Roses à crédit d’Amos Gitaï hélas déjà fané

Posté par geoffroy, le 12 décembre 2010

Le dernier film d’Amos Gitaï, Roses à crédit, qui devait sortir sur les écrans le 15 décembre prochain, ne verra pas le jour au cinéma. Alors que tout était paré pour une sortie en bonne et due forme, le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) vient d’y opposer son veto.

L’argument avancé par la commission d’agrément du CNC est très simple : l’adaptation éponyme du roman d’Elsa Triolet produit par Images & Cie pour une chaîne de télévision,  France 2 en l’occurrence, fait de Roses à crédit un téléfilm et non une œuvre de cinéma à proprement dite. Peu importe, alors, que les différentes parties se soient mis d’accord sur un projet clairement défini comme cinématographique et destiné à sortir dans les salles de cinéma avant sa diffusion télé.

Il aurait fallu, pour que la commission d’agrément donne son aval, que le film d’Amos Gitaï  se décline en deux versions distinctes, l’une pour le cinéma, l’autre pour la télévision. Or la commission a estimé « qu'il n'y a qu'une seule œuvre. Dans ce cas, on ne peut pas accepter qu'un film soit diffusé sur une chaîne non payante seulement trois mois après sa sortie en salles. Si on remet en cause la chronologie des médias, c'est la mort de l'économie du cinéma. ». Ce que conteste Nicole Collet, productrice du film, considérant que « la version cinéma est pourtant plus longue, et donne surtout à la narration un autre éclairage en l’encrant dans un contexte historique différent ».

Insuffisant, semble t-il, pour une commission indépendante ayant comme objectif principal de veiller au respect d’une réglementation encadrant la production des films de cinéma selon des critères définis par le CNC lui-même. Doté d’un pouvoir consultatif, elle obtient donc sans peine l’interdiction d’un film en salles sous prétexte qu’il fut intégralement financé par la télévision. Peu importe que celui-ci possède des qualités artistiques évidentes que de nombreux journalistes ont déjà pu constater.

Confusion des genres

Mais revenons sur cette interdiction qui, outre son caractère incroyablement tardif (elle arrive une dizaine de jours avant la sortie du film), est à géométrie variable. N’est-il pas étrange, qu’en 2008, Plus tard, tu comprendras, téléfilm du même Amos Gitaï financé par Arte, ait été diffusé sur France 2 le 20 janvier 2009 puis le lendemain au cinéma sans que la commission n’y trouve rien à redire. Comment comprendre, par exemple, les différences de traitement entre les films d’Olivier Assayas, Carlos, et de Pascale Ferran, Lady Chatterley. Si le premier, intégralement financé par Canal +, aura été "désélectionné" du festival de Cannes pour des raisons de production (il a finalement été présenté hors compétition), le deuxième aura obtenu, sans contestation aucune, le double agrément de la commission. Nous le voyons, tout ceci est bien flou et discrédite un organe de contrôle se basant essentiellement sur des critères de financement, certes importants, et non vis-à-vis d’enjeux artistiques eux aussi bien réels. D’où l’ambiguïté de certaines situations ou de vrais films de cinéma sont interdits dans les salles de cinéma. Sans parler des incohérences à la marge relevées plus haut, exceptions rares mais ô combien symboliques d’un système ayant montré à plusieurs reprises ses limites.

Une sortie en salles n'est pas garante d'une existence dans les cinémas

Loin de nous l’idée de nier en bloc l’utilité d’un système (les raisons de sa mise en place est toujours d’actualité) qui, bon an mal an, fonctionne correctement. En effet, séparer la production cinématographique de la production en général est nécessaire, les chaînes de TV n’ayant pas à user et abuser d’une position enviable pour financer en sous-main leurs téléfilms. Le système est complexe, imparfait, voire pervers. Dans ce cas, doit-on s’en indigner et constater, incrédule, à la mise au placard d’œuvres cinématographiques parce que produites sur des fonds audiovisuelles alors qu’on nous abreuve toute l’année de films estampillés « cinéma » aux allures de mauvais téléfilms ? Bien sûr que non, mais que faire lorsque Alexandra Henochsberg, directrice de la société Ad Vitam (celle qui devait distribuer Rose à crédit) admet qu’elle n’est pas « certaine qu’il faille la réformer (la commission), moins encore la supprimer, même si nous sommes victimes d’un système qui manifestement ne fonctionne pas ».

