Mon film de l’année : Aquarius, œuvre libertaire et anti-libérale

Posté par vincy, le 26 décembre 2016

Parmi la quinzaine de films marquants cette année, c'est Aquarius, la fresque intime et politique de Kleber Mendonça Filho, qui me vient immédiatement à l'esprit. Sans doute parce qu'il allie parfaitement deux états d'esprit qui ne son pas dans l'air du temps. Un personnage principal, Clara, magnifié par une Sonia Braga impériale qu'on avait perdu depuis plusieurs années, revendiquant sa liberté de penser, de vivre, affirmant à la fois sa place conquise en tant que femme, assumant pleinement son indépendance, se désolant du conservatisme ambiant, et constatant que ses victoires du passé (sur le racisme, le sexisme, les droits fondamentaux) sont plus vulnérables qu'elle ne le croyait. Et puis il y a sa lutte, sa résistance même, contre un ordre établi, corrompu et cupide, déshumanisé et cynique. La destruction de son immeuble n'est pas qu'un symbole dans ce conflit. C'est un avertissement.

Ironiquement, l'histoire du film a croisé l'histoire du Brésil cette année avec un "coup d'état" institutionnel et une succession de démissions et de poursuites judiciaires dans le système politique, tous bords confondus. La crise évoquée dans Aquarius n'est qu'une infime représentation des symptômes qui gangrènent le développement du pays. D'ailleurs le pouvoir en place a fait pression pour qu'Aquarius ne représente pas le Brésil aux Oscars. Ces ultra-libéraux n'ont pas supporté la contestation des artistes et l'opposition des équipes du film (jusque sur les marches de Cannes) à leur hold-up sur la présidence et le gouvernement.

Mais ce qui épate avec cette épopée d'une veuve pleine de vigueur contre des promoteurs véreux est ailleurs: dans des séquences hors-limites, dans ce récit ample et multi-dimensionnel, dans cette incarnation chaleureuse d'une famille éclatée. Tel un feuilleton, d'une folle intelligence, on suit le temps qui passe, les rebondissements de cette sale affaire, entre le calme et les tempêtes, le sexe cru et le carpe diem. Mais si les répliques sont franches, si les nus sont frontaux, tout est contourné avec une mise en scène qui maîtrise parfaitement ses limites, n'allant jamais trop loin dans la critique, la satire, le mélo, le drame ou la dénonciation manichéenne. Car au bout de cette bataille, il y a la volonté de croire qu'on peut changer les choses, qu'on peut refuser le fatalisme. Le film est aussi riche dans sa complexité que son personnage est radieux dans l'adversité.

Evidemment, ce ne sera pas forcément le cas, et c'est là toute la beauté de l'immoralité. Après tout Aquarius fait l'éloge du désir, du souvenir, de la conscience, de la transmission. Mais c'est aussi un manifeste qui rappelle les points faibles de cette liberté tant aspirée dans un monde profondément chaotique où la loi du plus fort est aussi celle du plus riche, où l'ignorant, l'inconscient et l'aveugle sont soumis aux règles dictées par les puissants. Et malgré le propos sombre, l'œuvre demeure lumineuse de bout en bout. Pourtant, cet immeuble Aquarius est une utopie qu'on détruit. Mais tant qu'il y aura des Clara pour se tenir debout, danser et baiser comme elle en a envie, alors tout n'est sans doute pas perdu.

Mes autres coups de cœur : Mademoiselle et Carol pour leur esthétisme hypnotisant et le soufre immoral de leurs liaisons dangereuses, Ma vie de Courgette et Quand on a 17 ans car dans les deux cas Céline Sciamma prouve qu'elle traduit les émotions et sentiments de la jeunesse avec une justesse impressionnante, Diamant noir parce qu'il s'agit assurément du meilleur film noir de l'année, genre snobé par le cinéma francophone, Mekong Stories et L'ornithologue pour leurs audaces narratives où spiritualité, sexualité et nature s'entrelacent merveilleusement et Manchester by the Sea car il s'agit de loin du plus beau drame familial de l'année, aussi sobre et pudique que ténu et tragique.

Audrey Tautou : du remake US des Valseuses à son troisième Salvadori

Posté par vincy, le 18 octobre 2016

On n'arrête plus Audrey Tautou. L'actrice, qui se paye le luxe de ne pas avoir d'attaché de presse ni d'agent, est à l'affiche d'Eternité et de L'Odyssée. En janvier, elle sera au générique de Ouvert la nuit, le nouveau film d'Edouard Baer. Mais avant cela, en novembre, l'actrice tournera son troisième film avec Pierre Salvadori, Remise de peine. Produit par Les Films Pelléas, le long métrage mettra en vedette Adèle Haenel en jeune inspecteur de police, veuve d'un flic parfait. A l'occasion d'une enquête banale, elle découvre que son feu mari était un ripou et un menteur. Outre Tautou et Haenel, Salvadori a choisi un sacré trio de mâles: Vincent Elbaz, Damien Bonnard (Rester vertical) et Pio Marmaï.

