Cannes 2016: Qui est Damien Bonnard?

Posté par vincy, le 12 mai 2016

Alain Guiraudie a du flair pour choisir ses acteurs. Pour Rester vertical, plutôt que d'enrôler des comédiens qui lui étaient familiers, il a opté pour un casting inédit, où l'on note la présence de Damien Bonnard. Diplômé de l'Ecole des Beaux-Arts, formé au Théâtre du soleil, entre autres, ce jeune quadra séduisant a commencé un peu sur le tard.

Au cinéma, on l'aperçoit d'abord en arrière plan chez Rachid Bouchareb (Hors-la-Loi), Bertrand Blier (Le bruit des glaçons), Pascal Chaumeil (Un plan parfait), Alice Winocour (Augustine). En 2013, il est repéré de manière plus frappante grâce au film de Virgil Vernier, Mercuriales.

Il est également très actif dans d'autres formats que le long métrage. Damien Bonnard tourne pour la télévision: Rapace (Claire Devers), Nicolas Le Floch, la série Paris... Côté courts, il tourne pour Sylvain Desclous (Le monde à l'enversMon héros, sélectionné à Clermont-Ferrand), Charlotte Le Bon (Modern Monster) et Hugo Rousselin (Pays rêvé, pays réelVirée), entre autres. Il apparait également dans des clips et des fictions radiophoniques.

Assurément, ce mois de mai 2016 n'est pas comme les autres. Outre Rester verticalen compétition à Cannes, il est au casting, dans un petit rôle, de Voir du pays de Delphine et Muriel Coulin, sélectionné à Un certain regard et Vendeur, premier long métrage de Sylvain Desclous à l'affiche actuellement. Chez Guiraudie, il interprète un cinéaste en panne d'inspiration, s'enfonçant dans la misère, avec un bébé sur les bras et qui cherche son salut en essayant de rencontrer un loup en Lozère. Homme traqué, paumé, il trouve du réconfort chez des exclus de la société, qui le rejettent. Une atmosphère aux antipodes des deux autres films cités plus haut.

L'occasion de découvrir (enfin) ce comédien un peu à la marge, qui n'a jamais eu de grands rôles, mais, par fidélité ou exigence, a choisi, souvent, des chemins de traverse. Ici, son errance en France le met littéralement à nu.

Ouverture de Cannes 2016 : « C’est ça le cinéma, l’individu qui parle au monde »

Posté par kristofy, le 12 mai 2016

On nous avait prédit une soirée d'ouverture avec Cafe Society, le 14e Woody Allen cannois, sous la pluie : la première belle surprise aura été un soleil rayonnant, tout comme Laurent Laffite dans le rôle du maître de cérémonie. Le 69e Festival de Cannes est officiellement lancé avec une nouvelle fois l'ami Woody "mélancolique et plein de mordant, nostalgique et un peu désabusé, pour nous raconter l'âge d'or d'Hollywood couplé à une histoire d'amour malheureuse et un portrait de famille au vitriol"; et le tout avec Kristen Stewart, Jesse Eissenberg, Blake Lively, Corey Stoll, et le directeur de la photographie Vittorio Storaro.

Après une introduction poussive et pas drôle, le discours de Laurent Laftite a marqué une pause avec un court intermède de danse : "Cannes c'est une parenthèse enchantée..., la vraie star c'est le cinéma". Son humour passe mal et on se désole pour lui, notamment la vanne douteuse qui cible la vie privée de Woody Allen et de Roman Polanski (mais qui permet à Lafitte de faire le tour du monde de l'info). Enfin, le voilà qui clame: "Le Palais des festivals qui après 10 jours devient un gros truc moche" au moment où les panneaux s'ouvrent sur Catherine Deneuve. Maladresse ou hommage à la couverture de Charlie Hebdo l'an dernier? Pourtant, la Deneuve vient lui faire un baiser de cinéma et c'est enfin touchant (quelle cougar quand même cette Catherine).

Le jury est enfin appelé à venir se présenter, toutes et tous avec une belle élégance avec en tête le président George Miller précédé d'extraits de ses différents films. "C'est ça le cinéma, l'individu qui parle au monde" : 21 films de par le monde sont en sélection. Une chanson jouée par Matthieu Chédid (Vanessa Paradis devait être aux anges) entouré d'un choeur en hommage à Prince récemment décédé contribuera a donner de la majesté à la somptueuse scénographie qui avait été prévue, et malheureusement desservie de solennité avec un discours dans l'ensemble bancal et beaucoup moins drôle que la présentation des Molières où Lafitte avait été hilarant.

