Mark Rylance, William Shakespeare et une sale odeur de pétrole

Posté par vincy, le 23 juin 2019

Le comédien britannique Mark Rylance (Le Pont des espions, Dunkerque, Ready Player One) va quitter la Royal Shakespeare Company. En soi, pas une nouvelle extraordinaire. Excepté qu'il le fait pour une raison politique: il refuse de joindre son nom à une troupe aussi prestigieuse soit-elle qui se vend au mécénat de la compagnie pétrolière BP (British Petroleum). Il jouait au sein de la RSC depuis plus de 37 ans. De 1995 à 2005, il a également été le directeur artistique du Shakespeare's Globe Theatre.

L'acteur - Prix Laurence Olivier Awards en 1994 pour Beaucoup de bruit pour rien de William Shakespeare et en 2010 pour Jerusalem de Jez Butterworth, trois fois récompensé par les Tony Awards (Boeing Boeing, Jerusalem, La nuit des rois, toujours de Shakespeare), et meilleur acteur dans un second rôle pour Le Pont des espions de Steven Spielberg aux Oscars et aux Baftas - en a fait une cause engagée.

Engagé

"J'ai informé la Royal Shakespeare Company que je pensais devoir démissionner car je ne souhaite pas être associé à BP, comme je ne souhaiterais pas l'être à un marchand d'armes, un vendeur de tabac ou toute personne qui détruit délibérément la vie de personnes vivantes et à naître. William Shakespeare ne le voudrait pas non plus, je crois", écrit le comédien dans The Guardian.

Opposé de longue date à ce mécénat, et ne voyant pas la direction de la compagnie changer sa position, il a dramatisé la situation: "Je suis sûr que la RSC veut être du côté des jeunes qui changent le monde, pas des entreprises qui détruisent le monde".

La RSC voit là une mauvaise publicité et a répondu laconiquement qu'elle reconnaissait l'importance du débat face à l'urgence environnementale et climatique, qu'elle ne conteste pas (il manquerait plus que ça). Quant au mécène, il rappelle que ce soutien financier permet à 10000 jeunes d'acheter des billets à bas coûts.

BP et les autres compagnies pétrolières sont sous les feux des artistes et des militants environnementaux, qui critiquent leurs liens financiers avec des institutions culturelles alors qu'elles détruisent la planète. Tous réclament la fin de ces mécénats toxiques et anti-climatiques.

Timothée Chalamet, Joel Edgerton et Robert Pattinson tournent « The King » pour Netflix

Posté par vincy, le 1 juin 2018

Timothée Chalamet (Call Me By Your Name) et Joel Edgerton sont rejoints par Robert Pattinson, Sean Harris, Ben Mendelsohn et Lily-Rose Depp pour le film The King, contenu original destiné à Netflix. Tom Glynn-Carney et Thomasin Harcourt McKenzie sont aussi au générique.

Le tournage commence aujourd'hui au Royaume-Uni. David Michôd, qui avait déjà réalisé le très inégal War Machine (avec Brad Pitt) pour la plateforme, s'est inspirés des pièces de William Shakespeare, Henri IV et Henri V. Chalamet incarnera le Prince Hal (Henri V), défiguré dans sa jeunesse, qui hérite de la couronne en pleine Guerre de Cent ans, et doit apprendre à être roi, guidé par son ami le plus proche, Falstaff (Edgerton).

Robert Pattinson interprètera un prince français, le Dauphin, tandis que Mendelsohn sera Henri IV, et Lily-Rose Depp la princesse française Catherine de Valois, qui épousera Henri V.

Produit par Plan B (Brad Pitt), le réalisateur et Joel Edgerton, qui signent tous deux le scénario, le film sera diffusé sur la plateforme en 2019.

Henri V a été incarné au cinéma par Laurence Olivier, Kenneth Branagh et Tom Hiddleston. Timothée Chalamet, nommé aux Oscars pour son rôle dans Call Me By Your Name, et à l'affiche de Lady Bird et Hostiles cet hiver, est attendu dans Beautiful Boy de Felix Van Groeningen avec Steve Carell, pressenti pour Venise.