Il ne s’agit pas, d’un coup d’un seul, de tout chambouler pour faire plaisir aux contestataires que nous aimons être. Non, ce qu’il faut c’est mettre en place, une bonne fois pour toute, une politique culturelle cohérente à même de garantir la pluralité des cinémas pour que des films comme Rose à crédit puisse exister sur grand écran. Il en va de la sauvegarde d’un cinéma de plus en plus difficile à financer se retrouvant l’otage des moyens de financement qu’on lui accorde. Résultat : au lieu d’aider des cinéastes à monter puis à diffuser leurs films, on les enterre lamentablement comme de vulgaires produits consommables non conformes. Le cinéma et l’art en général valent mieux que cela.

RIHL 2010 : le cinéma continue de refléter un monde perturbé

Posté par Benjamin, le 12 décembre 2010

Aux Rencontres internationales Henri Langlois cette année, les réalisateurs font preuve d’un grand engagement politique voire social. Ils abordent des sujets d’actualité difficiles tels que le terrorisme (London Transfer, photo, suédois), l’exclusion des immigrés clandestins (Mort par suffocation, allemand), le retour de la guerre en Irak (Cigarette Candy, américain) mais aussi d’autres sujets comme le viol (Solstice, anglais) ou l’infanticide (Narben im beton, allemand).

A priori, que ces jeunes cinéastes se frottent à des sujets sensibles, cela n’a rien d’exceptionnel mais ils le font bien, en choisissant de très bons acteurs, en donnant à voir soit une grande émotion soit un absurde des plus total.

Le réalisateur de London Transfer, Roozbeh Behtaji, choisit une situation simple, un homme en transit entre deux aéroports cherche des toilettes à tout prix dans Londres. Avec sa valise à la poignée cassée et sa tête de « terroriste », il est difficile pour lui de trouver de l’aide. On le rejette, on se méfie de lui, on le surveille bien qu’il soit suédois. La peur de l’autre, la peur d’une menace qui a été instaurée depuis des années dans beaucoup de pays occidentaux parasitent tout simplement la relation entre les individus. Ainsi, une situation aussi simple que celle de vouloir aller aux toilettes révèle des tensions et des problèmes disproportionnés.

Narben im beton (de Juliane Engelmann) et Solstice (de David Stoddart) choisissent le camp des femmes. Femmes comme être vulnérables et abandonnées qui sont reléguées aux rôles de mère et de réceptacle des pulsions sexuelles de l’homme. Femme au foyer et femme objet. Mais, elles essayent par tous les moyens d’échapper à cette emprise, cela finit souvent tragiquement : suicide, infanticide. Mais il y aura peut-être un jour nouveau qui viendra pour elle, que ce soit dans l’austérité d’une banlieue allemande ou dans les somptueux paysages embrumés d’Ecosse.

Mort par suffocation est l’un des meilleurs films de la compétition parce qu’il a un début et une fin (croyez moi c’est déjà très bien car beaucoup de réalisateurs trouvent une idée de départ mais n’ont aucune idée pour la conclusion !) et un véritable enjeu. Visar Morena, le réalisateur, utilise un sujet déjà bien traité au cinéma, celui de l’immigration (il suffit de voir Welcome de Philippe Lioret en France) mais il parvient à installer une véritable tension - un couple d’immigrés erre dans la rue, la femme enceinte, perd beaucoup de sang, son mari part chercher de l’aide mais se fait arrêter par la police qui ne veut rien entendre - et il réussit à pointer du doigt l’immense fossé entre les autorités et les immigrés. Un homme qui crie, qui résiste, qui fait du grabuge est forcément coupable, une menace qu’il faut vite éradiquée. Mais ce peut être aussi un homme soucieux pour sa femme qui se vide de son sang, seule dans une rue.

Mort par suffocation se finit de la plus tragique des façons. Par son rythme, par ses images, par le jeu des acteurs, par son découpage, le film est une véritable claque. La mondialisation c’est la peur de l’autre et le renfermement sur soi.