Plus surprenant, Audrey Tautou sera de la troupe du nouveau film que John Turturro vient de terminer. Going Places a ceci de particulier qu'il s'agit d'une sorte de remake des Valseuses. Turturro a écrit une histoire similaire à partir des du scénario de Bertrand Blier mais aussi de The Big Lebowski des frères Coen. Dans cette version, Turtutto aurait eu l'autorisation des Coen pour incarner un certain Jesus Quintana, fan de bowling avec un fort accent puerto-ricain (coucou The Duke), soit le type qu'il incarnait dans The Big Lebowski. Outre Tautou qui reprendrait le rôle de Miou-Miou, on retrouve Turturro, Susan Sarandon, en ex-taularde tout juste sortie de prison, Sonia Braga (Aquarius), Bonny Cannavale (Ant-Man, Vinyl) et Gloria Reuben (Mr Robot).

Hector Babenco (1946-2016) en liberté dans les champs du seigneur

Posté par vincy, le 14 juillet 2016


Hector Babenco est mort à 70 ans dans la soirée du mercredi 13 juillet, à Sao Paulo (Brésil), annonce confirmée par Denise Winther, associée du cinéaste dans HB Films.

Né à Mar del Plata en Argentine le 7 février 1946, le réalisateur, scénariste et producteur brésilien a été l'une des figures de proue du cinéma latino-américain des années 1970 et 1980.

Il a commencé sa carrière en réalisant O Fabuloso Fittipaldi en 1973, documentaire sur le pilote automobile brésilien Emerson Fittipaldi. Deux ans plus tard, il réalise son premier long métrage de fiction intitulé O Rei da Noite. Son deuxième long métrage, Lucio Flavio en 1977 remporte le prix du meilleur film au Festival de Sao Paulo. Mais c'est en 1981 qu'il se fait remarquer avec un film réaliste sur un enfant abandonné et l'environnement carcéral brutal, Pixote, la loi du plus faible. Le film reçoit un Léopard d'argent à Locarno et le prix du meilleur film en langue étrangère des critiques de Los Angeles et ceux de New York. Avec ce film, le cinéaste rompt avec le cinéma Novo et inscrit le cinéma brésilien dans un registre presque documentaire, dont Walter Salles et Kleber Mendonça Filho sont les actuels héritiers. Le film est considéré comme une référence aujourd'hui.

Suite à ce succès international, il réalise Le Baiser de la femme araignée (Kiss of the Spider Woman). En compétition au Festival de Cannes, Babenco sera aussi le premier cinéaste latino-américain nommé à l'Oscar du meilleur réalisateur. Adaptation du roman éponyme de Manuel Puig, le huis-clos dans une cellule en pleine période de la dictature en Argentine se focalise sur Molina, un étalagiste homosexuel arrêté pour détournement de mineurs, évoque chaque soir de vieux films romantiques à son compagnon d'infortune, Valentin, un prisonnier politique. A la manière d'un Borges en littérature, Babenco évade ses "prisonniers" grâce à un univers fantasmagorique. Le film vaut à William Hurt l'Oscar du meilleur acteur et le Prix d'interprétation masculine au Festival de Cannes mais aussi à Sonia Braga (récemment à Cannes pour Aquarius) une reconnaissance internationale et Raul Julia. Ce drame à la fois intime et allégorique est sans aucun doute son chef d'œuvre tant il synthétise toutes ses obsessions: la souffrance des minorités, l'étouffement des déviants et rebelles, l'humanité qui transcende l'animosité.

Il enchaîne avec un film hollywoodien, Ironweed, histoire d'un couple de SDF - lui alcoolique, elle en phase terminale, qui vaudra à Jack Nicholson et Meryl Streep, une nomination aux Oscars chacun. Puis tourne En liberté dans les champs du seigneur, qui met en scène le conflit entre les Indiens d'Amazonie et "l'homme blanc", toujours avec un casting américain. Il revient en Amérique du sud avec Cœur allumé, flirtant toujours entre aspiration artistique, folie et huis-clos. Babenco aimait opposer la liberté individuelle, celle qui est dans nos têtes, à des systèmes concentrationnaires ou tyranniques. C'est ainsi qu'en 2003, il revient en compétition à Cannes avec Carandiru, prison gigantesque brésilienne où un médecin décide de mener un programme de prévention contre le sida. Le propos est humaniste mais le lieu n'est pas anodin puisque cette prison a réellement vécu l'un des pires massacres en centre pénitencier (111 morts). Le film emporte la plupart des grands prix du continent sud-américain dans différents festivals.

