Le Tribunal de commerce de Nanterre valide la reprise de Duboi par Technicolor

Posté par vincy, le 3 février 2012

On approche de la fin du cauchemar autour de la faillite de Quinta Industries. Selon Le Film Français, Technicolor reprendra Duboi. Le tribunal de commerce de Nanterre a en effet validé l'offre de reprise de Duboi par Technicolor ce vendredi 3 février. 12 employés sont concernés. Technicolor avait déjà été accepté comme repreneur de Scanlab, de SIS et des Audis de Joinville (voir notre article plus complet sur les enjeux de ces rachats). Le stock de LTC, lui, avait été confié plus tôt dans le mois à Archive TV.

Prochaine épisode : la reprise de Duran?

Technicolor reprend une partie de Quinta Industries

Posté par vincy, le 23 janvier 2012

Un mois après la faillite de Quinta Industries (voir notre actualité du 22 décembre 2011) et les turbulences qui ont causé quelques frayeurs au cinéma français (tant patrimonial qu'en cours de production), une première solution est survenue vendredi en provenance du groupe Technicolor.

La société, qui affirme renforcer ainsi sa présence européenne dans la postproduction et la distribution, va reprendre plusieurs activités du groupe Quinta Industries, tout en annonçant l'ouverture d'un studio de doublage en France.

Suite à la décision du Tribunal de Commerce de Nanterre le 20 janvier 2012, Technicolor a décidé d'acquérir l'essentiel des activités des Auditoriums de Joinville, la Société Industrielle de Sonorisation et ScanLab, qui appartenaient toutes à Quinta Industries. ADJ (Les Auditoriums de Joinville) et SIS (Société Industrielle de Sonorisation), sont spécialisées dans les activités son tandis que Scanlab rassemble les activités de conversion numérique - encodage, VOD et mastering DCP - permettant ainsi à Technicolor d'entrer sur le marché de la distribution pour le cinéma numérique en France.

Le Directeur Général de Technicolor Frédéric Rose déclaré dans un communiqué que  « ces opérations sont parfaitement en ligne avec notre stratégie dans le domaine du Media & Entertainment et vont nous permettre de renforcer encore nos positions de leader mondial ». Technicolor a davantage surpris en annonçant l'ouverture d'un studio de doublage pour le cinéma et la télévision. Le studio est installé à Saint-Cloud, à quelques kilomètres de Paris, sur le site de de Technicolor.

Technicolor est leader mondial dans les services de postproduction, d'effets visuels, d'animation, de distribution de cinéma numérique, d'encodage et de formatage des contenus en vue de leur diffusion. Selon leur communiqué, "ces activités comptent environ 5 000 personnes dans le monde et sont réparties en Amérique du Nord (Canada, Etats-Unis) ; en Asie (Thaïlande, Inde, Chine) ainsi qu'en Europe (Royaume-Uni, Espagne, Italie) - et désormais en France où Technicolor va jouer un rôle-clé auprès de l'industrie du cinéma."

Avec ces différentes reprises, 34 salariés seront repris, soit 70% des employés concernés. Pour l'instant, aucune décision juridique n'a été actée pour les autres filiales du groupe Quinta Industries - Duboi, Duran et LTC.

Reste qu'on peut s'interroger sur la chronologie du processus. Quinta Industries était détenue à 83% par l'homme d'affaires franco-tunisien Tarak Ben Ammar et par Technicolor, à hauteur de 17%. Pourquoi Technicolor n'a pas aidé le groupe dont il était actionnaire avant qu'il ne dépose son bilan? La réponse est peut-être dans la fragilité même de Technicolor. Son résultat opérationnel 2011 a été révisé à la baisse et le groupe a annoncé un programme de réduction de coûts (qui comprend 600 suppressions d'emplois sur les 17 000 salariés de la multinationale).

Technicolor, qui cherchait depuis un an et demi à s'installer en France, a trouvé là un relais de croissance dans le plus important marché cinématographique européen. Espérons que leur stratégie s'avère fructueuse pour ce secteur de la post-production, vitale pour notre économie.

La liquidation de Quinta industries : un effet papillon

Posté par vincy, le 22 décembre 2011

C'est un feuilleton quotidien, avec ses rebondissements. Depuis la mise en liquidation il y a une semaine du groupe Quinta Industries, les nouvelles se suivent. Et se ressemblent.