Beaucoup des films en compétition à Poitiers cette année ont montré des personnages isolés, abandonnés, délaissés par la société. Un état du monde pas très brillant et une vision quelque peu désespérée du XXIème siècle.

RIHL 2010: Nicolas Saada et le livre de cuisine hitchcockien

Posté par Benjamin, le 12 décembre 2010

Nicolas Saada est l’invité d’honneur des 33ème Rencontres Henri Langlois et c’est à lui qu’incombe la tâche de livrer la leçon de cinéma axée sur la direction d’acteur (voire La 40eme marche ne se loupe pas). Mais Nicolas Saada est avant tout un passionné. Un cinéaste qui met en avant l’importance de l’école, et de la transmission du savoir, choses qui se perdent cruellement de nos jours. Il parle avec ferveur des classiques d’Hitchcock et de la culture cinématographique, car savoir d’où l’on vient c’est un peu savoir où l’on va.

Sans vouloir faire son professeur, sans vouloir venir prêcher la bonne parole, Nicolas Saada a tout simplement envie de transmettre sa passion du cinéma, d’échanger et de partager avec les autres. Poitiers lui semble donc un carrefour essentiel.

Écran Noir : Pensez-vous qu’il y a une grande valeur pédagogique dans le cinéma d’Hitchcock ?

Nicolas Saada : Et bien oui. C’est ce que je disais : ce ne sont que des prototypes. Il y a un moment quand un ébéniste ou un musicien doit apprendre des choses de base à quelqu’un, il passe par des choses qui sont basiques. Quelqu’un qui veut apprendre le contre-point, l’harmonie, la mélodie à des étudiants de musique, il ne va pas prendre Lady Gaga ! Il va prendre des espèces d’objets absolument pérennes dans l’histoire de la musique. Hitchcock c’est pérenne ! Avec Hitchcock, je pense qu’on peut apprendre plein de choses. On peut piquer des trucs et je vois le nombre de cinéastes qui finalement prennent à Hitchcock non pas une matière qu’ils veulent copier, à laquelle ils veulent rendre hommage, mais un effet qui leur sert à raconter quelque chose. Hitchcock moi-même m’a servi à me dépatouiller de certaines situations, que ce soit dans mon film Les parallèles ou dans Espion(s), Hitchcock m’a toujours servi, soit à faire vivre une scène qui peut être absurde, soit à faire vivre une situation qui peut paraître forcée. C’est un livre de cuisine permanent. Le cinéma selon Hitchcock c’est un livre que tous les étudiants en cinéma devraient lire et relire. C’est le livre de cuisine du cinéma ! Donc moi je me dis, c’est un livre de cuisine, autant appliquer une recette et la faire partager au public de Poitiers.

EN : Demain soir, en même temps que la leçon de cinéma sera diffusé au festival The Ghost-writer de Roman Polanski…

NS : Alors c’est très marrant parce que beaucoup de gens m’ont parlé d’Espion(s) quand ils ont vu The Ghost-writer. Quand j’ai vu le film, je n’ai pas tout de suite compris, mais maintenant en y repensant je crois qu’il y a comme ça des espèces de chevauchements, de croisements entre les deux films.

EN : En tout cas, c’est un film très classique qui a quelque chose d’hitchcockien…

NS : Moi je suis pour le classicisme. Je suis pour tout ce qui est inactuel.

EN : On l’a beaucoup comparé par exemple à Shutter Island de Martin Scorsese et ce qu’on a mis en avant chez Polanski c’est qu’il n’avait utilisé aucuns effets spéciaux.

NS : Moi j’aime beaucoup Shutter Island. J’aime autant les deux. Polanski c’est un metteur en scène dont j’ai beaucoup regardé les films. Par exemple pour mon court métrage Les parallèles, une des références c’était Frantic : c'est un film que j’adore et c’était aussi un film de référence pour Espion(s).

EN : Est-ce que vous pensez que le patrimoine cinématographique se perd aujourd’hui ?