Par la suite, il ne réalise que deux films, El pasado en 2007, avec Gael Garcia Bernal, inédit en France malgré une sélection à Toronto, et My Hindu Friend, l'an dernier, avec Willem Dafoe.

Hector Babenco fut aussi membre du jury du Festival de Cannes en 1989 et de la Mostra de Venise en 1998.
Filmographie

[L'instant Glam'] Cannes 2016 – Jours 6 et 7: du glam aux larmes

Posté par cynthia, le 17 mai 2016

Oyé oyé cinéphiles... et oui deux jours en un, car les journalistes aussi tombent malade. Nous ne sommes pas des stars nous... On ne peut pas se pavaner sur la Croisette en petite tenue et résister à une s****** d'angine! La maladie touche les journalistes tandis que la loi de la gravité frappe nos stars.

Première chute cette année pour (non, ce n'est pas Jennifer Lawrence) le mannequin tchèque Petra Nemcova qui s'est mangé le sol avec classe, puisque cette dernière s'est relevée en se recoiffant et en faisant comme si de rien était. Tiens, je vais suivre son délire et la prochaine fois que je rends mon déjeuner je m’essuie la bouche, me recoiffe et continue mon chemin comme si de rien était *chouette idée de glam*.

Sinon côté célébrité qui sait marcher, autant vous dire que l'actrice brésilienne Sonia Braga reflétait parfaitement l'ambiance de ces deux jours avec sa robe terne marron-bordeaux trop triste! Ce ne sera plus L'instant Glam mais L'instant larme... On ne comprend pas : Sonia est si belle, si sexy. En même temps, nos regards étaient surtout posés sur le reste du casting du film Aquarius, qui a brandi des pancartes (c'est toujours plus digne que les bras et doigts d'honneur de l'équipe de Captain Fantastic à Un certain regard) dénonçant le "coup d'Etat" par voie judiciaire et politique au Brésil.

Bien qu'il ait eu Usher et Robert De Niro sur la croisette (le baromètre de la classe était à son apogée), on ne peut pas dire que les stars nous éblouissent en ce milieu de 69e festival de Cannes. Depuis Ryan SEXling notre bassin a arrêté de faire des ronds! Nos yeux par contre tournent en rond!

Rappelons tout de même que Robert De Niro a reçu un hommage pour l'ensemble de sa carrière (sauf pour ses collaborations laborieuses avec David O'Russell et son duo débile et pas drôle avec Zach Efron)!

Frédéric Bel, dont le métier est d'amuser Facebook, est arrivée toute transparente dans une robe coquelicot... heureusement qu'il y avait les coquelicots en fleurs, sinon on était partis pour le festival du genre où on défleure les filles. Serais-ce parce que c'est la 69e édition que les stars se lâchent de la sorte? Le chiffre 69 doit pas mal titiller nos stars du red carpet! En effet, même Lady Victoria Harvey était sans soutif! (N.B: si je tente de faire ça, je crois que mes seins raclent le sol telle une truelle sur un chantier!)

Niveau nudité, Michelle Yeoh a choisi également la transparence dans une sublime robe noire en dentelle tandis que Marthe Villalonga est venue en pyjama, juste au cas où le film serait soporifique. Donc... pour résumer à Cannes, soit on en a envie de tirer son coup, soit on en a envie de se taper un roupillon... En parlant de tirer son coup Kim KardaCHIANTE est arrivée à Cannes vêtue de soie... Mais comme on s'en fout comme du premier verre de Gérard Depardieu, on ne va pas s'éterniser sur le sujet!

George Miller, quant à lui, reste classe tout en portant les mêmes lunettes depuis le début du festival. Ce n'est pas parce qu'on est président du jury qu'on doit faire des caprices de stars. Jean-Paul Gaultier portait une étrange cravate avec une lame de rasoir au bout. Vu les tonnes de fashion faux pas présent(e)s sur la Croisette, on comprend que le créateur de mode ait envie de mettre fin à ses jours... On n'a pas compris non plus Valérie Damidot sur la croisette en basket... Peut-être qu'elle voulait refaire la déco du Palais, qui sait? En tout cas si elle a besoin de maçon elle peut toujours faire appel à Agnès B qui a déboulé en combinaison de chantier. On se serait cru dans le clip Work from Home des Fifth Harmony ou plus anciennement celui des Village People.