1) Liquidation judiciaire décidée

Quinta industries, détenue à 83% par l'homme d'affaires franco-tunisien Tarak Ben Ammar et à 17% par Technicolor, était en cessation de paiement depuis le 1er septembre et avait été placé début novembre en redressement judiciaire. Les 115 salariés de LTC, une filiale à 100% du groupe, s'étaient mis en grève le vendredi 9 décembre, ce qui avait entraîné comme première conséquence le blocage de la livraison des copies de Hugo Cabret et du réassort de quelques films (voir actualité du 13 décembre).

Le processus de numérisation des salles, qui s'est accéléré ces derniers mois (voir actualité du 26 septembre), aura eu raison des activités photochimiques.

LTC, ScanLab, SIS, les Audis de Boulogne : toutes ont été liquidées en attendant les offres de reprises début janvier. La continuation de l'activité a été accordée jusqu'à la mi-janvier seulement. On peut ajouter à cela l'absence de proposition pour reprendra Duran et le studio Duran Duboi (voir actualité du 2 décembre), qui "plantent" ainsi les effets spéciaux de plusieurs grosses productions. La continuation de l'activité est prévue jusqu'à fin janvier. Cela va notamment entrainer les producteurs à trouver d'autres solutions, coûteuses.

2) Des films menacés, reportés...

Warner Bros a annoncé aujourd'hui que la sortie du film Les Seigneurs, d'Olivier Dahan, serait reportée d'avril à septembre 2012. Fidélité Films a voulu rassurer. Pour Astérix 4, ils examinent différentes solutions, comme "la reprise de l'ensemble des effets spéciaux par des sociétés tierces. Cette reprise va s'accompagner de surcoûts importants, que nous n'avions évidemment pas prévus, mais qui sont gérables dans le cadre d'une production comme Astérix."

En plus de la casse sociale (près de 200 employés licenciés d'ici la fin de l'année) à la veille des Fêtes, ce sont en effet 36 longs métrages qui sont impactés. 36 films qui étaient en cours de post-production dans ces différents laboratoires, parmi lesquels, Astérix au Service de sa Majesté, La Vérité si je mens 3, Les Seigneurs, le nouveau film d'Olivier Dahan, Les Infidèles de Jean Dujardin et Gilles Lellouche, le prochain Leos Carax, Holly Motors, ou encore Thérèse Desqueyroux de Claude Miller. Les films de Gilles Bourdos, Pierre Jolivet, Frédéric Forestier, Régis Roinsard sont également concernés.

La Fédération des industries techniques du cinéma, de l'audiovisuel et du multimédia (Ficam) explique que
"toutes saisies et déplacements des serveurs informatiques entraîneraient la perte irrévocable des éléments", soit près de 300 millions d'euros d'investissements de production. Les serveurs des sociétés feraient déjà l'objet de saisies. La perte des données est sans doute le risque le plus grave actuellement. Au delà des films en cours, il y a aussi le transfert des oeuvres du patrimoine (depuis 1935) qui doit être envisagé. La Ficam propose de former un comité d'experts pour trouver des solutions à court terme mais aussi la mise en place d'un Fonds spécial de compte de soutien.

3) Les issues de secours

Il faut donc un plan de sauvetage urgent. Et là, nous ne pouvons être que circonspects face à la réponse publique. Le CNC a immédiatement réagit. Une réunion se tient aujourd'hui avec les organisations professionnelles en vue de trouver les bonnes solutions. Mais le Ministère de la Culture a attendu près d'une semaine pour faire valoir sa position. Le mépris à l'égard de cette situation surprend. Et la réponse ne rassure pas complètement.

Après la formule de politesse qui convient (Frédéric Mitterrand, Ministre de la Culture et de la Communication fait part "de la très vive attention qu’il porte à la situation des industries techniques du cinéma, suite à la liquidation judiciaire dont fait l’objet le groupe Quinta industries et les sociétés qui le compose"), il fixe une priorité (qui paraît évidente) : "permettre dans les meilleures conditions la finalisation et la sortie en salle des films actuellement traités par Quinta industries, et à moyen terme de garantir la conservation des œuvres stockées par le groupe."

