Robin Campillo, Julie Delpy et The Square récompensés aux European Film Awards 2017

Posté par wyzman, le 9 décembre 2017

C'est ce soir qu'avaient lieu les European Film Awards 2017. Sacrés à Berlin, les vainqueurs sont élus par l'European Film Academy, rassemblement de plus de 2500 professionnels du cinéma. Cette année encore, les films récompensés sont tous passés par des festivals majeurs (Cannes, Berlin, Venise).

Meilleur film

- THE SQUARE by Ruben Östlund

Meilleure comédie

- THE SQUARE de Ruben Östlund

Meilleur réalisateur

- Ruben Östlund - THE SQUARE

Meilleur scénariste

- Ruben Ostlund - THE SQUARE

Meilleure actrice

- Alexandra Borbély - CORPS ET ÂME (ON BODY AND SOUL)

Meilleur acteur

- Claes Bang - THE SQUARE

Meilleur compositeur

- Evgueni & Sacha Galperine - FAUTE D'AMOUR (LOVELESS)

Meilleur chef-opérateur

- Michail Krichman - FAUTE D'AMOUR (LOVELESS)

Meilleur monteur

- Robin Campillo - 120 BATTEMENTS PAR MINUTE

Meilleur décorateur

- Josefin Åsberg - THE SQUARE

Meilleur costumier

- Katarzyna Lewinska - SPOOR

Meilleur mixeur

- Oriol Tarragó - A MONSTER CALLS

Meilleur maquilleur-styliste

- Leendert van Nimwegen - BRIMSTONE

European Achievement in World Cinema

- Julie Delpy, Ethan Hawke

Meilleur documentaire

- COMMUNION by Anna Zamecka

EFA Lifetime Achievement Award

- Aleksandr Sokurov

Meilleur court-métrage européen

- TIMECODE de Juanjo Gimenez

Meilleur film d'animation

- LOVING VINCENT de Dorota Kobiela & Hugh Welchman

EFA People's Choice Award 2017

- STEFAN ZWEIG - FAREWELL TO EUROPE de Maria Schrader

Prix FIPRESCI de la meilleure découverte

LADY MACBETH (THE YOUNG LADY) de William Oldroyd

L’artisan bricoleur Chris Marker a soufflé sa dernière bougie (1921-2012)

Posté par vincy, le 30 juillet 2012

Chris Marker est mort le jour de son anniversaire, hier, 29 juillet 2012, le jour de ses 91 ans. Dans un tweet, Gilles Jacob, président du Festival de Cannes, lui a immédiatement rendu hommage : "Esprit curieux, cinéaste infatigable, poète amoureux des chats, vidéaste, personnage secret, immense talent, sommes orphelins de Chris Marker."

Christian François Bouche-Villeneuve, alias Chris Marker, gârce à ses documentaires et films expérimentaux, a profondément influencé le cinéma mondial. Il a commencé en coréalisan avec Alain Resnais Les Statues meurent aussi (1953). Il fut aussi directeur de collection chez un grand éditeur, écrivain, illustrateur, traducteur, intellectuel, réalisateur, photographe, éditeur, philosophe, essayiste, critique, poète, artiste vidéaste, professeur à la Fémis, voyageur, communiste, existentialiste (il a eu Sartre comme professeur), résistant, moraliste... Ses photos avaeint aussi fait l'objet d'expositions (y compris aux Rencontres d'Arles).

Son cinéma, singulier et poétique, s'est affirmé au moment où la Nouvelle vague cherchait une nouvelle voie narrative : Dimanche à Pékin (1956), Lettre de Sibérie (1957), Description d’un combat (1961), Cuba Si (1961). Il témoigne d'un monde en pleine guerre froide, entre Guerre du Vietnam et Mai 68, luttes gauchistes et pouvoirs communistes...

C'est évidemment avec La Jetée (1962), montage cinématographique composé de photos fixes qu'il inventa un style et une nouvelle écriture cinématographique.La durée total des rushes e ce photo-roman était de 55 heures! Le film sera culte et inspirera de nombreux cinéastes et sera la base du scénario Twelve Monkeys (L'armée des douze singes) de Terry Gilliam.

En 1963, avec Pierre Lhomme, il coréalise son premier long métrage, Le joli mai (prix de la meilleure oeuvre au Festival de Venise).you

Dans les années 70, il réalisera La Solitude du chanteur de fond (sur Yves Montand, en 1974), Le fond de l’air est rouge (1977), Junktopia (César du meilleur cout métrage), Sans Soleil (1983), A.K. , film sur le tournage de Ran, d’Akira Kurosawa (1985), Mémoires pour Simone (1986), en hommage à Simone Signoret, sa grande amie et sa protectrice, L’Héritage de la Chouette (1989), Le Tombeau d’Alexandre (1993), Level Five (1997), Le Souvenir d’un avenir (2003), et enfin dernier court-métrage réalisé en 2007 Leila Attacks.

