Berlin 2011 : la 3D déferle sur le festival
Invitée désormais inévitable des festivals, la 3D a surgi en force dans cette 61e Berlinale avec pas moins de trois films en relief dans une même journée. Pour commencer, Les contes de la nuit de Michel Ocelot qui cumule les particularités d'être à la fois le seul film français et le long métrage d'animation en compétition. Ensuite, on a enfin découvert le très attendu Pina de Wim Wenders et The cave of forgotten dreams de Werner Herzog. Deux réalisateurs qui mettent la technologie 3D au service du documentaire : Pina est un hommage à la chorégraphe Pina Bausch, décédée subitement en 2009, et The cave of forgotten dreams emmène le spectateur dans la grotte Chauvet, en Ardèche, où ont été découvertes des peintures vieilles de plus de 30 000 ans.
Et cette tendance émergente pourrait bien devenir la règle, si l'on en croit Wim Wenders cité par l'édition quotidienne de The Hollywood reporter à Berlin, qui voit dans le relief l'avenir du documentaire. Il faut avouer que l'on commence enfin à trouver un certain intérêt au cinéma en relief en regardant ces deux films qui ont en commun de recréer directement pour le spectateur une expérience vécue "en live". Wim Wenders n'aurait d'ailleurs pas entrepris ce film si la technologie 3D ne lui avait pas permis de reconstituer le plus fidèlement possible la fluidité et l'expressivité des chorégraphies de Pina Bausch. Le spectateur est tantôt au milieu des danseurs, tantôt dans la salle de spectacle où se déroule le ballet. C'est notamment impressionnant dans les séquences où les danseurs évoluent en groupe ou dans un espace recouvert de chaises, et cela permet d'être au plus près des corps. Visuellement, c'est plutôt une réussite. Mais le film s'essouffle, peut-être pour cause de scénarisation confuse.
Pour Werner Herzog, l'enjeu est encore plus grand, puisqu'il s'agit de permettre au grand public de découvrir les trésors de la grotte Chauvet, bien trop fragile pour être visitée. On évolue ainsi dans ce décor prodigieux de stalactites et de roches, où apparaissent des peintures si bien conservées qu'elles semblent dater de notre époque. Grâce à la 3D, on est vraiment dans la grotte, et chaque dessin se détache presque miraculeusement dans la pénombre. Les séquences extérieures gagnent aussi en saveur et en second degré, créant de petits portraits truculents des différents intervenants. On est bien au-delà du simple film éducatif pour se rapprocher d'une oeuvre esthétiquement et philosophiquement dense.
Plus classiquement, Michel Ocelot utilise la 3D pour gagner en profondeur de champ et en ampleur. Sans être à 100% convaincant, le relief participe de la magie visuelle du film, qui joue sur le contraste entre les personnages en ombres chinoises et les décors somptueux dans lesquels ils évoluent. On est clairement dans le domaine du conte où humour, rêve, voyage et aventure s'entrecroisent assez simplement. Michel Ocelot y ajoute un message de tolérance, d'universalisme et de générosité, faisant primer l'amour sur les possessions terrestres, la droiture sur le pouvoir. Dommage que la répartition des rôles reste aussi conservatrice entre le personnage masculin, forcément un héros au grand coeur, et le personnage féminin, qui est au mieux une victime, au pire une garce manipulatrice. Les clichés sexistes, dernier bastion à conquérir ? Et là, la 3D ne change rien à l'affaire...
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