Venise 2015 : deux films d’Orson Welles en préambule

Posté par MpM, le 11 août 2015

orson wellesA Venise, avant le festival, c'est déjà le festival ! Mardi 1er septembre, soit la veille de l'ouverture officielle avec Everest de Baltasar Kormakur, sera ainsi rendu un hommage à Orson Welles, dont on célèbre cette année le centenaire de la naissance. A cette occasion, deux films restaurés, d’inspiration shakespearienne et liés à la ville de Venise, seront projetés.

D'une part, Le marchand de Venise qui a longtemps été considéré comme perdu. L'Orchestre classique d’Alexandrie interprétera en direct la bande originale qui n'a jamais été publiée mais retranscrite à partir du seul enregistrement fait à l’époque.

D'autre part, la fameuse version d'Othello réalisée par Welles en 1951 qui aurait dû être présentée en compétition à Venise à l'époque. Le réalisateur l'avait retirée au dernier moment parce qu'il considérait que la copie n'était pas prête. De ce fait, le film avait été projeté à Cannes l'année suivante, dans une version plus courte qui lui avait valu le Grand prix du jury.

L'hommage à Orson Welles se poursuivra quelques jours plus tard à Deauville dans le cadre du 41e festival de cinéma américain.

Cannes 2015: Qui est Justin Kurzel ?

Posté par vincy, le 23 mai 2015

justin kurzel

À 40 ans, l'Australien Justin Kurzel fait sa première montée des marches cannoises avec Macbeth, sa version de la pièce de Shakespeare. C'est aussi à Cannes que le cinéaste fut révélé puisque après un un court métrage sélectionné à la Semaine de la critique en 2005, Blue Tongue, il présente son premier long, Les Crimes de Snowtown dans cette même section parallèle du Festival.

La Critique internationale le récompense du prix FIPRESCI et le jury d'une mention spéciale. Brillant, puissant, intense, ce film noir naturaliste et relativement poétique, entre crimes sordides et attirance entre mâles refoulée, envoûte les cinéphiles. Inspiré d'un fait divers réel, pas très loin de là où Kurzel a grandit, Snowtown est aussi brutal que lugubre. Avec des films comme Samson & Delilah et Animal Kingdom, celui-ci contribue au renouveau du cinéma australien.

Cinéaste sans concession, assez radical même en préférant l'essentiel, la dureté même, à la séduction et aux effets, Justin Kurzel a commencé sa carrière comme décorateur pour le cinéma et le théâtre. Après Les crimes de Snowtown, Kurzel se cherche: il écrit une version longue de Blue Tongue, réalise un segment de The Turning, où il révèle un certain sens de l'humour (noir là aussi) autour du tennis, et accepte de transposer le best-seller de John Le Carré, Our Kind of Traitor, avec Ewan McGregor, Damian Lewis et Naomie Harris. Finalement il y renonce et plonge dans la tragédie de Macbeth.

On est loin des Crimes de Snowtown, mais c'est toujours le sang qui parle. Ce Game of Throne classique, avec Michael Fassbender et Marion Cotillard, le place dans la cour des grands. Il va devoir rivaliser avec d'autres versions de la pièce réalisées par Orson Welles, Roman Polanski ou encore Alira Kurosawa avec Le château de l'araignée.

A l'ombre de ses géants, il prépare déjà son prochain film. L'adaptation du jeu vidéo Assassin's Creed, avec, a priori, le même duo de stars, Fassbender et Cotillard. C'est peut-être là que réside une partie de son don: dans sa relation avec les acteurs, professionnels ou non. En tout cas, il se dessine une oeuvre sombre et saignante, tragique et aliénée, où l'Homme est dépassé par ses démons.

Berlin 2012 : César doit mourir des frères Taviani, premier vrai frisson de la compétition

Posté par MpM, le 12 février 2012

La Potsdamer Platz a frémi samedi lors de la présentation en compétition à la 62e Berlinale du nouveau film des frères Paolo et Vittorio Taviani, César doit mourir, qui se déroule dans le quartier de haute sécurité de la prison de Rebibbia. On y suit un groupe de détenus choisis pour interpréter la pièce Jules Cesar de Shakespeare sous la direction du metteur en scène Fabio Cavalli.

