Jafar Panahi : la mobilisation s’organise

Posté par MpM, le 23 décembre 2010

Depuis l'annonce de la sentence qui a frappé Jafar Panahi le 20 décembre dernier (6 ans de prison et 20 années d'interdiction de travailler et de sortir de son pays), de nombreuses voix se sont élevées en France et dans le monde pour prendre la défense du cinéaste iranien condamné au silence.

Thierry Frémaux, le délégué général du festival de Cannes, a immédiatement réagi, tentant d'organiser dès le 20 au soir un comité de soutien avec la cinémathèque française et la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), présidée par le réalisateur Bertrand Tavernier. "Serge Toubiana, Costa-Gavras (les directeur-général et président de la cinémathèque], la SACD... tout le monde est d'accord", a-t-il précisé avant de rappeler qu'au "terme de son premier emprisonnement l'an dernier, Jafar Panahi nous avait fait savoir à quel point le soutien venu de l'étranger lui avait été précieux. C'est important qu'il sache que nous sommes là. Ce qui vient de se passer montre qu'on avait eu raison de prendre au sérieux les premières menaces à son encontre..."

Du côté de Berlin, qui avait invité Jafar Panahi à être membre de son jury 2011, le directeur Dieter Kosslick a assuré le cinéaste de son soutien le plus total, avouant son inquiétude et son indignation face à la décision de la justice iranienne.

A Rotterdam, c'est la colère qui prédomine. "Il est inacceptable que le travail d'un cinéaste majeur, humain et impliqué comme Panahi, soit soumis à l'oppression" ont déclaré les organisateurs dans un communiqué, appelant à à la libération immédiate de Jafar Panahi et Mohammad Rasoulof (son coréalisateur). "Le Festival international du film de Rotterdam espère que la protestation trouvera un écho dans le monde entier et appelle tous les cinéphiles à condamner cette scandaleuse sentence", déclarait également le communiqué.

Bernard-Henri Lévy a quant à lui souligné que le pouvoir iranien a inventé "le délit de synopsis" et "déclaré la guerre à ses artistes et à sa société civile toute entière". Il promet de mettre "toutes ses forces", dont celles de sa revue "La règle du jeu" et d'Arte dont il préside le conseil de surveillance, pour remporter "ce bras de fer symbolique" avec les autorités de Téhéran.

En attendant de connaître la forme exacte que prendra cette mobilisation générale, une pétition est disponible en ligne pour tous ceux qui souhaitent manifester leur soutien à Jafar Panahi et Mohammad Rasoulof.

Le fonds Hubert-Bals sélectionne 24 films dans 13 pays

Posté par MpM, le 18 octobre 2010

Le fonds de soutien Hubert-Bals, créé par le Festival international de Rotterdam, a par le passé aidé des films comme Oncle Bonmee..., Palme d'or à Cannes, et Winter Vacation, Léopard d'or à Locarno, ou encore Uzak (Loin) et Japon. Encouragé par un tel succès, il vient lors de sa session automnale de répartir 349 000 euros à des projets venus principalement d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine.

Les films soutenus dans cette sélection d'automne se répartissent en plusieurs catégories :

- section post-production : Ausencias de Milagros Mumenthaler (Argentine, Pays-Bas), Black Blood de Zhang Miaoyan (Chine), Flying Fish de Sanjeewa Pelanwattage (Sri Lanka),The Old Donkey de Li Ruijun (Chine) et Paraísos artificiales d'Yulene Olaizola (Mexique) ;

- section numérique : If It Is Not Now, Then When ? de James Lee (Malaysie), Steel is the Earth de Mes de Guzman (Philippines) et Las voces de Carlos Armella (Mexique) ;

- section "aide à l'écriture" : Mai morire d'Enrique Rivero (Mexique), Rey de Niles Atalla (Chili), Plemya de Myroslav Slaboshpytskiy (Ukraine), Cactus Flower de Hala Elkoussy (Egypte), Conurbano de Gregorio Cramer (Argentine), Dos disparos de Martín Rejtman (Argentine), Marustali de Geethu Mohan Das (Inde), La mujer de barro de Sergio Castro San Martín (Chili), Oxhide 3 de Liu Jiayin (Chine), Sombra del arbol de Pedro Gonzalez-Rubio (Mexique) et While Waiting for You de Prasanna Vithanage (Sri Lanka) ;

- section "aide à la distribution" : Qarantina d'Oday Rasheedin (Irak), Amakula Mobile Cinema d'Amakula Kampala IFF (Ouganda) et Year Without a Summer de Tan Chui Mui (Malaysie).