NS : Oui le patrimoine cinématographique se perd parce qu’on a une peur panique de ce qui est vieux. C’est Godard qui disait : « On dit toujours : je vais voir un vieux Fritz Lang. On ne dira jamais, je vais lire un vieux Stendhal. » Mais c’est vrai et c’est dommage qu’on ait une perte de ça, parce que c’est très important pour décoder des trucs. L’histoire que je raconte toujours, c’est qu’il n’y aurait pas Batman sans Victor Hugo. Donc j’adore cette idée qu’il n’y aurait pas Batman sans Victor Hugo parce que, en fait, le Joker dans Batman est inspiré de L’homme qui rit qui est un roman de Victor Hugo qui raconte l’histoire d’un enfant qui est capturé par des faiseurs de montres qui vendent des enfants défigurés dans les cirques. Et lui, on le défigure à un très jeune âge, on lui ouvre la bouche d’une oreille à l’autre. Et il devient l’homme qui rit. Ça devient une espèce de monstre de foire. Et il grandit comme ça accompagné de toute une troupe de gens avec qui il fait du cirque et il a ce visage défiguré, ce sourire permanent. Et après il apprend qu’il est de descendance royale donc on le kidnappe et on le remet au pouvoir, il se retrouve face à des responsabilités qui sont trop grandes pour lui. Enfin, ça se termine tragiquement. L’homme qui rit a inspiré un film dans les années 20 de Paul Leni. Un film de 1924 ou 25 (film de 1928 en réalité, ndlr) avec un acteur allemand qui s’appelait Conrad Veidt. Et ce film en 1925 est devenu un film culte aux États-Unis. C’est un film américain. Tout jeune, l’auteur de Batman (Bob Kane) a vu le film et il était tellement impressionné par le visage de Conrad Veidt qui reproduisait  les gravures qui accompagnaient le roman de Victor Hugo qu’il l’a noté dans un coin de sa tête. Et c’est à cause de ce film qu’il a eu l’idée du Joker. Donc on se dit, voilà, sans Victor Hugo, il n’y a pas Batman ou en tout cas le Joker. Et moi je trouve ça très intéressant. Je trouve plus intéressant de dire à un gamin que Victor Hugo c’est aussi bien que Batman plutôt que de lui dire que Katy Perry c’est aussi bien que Billie Holiday, parce que ce n’est pas vrai. Aujourd’hui, on a une tendance à négliger le passé en disant que finalement tout est cool dans la culture d’aujourd’hui, que tout se vaut, que tout est bien, que Lady Gaga c’est comme Barbara. Et du coup on expose tellement toute les références qui sont, je dirais, des références patrimoniales, dans un désir d’aller contre une espèce d’ordre établi qui serait une espèce d’ordre moral des choses.

RIHL 2010: La 40ème marche ne se loupe pas

Posté par Benjamin, le 11 décembre 2010

Écran Noir vous en a longuement parlé, mardi soir s’est tenu la Leçon de cinéma de Nicolas Saada (voir actualité du 7 décembre) au festival de Poitiers avec, en tant qu’acteur principal, Grégoire Leprince-Ringuet.

Inutile de dire que le TAP Cinéma affichait complet et que le festival et Nicolas Saada avaient parfaitement vendu leur affaire. L’alléchante idée de la reconstitution d’un tournage sur la scène du TAP, mais un tournage interactif où le public aura son rôle, a conquis son monde. Des caméras, un preneur de son, un chef op’, une maquilleuse, un réalisateur, deux acteurs, des figurants. Tout était là !

Alors la question est, Nicolas Saada a-t-il réussi son pari de réaliser 31 plans en 3 heures, sans ennuyer le public, en respectant les conditions réelles d’un tournage et en donnant une véritable leçon de cinéma ? La réponse est ou. Le spectacle fut au rendez-vous et Saada qui semblait comme un enfant, ainsi que toute son équipe très professionnelle, ont été très généreux avec le public. Leurs actions, leurs façons de faire étaient commentées, permettant aux spectateurs de comprendre l’enjeu de filmer la scène de tel ou tel point de vue.

Bien entendu, ce court métrage, intitulé pour l’occasion La 40ème marche, a été tourné de la façon la plus efficace qui soit. Le réalisateur a préféré l’efficacité à une certaine personnalisation de la scène. Difficile de faire autrement dans ce laps de temps et avec un décor aussi immuable que le théâtre de Poitiers.