Mais dans son communiqué, le ministre considère que l'urgence ne concerne que les films qui doivent sortir d'ici fin janvier (très peu des 36 films concernés), ignorant sans doute qu'une phase de post-production est engagée plusieurs mois avant la sortie du film. Erreur de raisonnement.

Pour les autres oeuvres, qui sont prévues après janvier, le Ministère délègue au CNC le dialogue avec les parties concernées. Manière de ne pas trop se mouiller en cas d'échec.

Enfin, maladroitement, le Ministère indique que la liquidation de Quinta industries était prévisible. Il y a eu ces dernières années une volonté publique de numériser les salles (notamment "par l’intermédiaire de dispositifs de soutien déjà existants, mais également dans le cadre des programmes de numérisation des films de patrimoine, afin de faire du numérique non seulement un moyen de valoriser et diffuser les œuvres, mais également une opportunité pour nos industries"). Manière d'annoncer que l'Etat ne sauvera pas le savoir-faire des techniciens licenciés et que les salles n'ont plus d'autres choix que de passer au numérique... La liquidation judiciaire de ces sociétés est donc une opportunité et l'Etat les enterre sans ménagement. On ne s'étonnera pas que dans ce communiqué, on ne trouve pas un seul mot pour les employés.

La sortie d’Hugo Cabret subit la grève des laboratoires LTC

Posté par vincy, le 13 décembre 2011

Après l’annonce de la possible mise en liquidation par le tribunal de Nanterre du laboratoire LTC, les salariés se sont mis en grève vendredi dernier.

Cela impacte sur l’une des plus grosses sorties de la semaine, et la plus importante sortie de l’année de son distributeur : Hugo Cabret, de Martin Scorsese. 695 copies. Le distributeur Metropolitan Filmexport a du faire face au blocage de 25% des copies 35MM (environ 140/150). Le reste du plan de sortie est prévu en copie numérique. Metropolitan a donc demandé à Technicolor Italia, à Rome, de tirer les copies manquantes, qui seront livrées à temps. Mais à quel prix, si l’on compte aussi les frais d’acheminement en livraison express ?

Selon Le Film Français, la grève des laboratoires LTC touche aussi 32 réassorts d’Intouchables. Ces 32 copies ne seront pas livrées à temps pour mercredi, mais devraient être disponibles pour jeudi.

Les 115 salariés de LTC se battent contre la liquidation de leur société qui pourrait être décidée jeudi.

Duran Duboi débranché par le Tribunal de commerce

Posté par vincy, le 2 décembre 2011

Jeudi 1er décembre, le Tribunal de commerce de Nanterre a mis en liquidation judiciaire le groupe Duran (sociétés de post-productions Duran, Duboi et DuboiColor). La société était en plan de continuation depuis 2003, selon les informations du Film Français.

Un mois après le dépôt de bilan de LTC, ScanLab et la holding Quinta Industries, c'est une mauvaise nouvelle pour les anciens fleurons de la post-production française. Duran Duboi, dirigée par Jacquemin Piel, est spécialisée dans l'animation 3D et les effets visuels et appartient au groupe Quinta Industries. L'ensemble de ces entreprises représentent environ 200 emplois.

Le tribunal a accordé la continuation de l'activité durant un mois en attendant de retrouver un repreneur. Les dossiers seront examinés le 20 décembre.

Cela pourrait impacter sur les films actuellement en laboratoires, comme Astérix 4 de Laurent Tirard.

Droit de réponse de M.Tarak Ben Ammar

Posté par redaction, le 25 novembre 2011

Ecran Noir publie un droit de réponse de M. Tarak Ben Hammar, producteur d'Or noir et patron de Quinta Communications.

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Je ne peux rester indifférent à votre article publié le 22 novembre 2011.

Si Internet permet de nos jours de prendre des libertés avec la réalité des choses, il y a, ou il devrait y avoir, des limites à ne pas dépasser.

Quant elles le sont, comme vous le faites, on s’approche dangereusement de la diffamation.

Il est habituel que des salariés dans l’attente d’un plan social fassent état d’ « arguments » qui ignorent les vérités économiques et juridiques dont la CGT, il est vrai, n’est pas le spécialiste le plus pointu.

