Un prophète, récompensé par les Britanniques

Posté par vincy, le 22 février 2010

Un prophète, le film de Jacques Audiard, a emporté le prix du Meilleur film en langue étrangère des BAFTA (Oscars britanniques), laissant K.O. Le Ruban blanc, Morse, Etreintes brisées et Coco avant Chanel.

La cérémonie a couronné Démineurs, qui semblent bien parti pour les Oscars.  Meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario original, meilleure photo, meilleur montage, meilleur son. Une razzia.

Les BAFTA ont du créer des prix spécifiquement britanniques tant la cérémonie a des tonalités hollywoodiennes. Le prix du meilleur espoir  (jeune réalisateur) a été remis à Duncan Jones (Moon). Le prix du meilleur film anglais est revenu à Fish Tank, prix du jury cannois.

Les acteurs Colin Firth et Carey  Mulligan ont été honorés pour leur interprétation respective dans A Single Man et Une éducation, tous deux dans les salles françaises cette semaine. Pour les seconds-rôles, Mo'Nique (Precious) et Christopher Waltz (Inglourious) continuent de monopoliser la catégorie.

Et sinon? In The Air (meilleure adaptation), Avatar (meilleur décor, meilleurs effets visuels), The Young Victoria (melleur costume, meilleur maquillage), Là-haut (meilleur film d'animation, meilleure musique) se partagent les restes.

Notons que c'est Kristen Stewart (Twilight) qui a reçu le prix Orange Rising Star. Vanessa redgrave a été honoré pour l'ensemble de sa carrière.

Festival de Gérardmer 2010 : les neiges silencieuses (suite)

Posté par geoffroy, le 1 février 2010

Dimanche 31/01/2010

Métropia de Tarik Saleh (Hors compétition)

Film d’animation suédois, Métropia développe une histoire d’anticipation assez classique entre asservissement du genre humain, complot et anti-héros ordinaire prêt à sauver l’humanité. Ce long-métrage vaut le détour pour son esthétique incroyable (photomontage réussi mélangeant la 2D pour les personnages macrocéphales et la 3D dans des décors exclusivement urbains et souterrains) et son idée, brillante, de relier toutes les capitales d’Europe via un réseau de métros. Beau comme mélancolique, Métropia nous plonge dans un monde individualiste sans perspective mais traversé par la lumière d’un amour salvateur.

Notes : Denis 3/5 ; Geoffroy 4/5

Moon de Ducan Jones (Compétition officielle)

SF d’ambiance et de scénario, ce huis-clos lunaire anglais ne tombe jamais dans la facilité ni le twist final racoleur. Mieux, il arrive à nous capter littéralement en façonnant au compte goutte l’incroyable vérité vécue par Sam Bell, employé gérant l’extraction d’un gaz à même de résoudre la crise énergétique de la Terre. Suffisamment maîtrisé dans sa narration, son exploitation scénaristique et son interprétation (Sam Rockwell tout simplement parfait), Moon est une excellente surprise qui le place bien au-dessus des sempiternelles séries B proposées chaque année.

Notes : Denis 4/5 ; Geoffroy 4/5 ; Petsss 5/5

Splice de Vincenzo Natali (hors compétition)

La mise en abime d’un couple d’apprentis sorciers talentueux franchissant l’ordre moral voire déontologique propre à toute création organique, fait immédiatement penser aux films de Cronenberg. Sauf que Natali se dérobe des questions éthiques à proprement parler pour aller sonder les ravages d’une intimité de couple se retrouvant à gérer tant bien que mal l’existence de « Nerd »,  mutant androgyne créé à partir d’ADN d’animaux et d’un humain. Le film explose les conventions, devient viscéral, organique et arrive à nous toucher au plus profond de notre être. Le sexe devient le moteur de toute vie, sa raison fondamentale entre séduction et procréation. Splice est une fable psychologique autour d’un couple dépassé par leur propre création (elle-même remarquablement bien intégrée grâce à des effets spéciaux réussis), être prodigieux et destructeur. Sans aucun doute Splice est la vraie claque ciné du festival.

