Guillaume Depardieu, la fin d’une promesse fragile

Posté par vincy, le 13 octobre 2008

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Guillaume Depardieu est né en 1971. Le fils de Gérard et Elizabeth aura oscillé entre la chance et la poisse du hasard. Une vie où public et privé sont étroitement mêlés, vacillant une première fois en 1995 suite à un accident de moto qui, huit ans plus tard, le conduira à amputer une partie de sa jambe. Elle basculera définitivement ce 13 octobre 2008, suite à une pneumonie foudroyante attrapée sur un tournage.

César du meilleur espoir (Les apprentis) après deux tentatives malchanceuses, le comédien, lauréat du prix Jean Gabin en 1996, avait tout donné pour sortir de l'ombre de son père envahissant. C'est pourtant à ses côtés dans Tous les matins du monde, qu'il se fait un prénom. En interprétant Marin Marais jeune devant la caméra d'Alain Corneau, il fait un temps oublier les faits divers liés à son nom pour s'imposer comme le véritable acteur de talent qu'il sait être. Par la suite, il trouve ses rôles les plus populaires à la télévision avec Josée Dayan (Le comte de Monte Christo, Milady, Les rois maudits...) mais ce sont Pierre Salvadori, Léos Carax ou encore Jacques Rivette qui l'ont entraîné dans un cinéma d'auteur exigeant où sa nature attachante, tantôt dramatique (Ne touchez pas la hache), tantôt légère (Comme elle respire) trouve toute son ampleur.

Récemment, il était à l'affiche de Versailles, présenté au dernier festival de Cannes, où il apparut amaigri, flottant dans des vêtements trop larges, mi-agressif, mi-désespéré, comme partageant la souffrance de son personnage de SDF torturé et fragile se faisant violence pour aider un jeune enfant. On l'a vu également dans Stella, projeté à Venise, où il incarne une fois encore un homme paumé n'attendant plus grand chose de la vie. Animal blessé, homme fragile, il s'était confié dans un livre d'entretien avec Marc-Olivier Fogiel. Tout donner. Mais quoi recevoir ? Le destin le pulvérise.

Quand les pompes funèbres se refont une beauté

Posté par Morgane, le 13 octobre 2008

le-104-001.jpgL’événement incontournable du week-end parisien était bien évidemment l’ouverture du Cent Quatre (104), nouvel établissement artistique de la ville de Paris, qui a pris place en plein cœur des HLM de l'avenue de Flandres, à l’endroit où se tenaient auparavant les pompes funèbres. "Un trait d'union entre les XIXe (Porte rue de Curial) et le XVIIIe (Porte rue d'Aubervilliers) arrondissements", soulignait Bertrand Delanoë lors de l'inauguration samedi matin. Amira Casar, Pierre Arditi, Benoît Jacquot étaient parmi les "people" présents à cette ouverture, qui fut champagnisée comme il se doit. Baigné de lumière, mais avec une sonorisation épouvantable, le lieu se dévoilait prudemment à des mondains venus de toutes les disciplines.

Entre squat berlinois organisé et résidence d'artistes improvisée, le site gigantesque (près de 40 000 m²) a accueilli dès samedi après midi un nombre très important de Parisiens curieux. Ateliers pour enfants (jardinage, construction, dessin…), expositions, concerts et autres se sont déployés sosu les yeux des badauds, même si pour y accéder la file d’attente était souvent très longue.

Christian Prigent a lu "104 slogans pour le Cent Quatre", du slam a envahi la salle 400, Berger&Berger ont présenté leur installation lumineuse Dr Jekyll & Mr Mouse, Andrea Cera a fait participer le public à son installation interactive et d’autres encore ont arpenté et occupé les nombreux espaces du Cent Quatre en cette journée d’ouverture.

Un cinéaste à la marge pour une sélection radicale

Le cinéma est évidemment présent avec Sébastien Lifshitz (Les corps ouverts, Presque rien, Wild Side) qui réalise une sélection de films d'écoles. "Cette sélection, je la voudrais subjective, différente des habituelles compilations que l’on retrouve souvent dans les festivals. Diriger mon regard vers des esthétiques radicales, neuves (s’il en est) pour mieux faire ressortir la part de recherche et de liberté. Par « esthétique radicale », j’entends une proposition plastique originale et des sujets personnels, filmés sur tous supports, de la dv au portable d’un téléphone comme du film argentique. " Il espère que "ces projections auront pour but de mettre en relation les réalisateurs avec le milieu de la production et de l’industrie en général, afin de faciliter leur parcours dans leur projet de futur premier long métrage."