Rétablissons quelques faits :

  • LTC, Scanlab et Quinta Industries (alors dénommé Dataciné) étaient en 2002 sous mandataire ad hoc, au bord du dépôt de bilan. Quinta Communications a été le seul repreneur prêt à relever le défi de leur rétablissement. Sans Quinta, les salairiés de LTC auraient perdu leurs emplois depuis 10 ans. Tout au long de cette période, Quinta a contribué plusieurs millions d’euros et apporté un important chiffre d’affaires (payé souvent au-dessus des prix de la concurrence), sans tirer un centime de dividendes. Il est donc ahurissant de prétendre que Quinta Industries/LTC/Scanlab ont opéré pour le « seul bénéfice de Quinta Communications » quand cette dernière a consacré une partie de ses ressources au seul bénéfice de ses filiales des industries techniques.

Ses filiales ont été les dernières parmi leurs concurrents à se mettre sous la protection des tribunaux après que GTC ait été liquidé et qu’Eclair soit entré en plan de sauvegarde, tout comme Technicolor, le leader mondial de l’industrie.

  • Si le public pourra voir « Or Noir », ou Intouchables ou Polisse d’ailleurs, c’est effectivement grâce à l’excellent travail des salariés de Quinta Industries, LTC et Scanlab. Mais, à moins que je ne me trompe, c’est précisément pour cela que ces salariés perçoivent un salaire. Salaire qui contrairement à ce qui est dit, ont été régulièrement payés tout au long de l’année, malgré les difficultés naissantes, alors que ceux du dernier mois l’ont été dans le cadre de la procédure de règles judiciaires. Quant aux salaires futurs, ils sont garantis par l’Administrateur Judiciaire et les organismes étatiques.
  • La « controverse » liée aux conditions de tournage d’Or Noir n’engage que ses auteurs. Le directeur du CNC n’a pris la décision d’accorder l’agrément qu’après s’être assuré auprès des autorités compétentes que Quinta Communications avait respecté toutes les réglementations en vigueur. Les explications du syndicat prétendant que Quinta avait « imposé » quoique ce soit à qui que ce soit sont l’objet d’une plainte en diffamation, actuellement instruite par un juge d’instruction à Paris.
  • Je suis fier d’être l’actionnaire d’une chaîne qui a diffusé Persépolis pour défendre les valeurs de liberté et de tolérance dans un pays qui n’y a pas été habitué.
  • Mon « amitié » avec Ben Ali m’a valu une menace de fermeture de ma chaîne à la suite de la diffusion d’une émission sur les évènements de Sidi Bouzid, émission saluée par le Nouvel Observateur comme une « initiative sans précédent dans les annales des médias Maghrébins»
  • Ce n’est pas Mr Berlusconi qui est mon actionnaire mais une filiale du groupe Fininvest, un des plus importants groupes de média en Europe. Ce groupe est notamment éditeur en France des magazines Grazia, Closer et Le Film Français. Il est actionnaire depuis bien avant que Mr Berlusconi n’entame une carrière politique et notre partenariat ignore totalement les hauts et les bas du destin de quelque homme politique que ce soit.
  • Enfin, la Libyan Investment Authority, fonds souverain d'un pays alors reconnu par la totalité de la communauté internationale, a effectivement pris en 2009 une participation de 10 % dans le capital de Quinta Communications. Si cette participation devait être interprétée comme le signe d'une amitié avec Khadafi, il conviendrait de joindre à la liste de ses amis du dictateur déchu les sociétés Vodafone, Exxon, Lagardère, EDF, BNP Paribas, EDF, Vinci et Nestlé, qui ont toutes la LIA comme actionnaire. La LIA a été reconnue par le Conseil National de Transition comme une émanation légitime de l'État libyen. Son investissement dans Quinta Communications n'est donc certainement pas de l'argent reçu de Khadafi.

Je prends donc l’expression « sales temps pour Tarak Ben Ammar » plus comme un commentaire sur les conditions météorologiques prévalant actuellement en France que comme un diagnostic sur la situation de mon groupe.