Parmi les réalisateurs retenus, on note la présence de James Lee, dont on a pu découvrir la "trilogie de l'amour" (Before We Fall in Love Again, Things We Do When We Fall in Love, Waiting for love) ; le Srilankais Prasanna Vithanage, habitué notamment du festival de Vesoul (Soleil d'août, Flowers in the sky) ; Pedro Gonzalez-Rubio dont le premier long métrage, Alamar, a reçu le Grand prix du jury du Festival de Miami et le prix Tiger à celui de Rotterdam (sur nos écrans le 1er décembre)  ou encore Liu Jiayin, cette réalisatrice chinoise à qui l'on doit les deux premiers volets minimalistes d'Oxhide.

Le fonds Hubert Bals permet ainsi de soutenir des cinéastes souvent confidentiels ou ayant des difficultés à monter leurs films mais également de faciliter l'émergence de nouveaux talents dans les pays dits "du sud". Or, qui sait, peut-être se cache-t-il parmi eux la prochaine coqueluche des festivals internationaux...

Chant des mers du Sud : hymne au vivre ensemble

Posté par MpM, le 16 février 2010

Chant des mers du SudL’histoire : Ivan le Russe et Assan le Kazakh sont voisins. Un jour, la femme d’Ivan donne naissance à un enfant étonnamment brun et bridé, et le conflit éclate entre les deux familles. Des années plus tard, chacun des deux hommes éprouve le besoin de partir à la recherche de ses racines.

Notre avis : Sélectionné et primé dans de nombreux festivals internationaux (Pusan, Nantes, Rotterdam, Vesoul…), ce Chant des mers du Sud délicat et cocasse s’avère une fable humaniste sur la nécessité de dépasser les différences ethniques pour vivre en bonne harmonie. Comme souvent avec le cinéma venu d’Asie centrale, l’histoire semble passer par bien des digressions qui sont autant de détours et de circonvolutions empêchant au film d’aller droit au but. Pour l’apprécier malgré tout, il faut se faire à ce mélange des genres, symbolisme et didactisme, drame et comédie, et à cette lenteur étudiée, patiente, qui mène toujours quelque part mais à son rythme, et avec son cheminement propre.

Même la structure, extrêmement archétypale, rend aux premiers abords l’intrigue complexe et peu avenante. Comme si chaque personnage, chaque situation, chaque geste même, ne servait qu’à illustrer avec force le propos de Marat Salut, mais n’existait pas pour lui-même. Il s’en dégage alors une impression de lourdeur, un manichéisme qui rend le film maladroit, légèrement sentencieux. On n’est pas loin de la démonstration pontifiante, heureusement contrecarrée par le regard bienveillant et amusé que le réalisateur porte sur cette société où tout finit toujours par tourner à la farce.

L’illustration du fameux Chant des mers du Sud en animation de papiers découpés, les plans contemplatifs sur les vastes plaines, les passages hauts en couleur entre le chef du village et son chauffeur allemand nous immergent dans l’ambiance burlesque de ce village kazakh dont on ne saurait vraiment prétendre qu’il est typique… mais qui participe à ancrer l’intrigue dans l’univers du conte décalé plus que du réalisme. Grâce à ce petit brin de fantaisie, cet appel au vivre ensemble et à l’ouverture aux autres ne manque indéniablement pas de charme.

Berlin slalome entre Sundance, Rotterdam et les Oscars

Posté par MpM, le 4 mars 2009

Pour son 60e anniversaire, le festival de Berlin devait à tout prix éviter une collision fâcheuse avec l’un ou l’autre des grands événements cinématographiques du début d’année 2010. C’est pourquoi elle devrait se tenir du 11 au 21 février, soit près d’une semaine plus tard qu’en 2009. Ce changement tient très simplement à un petit jeu de chaises musicales initié par le festival de Sundance, la Grand messe du cinéma américain indépendant ayant en effet décidé de déplacer l’ouverture de sa prochaine édition du 15 au 21 janvier. Automatiquement, Rotterdam a dû à son tour décaler ses dates d’une semaine (il se tiendra ainsi du 27 janvier eu 7 février) afin d’éviter tout chevauchement entre les deux manifestations, ne laissant plus que le créneau de mi-février disponible.

Grande inconnue au tableau : la date des Oscars 2010, qui ne devrait pas être annoncée avant fin mars. Or il serait très mauvais pour la Berlinale que la cérémonie des Oscars vienne percuter les célébrations de la soixantième édition ! Soit Dieter Kosslick, le délégué général du Festival, a bénéficié d’une indiscrétion de l’Académie, lui assurant que la remise des Oscars 2010 se tiendrait le 28 février, soit l’organisation berlinoise a tout simplement décidé de mettre Hollywood devant le fait accompli…