2000-2009 : Les 10 Palmes d’or

Posté par vincy, le 22 décembre 2009

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L'Europe est la grande puissance dominatrice du palmarès cannois. Seulement deux films venus des Etats-Unis. Les Dardenne ont ajouté une deuxième Palme à leur filmographie. Von Trier, Moretti, Loach et Haneke, grands habitués de la Croisette et vétérans du 7e art d'auteur, ont conquis la récompense suprême, à force de sélections. Une prime à la classe... Finalement seuls le roumain Mungiu et le français Cantet font figure de révélation issue d'une nouveau genre de cinéma, entre documentaire et réalité, ce que représentent aussi très bien les deux Palmes américaines de Van Sant et Moore.

Côté public, il est intéressant de constater la suprématie d'un documentaire devant deux films français (mais un francophone) et une comédie musicale au casting international. Les quatre seuls millionaires. Notons que sans Palme, aucun de ces films n'auraient atteint de tels scores. 300 000 spectateurs pour un film roumain ou les presque 600 000 pour une oeuvre austère en noir et blanc, c'est, dans le contexte de cette fin de décennie, inespéré.

Voici les palmes avec leur box office français entre parenthèses.
2000 : Dancer in the dark (1 120 100)
2001 : La chambre du fils (598 437)
2002 : Le pianiste (1 400 000)
2003 : Elephant (616 771)
2004 : Fahrenheit 9/11 (1 979 186)
2005 : L’enfant (310 720)
2006 : Le vent se lève (876 370)
2007 : 4 jours, 3 semaines et 2 jours (297 558)
2008 : Entre les murs (1 500 677)
2009 : Le ruban blanc (550 000, encore en exploitation)

Treeless mountain : enfance douce-amère

Posté par MpM, le 22 décembre 2009

Treeless mountain

"Elle revient quand, maman ?"

L'histoire : Lorsque leur mère les confie à une tante habitant à la campagne, Jin et sa petite soeur Bin se sentent complètement abandonnées. Commence alors une nouvelle existence où, relativement livrées à elles-mêmes, elles tentent de compenser cette absence par tous les moyens.

Notre avis : Largement autobiographique, Treeless Mountain raconte à hauteur d'enfant une succession d'abandons qui conduisent malgré tout à la sérénité et au renouveau. Une sorte de parcours initiatique fait de dépouillement, au cours duquel il faudrait renoncer à son vœu le plus cher (le retour d'une mère) pour mieux se construire.

A l'écran, tout est très ténu. La réalisatrice Kim So-yong fait avancer le récit par toutes petites touches, avec des scènes ultra-courtes qui ne font qu'esquisser les situations. On saisit au vol des bribes d'explication, une atmosphère, un parfum d'enfance. La tristesse et la mélancolie se mêlent au cocasse et à la fantaisie. Pas de place pour le mélodrame ou la complaisance. D'ailleurs, tout ce qui pourrait plomber l'intrigue est rapidement évacué, à commencer par les adultes, presque inexistants.

Seules comptent les relations entre les deux fillettes et leur inépuisable énergie face à l'existence. Cette naïveté assumée (due en grande partie au fait que le film embrasse le point de vue de Jin) ne rend jamais Treeless mountain mièvre mais au contraire attachant. Toutefois, en contrepartie, elle le prive peut-être de substance plus "dramatique" qui en dynamiserait le cours, et prend le risque de rebuter les spectateurs les moins sensibles à la seule délicatesse du style.

Cracks : pas de quoi craquer…

Posté par MpM, le 22 décembre 2009

Cracks"La chose la plus importante dans la vie, c'est le désir."

L'Histoire : Miss G, professeur d'éducation physique dans un pensionnat pour jeunes filles isolé du monde, est la coqueluche de ses élèves, des adolescentes fantasques qu'elle charme par des récits de voyages exotiques et des propos modernistes. Mais l'arrivée d'une nouvelle étudiante, une aristocrate espagnole en disgrâce, bouleverse la vie de la petite communauté.

