Bilan 2013 : mauvaise année pour le cinéma français à l’étranger

Posté par vincy, le 17 janvier 2014

michelle pfeiffer dans malavita de luc besson

Les films français à l'étranger ont atteint leur plus bas niveau depuis 10 ans avec 50 millions d'entrées et 280 millions d'euros de recettes. Le box office international des productions françaises n'avait pas été aussi faible depuis 2004 (avec 50 millions d'entrées à l'époque). Et seulement la moitié des entrées a été captée par des films qui sont en langue française.

En 2013, 480 films français ont connu une vie dans une salle de cinéma étrangère. 87 de moins qu'en 2012.

En cause, sans doute le manque de film fort et fédérateur. Le Top 5 ne représente que 37,7% des entrées (contre 70% en 2012). 66 productions et coproductions ont dépassé les 100 000 entrées, mais un seul franchit le cap des 5 millions de spectateurs.  Cette atomisation ne suffit pas à tout expliquer. Des gros marchés comme l'Espagne ou l'Italie ont vu leur fréquentation cinématographique chuter. Et le dynamisme du marché chinois, désormais le 2e du monde mais aussi 2e marché pour le cinéma français, ne suffit pas à compenser les pertes.

Normal que la chute soit dure : l'année 2012 fut exceptionnelle avec Taken 2, Intouchables et The Artist soit 144 millions d'entrées en 2012! (lire notre actualité)
Aussi, relativisons un peu : avec les entrées enregistrées en France, le cinéma français reste l'un des plus attractifs du monde, cumulant 114 millions de spectateurs, marché français inclus, en 2013.

L'Europe reste toujours le plus gros marché pour le cinéma français avec 23,4 millions spectateurs étrangers, devant l'Asie (9,4 millions), l'Amérique du nord (8,6 millions) et l'Amérique latine (5,6 millions). Il est intéressant de noter qu'il y a dorénavant plus de chinois qui vont voir des films français que d'allemands ou d'italiens.  L'Amérique latine stagne. La France peine à s'imposer sur les marchés émergents, déjà très américanisés dans leurs habitudes "cinéphiliques".

Les productions de Luc Besson, avec stars hollywoodiennes et dialogues en anglais, dominent toujours le classement. Une bonne recette. Mais on notera aussi la présence très diversifiées de comédies et de films art et essai, dont deux Palmes d'or. 2013 a surtout profité à de nombreux films sortis en 2012. 4 d'entre eux occupent encore ce Top 10 annuel. Certains films comme Paulette et La Cage dorée ont fait l'essentiel de leur succès dans un seul pays (respectivement, l'Allemagne et le Portugal).

Reste que l'export devrait être priorité pour les producteurs français. Certains films doublent leurs recettes grâce à leurs sorties internationales, comme La vie d'Adèle. Pour cela, il ne suffit pas de se reposer sur l'aide bienveillante d'Unifrance : il faut aussi choisir des histoires qui peuvent plaire au plus grand nombre, et ne pas hésiter à s'aventurer dans des genres populaires comme le polar ou l'action. Deux genres complètement absents du Top 10, hormis les films du roi Besson.

On appelle ça le "soft power" : une manière d'imposer la culture française dans le monde, comme le Japon l'a si bien réussit avec le manga, comme Hollywood l'exploite depuis 80 ans et comme la Chine l'a très bien compris en investissement massivement dans des films à gros budgets dédiés aux marchés asiatiques. Les pouvoirs publics réfléchissent à une incitation fiscale ou financière soit envers les distributeurs étrangers soit envers les producteurs français. L'autre piste, plus évidente, serait de contourner le problème de la distribution dans les marchés émergents et les zones mal équipées en cinémas art et essai (ce qui fait quand même une grande partie de la planète) en diffusant plus et mieux des films français sur des plateformes numériques en vidéo à la demande.

Top 5 des pays
(en nombre de spectateurs)

1. Etats-Unis
2. Chine
3. Allemagne
4. Italie
5. Russie

Top 10 des films
(entrées (cumul total)/recettes (cumul total))

1. Malavita 8,3 millions / 47,4 millions d'euros
2. Amour 2,4 millions (3,6 millions) / 23,4 millions d'euros (31,5 millions d'euros)
3. Un plan parfait 1,6 million (1,9 million) / 7,6 millions d'euros (9,4 millions d'euros)
4. Colombiana 1,5 million (9,6 millions) / 6,3 millions d'euros (51 millions d'euros)
5. La vie d'Adèle 1,1 million / 7,5 millions d'euros
6. La cage dorée 1 million / 5,8 millions d'euros
7. De l'autre côté du périph' 800 000 / 5 millions d'euros
8. Paulette 760 000 / 4,7 millions d'euros
9. Renoir 700 000 / 4,3 millions d'euros
10. De rouille et d'os 700 000 (1,4 million) / 4,8 millions d'euros (9,6 millions d'euros)