Ce fut intéressant d’assister en tant que spectateur aux coulisses de ce tournage, d’observer les variations dans le jeu de Grégoire Leprince-Ringuet (très ludique!) et le rôle de chacun sur le plateau. mais surtout nous étions tous les acteurs d’un soir, participant au film, car le public fut bien entendu filmé.

Au final, l’expérience fut des plus vivantes. Certes, Nicolas Saada a dévié de la traditionnelle Leçon de cinéma, car plus qu’une leçon, c’était davantage un échange avec le public. Mais le public poitevin retiendra surement longtemps cette soirée à la fois bon enfant et enrichissante.

RIHL 2010: les jeunes réalisateurs dérèglent le réel

Posté par Benjamin, le 11 décembre 2010

Il y a cette année aux 33e Rencontres Internationales Henri Langlois à Poitiers une véritable maturité qui émerge des films de ces jeunes réalisateurs tout juste sortis de leur classe. La compétition est réellement pleine de promesses, la promesse de voir dans les années à venir des courts ou longs métrages réalisés par des gens qui tiennent un sujet, une idée et possèdent un univers, un style qui leur est propre. Ils sont loin certes d’atteindre la perfection mais ils dépassent de loin l’appellation « films d’école ».

Et bien entendu, ces réalisateurs en devenir font la démonstration de l’envie qui les ronge de s’emparer de leur époque, de la dépeindre avec franchise, d’analyser tantôt certains phénomènes de société ou tout simplement de traduire l’atmosphère actuelle.

Mais il y a un thème qui émerge dans un certain nombre de courts métrages, c’est le dérèglement du réel. Le monde réel qui voit son rythme perturbé, changé. Un monde qui déraille parce qu’il est allé trop loin dans l’absurde et dans l’avilissement de l’être humain. Ces cinéastes décrivent un monde qui oppresse, qui étouffe, qui se resserre lentement sur l’individu pour ne lui laisser plus aucune marge de manœuvre. La moindre erreur, et c’est la mort !

Trois films sont à citer : Conflit du français Pierre Teulières, Stanley Pickle de l’anglaise Vicky Mather et Le dernier jour d’Ivan Bulkin du russe Alexey.

Conflit est marqué par l’influence de Michel Gondry et par un esprit quelque peu lynchien. Le film  est une boucle temporelle qui se referme sur elle-même, nous montrant la vie programmée d’un homme : métro, boulot, dodo. Les habitudes ne changent pas. Un travail à l’usine, un appartement de célibataire et un meurtre horrible dont on parle sans cesse au journal télévisé. Bernard regarde en fait son propre acte de folie à la télé, il contemple son propre dérèglement. Le jeune cinéaste réalise son film sous la forme d’un plan séquence. Il créé une continuité entre les différents espaces que le personnage parcourt (métro, usine, bar, lit, etc). Et tous ces lieux finissent par se confondre, par s’envahir les uns les autres pour finir par créer une perte totale des repères. La société a transformé Bernard en esclave.

Chez Stanley Pickle, les choses sont toutes autres. Pour ne pas grandir, pour ne pas avoir à affronter la mort (de ses parents), ils mécanisent son quotidien. Ainsi, ses parents (morts) sont aujourd’hui transformés en automate et Stanley tourne leur petite clef située dans leur dos pour les « relancer ». Mais ce monde si parfait, si enfantin se rouille.  Il doit quitter son cocon et vivre de façon libre et épanouie tout en acceptant que la mort nous prend tous un jour ou l’autre. Drôle et beaucoup moins désespérant que Conflit, Stanley Pickle est un film sur l’évolution de chacun. Mais il ne faut pas oublier de signaler que ce film réalisé en prises de vues réelles a été tourné en stop motion en trois semaines. Et lorsque l’on observe sa fluidité et la richesse des décors, on ne peut qu’applaudir le travail de la jeune réalisatrice !

