Django unchained a gagné deux trophées aux Oscars dimanche soir. Christoph Waltz a reçu une nouvelle fois celui du meilleur second rôle (après celui pour Inglourious Basterds) : ce choix de catégorie est en fait une volonté du producteur Harvey Weinstein puisqu'il avait peu de chances de gagner dans la catégorie du meilleur acteur face aux favoris Daniel Day-Lewis et Joaquin Phoenix (il avait d’ailleurs fait la même chose pour The Artist avec Bérénice Béjo ou pour Le patient anglais avec Juliette Binoche). Et l'autre Oscar a été décerné à Quentin Tarantino, oublié dans la catégorie réalisateur, en tant que scénariste.
Cet Oscar du meilleur scénario récompense en réalité un script très amputé ! Le scénario original de Django unchained décrit de manière très précise une oeuvre qui devait durer environ 3h30 ; mais hors de question pour la production de découper le film en deux parties comme pour son Kill Bill… Quentin Tarantino a dû enlever plusieurs parties de son script pour raccourcir la durée du (déjà) long métrage... et l’histoire de Django unchained s’en est trouvée réduite.
A quoi devait ressembler le film Django unchained d’après son scénario ?
Le personnage de Broomhilda (Kerry Washington) peu présente dans le film (elle apparaît pour le dîner vers la fin), celle que Django aime, avait un rôle beaucoup plus important dans le scénario.
Dès le générique de début et avant même l’arrivée du Docteur Schultz, Django enchaîné dans la forêt aux autres esclaves avait un flashback qui montrait comment avait été vendue sa femme. Cette séparation sera ensuite le moteur de l’histoire. Il devait y avoir une séquence qui décrit ce marché aux esclaves où des hommes blancs acheteurs et des hommes blancs vendeurs fixent les prix pour les noirs comme pour des bêtes... Un autre marché d’esclaves était montré à Greenville-Missippi, un autre flashback montrait que Django avait été amené là par un train avec environ 150 autres noirs dont Broomhilda...
Un ‘chapitre’ entier raconte toute l’histoire de Broomhilda qui n’est pas dans le film, des personnages ont été supprimés comme celui de Scotty Harmony que devait jouer Jonah Hill (qui à la place aura un tout petit caméo situé ailleurs dans le film).
Dans ce chapitre, le film décrit la vente de la jeune femme : le vendeur expose ses seins, les marques de fouet dans son dos, et le ‘r’ de sa joue à une douzaine d’acheteurs (une humiliation qui devait être répétée durant le dîner). Elle est alors achetée par un certain Mike Harmony comme cadeau d’anniversaire pour son fils de 24 ans, Scotty Harmony, timide, qui va tomber amoureux de cette esclave noire… Il va ensuite l’emmener en week-end romantique là où des blancs se pavanent avec leur ‘nègre de compagnie’, au Cleopatra Club.
Dans le film on découvre ce lieu tenu par Calvin Candie (Leonardo Di Caprio) quand Schultz et Django arrivent chez lui. Dans le script, le Cleopatra Club et son propriétaire sont révélés bien avant. Calvin Candie se montre déjà un redoutable manipulateur. Il arrange une partie de cartes avec ce jeune Scotty, où, après l’avoir plumé, se jouera l’acte de propriété de l’esclave : Candie gagne, Harmony l’accuse d’avoir triché. Le vainqueur tue le perdant. C’est ainsi que Broomhilda va appartenir à Calvin Candie : il ira la chercher dans sa chambre à coups de ceinture. Elle tente alors de s’enfuir toute nue et, une fois dehors, tombe dans la boue : désormais elle est lui appartient.
Ces évènements se déroulent quatre mois avant que Django et Schultz apprennent le nom du propriétaire de Broomhilda.
Un scénario beaucoup plus violent et romantique
Toute cette partie du scénario absente du film avait en fait une grande importance : plusieurs scènes devaient montrer davantage les horreurs de l’esclavage et du racisme. L’utilisation du mot ‘nigger’ a fait polémique aux USA, mais Quentin Tarantino allait plus loin dans sa version originale du scénario avec notamment plusieurs lignes de dialogues encore plus cruelles ou l’image d’un enfant blanc d’environ 14 ans, avec un chien, qui conduit comme un berger un troupeau d’enfants noirs esclaves… De plus, Leonardo Di Caprio avait l’occasion de jouer un vrai grand rôle de méchant encore plus détestable que ce qu’il est dans le film. En perdant de vue ce personnage féminin majeur, Django Unchained donne beaucoup moins d’importance au caractère sacré de la promesse amoureuse d’aller la sauver (‘kill is love’ disait déjà Tarantino dans Kill Bill).
Ce n'était pas seulement la vengeance de l’esclave Django accompagné du chasseur de prime Schultz. Le scénario c’était aussi l’histoire de cette femme Broomhilda qui symbolise toutes les injustices et violences commises durant ces années d’esclavage.
Dans ce script, Broomhilda était plus un enjeu qui motivait la quête des deux hommes Django et Schultz, alors que dans le film elle est, peut-être, plus simplement la récompense de leur quête...
Oscar du meilleur scénario, le film Django unchained est devenu le plus grand succès de Quentin Tarantino. Le film a rapporté 380 millions de $ dans le monde. En France, il battu tous les films du réalisateur en nombre de spectateurs (3,7 millions d'entrées)