La Cinémathèque française lui a immédiatement rendu hommage : "Grand moraliste, Chris Marker avait le regard d’un ethnographe engagé, soucieux de styliser son écriture cinématographique. Ecrivain, photographe, auteur de nombreux collages qu’il envoyait à ses amis de par le monde, au Japon, en Amérique et partout ailleurs, en se servant des nouvelles technologies et d’Internet, grand voyageur solitaire, Chris Marker, figure libre et souveraine, aimait entretenir le mystère sur sa personne, refusant d’être photographié ou de présenter ses propres films."

"Dans le monde cinématographique de Marker, tout se tient : l’individuel et le collectif, le présent et la mémoire, l’intime et le spectaculaire des luttes, le bricolage et la haute technologie, la « petite forme » (la danse sublime de l’éléphant sur une musique de Stravinsky pendant les quatre minutes de Slon Tango, 1993) et la grande histoire (Le fond de l’air est rouge, L’Héritage de la chouette). Du grand art à l’échelle d’un seul homme" poursuit le communiqué.

Dans un entretien à Image & Son en 1963, Resnais disait de lui : "Chris Marker me paraît un personnage fascinant, à ma connaissance unique au monde. Je ne connais personne qui puisse avoir à la fois ce sens des problèmes politiques contemporains, ce goût du beau, cette espèce de joie devant la culture et devant l'art, cet humour ; et qui arrive, lorsqu'il fait un film à ne se séparer d'aucune de ces tendances." Il avait été son assistant réalisateur sur Nuit et brouillard.

Il a également collaboré avec Costa Gavras (L'aveu, photographe de playeau), Jorge Semprun (Les deux mémoires, monteur, ingénieur du son), Patrico Guzman et Alexandre Sokourov (producteur) , Arielle Dombasle (conseiller artistique avec Eric Rohmer sur Les Pyramide bleues). Sans oublier ses innombrables participations (devant la caméra ou à d'autres format comme les vidéo-clips).

Sur Youtube, il diffusait des vidéos sous le pseudo de Kosinki.

Venise 2011 pactise avec le Faust d’Alexandre Sokourov

Posté par vincy, le 10 septembre 2011

Le jury du 68e Festival de Venise, présidé par Darren Aronofsky, a joué le consensus. En récompensant le vétéran russe Alexandre Sokourov, toujours audacieux dans son formalisme, il répare une injustice de 30 ans : le cinéaste, pour la première fois sélectionné à Venise, n'avait jamais obtenu plus qu'un prix de la critique et un prix du meilleur scénario à Cannes. Il avait aussi obtenu un Léopard de bronze et un Léopard d'honneur à Locarno.

Avec sa version de Faust (photo du casting lors de la présentation officielle le 8 septembre), parabole de la corruption du pouvoir dans une atmosphère suffocante (à l'instar de sa trilogie sur les dictateurs), Sokourov remporte le Lion d'or, au nez et à la barbe des favoris (Carnage de Polanski était le film le plus apprécié de la critique). C'est la deuxième fois en 68 Mostras qu'un cinéaste russe gagne la prestigieuse récompense, après Le retour en 2003. Mais c'est la troisième fois si l'on compte Urga du soviétique (à l'époque) Nikita Mikhalkov.

Le Palmarès, très porté sur des oeuvres radicales ou "auteurisantes" fait la part belle au cinéma asiatique. On remarquera que le prix de la mise en scène a été décerné au film surprise, le 23e de la compétition, invité en dernière minute, People Mountain, people sea.

Le cinéma français n'obtient rien. De nombreux primés ont déjà été remarqués dans d'autres festivals.

Notons enfin la consécration de l'allemand Michael Fassbender, dans son rôle d'addict au sexe dans Shame, et qui se voit propulser ainsi parmi les incontournables du cinéma anglo-saxon, après un blockbuster (X-Men : First Class) et un autre film remarqué à Venise et reparti bredouille, A Dangerous Method de David Cronenberg.

Lion d'or : Faust, d'Aleaxandre Sokourov (Russe)

Lion d'agent de la mise en scène : Cai Shangjun pour People Mountain, people sea (Chine)

Prix spécial du jury : Terraferma, d'Emmanuele Crialese (Italie)

Coupe Volpi du meilleur acteur : Michael Fassbender pour Shame (Honte) de Steve McQueen (Grande-Bretagne)

Coupe Volpi de la meilleure actrice : Deanie Yip pour Taojie (Une vie simple) de Ann Hui (Chine Hong-Kong)

Prix Marcello Mastroianni du meilleur jeune interprète: Shôta Nikaidô et Fumi Nikaidô pour Himizu de Sion Sono (Japon)

Prix Osella du meilleur scénario : Alpeis (Alpes) de Yorgos Lanthimos (Grèce)

Prix Osella de la meilleure direction artistique : Robbie Ryan pour Wuthering Heights (Les hauts de Hurlevent) d'Andrea Arnold (Grande-Bretagne)