Tarak Ben Ammar

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M. Ben Ammar est un producteur respectable. Nous n'en avons jamais douté. Héritier des nababs qui manquent tant par leur prises de risques, le producteur a, ne le négligeons pas, le mérite d'avoir construit une société qui a produit de grands cinéastes (Chabrol, Rossellini, Zeffirelli, Schatzberg, Polanski, Verneuil, Bouchareb...). Nous n'avons jamais critiqué ses ambitions.
Concernant notre article du 22 novembre et  ce droit de réponse, nous allons préciser quelques points qui méritent d'être clarifiés, et qui permettront de comprendre que nous n'avons diffamé personne.

1) Les accusations portées contre sa société concernant le conflit syndical sont extraites du tract syndical qui a été distribué lors de l'avant-première d'Or noir. Ces accusations sont donc celles du SNTR CGT, que nous avons placées en italiques et entre guillemets pour bien comprendre qu'il ne s'agissait pas de notre point de vue. Nous laissons aux deux parties le soin d'en discuter.

2) Le non paiement des salaires est là aussi une affirmation des syndicats, reprise dans différents journaux comme La Tribune. M. Ben Ammar a raison, cependant, quand il explique que les salaires sont garantis par l'Administrateur judiciaire. En revanche, nous ne savons toujours pas si le groupe Quinta est prêt à financer le plan de licenciement ou la reconversion des employés de Quinta Industries. De même nous ignorons si ce plan social est en effet plus important que celui prévu cet été (34 licenciements).

3) La controverse liées au conditions de tournage d'Or noir n'est pas une invention de notre part. Elle est exprimée clairement par les syndicats (voir Pour quels motifs obscurs le CNC délivre-t-il l’agrément à Tarek Ben Ammar ?). Par ailleurs, le magazine professionnel Le Film Français avait évoqué le problème de l'agrément dès mars 2011 (voir "L'or noir" de Jean-Jacques Annaud toujours en quête d'agrément) où les deux parties se renvoyaient la balle, campant chacun sur leurs arguments. Le film a reçu l'agrément du CNC, jugeant le dossier conforme juridiquement. La décision est discutée par les syndicats. mais là encore Ecran Noir ne fait que les citer afin d'expliquer un contexte de défiance ; il ne s'agir pas de remettre en question une décision dont on ne connait pas tous les détails.

4) Sur la diffusion de Persépolis, nous aussi nous sommes fiers que la chaîne TV Nessma l'ait diffusé. Nous ne disons pas le contraire. Nous l'avions déjà exprimé en soutenant cette initiative : "La censure est une atteinte aux libertés, et ça c'est sacré! Personne n'est obligé de regarder les films."

5) Concernant les relations avec MM. Ben Ali, Berlusconi et Kahdafi, nous proposons d'en parler directement avec M. Ben Ammar pour nous expliquer sans détour ses positions concernant leurs politiques. Certes il s'agissait de dirigeants "reconnus" par la communauté internationale. Mais nous sommes en droit de nous interroger si la fin (produire, diffuser, cultiver) justifie certains moyens...

Comme il nous l'a proposé, c'est avec plaisir que nous acceptons de le rencontrer. Le débat est un ingrédient fondamental de nos civilisations. Nous le remercions pour avoir apporté son point de vue face à celui des syndicats. Nous espérons que le dialogue entre les deux parties se résoudra positivement pour tous les employés de son groupe.

L’avant-première d’Or noir troublée par un conflit avec le producteur

Posté par vincy, le 22 novembre 2011

L'avant-première d'Or noir, le nouveau film de Jean-Jacques Annaud, lundi 21 novembre au Gaumont Champs-Elysées, a été troublée, de manière très sage, par les employés de LTC, filiale à 100% de Quinta Industries. Le Syndicat national des techniciens et réalisateurs de la production cinématographique et de télévision (SNTR / SGTIF - CGT) a distribué un tract aux invités qui faisaient la queue. Quelques employés brandissaient des pancartes, accusant principalement l'actionnaire Tarak Ben Ammar, le long du tapis rouge.