Notes : Denis 5/5 ; Geoffroy 4/5

Gérardmer 2010 : Dans l’espace personne ne vous entend crier

Posté par geoffroy, le 27 janvier 2010

dp_gerardmer_2010-1.jpgLe 17e festival international du film fantastique de Gérardmer retiendra son souffle, du  27 au 31 janvier, en nous proposant de redécouvrir les vertus du silence. Procédé ô combien cinématographique capable de composer le cadre par l’absence, le silence impose une expression originelle chargée de sens. Acte créatif par excellence, il précède le verbe pour lui donner sa raison d’être. Dans un monde abreuvé de bruits en tout genre, un tel choix n’est pas anodin. Une rétrospective lui sera consacrée, ainsi qu’une nuit Zombies, créatures aphones contrastant avec les cris et autres hurlements d’humains en proie à la panique.
Le festival, présidé par le cultissime John McTiernan, lui rendra hommage sous la forme d’une rétrospective des plus alléchante (Predator, Le treizième guerrier, Rollerball, Last Action Hero, Nomads, Die hard : Une journée en enfer). Comme l’année dernière, le président sera secondé par un jury essentiellement français mais non paritaire. Six hommes (président compris) pour 3 femmes.

Ils devront trancher dans le vif d’une compétition solide et éclectique. Drame fantastique (Hierro), film de zombies féroces (la Horde), Giallo (Amer), huis clos spatial (Moon), thriller surnaturel (The Door), épouvante-horreur (Le témoin du mal, Possessed, 5150 rue Orme).
Pour ce qui est des films présentés hors compétition, signalons la présence des derniers Rob Zombie (Halloween 2), George A. Romero (Survival of the Dead) et Vincenzo Natali (Splice). Dans ton sommeil, film français de Caroline et Eric Potet avec Anne Parillaud, Thierry Frémont et Jean-Hugues Anglade aura le privilège d’ouvrir la 17e édition du festival qu’Ecran Noir vous fera suivre sur son Blog.

BAFTA : Les britanniques préfèrent Coco au Prophète

Posté par vincy, le 22 janvier 2010

Les BAFTA, équivalent des César en Grande-Bretagne, ont cette particularité qu'ils sont souvent plus Américains que les Oscars. Dans la catégorie meilleur film, un seul film anglais est cité parmi les cinq.  Une catégorie meilleur film britannique a même été créée pour valoriser le cinéma local. On y retrouve An Education, Fish Tank (adoré à Cannes), In the Loop, Moon (coup de coeur de notre directeur artistique) et Nowhere Boy (sélectionné au prochain festival de Sundance).

Le cinéma britannique, sinon, est très peu présent dans les catégories principales - réalisateur, scénario, acteur, seconds rôles... Une honte quand on sait le talent de leurs comédiens. A force de singer Hollywood...

Notons que dans la catégorie meilleur film en langue étrangère, Morse, Le Ruban blanc, Etreintes brisées, Un prophète et Coco avant Chanel se disputeront le prix. Deux films français qui ont chacun des mérites. Un prophète est le film français le plus primé de l'année depuis son Grand prix du jury au Festival de Cannes. Il est retenu parmi les 9 films pouvant coucourrir à l'Oscar du meilleur film étranger. Coco avant Chanel est le film français le plus populaire à l'export avec bientôt 6 millions d'entrées en dehors de la France.

Il est intéressant de noter que le film d'Anne Fontaine a aussi reçu d'autres nominations : meilleur costume, meilleur maquillage, et surtout meilleure actrice pour Audrey Tautou. Un prophète  n'est nommé qu'une seule autre fois avec Tahir Rahim, pour le prix Orange du meilleur espoir. Il a en face de lui une certaine Kristen Stewart...