Le cinéma russe dans la tourmente

Posté par vincy, le 28 avril 2010

soleil trompeur 2Nikita Mikhalkov a déclenché une tempête en Russie avec la sortie de Soleil Trompeur 2, qui sera en compétition au prochain Festival de Cannes. Il est accusé de s'approprier tous les pouvoirs et de ne plus se soucier des conflits d'intérêt que cela entraîne. Aussi un grand nombre de cinéastes ont quitté, en signe de protestation, l'Union des cinéastes russes que préside Mikhalkov. Parmi eux, on note Alexei Gurman, Alexandre Sokourov, Andreï Popov, Daniil Dondoureï ou encore le directeur du Musée du cinéma de Moscou. Au total, il y aurait une centaines de personnalités qui dénonce le "style totalitaire" de leur Président. Une pétition publiée sur Internet le 8 avril affirme que "la discussion libre, la diversité des opinions, l'esprit de liberté et de démocratie ont quitté les murs de notre Union depuis longtemps", tous révoltés par le faux patriotisme et la servilité qui dominent désormais cette Union. Les signataires pensent  faire sécession en créant leur propre alliance, dissidente.

Mikhalkov, proche du premier ministre Vladimir Poutine, cumule, à leurs yeux trop de fonctions ; outre la direction de l'Union depuis 1998, il est président du Fonds russe de la culture, membre du Conseil présidentiel, membre du conseil civil du Ministère de la Défense. Surtout, il est devenu expert en financement public pour ses propres films, dont Soleil Trompeur 2. Sa société de production a été choisie avec seulement sept autres (sur 400!) pour s'accaparer 4/5e des fonds accordés par l'Etat au cinéma (environ  50 millions d'euros). Avec 6,5 millions d'euros chacune, elles doivent s'engager à produire trois films par an, selon des critères spécifiques (humanisme, patriotisme...). Sokourov, interrogé par Le Monde, râle que "les subventions ne vont qu'aux personnes appartenant au cercle de Mikhalkov."

Les aides ne transitent plus qu'à travers le Fonds de soutien économique et social, où l'acteur-réalisateur-producteur a une position dominatrice, au détriment d'un Ministère de la Culture de plus en plus impuissant. Ce fonds n'investit désormais que dans des films de qualité, correspondant aux intérêts nationaux. "On n'aime pas la quête obsédée de l'ennemi intérieur et l'expulsion des insoumis" est-il écrit dans la pétition. Plus largement, cette révolte se dirige contre la réforme du système de subventions nationale. Beaucoup subissent la suppression d'aides publiques qui les empêchent de pouvoir réaliser leurs films.

La réforme exige dorénavant que les financements publics ne se limitent qu'aux compagnies produisant des films à succès, au contenu davantage patriotique. Parmi les critères de sélection, il y a la rentabilité de la société, les prix reçus dans les festivals, ...  Comme par hasard, Mikhalkov répond à ses exigences.

Les cinéastes dénoncent tout la gangrène d'un système qui souffre de commissions occultes (corruption de fonctionnaires, subventions gonflant les budgets) et de problèmes de distribution pour le cinéma national (piratage notamment). La moitié des films réalisés l'an dernier n'est  jamais sorti dans les salles. Les exploitants ne veulent pas faire preuve de transparence sur le nombre réel d'entrées, grugeant ainsi les producteurs de 25 à 40% des recettes. Mais le gouvernement de Vladimir Poutine a surtout décidé de faire du cinéma russe, comme à la grande époque du cinéma soviétique, un instrument de propagande à son service.

Poutine a ainsi permit de rénover 1 500 salles et la production d'une centaine de films par an. Mais il ne cache pas qu'il veut surtout voir des films commercialement intéressant, aussi bien en Russie qu'à l'étranger. Manière de critiquer la médiocrité du cinéma russe actuel dans un pays qui a connu une hausse de 12% de sa fréquentation en 2009 (avec 139 millions de spectateurs, il s'agit du quatrième marché européen), mais aussi une baisse de 11% ds recettes (735 millions de $). La part de marché des films russes ne s'élève qu'à 25%.

Soleil Trompeur 2 était censé être un sauveur face à un Hollywood envahissant. Sorti en Russie le week-end dernier afin de coïncider avec la commémoration de l'Armistice de 1945, il a coûté 55 millions de $ (un record dans ce pays), principalement financé par les fonds alloués à la célébration de ce 65e anniversaire. Malin. Film à la gloire de Staline, les critiques l'ont incendié. Et malgré ses 1 000 copies, il n'a récolté que 3,7 millions de $ au box office. Un score très faible (trois à cinq fois moins qu'un blockbuster hollywoodien) par rapport aux attentes (le distributeur espérait un box office final aux alentours de 20 millions de $). D'autant que, pour élargir l'audience, les billets sont bradés.

Il reste à attendre l'accueil cannois pour être fixé sur cette oeuvre. Surtout, l'ambiance au Pavillon Russe sera une bonne manière de voir si le cinéma Russe est redevenu soviétique ... ou s'il maintient un semblant d'apparence démocratique.