Pour un peu plus de prestige sont heureusement arrivés le duo Jessica Chastain et Vincent Lindon pour la fameuse déclaration "nous déclarons ouvert le 69e Festival de Cannes".

[69, année érotique] Cannes 2016: Love en 2015

Posté par kristofy, le 11 mai 2016

Pendant longtemps le cinéma français a raconté des histoires sentimentales ponctué de temps en temps d'une scène "osée" de nu : de Brigitte Bardot, à Catherine Deneuve, d'Isabelle Huppert à Anne Parillaud, de Valérie Kaprisky à Sophie Marceau en passant par... Gérard Depardieu. Des seins sous la douche, des fesses sur un lit, mais quasiment jamais de sexe masculin en érection. Il y a bien eu le cas Stéphane Rideau (Sitcom, Presque rien), le films "gays" L'inconnu du lac et Théo et Hugo sont dans le même bateau. Mais les cinéastes hétéros ont une certaine pudeur à montrer un mec qui bande. La sexualité frontale est tabou dans un pays qui a la réputation d'être grivois.

Dans son film Love Gaspar Noé fait dire à son personnage qu’il voudrait "faire un film avec du sexe qui montre des sentiments". Et dès la toute première image de Love, le ton est donné : lui et elle sont nus sur un lit avec les doigts autour et dans le corps de l’autre : la première scène est un plan-séquence de masturbation qui dure 2 minutes et demi jusqu’au moment d’une éjaculation. Le temps de découvrir deux personnages et déjà 7 minutes après une image de pénétration, mais qui est justifiée pour raconter que la femme va tomber enceinte. Si le sexe semble très présent dans le film c’est surtout par la puissance évocatrices des cadrages de l’image: il y a bien une demi-heure de narration avant la scène de sexe suivante : un rapport à trois (l’homme et deux femmes, forcément) très sensuel, en fait l’une des plus belles scènes du film.

Une image qui bien que très courte, 1 minute, a pu surprendre ou choquer : le sexe de l’homme sur lequel s’active la main de sa compagne est filmé face-caméra en très gros plan, et le sperme en jaillit donc à la face des spectateurs devant l'écran. Gaspar Noé s’en est expliqué : c’est Love 3D, sur ce film il utilise une technique de 3D pour le rendu d’un certain relief dès lors il aurait été dommage de ne pas y inclure une image d’éjaculation en relief en direction du public, c’est d’ailleurs aussi une auto-citation d’un plan similaire de son film précédent Enter the void. C'est aussi l'exact opposé d'un autre film qui avait choqué pas mal de festivaliers quelques années plus tôt, Irréversible (que ce soit la backroom SM ou la séquence du viol), où l'on de voyait rien mais où le sexe était malsain, caché, honteux.

Dans Love, présenté en séances de minuit l'an dernier (les places valaient chères), il y a donc plusieurs séquences à caractère sexuel, avec le plus souvent un couple, et parfois un trio (et un 69 d’ailleurs). La caméra s’attarde à plusieurs moments en gros plan sur les seins des femmes et sur le sexe de l’homme durant le plaisir. C’est avant tout et d’abord des images où on fait l’amour: c’est le sujet du film, qu'il soit physique, sexuel et bien entendu sentimental. Bref, intime.

Le film Love était sorti en salles de cinéma (en 3D donc) avec une interdiction aux moins de 16 ans avant qu’une action judiciaire la modifie interdit aux moins de 18 ans, mais pas classé X : la représentation du sexe ce n’est pas forcément pornographique. C'est même, rappelons le, ce qu'il y a de commun à tous les humains, et tous les arts l'ont représenté depuis la nuit des temps.

Cannes 2016 : le court métrage en cinq rendez-vous incontournables

Posté par MpM, le 11 mai 2016

Bonne figure

Même si les stars, les paillettes et les films attendus ont tendance à monopoliser le devant de la scène, le Festival de Cannes n’en est pas moins un carrefour important pour le court métrage. Que ce soit pour découvrir de jeunes auteurs qui débutent, prendre des nouvelles de réalisateurs confirmés, ou tout simplement parce que l’on aime ce format qui, quoi qu’on en dise, existe pour lui-même, il serait dommage de faire l’impasse sur les temps forts qui lui sont consacrés au cours de la Quinzaine.