Prix Lumières 2014 : Quai d’Orsay en tête des nominations

Posté par vincy, le 18 décembre 2013

Quai d'Orsay est en tête des nominations avec 5 citations mais 4 des 5 autres films cités dans la catégorie du meilleur film pour les Prix Lumières de l'an prochain se partagent 4 citations chacun. Autant dire que le jeu est ouvert entre La vie d'Adèle, 9 mois ferme, Grand Central et Renoir.

Les prix seront décernés le 20 janvier prochain.

MEILLEUR FILM

9 mois ferme de Albert DUPONTEL
Grand Central de Rebecca ZLOTOWSKI
La vie d’Adèle – Chapitres 1 et 2 de Abdellatif KECHICHE
L’Ecume des jours de Michel GONDRY
Quai d’Orsay de Bertrand TAVERNIER
Renoir de Gilles BOURDOS

MEILLEUR REALISATEUR

Gilles BOURDOS
Albert DUPONTEL
Michel GONDRY
Abdellatif KECHICHE
Bertrand TAVERNIER
Rebecca ZLOTOWSKI

MEILLEUR SCENARIO ORIGINAL ou ADAPTATION

Le passé de Asghar FARHADI
Quai d’Orsay de Bertrand TAVERNIER
9 mois ferme Albert DUPONTEL
La Marche de Nabil BEN YADIR
La Vénus à la fourrure de Roman POLANSKI
Arrêtez-moi de Jean-Paul LILIENFELD

MEILLEURE ACTRICE

Juliette BINOCHE dans Camille Claudel, 1915 de Bruno DUMONT
Catherine DENEUVE dans Elle s’en va d’Emmanuelle BERCOT
Sandrine KIBERLAIN dans 9 mois ferme de Albert DUPONTEL
Emmanuelle SEIGNER dans La Vénus à la fourrure de Roman POLANSKI
Christa THERET dans Renoir de Gilles BOURDOS
Léa SEYDOUX dans Grand Central de Rebecca ZLOTOWSKI et La vie d’Adèle – Chapitres 1 et 2 de Abdellatif KECHICHE

MEILLEUR ACTEUR

Michel BOUQUET dans Renoir de Gilles BOURDOS
Guillaume CANET dans Jappeloup de Christian DUGUAY
Romain DURIS dans L’Ecume des jours de Michel GONDRY
Guillaume GALIENNE dans Garçons et Guillaume à table de Guillaume GALIENNE
Thierry LHERMITTE dans Quai d’Orsay de Bertrand TAVERNIER
Tahar RAHIM dans Grand Central de Rebecca ZLOTOWSKI

REVELATION FEMININE DE L’ANNEE

Pauline ETIENNE dans La Religieuse de Guillaume NICLOUX (France, Allemagne, Belgique)
Adèle EXARCHOPOULOS dans La vie d’Adèle – Chapitres 1 et 2 de Abdellatif KECHICHE
Alice de LENCQUESAING dans La tête la première d’Amélie van ELMBT
Candy MING dans Henri de Yolande MOREAU
Vimala PONS dans La fille du 14 juillet de Antonin PERETJATKO
Marine VACTH dans Jeune & Jolie de François OZON

REVELATION MASCULINE DE L’ANNEE

Pierre DELADONCHAMPS dans L’Inconnu du lac de Alain GUIRAUDIE
Paul HAMY dans Suzanne de Katell QUILLEVERE
Tewfik JALLAB dans La Marche de Nabil BEN YADIR
Vincent MACAIGNE dans La fille du 14 juillet de Antonin PERETJATKO
Raphaël PERSONNAZ dans Quai d’Orsay de Bertrand TAVERNIER et Marius de Daniel AUTEUIL
Niels SCHNEIDER dans Désordres d’Etienne FAURE

PRIX HEIKE HURST du MEILLEUR PREMIER FILM

Au-delà du sang de Guillaume TAUVERON (France, Japon)
Comme un lion de Samuel COLLARDAY
En solitaire de Christophe OFFENSTEIN
Guillaume et les garçons à table de Guillaume GALIENNE
La tête la première d’Amélie van ELMBT (France, Belgique)
Nous irons vivre ailleurs de Nicolas KAROLSZYK