Rappel des faits : LTC (32 millions d'€ de chiffre d'affaires en 2010, 24 millions prévus cette année), mais aussi Scanlab (6,3 millions d'euros) et Quinta Industries (6,6 millions d'euros) sont en redressement judiciaire depuis le 3 novembre. Les trois sociétés regroupent 182 employés. Le groupe Quinta industries, qui englobe les trois sociétés, détenu à 83% par Tarak Ben Ammar et à 17% par Technicolor, elle-même en procédure de sauvegarde, est en cessation de paiement depuis le 1er septembre et les salaires d'octobre n'ont pas pu être payés. Un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) devrait être présenté d'ici deux mois aux 182 salariés des trois sociétés. Les difficultés financières des trois sociétés sont liées notamment au déclin de l'activité photochimique, qui a accéléré sa chute à partir du 2e semestre 2010, notamment liée au processus de numérisation des salles de cinéma, en forte accélération ces derniers mois. Le Conseil de la concurrence a rejeté la fusion des laboratoires LTC avec ceux d'Eclair, dont Tarak Ben Ammar est aussi actionnaire à hauteur de 43%. Tarak Ben Ammar justifie qu'il a anticipé la mutation technologique en orientant les activités de ses laboratoires vers la numérisation des oeuvres mais qu'il n'a pas réussi à trouver les financements nécessaires pour répondre aux besoins de cette montée en charge. Il compte démarrer la numérisation de son catalogue (500  films environ) dès décembre.

Cependant, les syndicats reprochent à Tarak Ben Ammar de ne pas faire face à ses responsabilités. "L'administrateur judiciaire a annoncé aux élus du personnel qu'un plan massif de licenciement était nécessaire et que les mesures d'accompagnement seraient au minimum conventionnel à moins que l'actionnaire y participe financièrement". Un premier plan de licenciements de 34 personnes avait été enclenché l'été dernier. Le plan avait été annulé, et celui qui s'annonce semble bien plus "massif". Le tribunal a accordé une période d'observation de six mois. Le plan de continuation prévoit un plan de sauvegarde de l'emploi et la cession du site de Saint-Cloud, qui rapporterait 13,5 millions d'euros (soit un peu moins que la dette financière, qui s'élève à 15 millions d'euros).

Les salariés reprochent à l'actionnaire une certaine désinvolture. "Si vous allez pouvoir voir (...) le film Or noir (...), c'est parce que les salariés de LTC, Scanlab et Quinta Industries continuent à travailler alors qu'ils ne sont même pas certains que, comme le mois dernier, leur salaire sera versé. Les salariés réclament qu'en juste contrepartie de 10 ans au travail au seul bénéfice des sociétés du groupe Quinta Communications, Tarak Ben Ammar mette la main à la poche pour assurer dignement le départ et la reconversion des salariés." Ce dernier ne s'est toujours pas engagé à participer financièrement aux licenciements alors que les salaires n'ont effectivement pas été versés en octobre et qu'il affirme que son groupe Quinta Communications "va très bien".

Des amis nommés Ben Ali, Khadafi, Berlusconi

A cela s'ajoute une controverse liée aux conditions de tournage d'Or noir. Le syndicat exige, "compte tenu des conditions sociales iniques qui ont permis la réalisation de ce film", que soient revues très rapidement les conditions de l'agrément de ce film, agréé par le Président du CNC, en dépit d'un avis défavorable de la Commission des professionnels. Le 21 septembre dernier, le syndicat expliquait que "la société Quinta Communication avait imposé aux ouvriers et techniciens de travailler en qualité d'expatriés via une société tunisienne, ceux-ci ne bénéficiant alors d'aucune couverture sociale et conventionnelle, la commission d'agrément dont l'avis est consultatif, avait unanimement émis un avis défavorable à la délivrance de l'agrément pour ce film, à deux reprises. En délivrant l'agrément sans même en informer la commission, le Président du CNC fait preuve d’une véritable défiance vis-à-vis des professionnels du cinéma ; en conséquence, les organisations professionnelles de la CGT, artistes et techniciens, siégeant à la Commission ont décidé de quitter la séance qui a du être ajournée."