Short Film Corner : le paradis du format court

C’est évidemment le lieu le plus évident pour voir des courts métrages sur la croisette. En 2015, près de 2500 étaient inscrits, venus de 105 pays, et accessibles au visionnage sur l’un des 56 postes de consultation. Cette année, ce véritable marché du film court prendra place du 16 au 22 mai et devrait proposer un panorama plus que complet de la production mondiale.

Compétition officielle : la course à la Palme d’or

Qui succédera à Waves'98 de Ely Dagher ? Les concurrents sont au nombre de dix, et certains d’entre eux sont précédés d’une certaine notoriété : Simon Mesa Soto (Colombie) a déjà remporté cette distinction prestigieuse en 2014 avec Leidi et revient avec Madre, un film sur la pédo-pornographie ; João Paulo Miranda Maria (Brésil) était en compétition à la Semaine de la Critique en 2015 avec Command Action et propose A moça que dançou com o diablo ; le metteur en scène Lofti Achour présente La laine sur le dos… Quant à l’acteur Felix Moati, il montera les marches avec Après Suzanne qui réunit notamment Vincent Lacoste, Antoine de Barry et François Morel.

La Cinéfondation : étudiants sur tapis rouge

Ils sont encore à l’école, et leurs films (parfois le tout premier) auront les honneurs d’une sélection officielle dans l’un des plus prestigieux festivals du monde. De quoi présager du meilleur pour 14 réalisateurs sélectionnés cette année, et qui marchent dans les traces de Nadav Lapid et Deniz Gamze Ergüven (sélectionnés en 2006) ou de Claire Burger, présente en 2008. A priori, on a envie de tout voir, mais on suivra avec une attention particulière les films qui représentent deux pays sélectionnés pour la première fois : la Bosnie-Herzégovine (Dobro de Marta Hernaiz Pidal) et le Venezuela (La culpa, probablemente de Michael Labarca) ; ainsi que le documentaire d’animation Bei Wind und Wetter de Remo Scherrer (Suisse).

La Quinzaine des Réalisateurs : un grand maître, des débutants et de jeunes talents à suivre

Sélection gourmande pour la 48e Quinzaine des réalisateurs qui réunit de tout jeunes talents et un cinéaste réputé, pour un panorama éclectique et passionnant du court métrage contemporain. Ainsi, on retrouvera avec beaucoup de plaisir le nouveau film du réalisateur russe Gari Bardine, grand maître de l’animation de retour avec Listening to Beethoven. A ses côtés, les débuts derrière la caméra de Romane Gueret, qui coréalise Chasse royale avec Lise Akoka, la première fiction de Damien Ounouri (Fidaï en 2012) et même un film de fin d’étude, Happy end de Jan Saska. On surveillera également Léthé, le nouveau film de Dea Kulumbegashvili qui concourait pour la Palme d’or du court métrage en 2014 avec Invisible spaces, Hitchhiker de Jero Yun, réalisateur sélectionné à la résidence de la CInéfondation en 2012 et participant de la Taipei Factory en 2013, et Decorado de Alberto Vásquez, cinéaste espagnol qui vient de terminer son premier long métrage, Psiconautas.

La Semaine de la Critique : des courts à tous les étages

A la Semaine de la Critique, le court fait quasiment jeu égal avec le long, et s’octroie pas moins de quatre séances. Pour prendre des nouvelles de la jeune création, on privilégiera la compétition et ses dix films qui proposent un petit tour du monde de la fiction contemporaine (Europe, Asie, Amériques). Côté français, il faudra suivre Le soldat vierge, nouveau film d’Erwan Le Duc déjà découvert aux festivals de Vendôme et Angers, et L’enfance d’un chef, une comédie signée Antoine de Barry avec Vincent Lacoste et Felix Moati. On surveillera également l’intrigant dynamisme du cinéma portugais qui a lui-aussi deux films en course : Ascensão de Pedro Peralta et Campo de víboras de Cristèle Alves Meira. A noter que les 10 films de la selection seront disponibles gratuitement sur le site FestivalScope du 20 au 27 mai.

Plus people, mais tout aussi intrigante, la clôture réunit le premier court métrage de trois actrices passées pour la première fois derrière la caméra : Sandrine Kiberlain (Bonne figure, avec Chiara Mastroiani, notre photo), Chloé Sevigny (Kitty) et Laetitia Casta (En Moi avec Yvan Attal). Quant à la séance spéciale 50 + 5, elle donne des nouvelles de deux cinéastes révélés par la Semaine : Nadav Lapid (Myomano shel tzalam hatonot) et César Augusto Acevedo (Los pasos del agua).

