâches de producteurs et scénaristes, se réclamant ainsi comme unique auteur, que les maisons d'édition qui peuvent ainsi vendre les droits audiovisuels de leurs livres.

Mais avec quel sacrifice quand on sait, tel que Le Figaro l'annoncera demain, que Anna Gavalda touche 100 000 euros pour la cession des droits de Je l'aimais et que Zabou Breitman obtient 135 000 euros pour son travail de scénario-adaptation, et la même somme pour son activité de réalisation?

Monaco devrait, à l'avenir, se focaliser davantage sur des débats et des ateliers pédagogiques, plutôt que de perdre son énergie dans un marché qui n'a plus lieu d'être. Avec plus de films et de téléfilms diffusés, montrant ainsi les liens entre les deux arts, il serait bon pour cet événement arrivé à un cap décisif de croissance, qu'il se mue en Festival.

photo : Philippe Besson, Laura Morante (c) Vincy Thomas