Notre avis : Adaptation sans éclat du roman éponyme de Sheila Kohler, Cracks fait penser dans un premier temps à une version féminine du Cercle des poètes disparus, où Miss G tenterait d'élever l'esprit de ses étudiantes et de les libérer du carcan social rigoriste de l'époque. Rapidement, malgré tout, on s'aperçoit que la belle enseignante cherche plus à leur dire ce qu'il faut penser qu'à leur apprendre comment faire. L'intrigue prend alors un autre chemin, largement plus ambigu, mais qui n'en est hélas pas moins prévisible.

Rivalités adolescentes, opposition entre sentiments troubles et noblesse du cœur, potacheries à la limite de la cruauté... les situations et les rebondissements ne parviennent pas vraiment à surprendre. Pire, le manque de rythme et de personnalité de la mise en scène (pour son premier film, Jordan Scott ne semble pas encore avoir hérité du savoir-faire de son père Ridley) rendent certains passages franchement indigestes.

Pourtant, on comprend ce qui a pu séduire Eva Green dans le projet. Avec Miss G, elle aborde un personnage extrêmement ambigu et aux nombreuses zones d'ombre, qui lui permet d'être à la fois dans le domaine de la séduction, de la manipulation et de la folie. Plus torturée que venimeuse, sa composition est au fond à l'unisson de celle des autres actrices : un peu en deçà du potentiel du rôle, mais efficace et sans réelle fausse note. Pas de quoi rendre le film inoubliable, mais suffisant pour l'élever au-delà du téléfilm passe-partout.

Esther espère terrifier son monde

Posté par kristofy, le 22 décembre 2009

esther.jpg"Quelque chose ne va pas chez Esther…"

L’histoire : Après avoir perdu l'enfant qu'elle attendait, la fragile Kate fait le choix, avec son compagnon John, d'adopter un enfant. A l'orphelinat voisin, Kate et John se sentent étrangement attirés par une fillette, Ether.
Mais Kate ne tarde pas à découvrir la face cachée de la douce enfant. Autour d'elle, personne n'a rien remarqué, et nul ne semble partager ses doutes et ses inquiétudes...

Notre avis : Elle a l’allure d’une petite fille modèle avec ses jolies robes et ses rubans mais elle est loin d’être un modèle de petite fille sage. Esther est plutôt une gamine très maligne qui sait se défendre…et surtout attaquer. Rien que son regard montre que c’est une orpheline qui est bizarre, ce que le spectateur ‘sait’ d’avance. Cependant aucun des personnages du film ne remarque quelque chose d’étrange jusqu’à ce que…

Esther est un thriller pas très original mais relativement efficace. Malgré son nom hispanique, Jaume Collet-Serra n’est pas un autre réalisateur du renouveau horrifique venu d’Espagne : il avait déjà mis en boite La Maison de Cire qui était déjà aussi une production Dark Castle. La boîte a déjà produit 13 fantômes, Le vaisseau de l'angoisse, Gothika, Les Châtiments… , soit l’ambition de proposer régulièrement un film d’angoisse original (ou un remake inspiré d’un classique) avec en gros, comme slogan, "ça va vous faire peur". Esther est dans cette droite ligne : un film (assez) divertissant d’épouvante (mais pas trop). C’est le caractère de cette Esther (et son secret) qui provoque un mélange de fascination/répulsion qui tient en halène, car on va la découvrir mettre sa famille adoptive à feu et à sang.

Vera Farmiga (formidable dans In the air, bientôt sur les écrans) et Peter Sarsgaard se vont voler la vedette par la gamine Isabelle Fuhrman qui compose ici une méchante monstrueuse dont on se souviendra. C’est même peut-être la fillette la plus flippante au cinéma depuis Linda Blair dans L’Exorciste. Le thème de l’enfant comme menace mortelle est un classique du genre fantastique bien qu’il soit (mal)traité souvent sous l’angle du risible (Godsend, Joshua, Ils). Il faut reconnaître que Jaume Collet-Serra s’en sort plutôt bien. Si son film n’évite pas quelques clichés téléphonés il réussit à distiller progressivement un certain malaise. Le scénario est composé des différents écueils qui cimentent ou fragilisent une famille comme le deuil, l’adultère, l’alcoolisme, et bien entendu l’adoption d’une orpheline qui s’appelle Esther. Quand on découvrira sa véritable personnalité, brrrr… Oserez-vous (encore) la regarder ?