Cannes 2016: 66 minutes pour Ma vie de Courgette, 173 minutes pour Sieranevada

Posté par vincy, le 11 mai 2016

125 minutes. C'est la durée moyenne d'un film en compétition au 69e Festival de Cannes, soit 2 heures et 5 minutes. Une durée particulièrement longue due à quelques films très très longs: Sieranevada (2h53), Toni Erdmann et American Honey (2h42 chacun), Mademoiselle (2h25) et Aquarius (2h20). Au total, sur les 21 films en lice pour la Palme d'or, 12 font plus de deux heures.

Il y a bien sur quelques exceptions: Julieta (1h36), Juste la fin du monde (1h37) et Rester vertical (1h40).

Dans la Sélection officielle, le film le plus long reste le documentaire de Bertrand Tavernier, Voyage à travers le cinéma français (3h10) présenté dans le cadre de Cannes Classics). Notons que quatre films d'Un certain regard durent entre 1h18 et 1h24.

Côté Quinzaine des réalisateurs, Ma vie de Courgette ne dure qu'1h06 et aucun film ne dépasse les 2h11 du film d'ouverture, Fais de beaux rêves, de Marco Bellocchio.

A la Semaine de la Critique, il n'y a aucun film au dessus d'1h52 (Yellow Bird) et le plus court dure 1h29 (Apnée).

[20 ans de festival] Cannes 2016 : 1997-1998-1999 – Nos premiers pas sur la Croisette

Posté par vincy, le 11 mai 2016

En 1997, Cannes célèbre sa cinquantième édition. Et Ecran Noir sa première. Le magazine a à peine un an et décide de consacrer un site internet retraçant l'histoire du festival. Finalement, la petite équipe de l'époque fait le trajet jusqu'à la Croisette pour le vivre de l'intérieur. A l'époque, il n'y a qu'un site web francophone, le notre, et quelques américains. La presse des pays émergents n'a pas encore envahit le Palais. Les critiques français sont encore dominants. Pour nous, ce sont les premiers pas: la découverte du système hiérarchique, les badges, les casiers, etc... Une grosse piqûre de morphine et de rêves en celluloïd qui nous rendra addict.

Notre premier jury est présidé par Isabelle Adjani. Notre premier film, Le Cinquième élément de Luc Besson. Notre premier film en compétition, Ne pas avaler de Gary Oldman: on expérimente la violence et la brutalité sociale dès 8h30 du matin. 1997 fut une édition mouvementée. Des huées et des clashs avec Assassin(s) de Mathieu Kassovitz. Un grand écart entre La femme défendue de Philippe Harrel et The End of Violence de Wim Wenders, une plongée dans le glamour de L.A. Confidential et l'ennui total de The Brave. La Palme d'or sera partagée entre deux beaux films poétiques, L'Anguille de Shohei Imamura et Le Goût de la cerise d'Abbas Kiarostami, mais n'oubliera pas les expériences cinématographiques qui nous ont enthousiasmés: De beaux lendemains d'Atom Egoyan, Le destin d'Youssef Chahine, Happy Together de Wong Kar-wai, The Ice Storm d'Ang Lee et Western de Manuel Poirier.

Mieux armés et mieux préparés, nous revenons en 1998 avides de découvertes. Nous voici face à Thomas Vinterberg et son Festen,Erick Zonca et sa Vie rêvée des anges, Todd Haynes et son Velvet Goldmine. C'est une année riche, avec Moretti, Angelopoulos, Gilliam, Miller, Loach, Tsai-Ming Liang, Boorman, Hou Hsiao-hsien au top de leur forme. Mais c'est Roberto Benigni qui emporte tous nos souvenirs: de la projection presse de La vita e bella à sa séance officielle ovationnée jusqu'à son prix, où le cinéaste-acteur baise les pieds du président Martin Scorsese, le festival de cette année là fut sans doute le plus dense en émotions.

Et comme les années se suivent et ne se ressemblent pas, 1999 sera beaucoup plus sèche. Le jury de David Cronenberg ne nous convainc pas avec son palmarès. Nous nous étions emportés pour Tout sur ma mère, l'un des plus beaux films de Pedro Almodovar, nous avions été touchés par L'été de Kikujiro de Takeshi Kitano, nous avions vibré pour Ghost Dog de Jim Jarmsuch, nous avions embarqué dans Une histoire vraie de David Lynch. Et finalement ce sont les films les plus durs, même s'ils étaient beaux à leur manière, qui ont monopolisé le palmarès: Rosetta de Jean-Pierre et Luc Dardenne et L'Humanité de Bruno Dumont mais aussi Moloch d'Alexandre Sokourov et La Lettre de Manoel De Oliveira, des récits où la violence des rapports humains et la formalité esthétique créent une distance froide voulue.