Oh Cannes mon Cannes rend nous nos stars et notre glam...

Cannes 2016: Nos retrouvailles avec Sonia Braga

Posté par vincy, le 17 mai 2016

Pour ceux qui n'étaient pas nés, Sonia Braga, 65 ans, a été révélée au public français dans un soap brésilien, Dancin' Days, diffusé aux débuts de Canal +, au milieu des années 80. Lorsque l'actrice a tourné ce feuilleton, elle avait déjà dix bonnes années de carrière cathodique. Son nom s'était déjà imposée parmi les vedettes latino-américaines après la telenovela Gabriela (1975). Le cinéma s'était alors très vite intéressé à cette jeune femme, longiligne, aux allures de divas, et très talentueuse. Ainsi, en 1976, elle est l'héroïne de Dona Flor et ses deux maris, de Bruno Barreto. Film érotique censuré, ce fut un énorme succès au Brésil. Mais c'est en 1985 que Sonia Braga va se faire connaître d'un public international avec Le baiser de la femme araignée d'Hector Babenco. Film politique sulfureux, ce Baiser est en compétition au Festival de Cannes et vaut à Sonia Braga une nomination aux Golden Globes américains. L'année suivante elle est même invitée à être membre du jury du festival de Cannes. Femme fatale, elle séduit Hollywood (jusqu'à faire la couverture de Playboy tout de même) et devient l'une des rares actrices de son pays à exporter son talent chez les Gringos.

Ainsi on la retrouve dans Milagro de Robert Redford, Pleine lune sur Parador de Paul Mazursky (et deuxième nomination aux Golden Globes), La Relève de Clint Eastwood, et même quelques téléfilms pour la télévision américaine (dont The Burning Season de John Frankenheimer, qui lui vaut une nouvelle nomination aux Golden Globes). Durant presque dix ans, Sonia Braga ne tourne plus qu'aux Etats-Unis.

Hélas, au début des années 2000, elle se perd et nous la perdons de vue. On peut bien la croiser dans un épisode de Sex and the City, de Law and Order, des Experts: Miami ou d'Alias, le début de millénaire est fait d'apparitions, de seconds rôles, de séries B ou de films oubliés. Après une carrière flamboyante, la Braga s'éteint à petits feux. Elle commence à être honorée pour sa carrière, qui est loin derrière elle désormais. Sa volupté et sa séduction s'étiolent et n'attirent plus les cinéastes. Pourtant, elle-même l'avoue, sa beauté n'a jamais été un argument. Elle était "la moche" du cinéma brésilien" selon elle. Capable de perdre dix kilos pour obtenir le rôle de Titea do Agreste de Carlos Diegues (qu'elle a produit). Car, avouons-le, Sonia Braga est restée sexy, ne lui en déplaise. Et la revoir sur la Croisette, en compétition, avec le deuxième long métrage, Aquarius, d'un réalisateur de la nouvelle génération du cinéma brésilien, Kleber Mendonça Filho - nous ravit. Un rôle "moderne", réaliste, loin de l'image qu'elle a véhiculé tout au long de ses années.

Cannes : Qui est Alice Braga?

Posté par vincy, le 14 mai 2008

braga.jpg

Elle est l'une des héroïnes de Blindness le film d'ouverture du festival de Cannes 2008. Le cinéaste brésilien Fernando Meirelles a choisi l'une de ses concitoyennes pour jouer parmi la pléïade de stars cosmopolites (USA, Mexique, Japon, Canada...). Incarnant la "femmes aux lunettes noires", l'amante illégitime d'un des protagonistes, on découvre ainsi Alice Braga, la nièce de Sonia Braga, grande comédienne brésilienne, qui d'ailleurs fut à Cannes pour le film de Redford, Milagro.

Alice, 25 ans, a reçu le grand prix de la meilleure actrice dans son pays avec Cidade Baixa (2005), primé à Cannes par le prix de la jeunesse. Elle était surtout l'une des vedettes de La cité de Dieu, premier film de Fernando Meirelles, présenté sur la Croisette hors compétition en 2002. Il s'agissait de son premier rôle majeur. Plus récemment, elle était la rescapée de Je suis une légende aux côtés de Will Smith. Elle fait aussi partie du casting du nouveau David Mamet (Redbelt), actuellement 10e au box office américain (contre toute attente). Enfin, ironie du sort, elle vient de tourner dans Crossing Over avec Harrison Ford et Sean Penn, deux des stars les plus exposées de ce festival de Cannes.