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Toutes les nominations

Dinard 2009 : des cinéastes en tous genres

Posté par kristofy, le 27 octobre 2009

Le jury du 20ème Festival du film Britannique de Dinard a choisi de récompenser le film White Lightnin’  réalisé par Dominic Murphy où la violence de Jesco White en perdition se confond avec celle d’un coin du sud des USA, et le film Jean Charles de Henrique Goldman où des immigrants brésiliens se retrouvent à Londres, mais pendant la psychose des attentats l’un d’eux va être tué par des policiers… Ce palmarès est une nouvelle illustration que le cinéma britannique semble s’interroger sur le monde et les autres bien plus que le cinéma français. Si les films en compétition étaient très différents les uns des autres ils ont tous su faire partager aux spectateurs des quotidiens des personnes plutôt que de personnages.

Le cinéaste Shane Meadows vient maintenant chaque année à Dinard, son festival préféré, où presque chacun de ses films ont été découvert ici comme Dead Man’s Shoes (grand prix Hitchcock d’or en 2004), This is England, Somers Town en clôture en 2008. Son nouveau film Le Donk & Scor-Zay-Zee est une expérience de vrai-faux documentaire tourné en seulement cinq jours sans scénario. Shane Meadows avec une caméra numérique (plus un autre caméraman et un preneur de son) a choisi comme sujet de film Le Donk (un roadie qui travaille en coulisse des concerts des Artic Monkeys) qui voudrait devenir le manager de Scorz, un copain qui fait du rap en amateur. On découvre donc un looser magnifique qui regrette que son ex-femme enceinte de lui soit heureuse avec un autre et un rappeur qui espère chanter devant des milliers de personnes. Shane Meadows réussit avec habileté à provoquer des improvisations géniales (surtout de Paddy Considine) tout en nous montrant des scènes off, en plus de l’histoire des deux personnages il y a aussi celle du film dans le film (Scorz-Zay-Zee a depuis enregistré son premier album). Le Donk & Scorz-Zay-Zee est autant un exercice de style qu’une fiction en forme de documentaire, ce mockumentaire très drôle est aussi une sorte de manifeste encourageant les apprentis-cinéastes à réaliser eux aussi un film en cinq jours…   

Les amateurs de films de genre fantastique vont attendre Moon, un premier film très maîtrisé de Duncan Jones, déjà un peu connu comme réalisateur de pub et de clip et plus connu comme étant le fils de David Bowie. Dans un futur pas si lointain les ressources d’énergie sur Terre sont épuisées alors on exploite de l’hélium 3 produit sur la Lune. Là-haut, la production est surveillée par un seul employé (Sam Rockwell) qui y travaille avec un contrat de trois ans avant de revenir. Un accident va bousculer les certitudes de cet employé qui va se rendre compte qu’il n’est pas aussi seul qu’il le croyait… Moon est un film de science-fiction du genre introspectif, avec des mouvements de caméra calmes et la musique planante de Clint Mansell, un climat propice pour partager les doutes du personnage. Après avoir été un des évènements du festival de Sundance 2009 (40 après les premiers pas de l’homme sur la Lune), Moon a aussi récolté une moisson de récompenses au festival fantastique de Stiges.

Un des réalisateurs précurseur de la vague ‘Horror made in UK’ (The Descent, Eden Lake, Wilderness, etc…) était de retour à Dinard : Christopher Smith qui nous avait épouvanté avec Creep puis avec le survival déjanté Severance nous a présenté son mystérieux Triangle. Cette fois c’est un pur film d’angoisse qui joue avec les nerfs des spectateurs. Triangle est la fois très malin et très maîtrisé, une belle surprise.

 Une séance spéciale a fait découvrir sur grand écran Lesbian Vampire Killers, une chance car le film qui aurait dû sortir en salles cet été nous arrivera en fait directement en dvd courant février 2010. Deux potes en virée arrivent dans un village maudit où à leurs 18ème anniversaire les jeunes filles deviennent des vampires lesbiennes, et justement quatre bimbos étudiantes sont venues elles aussi… Même si on est loin en dessous de Shaun of the dead, cette comédie parodique est tout de même assez jouissive (les premières quinze minutes où on découvre les personnages sont délirantes) avec son lot de gags graveleux, difficile de lutter contre des suceuses démoniaques.