Enfin Le dernier jour d’Ivan Bulkin s’appuie sur une idée très amusante et pourtant banale. Une représentation de la mort vient chez Ivan Bulkin et lui annonce qu’aujourd’hui est son dernier jour. Dans ses mains, la mort tient le scénario de cette journée : quand il se tient la tête entre les mains, quelle réplique il sort à tel moment, etc. Une fois de plus, l’être humain est condamné, il n’a aucune échappatoire. Mais Ivan tachera d’être plus malin que la mort sur ce coup là… Il bouleverse le scénario et impose sa règle du jeu.

Il y a dans ces films des atmosphères très marquées, des effets de style très personnels malgré leur thématique commune. Dans cette vie trop compartimentée, qui « explose », il s'agit de rendre (ou non) à l’homme toute sa liberté.

Il y a comme un vent de révolution, un vent de créativité qui soufflait sur la ville poitevine. C'était presque libérateur.

L’instant Court : The black hole réalisé par Diamond Dogs

Posté par kristofy, le 10 décembre 2010

the black holeComme à Ecran Noir on aime vous faire partager nos découvertes, alors après Un sale coup réalisé par Pascal Voisine avec James Thierrée et Sarah Lassez, voici l’instant Court n° 10.

Les profits injustes sont comme la fausse monnaie : plus on en a, plus on risque. Ce proverbe sera illustré avec cette histoire d’un employé de bureau qui découvre un trou noir extraordinaire…

Voila donc le court-métrage The black hole, un "very short film" de Phil Sansom et Olly Williams,  un duo de réalisateurs qui travaillent aussi sous le nom Diamond Dogs pour des publicités et des clips. Ce film a été vu plus de 8 millions de fois sur Youtube depuis deux ans et a remporté le grand prix du Virgin Media Short Film Competition en 2009. Avec une durée de seulement 2 minutes et 22 secondes il parvient à atteindre une efficacité rare : caractériser un personnage et ce sans aucun dialogue, inclure un élément du genre fantastique avec des trucages (presque) invisibles, être original et amusant…

The black hole est tellement une réussite à tout point de vue que vous aurez envie de le revoir plusieurs fois…

Short Film 'The Black Hole' from PHOTOPLAY FILMS on Vimeo.

Crise dans le porno à Los Angeles

Posté par vincy, le 10 décembre 2010

On n'en parle pas assez, en même temps on n'y connait pas grand chose, mais les films pornographiques, classés X, font bien partis du cinéma. À la marge certes, mais ce sont les mêmes outils techniques (on a hâte avec la 3-D, non?) et les mêmes méthodes de travail qui y sont appliqués. Seuls les histoires, très faibles, et les acteurs, les critères sont différents, divergent du cinéma classique.

Avec la concurrence d'Internet et du porno individualisé, le X n'a plus la cote. Un déclin n'arrivant jamais seul - les salles de cinéma X ont été impuissantes face à leur extinction, les ventes de DVD débandent fortement - l'automne a, en plus, été meurtrier.

En effet, les tournages ont été interrompus durant plusieurs semaines dans la Vallée de San Fernando (au nord d'Hollywood), à Los Angeles, capitale mondiale des productions du genre. Vivid Entertainment, l'une des plus importantes sociétés du secteur, a  été la première à reprendre les tournages en cours, après un mois d'arrêt.

Pourquoi cette interruption? Un acteur a été révélé séropositif, ce qui a entraîné une panique dans toute la profession. Vivid a donc attendu d'avoir les examens de tous les partenaires de l'acteur avant de recommencer les plans culs. La quarantaine a été généralisée à toute la profession sur place : quatre sociétés avaient cessé leurs productions mi-octobre, suite à l'alerte de l'Adult Industry Medical Healthcare Foundation, une clinique spécialisée pour les comédiens du X.

Hier, les autorités sanitaires de Los Angeles ont ordonné ma fermeture de cette clinique, car elle ne dispose pas de la licence requise en tant que centre médical. "Après des années d'inaction totale, les fonctionnaires du comté de Los Angeles ont enfin fermé AIM, établissement imposteur de l'industrie du porno", a immédiatement réagi en revanche Michael Weinstein, président de la fondation de lutte contre le sida AIDS Healthcare Foundation (AHF).

De toute façon, les tests ne sont pas suffisants.