Cannes 2016 : Qui est Soko ?

Posté par MpM, le 11 mai 2016

Soko aurait-elle tous les talents ? Cette trentenaire singulière, de son vrai nom Stéphanie Sokolinski, mène depuis le milieu des années 2000 une carrière parallèle de chanteuse et d’actrice, alternant albums, concerts, contributions et incursions sur grand écran avec une jolie régularité.

Côté musique, on l’a découverte en 2007 avec Not SoKute, un EP comprenant cinq titres, dont le tube I’ll kill her, qu’elle a produit avec Thomas Semence, guitariste de Jean-Louis Aubert.
Côté cinéma, elle apparaît d’abord dans des téléfilms (Clara, cet été-là), plusieurs courts métrages (L’escalier, Ben et Thomas), et des comédies comme Au secours j’ai 30 ans de Marie-Anne Chazel et Madame Irma de Didier Bourdon. En 2006, on commence à la remarquer aux côtés de Léa Seydoux dans Mes copines de Sylvie Ayme, puis dans Dans les cordes de Magaly Richard-Serrano.

C’est finalement grâce à Xavier Giannoli, qui lui confie un rôle secondaire dans A l’origine (2008) aux côtés de François Cluzet et Emmanuelle Devos, qu’elle obtient la reconnaissance de la profession à travers une nomination au César du meilleur espoir féminin. Il faudra toutefois attendre 2012 pour la voir exploser coup sur coup dans deux rôles excessifs et habités, celui d’une adolescente internée en hôpital psychiatrique dans Bye-Bye Blondie de Virginie Despentes (elle y incarne Béatrice Dalle jeune, en toute simplicité) puis d’une jeune fille atteinte d’hystérie dans Augustine d’Alice Winocour, face à Vincent Lindon en professeur Charcot. La légende veut qu’elle ait harcelé la production du film pendant des mois pour obtenir le rôle. Chez elle, le goût du challenge est un moteur irrésistible.

Résultat : une moisson de prix, du Swan d’or de la révélation féminine à Cabourg pour Bye-Bye Blondie au prix Romy Schneider, en passant par le prix d’interprétation féminine à Mar del Plata et le Lumière du meilleur espoir féminin pour Augustine. Pourtant, la musique la happe à nouveau (I Thought I Was an Alien en 2012, My Dreams Dictate My Reality en 2015) et le cinéma ne lui offre que le rôle un peu stéréotypé d’une jeune femme libre, insouciante et engagée dans Les interdits d’Anne Weil (2013).

Heureusement, 2016 est clairement l’année de son retour sur grand écran, avec deux films sélectionnés à Cannes, tous deux en section Un certain Regard : Voir du pays de Delphine et Muriel Coulin et La danseuse de Stéphanie di Giusto. Dans le premier, elle est une soldate de retour d’Afghanistan qui essaye d’"oublier la guerre" avant de rentrer chez elle. Dans le second, où elle partage l’affiche avec Mélanie Thierry, Gaspard Ulliel et Lily-Rose Depp, elle est Loïe Fuller, danseuse américaine pionnière de la danse moderne. Deux rôles en apparence aux antipodes qui ont en commun de placer la jeune femme dans sa situation favorite : en position de relever quelques défis.

Cannes 2016 : deux prix pour la musique de film avec Cannes Soundtrack

Posté par MpM, le 9 mai 2016

the assassin

Depuis 2012, le prix Cannes Soundtrack permet de pallier l'absence de récompense officielle à destination des musiques de films en compétition. Décerné par un jury de 16 journalistes français et internationaux, ce "Coup de cœur de la meilleure musique originale" devient cette année le Cannes Soundtrack Award du Meilleur Compositeur et se double d'un deuxième prix, le Cannes Soundtrack Award de la Meilleure Musique Synchronisée. Ce dernier sera remis au réalisateur et au superviseur pour les musiques préexistantes.

Parmi les compositeurs en course, on retrouve Gabriel Yared (Juste la fin du monde de Xavier Dolan), Hans Zimmer (The last face de Sean Penn), Cliff Martinez (The neon demon de Nicolas Winding Refn) ou encore George Fenton (Moi, Daniel Blake de Ken Loach). Quant à la sélection pour la meilleure musique synchronisée, elle compte Paterson de Jim Jarmusch, American honey d'Andrea Arnold et Personal shopper d'Olivier Assayas.