Une poignée de films ont été quelque peu décevant, il faut bien le dire aussi, mais la grande majorité ont eu de nombreux échos très favorables. Pour les déceptions citons Shifty où le quotidien d’un jeune dealer de crack et ses mésaventures avec ses proches et ses clients ; Boogie Woogie film choral (avec Gillian Anderson, Heather Graham, Alan Cumming, une scène avec Charlotte Rampling…) qui critique le monde des amateurs d’art contemporain et ses clichés éculés ; et le film de clôture From time to time présenté par son réalisateur Julian Fellowes (oscarisé pour son scénario de Gosford Park) où un adolescent de 13 ans retourne au manoir familial au sortir de la guerre, sa grand-mère (Maggie Smith impériale) tente de sauver pour lui la demeure familiale et l’espoir que son père est encore vivant, mais des fantômes vont leur permettre de découvrir les secrets de leurs ancêtres…

Une jolie surprise est venue du réalisateur irlandais Lance Daly qui avec Kisses filme la vie nocturne d’une ville avec le regard de deux enfants qui font une fugue. Une fillette et son petit voisin subissent les disputes de leur famille, lui met un coup à son père pour défendre sa mère et une vitre est cassée à cause d’elle, alors ils s’enfuient ensemble. Le film commence en noir et blanc à l’image de leur quotidien gris puis doucement les couleurs arrivent au fur et à mesure qu’ils découvrent la grande ville. Ils s’amusent d’abord à dépenser de l’argent comme si c’était noël mais bientôt ils se rendent comptent qu’il va leur falloir trouver à manger et où dormir… Kisses réunit tout les ingrédients (et même les clichés) d’un film social comme seuls les britanniques savent en faire avec une situation désespérante d’où survient quand même l’espoir, mais son originalité un peu magique ne peut que remporter l’adhésion. On y entend cette jolie phrase : ‘when you kiss, you give or you take’.

L’autre belle surprise est peut-être le film le plus anglais du festival de Dinard bien qui soit réalisé par la danoise Lone Scherfig : An Education est le genre de film qui fait figure de classique instantané sur lequel on s’imagine parier pour arriver jusqu’aux Oscars (déjà un prix du public à Sundance). Il nous raconte le parcours d’une jeune fille BCBG de bientôt 17 ans qui va s’émanciper du conservatisme ambiant du Londres des années 60 encore marqué par l’après-guerre : un homme qui a dépassé la trentaine va lui faire tourner la tête et lui faire découvrir la vie comme elle la rêvait secrètement. La jeune Carey Milligan était conditionnée pour être sérieuse à l’école pour viser une prestigieuse université, mais elle va être séduite par l’aventurier Peter Sarsgaard qui lui fait découvrir le luxe et l’insouciance. Elle qui idéalise les français de Saint-Germain-des-Prés (Juliette Gréco et l’existentialisme de Sartre…) va découvrir d’un coup l’amour irraisonné (il a le double de son âge) et les conduites irraisonnables (ne pas compter l’argent, aller à l’encontre des bonnes moeurs…). Elle va transgresser beaucoup de conventions par rapport à sa famille (le père Alfred Molina voit d’un mauvais œil les étrangers sauf si ils permettent de s’élever socialement) et à son école (la directrice Emma Thompson ne veut pas entendre parler de relation intime avec un garçon pas plus que de se détourner des livres), mais l’époque du milieu des années 60 est-elle déjà prête pour être bousculée ? Le scénario très habile de Nick Hornby (inspiré d’une histoire vraie) parvient à nous faire partager les questionnements (féministes) et les envies (de belles vies) de son héroïne, ce qui fait que An Education trouve aussi un écho avec notre époque et notre adolescence.