Dans un noir et blanc qui confère à l'ensemble un aspect irréel, gommant les frontières entre les mots de l'auteur et ceux des détenus, le duo de cinéastes filme les acteurs lors du casting (à la fois cocasse et touchant) puis lors des répétitions. On assiste ainsi à la progression dramatique de la pièce, découvrant au fur et à mesure comment l'intrigue shakespearienne s'approprie l'espace de la prison. Les fenêtres grillagées, les coursives, les cellules deviennent autant de décors minimalistes qui soutiennent l'action et renforcent l'impression de confusion entre l'histoire dans la pièce, et celle dans la réalité.

Au final, cela donne une fable passionnante sur la nature humaine, mise en scène avec l'élégance rare d'une pure tragédie antique. Les acteurs deviennent des personnages presque plus édifiants que ceux qu'ils incarnent, malgré le peu de choses que l'on apprend d'eux. C'est là toute l'intelligence du scenario que d'éviter trop d'allers et retours entre la fiction et la vie de la prison. On connait seulement les noms des détenus, les causes de leur emprisonnement (meurtre, trafic de drogue, collusion avec la mafia...) et les peines (lourdes) auxquelles ils sont condamnés. Malgré cela, une résonance évidente se fait entre leur propre histoire et celle racontée par Shakespeare : l''honneur, les complots, la loyauté, sont des notions qui leur parlent et qu'ils ont eux-mêmes eu l'occasion d'expérimenter.

On perçoit d'ailleurs fugacement la douleur que réveillent les mots de Shakespeare chez certains prisonniers,  ainsi que le mal que peut paradoxalement leur faire ce contact étroit avec les grandes émotions de la pièce. "Depuis que je connais l'art, cette cellule est devenue une prison", avoue notamment l'un d'entre eux a la fin du film, rappelant que lorsque le rideau retombe sur les cadavres de César, Brutus et Cassius, les hommes cachés derrière le costume, eux, doivent retourner en cellule et continuer avec leur vie.

Shakespeare mis en scène par Sam Mendes au Théâtre Marigny à Paris

Posté par vincy, le 8 avril 2010

Certes, la presse people a préféré relayé sa séparation avec l'actrice Kate Winslet. Pourtant l'actualité artistique de Sam Mendes nous paraît bien plus pertinente à propager. En effet, le réalisateur d'American Beauty, des Noces Rebelles et d'Away We Go, met en scène deux pièces de William Shakespeare, du 14 au 24 avril, au Théâtre Marigny à Paris.

The Bridge Project regroupe "Comme il vous plaira" (14-17 avril) et "La tempête" (20-24 avril). La troupe réunit Stephen Dillane (The Hours), Michelle Beck, Alvin Epstein, Christian Camargo (Démineurs), Ron Cephas Jones (Half Nelson) et Thomas Sadoski. La troupe est composée de comédiens anglais et américains. Le texte est surtitré en français.

"The Bridge Project représente un engagement capital pour les acteurs. Il s'étend sur neuf mois avec deux pièces jouées au plus fort de la saison théâtrale à New York et à Londres, avec en prime une tournée internationale ..." confie Mendes. Il s'agit de la deuxième saison pour ce concept puisque l'an dernier, The Birdge Project avait agrégé "La Cerisaie" et "Le conte d'hiver".

_________
The Bridge Project 2010
The Bridge Project 2009
Informations et réserbations - Théâtre Marigny

Ralph Fiennes passe à la réalisation

Posté par vincy, le 26 mai 2009

Le comédien Ralph Fiennes, révélé par La liste de Schindler et incarnant Voldemort dans Harry Potter, va faire ses débuts derrière la caméra avec Coriolanus. Fiennes incarnera le personnage principal. Il a aussi enrôlé William Hurt, Vanessa Redgrave et la toute jeune Jessica Chastain pour cette adaptation d'une pièce Shakespearienne. Le scénario a été écrit par John Logan (à qui l'on doit The Aviator). Les décors de la Rome Antique seront reconstitués en Serbie pour un tournage début 2010 et une sortie en salles l'hiver suivant.