MEILLEUR FILM FRANCOPHONE HORS DE France

Aujourd’hui de Alain GOMIS (France, Sénégal)
Les Chevaux de Dieu de Nabil AYOUCH (France, Maroc, Belgique)
Le Démantèlement de Sébastien PILOTE (Québec)
Dead Man Talking de Patrick RIDREMONT (Belgique, France, Luxembourg)
Gabrielle de Louise ARCHAMBAULT (Québec)
Le Repenti de Merzak ALLOUACHE (Algérie, France)

Renoir de Gilles Bourdos, candidat pour l’Oscar du meilleur film en langue étrangère

Posté par kristofy, le 16 septembre 2013

renoir de gilles bourdos

Dans la catégorie Oscar du meilleur film étranger, il y a 5 films nominés, choisis après un vote des membres de l'Academie, parmi les nombreux films ayant été proposés par différents pays, du Pakistan à l'Arabie Saoudite en passant par le Japon ou le Chili.  La France a été sélectionnée 36 fois dans cette catégorie - un record - et a reçu 12 fois la statuette (juste une de moins que l'Italie).

Pour les Oscars 2014 le comité de sélection français a choisi de proposer le film Renoir de Gilles Bourdos. Depuis Un prophète en 2009, aucun film français n'a été nommé, et depuis Indochine en 1992, aucun film français n'a été oscarisé dans cette catégorie.

Chaque année, une commission de sélection de divers professionnels désignés par le Ministère de la Culture fait le choix du film à envoyer aux Oscars. Cette année autour de Thierry Frémaux (directeur général du Festival de Cannes) et de Paul Otchakovsky-Laurens (président de la commission avance sur recettes du CNC, éditeur) il y avait Laurent Cantet  (Palme d’or et nominé à l’Oscar pour Entre les murs), Estelle Fialon (productrice ayant eu une nomination à l’Oscar du meilleur documentaire l’année dernière pour The Gatekeepers), la célèbre scripte Sylvette Beaudrot, Alain Terzian (président de l’académie des Césars) et la comédienne Isabelle Adjani (qui a été nominée deux fois à un Oscar pour L'Histoire d'Adèle H. et Camille Claudel).

Cette année était particulière puisque La Vie d'Adèle - Chapitres 1&2 de Abdelatif Kéchiche - Palme d’Or et donc logique compétiteur - ne pouvait pas être sélectionnable en raison de sa date de sortie en salles (avant le 30 septembre). de même la commission ne pouvait pas choisir parmi les films les plus populaires à l'instar d'Intouchables l'an dernier : Les profs (3 944 000), Boule et Bill (1 994 000), Jappeloup (1 815 000), Les Gamins (1 639 000), La cage dorée (1 219 000), Paulette (1 020 000)… Et deux autres prétendants - L’écume des jours de Michel Gondry et Grand central de Rebecca Zlotowski - ne faisaient pas l’unanimité.

Un consensus sous le signe du bon sens

Il restait à chercher parmi les films français qui ont le plus de succès à l’international (comme La cage dorée). La liste est restreinte. On pouvait s'attendre au Passé, ce fut Renoir, qui a séduit plus de 3 millions de spectateurs à l’international ; au Box office nord américain, il a cumulé 2,24 millions de dollars de recettes : c’est le troisième film en langue étrangère à dépasser ce chiffre cette année aux USA, et de loin le plus gros succès français sur le territoire. Le film avait fait son avant-première mondiale au Festival de Cannes, dans la sélection Un certain regard, en 2012. Le sujet en lui-même a tout pour séduire une Académie assez frileuse et adepte en drames historiques.

Renoir a encore un long chemin à parcourir : de nombreux pays ont déjà sorti l'artillerie lourde pour être dans les cinq finalistes, comme, par exemple, Le grand passage de Ishii Yuya (Japon), Borgman d'Alex Van Warmerdam (Pays Bas), Wadjda d'Haifaa Al Mansour (Arabie Saoudite), Les chevaux de Dieu de Nabil Ayouch (Maroc), The Rocket de Kim Mordaunt (Australie), Gloria de Sebastian Leilo (Chili), Deux vies de Georg Maas (Allemagne), Child's Pose de Calin Peter Netzer (Roumanie), Ilo Ilo d'Anthony Chen (Singapour), ...

Et on attend les choix espagnol, iranien, danois, argentin, ou encore chinois...