Sales temps pour Tarak Ben Ammar, qui avait déjà du affronter la révolution tunisienne en plein tournage d'Or noir (voir aussi actualité du 19 janvier) et qui est, en tant qu'actionnaire de la chaîne télévisée Nessma, au coeur d'un procès en Tunisie pour avoir diffusé Persépolis (voir actualité du 14 octobre). Ce dernier point serait plutôt à mettre à son actif. Hélas, ses amitiés qui lui ont permis de construire son empire s'effondrent autour de lui. Après son ami Ben Ali, l'ancien dictateur tunisien, c'est au tour de Silvio Berlusconi (co-actionnaire de Quinta Communications) de tomber ; et il est aussi fragilisé par la révolution libyenne : en 2009, il avait reçu du régime de Khadafi, via le fonds souverain Libyan Foreign Investment Co, 19 millions d'euros soit 10% du capital de sa société.

Fin de tournage mouvementé dans une Tunisie bouleversée pour La soif noire

Posté par vincy, le 19 janvier 2011

La révolte tunisienne risque de ne pas faire les affaires du producteur Tarak Ben Ammar, neveu de l'épouse de l'ancien président Habib Bourguiba. Exilé en France depuis que sa tante a été répudiée par le régime de l'époque, il a pu revenir en grâce auprès du pouvoir tunisien, dans son pays de coeur, au début des années 2000 grâce à son portefeuille et ses relations : ainsi il fait venir le tournage de Star Wars dans le sud-tunisien. Copropriétaire de la chaîne de télévision Nessma (avec Silvio Berlusconi), actionnaire principal du groupe Éclair, fondateur du groupe Quinta Communications (distributeur, spécialiste en post-production), il a aussi lourdement investit dans les studios de cinéma d'Hammamet, l'Empire Studios, qui s'étendent sur 10 hectares pour accueillir les productions internationales les plus massives. C'était ici que furent tournés en leurs temps Le Messie de Rossellini, Les Aventuriers de l'arche perdue de Spielberg, Jésus de Nazareth de Zeffirelli, La Dernière Légion de Doug Lefler, Pirates de Roman Polanski ... Il en a fait le QG des tournages des séries des télévisions et des plus importants budgets cinématographiques italiens de Silvio Berlusconi comme Baaria, de Giuseppe Tornatore.

Cependant, ces liaisons dangereuses risquent de lui coûter cher.

Actuellement, son principal souci n'est pas la fuite de son "ami" Zine el Abidine Ben Ali. Il a beau jeu sur Europe 1 (hier matin) de trouver "salutaire" la révolte tunisienne. Mais ce proche des princes des Emirats et d'Arabie Saoudite a bénéficié des décisions de Ben Ali, notamment en 2004 quand il a pu lancer sa chaîne de télévision. Si aujourd'hui il se félicite de cette "révolution populaire exceptionnelle" et s'il justifie sa ferveur en soulignant qu'il a donné la parole sur sa chaîne de TV à des opposants et des journalistes censurés, il aurait aussi signé une pétition en août 2010 appelant Ben Ali à un nouveau mandat en 2014. Mais c'est aussi vrai que sa chaîne de télévision a été la première à diffuser des images du soulèvement dans la rue.

Face à ses paradoxes, Ben Ammar  a envoyé un communiqué de presse, voulant sans doute rassurer ses partenaires financiers sur sa production actuelle, La soif noire (Black Gold), de Jean-Jacques Annaud (voir actualité du 18 mai 2010). Manière de dire : "tout va bien, Madame la Marquise" et de protéger ses intérêts en Tunisie. D'autant qu'avant la révolte, il avait déjà du gérer le délicat problème d'un décès de figurant sur le plateau, en novembre.

40 millions d'euros, la Warner et Universal en distributeurs internationaux et un casting hollywoodien (Antonio Banderas, Tahar Rahim, Freida Pinto, Mark Strong) : voilà l'un des films les plus périlleux de l'année.

Les émeutes révolutionnaires ont "officiellement" peu affecté le tournage. Le clap de fin devait être donné il y a quelques jours. Finalement, il a pris un peu de retard. Deux jours selon le producteur, qui devraient servir à des scènes intérieures.

Si Pinto est restée sur place, Banderas en a profité pour quitter la Tunisie, pour raisons professionnelles. Et avec Ben Ammar, ils ont été contraints à un "plan média" très select, là encore pour rassurer, et se mettre dans le bon camp.

Ironiquement le film traite des conflits de la Péninsule Arabe au moment de la découverte de l'or noir, quand tradition et modernité, religion et capitalisme commençaient à s'affronter.