Richard III, une galette (DVD) des rois

Posté par Claire Fayau, le 5 janvier 2009

laurenceolivier_richard3L'histoire : Le bossu Richard, duc de Gloucester, complote pour ravir la couronne royale de son frère Édouard IV. Après avoir épousé de force Lady Anne, la veuve de l’héritier de la maison de Lancastre, Richard persuade Édouard que leur frère Clarence est un traître et parvient à le faire enfermer à la Tour de Londres, puis exécuter. Le roi Édouard meurt de maladie peu de temps après. La voie ainsi libérée, Richard n’attend plus que son couronnement pour pouvoir régner en tyran…

Notre avis : Il s'agit du dernier volet de la trilogie shakespearienne réalisée par Laurence Olivier , après Henri V et Hamlet. Très beau film de 1955, avec un Technicolor éclatant (chaque scène ressemble à une miniature médiévale), mais qui garde un style "théâtre filmé", et surtout peut sembler un peu lent par moments pour le néophyte.

Alors pourquoi parle t-on de classique? Quelle est la vision de Laurence Olivier sur cette pièce de Shakespeare : qu' a-t-il repris, qu'a-t-il ajouté ? Après le visionnage du film , on se posera certainement toutes ses questions qui resteraient sans réponse à moins d'avoir un professeur d'anglais ou de civilisation anglosaxonne à ses côtés. "Mon royaume pour une explication!"

Le supplément "Le jeu de l'illusion" revient en 26 minutes, avec Sarah Hatchuel, spécialiste du théâtre shakespearien, sur l’interprétation et la mise en scène, toute en excès, de Laurence Olivier. On apprend que celui-ci était très angoissé par son travail. Olivier, perfectionniste, faisait des ajouts textuels datant du XVIIIe siècle, et s'est même inspiré des codes de l'époque pour ressembler au Roi. Ceci dit, le faux nez est une création pour le film : "l'interprétation visuelle est inchangée depuis les premières interprétations de la pièce, sauf pour la protubérance nasale..."

Ce Richard III reste singulière dans sa forme. Olivier parle à la caméra, prenant le spectateur en aparté, comme au théâtre, pour l'impliquer et le placer en juge.

Les 50 ans du cinéma marocain : Essaouira (3)

Posté par vincy, le 11 octobre 2008

essaouira_orsonwelles.jpgAu bord de l'Océan Atlantique, entre Casablanca et Agadir, se dresse une petite ville fortifiée, un port de pêcheur qui, tranquillement, s'est mué en spot touristique. La ville a des airs (iodés) de Saint-Malo, le thermomètre est à peine plus chaud. Ce n'est pas Safi, autre ville océanique qui s'est transformée en Jérusalem pour les besoins du film de Ridley Scott, Kingdom of Heaven. Il s'agit d'Essaouira, cité adulée par les français, sans doute pour ses similitudes bretonnes. Planté dans le très occidental Sofitel, face à l'île de Mogador, Claude Lelouch y tourna le "mythique" And Now... Ladies and Gentlemen, avec Patricia Kaas, Jéremy Irons, et Jean-Marie Bigard.

Heureusement Essaouira a plutôt gardé le souvenir d'un autre tournage, mythologique. Othello.

Orson Welles posa sa caméra ici (mais aussi à Safi et El-Jadida, toutes deux plus au Nord) pour filmer sa plus belle oeuvre, en 1952. Il incarnait brillament le Maure de Venise dans cette tragédie shakespearienne, aux côtés de Suzanne Cloutier et Robert Coote. Ce Grand prix du festival de Cannes (Palme d'or de l'époque) avait connu deux suspensions de tournage, faute d'argent. Il a ainsi accepté des narrations et des seconds rôles deans Le troisième homme et Echec à Borgia pour réinvestir ses cachets dans la production de Othello. Welles devait batailler avec ses financiers pour parvenir à ses fins. Il a changé quatre fois de Desdémone. Tournage mouvementé, film tourmenté, son sixième long métrage fut un chemin de croix de trois années.

Locarno lui rendit hommage avec une rétrospective unique en 2005 et rappela qu'à la mort du cinéaste, Othello était le seul film qu'il possédait encore. Il existe trois versions de l'oeuvre, dont la plus rare reste celle présentée à Cannes. Sa fille avait entrepris la restauration du film en 1992; et la copie neuve eut le droit aux honneurs d'une projection publique en plein air, juste à l'entrée des fortifications. Désormais, là où se dresse une stèle (mal entretenue), avec le portrait de l'artiste, la place porte son nom.

(photo : Vincy Thomas)