En 2004, les autorités californiennes de la santé avaient proposé des mesures pour contrôler l'industrie du porno, parmi lesquelles l'usage obligatoire du préservatif pendant les tournages, après la découverte de plusieurs cas de séropositivité. La nouvelle avait, déjà, déclenché un vent de panique dans le secteur, qui avait interrompu les tournages pendant 60 jours, pour permettre à des dizaines d'acteurs de se faire dépister.

L'histoire se répète et sous prétexte qu'une capote dévalorise l'image pornographique, il semble que personne ne veuille retenir les leçons du passé. L'endurance ici n'est synonyme que de bêtise.

L'acteur incriminé, Derrick Burts (photo), 24 ans, a appelé hier à rendre obligatoire le port du préservatif sur les plateaux. Il n'est jamais trop tard. "Le fait qu'il y ait un manque d'utilisation du préservatif dans le porno, un métier à haut risque, est très dangereux", a dit le jeune homme au Los Angeles Times. "L'une des raisons qui fait que je voulais vraiment prendre la parole, était que je voulais aider d'autres acteurs (pornographiques) à prendre conscience du risque", a ajouté l'acteur.

Celui-ci, qui a une petite amie, joue principalement dans des films hétéros (sous le nom de Cameron Reid) et homos (sous le nom de Derek Chambers).

Le problème est ailleurs (et il est proprement diabolique et immoral) : plusieurs sources au sein de cette industrie avaient révélé que les producteurs de films pornographiques payaient davantage les acteurs qui acceptaient de jouer sans préservatif.

De quoi faire capoter des vies... pour quelques dollars et centilitres de sperme.

Blue Valentine échappe à une censure fatale

Posté par vincy, le 9 décembre 2010

L'organisme chargé de classifier les films aux Etats-Unis, la MPAA a changé d'avis pour le film Blue Valentine, produit par les puissants frères Weinstein. Il passe du redouté NC-17 (autant dire film pour adultes, comme n'importe quel film porno) à un gros R (pour Restricted). Le film de Derek Cianfrance, présenté à Sundance puis à Un certain regard au dernier festival de Cannes, met pourtant en scène deux jeunes stars hollywoodiennes : Michelle Williams et Ryan Gosling. Il n'a rien de choquant. Son réalisme, son style auteurisant et son histoire même justifient l'ensemble des séquences litigieuses. La censure ne dit rien sur l'alcool, ingrédient autrement plus compromettant dans le film.

Le premier avis de la MPAA en octobre relevait une scène au contact sexuel explicite. Damned. L'hypocrisie américaine n'a pas de limites. Il aurait mieux fallu buté l'un des protagonistes avec au préalable une bonne séquence de torture... Il n'y avait pourtant vraiment pas de quoi fouetter une chatte.

Dorénavant la mention expliquant le classement en R est assortie de "contenu sexuel fortement illustré, mauvais langage, coups".

Pour les producteurs, c'est un salut. Le NC-17 empêche de faire de la publicité dans les journaux, ce qui entraîne un désistement de nombreuses salles de cinéma qui auraient voulu le programmer. Surtout, il s'agit d'un sérieux obstacle pour la course aux Oscars. Or, Williams part dans les favorites pour une nomination.

Le film doit sortir aux USA le 31 décembre, date limite pour les qualifications. Le scénario avait gagné le concours du Chrysler Film Project en 2006.

Cinq scénaristes reçoivent un coup de pouce de l’Académie des Oscars

Posté par vincy, le 9 décembre 2010

C'est un nouveau club des cinq. Sur 6 304 scénarios reçus, seulement cette poignée a été sélectionnée. Les lauréats 2010 de la Bourse Nicholl sont Destin Daniel Cretton (primé à Seattle et Sundance pour son court métrage Short term 12, qu'il veut transposer en long métrage), Marvin Krueger (And Handled with a Chain), Andrew Lanham (The Jumper of Maine), Micah Ranum (A Good Hunter) et Cinthea Stahl (Identifying Marks). La cérémonie a eu lieu il y a un mois.