Le tournage a donc continué, vaille que vaille, vendredi (quand Ben Ali s'est enfui) et samedi avant d'être interrompu en début de semaine, pour reprendre jeudi 20 janvier. Les équipes n'étaient pas coupées des événements, mais la pression était suffisamment intense pour ne pas se déconcentrer. Antonio Banderas a déclaré il y a quelques jours à CNN, sur son lieu de travail, qu'il espérait une issue pacifique et que le pouvoir prendrait en compte les aspirations de ces jeunes générations qui feront la Tunisie de demain. "Il faut qu'ils croient en eux et il faut qu'ils se battent pour ça."

L’emmerdeur, un cas d’école?

Posté par vincy, le 23 décembre 2008

emmerdeur patrick timsit richard berryAvec L'emmerdeur, Francis Veber espérait encore avoir un film à un million d'entrées. En 9 films, il a séduit et fait rire 41 millions de spectateurs en France. Un seul, Le jouet, en 1976, n'a pas franchi les 2 millions d'entrées. Et seul Le jaguar, et ses 2,5 millions de fidèles, était considéré comme un fiasco pour le cinéaste. Tout est relatif.

Mais ce qui est absolu, c'est le fiasco financier du remake de L'emmerdeur. A l'origine le film, scénarisé par Veber, avait été réalisé par Edouard Molinaro. Sorti en 1973, le film réunissait Lino Ventura, Jacques Brel et Caroline Cellier. A Paris, 612 000 spectateurs en rient, et le total en France s'élève à 3 354 756 spectateurs. Cela en fait le cinquième film le plus populaire de l'année. Pour Molinaro, c'ests on plus gros succès depuis Hibernatus en 1969. Pour Lino Ventura, c'est la gloire intégrale, entre L'aventure c'est l'aventure et La gifle, tous au dessus des 3 millions de fans.

Le remake, réalisé par le scénariste d'origine, est la fausse bonne diée qui va coûter très cher. Dans un premier temps, Veber relance le concept au théâtre, à guichet complet. Dans un second temps, il convainc producteurs et distributeurs que L'emmerdeur peut renaître au cinéma, avec ce duo de scène : Richard Berry, populaire mais pas star, et Patrick Timsit, qui sort d'un fiasco cinématographique douloureux en 2005 avec L'Américain. Autrement dit, l'affiche n'avait rien à voir avec Ventura/Brel. Le premier était très populaire, le second une star incontestée dans la chanson.

On sort le grand jeu marketing. Un plan média qui n'épargne aucune émission de radio de grande écoute, aucun talk show télévisuel. Une affiche ringarde mais simple : le lettrage rouge et épais qui signifie en grosses lettres "comédie française", les deux comédiens, un fond blanc. Aucun travail graphique. On fait dans le basique, le déjà vu, le rassurant.

Puis TFM inonde le marché avec 595 copies, soit à peu près autant que Le jour où la terre s'arrêta. Au final, ce cumul d'impairs, ce lancement d'un autre temps, cette absence d'anticipation des désirs des spectateurs, ont entrâiné le crash désormais connu : 144 300 spectateurs en première semaine. 4e des nouveautés, 7e au classement général, 5e moins bonne moyenne par copie du Top 15 (mais la pire parmi toutes les nouveautés).

Autrement dit, même avec les fêtes, L'emmerdeur passera difficilement le cap des 350 000 entrées. Jamais Veber n'avait atteint de telles abysses. Plus grave pour TFM distribution, que TF1 cherche à vendre depuis plusieurs moi en vain (Quinta vient de se retirer des postulants), cela achève une année dramatique. Malgré 25 films sortis en 2008, le distributeur n'a attiré que 5,1 millions de spectateurs (à peine 3% de parts de marché) : ce qui le sitie en 11e place des distributeurs en France. Son plus gros (et unique) succès est sorti en mars dernier : Les femmes de l'ombre, avec à peine 850 000 spectateurs (53e succès de l'année). Ce qui ne veut pas dire que le catalogue est mauvais puisque récemment TFM a sorti The Visitor (200 000 curieux) et L'apprenti (Prix Louis Delluc du premier film). mais il est clairement mal exploité, au détriment des bons films.