Ouvert à tous les arts, le Cent Quatre se veut un lieu d’exposition mais aussi un lieu de création. Toutefois, certaines questions font tout de même débat. Le Cent Quatre souhaite s’ouvrir à tous, y compris aux jeunes des quartiers défavorisés environnant (17% de chômage !). Réussira-t-il à atteindre cet objectif ou deviendra-t-il un établissement réservé à une certaine élite ? Par exemple, la librairie et le restaurant ne seront ouverts qu'au printemps : mais si la bouquinerie promet un effort d'action culturelle envers les jeunes, le restaurant offrira-t-il un menu à moins de 30 euros ? Souvent le parisianisme a du mal à se conjuguer avec les couches populaires. Et le 104 risque de virer au "hype" : un défilé de mode y a déjà eu lieu. On a connu plus convenant et moins indécent.

De plus, le Cent Quatre coûte cher  (100 millions d'euros d'investissement, plus de 8 millions d'euros en fonctionnement) et certains s’interrogent sur ce budget qui pourrait manquer à d'autres. En bref, ses portes sont ouvertes mais le débat aussi…

photo : morgane postaire

Cinespana 08 : le jury couronne Todos estamos invitados de Manuel Gutierrez Aragon

Posté par MpM, le 13 octobre 2008

Todos estamos invitadosDans une compétition mêlant réalisateurs confirmés (Mario Camus, Ventura Pons, Pere Portabella…) et nouveaux venus (Jaime Marquès, Xavi Puebla), mais aussi thématiques sociales universelles (mondialisation, paupérisation, nationalisme…) et sujets plus intimes (la solitude, l’inconstance, la survie…), c’est assez logiquement le long métrage le plus brûlant, abordant la lutte armée de l’ETA dans le pays basque espagnol, qui a remporté la Violette d’or, récompense suprême de Cinespana. Todos estamos invitados du cinéaste internationalement reconnu Manuel Gutierrez Aragon (Demonios en el jardin, Maravillas…) réalise même le doublé en recevant par ailleurs le prix d’interprétation masculine pour le jeune Oscar Jaenada. Le reste du palmarès distingue Oviedo Express de Gonzalo Suarez (meilleur musique et meilleure photo), Siete mesas de billar frances de Gracia Querejeta (prix d’interprétation féminine pour Blanca Portillo) et le dernier opus de Ventura Pons, Barcelona (un mapa), prix du scénario assez mérité, tandis que le prix du public va à Bajo las estrellas de Felix Vizcarret, présenté en section Panorama.

Un cran au-dessus de la concurrence (seul Mario Camus et son El prado de las estrellas avaient réellement de quoi rivaliser avec le savoir-faire de Gutierrez), Todos estamos invitatos suit le destin de Xabier, professeur d’université qui a le tort de se prononcer publiquement contre l’organisation nationaliste Euskadi ta Askatasuna. D’abord menacé par celui qu’il considérait comme un ami, il fait alors l’expérience de la peur diffuse et continue qui s’insinue dans chaque morceau de l’être, jusqu’à ne plus lui laisser le moindre repos. Un peu à l'image de Gomorra de Matteo Garrone, Todos estamos invitados évite au maximum les ressorts du thriller traditionnel (suspense, action, grand spectacle) et se concentre sur les méthodes utilisées par l’ETA pour neutraliser par la terreur tous ceux qui voudraient s’opposer à elle mais également sur l’impuissance des forces de l’ordre à faire face à une telle situation. Sur le fond, on respecte sa démarche et son point de vue, quitte à passer sur l’absence de contrepoint ou même d’explication politique. Par contre, sur la forme, impossible de nier que cette succession de scènes extrêmement courtes et parfois peu signifiantes peine à passionner le spectateur, qui a par moments l’impression d’assister à une démonstration parcellaire. Pour Cinespana, toutefois, c'est l'occasion de distinguer une oeuvre engagée et courageuse parfaitement en prise avec la réalité contemporaine et de saluer la capacité de certains cinéastes espagnols à s'interroger frontalement sur ce qui ne va pas dans leur pays.