Le passé a encore de l'avenir

L’année dernière l’Oscar du meilleur film étranger à été décerné à Amour de Michael Haneke, mais sous drapeau de l’Autriche. Outre Indochine de Régis Wargnier, Jacques Tati avec Mon Oncle, Claude Lelouch avec Un homme et une femme, François Truffaut avec La nuit américaine, Bertrand Blier avec Préparez vos mouchoirs… ont remporté cet Oscar.

Parmi les films qui ont été nominés, on note Entre les murs de Laurent Cantet, Joyeux Noël de Christian Carion, Les choristes de Christophe Baratier, Le fabuleux destin de Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet, Le goût des autres de Agnès Jaoui, Est-Ouest de Régis Garnier, Ridicule de Patrice Leconte… Ce sont tous des films qui ont connu un succès public et critique, la plupart ayant été distingués à Cannes et/ou aux Césars. Cependant comme beaucoup de pays font concourir aussi leur film le plus populaire il arrive souvent le candidat français ne soit pas retenu dans la liste finale, ça a été le cas pour La guerre est déclarée, Des hommes et des dieux, Persépolis, 8 femmes, La vie rêvée des anges, Les roseaux sauvages, Germinal

A noter que ne pas figurer dans cette catégorie n’empêche pas un film français de concourir dans d’autres catégories par le biais de son distributeur américain comme ça a été le cas pour Z de Costa-Gavras, La Môme de Olivier Dahan pour lequel Marion Cotillard a été oscarisée, Tess et Le pianiste de Roman Polanski, et bien entendu The Artist qui a remporté 5 Oscars (meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur acteur, meilleure bande originale et meilleurs costumes). Il est probable que cette année Le Passé de Ashgar Farhadi (Oscar du meilleur film étranger en 2012 avec Une Séparation) avec Bérénice Béjo (nominée avec The Artist) soit promu de cette manière vers les Oscars tout comme La Vie d'Adèle - Chapitres 1&2 de Abdelatif Kéchiche et ses comédiennes...

Cinespana2008 : qui est José Luis Alcaine ?

Posté par MpM, le 7 octobre 2008

On doit à ce passionné d’image et de peinture parmi les plus belles lumières et atmosphères du cinéma espagnol des trente dernières années. D’abord photographe de plateau, José Luis Alcaine est en effet devenu dans les années 80 l’un des directeurs de la photographie les plus respectés dans son pays. Collaborateur de Fernando Fernán Gómez, Manuel Gutiérrez Aragón, Carlos Saura, Pedro Almodóvar, Bigas Luna, Fernando Trueba, Pilar Miró... il offre à chacun un style adapté à ses désirs et contraintes, bien loin d’une recette toute faite qu’il ne ferait que décliner. On lui doit notamment la tonalité bleue, presque indigo, de Démons dans le jardin (Manuel Gutiérrez Aragón, 1982), la faible luminosité et l’ambiance poussiéreuse des intérieurs espagnols des années 50 dans Amants de Vicente Aranda (1993) ou encore l’intense combat entre la lumière et l’ombre qui imprègne El Sur (Víctor Erice, 1983), poème visuel proche de Vermeer. Obsédé par les nuances de lumière selon les lieux et les heures du jour, il crée également la luz de siesta ("lumière de sieste"), où les rayons du soleil, encore haut dans le ciel, envahissent doucement les pièces tout en se réfléchissant sur le sol. Il l’utilise notamment dans Tasio (Montxo Armendáriz, 1984) et Belle époque de Fernando Trueba, où, selon lui, la couleur et la lumière faisaient écho à la sensualité des jeunes filles et au monde champêtre et pictural de Renoir.

Pour José Luis Alcaine, la lumière doit être la plus réaliste possible et générer un volume et un relief mettant en valeur acteurs et objets. "La question du volume est inhérente à ma façon de voir les choses", explique-t-il. "C’est peut-être à cause de l’influence d’un tableau qui m’a toujours obsédé, Las Meninas de Velázquez, où la lumière crée au fur et à mesure une foisonnante échelle de volumes." Autre caractéristique de son travail, le contraste inspiré du clair-obscur pictural qui lui permet de créer des ombres sans forcer l’intensité et en marquant le rythme du film. Lui-même définit son art comme une "peinture avec la lumière", permettant de façonner à l’infini les émotions et les perceptions de chaque scène. En lui rendant hommage au cours de sa 13e édition (jusqu’au 12 octobre prochain), Cinespana le met en lumière à son tour, offrant au public de (re)découvrir une partie de son œuvre, et honorant à travers lui une profession souvent méconnue.