Depuis 25 ans, l'Académie des Arts et des Sciences du cinéma, organisatrice des Oscars, offre chaque année à une poignée d'élus le luxe d'écrire un scénario de cinéma, libérés de tout souci d'argent. La bourse est dotée de 30 000 dollars, avec une seule contrainte : écrire un scénario de long métrage durant l'année qui suit la remise du prix.

La bourse Nicholl provient de l'idée de Don Nicholl, scénariste et producteur de séries télévisées qui souhaitait permettre à des scénaristes prometteurs, quel que soit leur âge, d'exercer leur art sans avoir à jongler entre les petits boulots comme le voudrait la tradition hollywoodienne.

À sa mort à l'âge de 54 ans, sa veuve Gee approcha l'Académie des Arts et des Sciences du cinéma pour lui proposer de financer une bourse annuelle destinée aux scénaristes.

La Bourse Nicholl offre aussi un contact privilégié avec les décideurs et les forces vives d'Hollywood, tous peu ou prou membres de l'Académie. D'où la liste impressionnante de films écrits ou réalisés par d'anciens lauréats, de The Virgin Suicides à Erin Brockovich en passant par le récent Secretariat. On peut aussi échouer et faire carrière : Little Miss Sunshine fut rejeté par le comité dès le premier tour.

Festival national du film d’animation: la science des rêves

Posté par Claire Fayau, le 9 décembre 2010

Pour sa 17e édition, le Festival national du film d'animation devient annuel et déménage en Bretagne, à Bruz, près de Rennes (du  14 au 19 décembre)

Bénéficiant du soutien  de l'association française du cinéma d'animation (Afca) et de l'association L'arrosoir à Emile, ce festival a sélectionné plus d'une centaine de films.

* L' Ouverture du festival avec Michel Ocelot qui présentera sa dernière œuvre, un épisode inédit de Dragons et princesses.

* Une sélection de 62 films en compétitions, sélectionnés parmi plus de 300 films reçus, en présence des réalisateurs (courts métrages professionnels et films d’étudiants)

* Des cartes blanches : Aux réalisateurs Alain Gagnol et Jean-Loup Felicioli ; à Monique Renault, personnalité atypique du cinéma d'animation ; au Kask, célèbre département d'animation des Beaux-Arts de Gand créé par Raoul Servais ; aux Fous d'Anim', et à la société de production créée par Michel Gondry, Partizan.

* Une dizaine de programmes spéciaux  pour revenir sur les films qui ont marqué l'animation depuis 30 ans,  découvrir des techniques - images de synthèse ou films d'encre et de charbon - mais aussi des films d'ateliers, des longs métrages…

* de nombreuses rencontres :  Xilam Animation nous dévoilera les secrets de fabrication de la série télévisée Oggy et les Cafards ; Cédric Mercier  parlera des décors de La science des rêves, long métrage de Michel Gondry, Sébastien Laudenbach nous présentera son film Regarder Oana,  et Juliette Loubières son nouveau court métrage en avant-première Citrouille et vieilles dentelles ... Et bien d'autres rendez-vous  avec les réalisateurs (une trentaine) et les personnalités invitées des cartes blanches. Un entretien intéressant à  noter  sur long- métrage Renaissance. Et enfin, le dessin animé français des fêtes, Une vie de chat.

* En extra: les programmes jeunesse, une Journée professionnelle, des Apéros Animés,et enfin, trois Ciné-Concerts : Fantasmagorie d’Émile Cohl, premier dessin animé de l’histoire du cinéma (1908),  La leçon de Solfège de Segundo de Chomon (1909), et Gertie le dinosaure de  Winsor McCay (1914).

Pour ceux qui sont  à Paris :

Le Festival national du film d’animation est au CARREFOUR DE L'ANIMATION, les 8,9, 10 et 12 décembre 2010 au Forum des Images, Paris.

Au programme :

- Trois séances thématiques (un mélange de films retenus en compétition à Bruz et de coups de cœur du Forum des Images) : «Après l’école » le 9/12 à 17h ; « Voyages » le 10/12 à 21h15 ; « Musique et son » le 12/12 à 17h30.

- Une table ronde : « films d’étudiants et droits d’auteur : l’entre deux droits ». Le 9 décembre à 15h.

Retrouvez toutes les informations sur le site internet du Festival national du film d'animation