Les lauréats 2016 succéderont à Lim Giong (récompensé l'an passé pour la musique de The Assassin de Hou Hsiao-Hsien), Howard Shore (Maps to the Stars de David Cronenberg), Jozef Van Wissempour (Only lovers left Alive de Jim Jarmush) et Mark Snow (Vous n’avez encore rien vu d'Alain Resnais).

Cannes 2016: les absents de la Croisette

Posté par vincy, le 8 mai 2016

Cannes ne les a pas retenus. Désormais ces films, quasiment prêts ou bien finalisés, sont dans la course pour Venise, Toronto, Telluride ou New York. Par choix stratégique pour les distributeurs ou parce qu'ils n'ont pas plu aux sélectionneurs. Mais il y a aussi ceux qui ne sont pas prêts du tout.

Ainsi le dernier film d'Emir Kusturica est le cas le plus symptomatique. On The Milky Road a vécu un mauvais buzz. Une méchante rumeur s'est répandue sur le film: Cannes ne l'aurait pas sélectionné pour les proximités politiques de Kusturica avec Poutine. Le cinéaste serbe, double Palme d'or, passe son temps à rectifier, démentir cette affirmation. Le film n'est tout simplement pas prêt. Il reste du montage, des effets spéciaux à finaliser, raccourcir la durée. Dans Screen Daily, le réalisateur explique même que le Festival a tout fait pour l'avoir.

On peut aussi regretter que Silence de Martin Scorsese (pas fini et visant plutôt les Oscars), Sully de Clint Eastwood (qui se réserve pour Venise/Toronto a priori), The Voyage of Time de Terrence Malick, Oppengeimer Strategies de Joseph Cedar, The Beautiful Days of Aranjuez de Wim Wenders n'y soient pas. Et ce ne sont pas les seuls. Jim Sheridan (The Secret Scripture), Oliver Stone (Snowden, date de sortie décalée) et surtout Tom Ford (Nocturnal Animals, prévu finalement à Venise) et Damien Chazelle (La La Land, qui cible lui aussi les Oscars et donc plutôt un calendrier d'automne) ont finalement échoué à venir sur la "french riviera".

Plus surprenant, Lucretia Martel, chouchou cannoise, avec Zama ou Derek Cianfrance, révélé à Cannes, avec The Light Between Oceans, sont désormais en passe de rejoindre le festival de Venise, tout comme les films de Tran Anh Hung (Eternité était pourtant proche de la Sélection officielle quelques jours avant la révélation de celle-ci) et Amat Escalante (pas prêt, parait-il), déjà calé pour un voyage vers l'Italie selon son distributeur. Quant à Wiener-Dog de Todd Solondz, présenté à Sundance et acquis par Amazon, il a été jusqu'au dernier moment pressenti pour la Quinzaine des réalisateurs, ce qui semblait assez évident. Finalement, il n'est nulle part et devrait faire son avant-première française à Deauville.

Venise devrait pouvoir aussi compter sur les derniers film de Ben Wheatley, James Pondoldt et Adam Leon, ainsi que sur de nombreux cinéastes asiatiques qui manquent à l'appel cannois.

Côté français, on remarque que François Ozon, Rebecca Zlotowski et Stéphane Brizé ont manqué le coche. Même si la stupéfaction fut plus grande concernant Nocturama de Bertrand Bonello. Dès le jour de l'annonce de la sélection cannoise, le distributeur français a balancé l'affiche du film et annoncé qu'il serait en compétition au festival de San Sebastian.

« Mala noche » à la Cinémathèque française: occupation politique et évacuation policière

Posté par vincy, le 7 mai 2016

© @JeromePasanauDe 60 à 100 de personnes ont occupé pendant quelques heures la Cinémathèque française à Paris, durant trois heures, dans la nuit de vendredi à samedi, avant d'être délogées par les forces de l'ordre.

Après une projection de Prête à tout de Gus Van Sant, auquel la Cinémathèque rend hommage à travers une exposition, un groupe d’une cinquantaine de personnes a décidé de ne pas quitter la salle, clamant qu'ils occupaient désormais l'institution.

Si l'on en croit Twitter, il s'agissait d'un mélange de revendications d'employés de la Cinémathèque, d'intermittents du spectacle, et du mouvement citoyen Nuit debout. Tous évoquaient une lutte contre le projet de loi travail et la précarisation de l’emploi dans la culture. La Cinémathèque est prise au piège dans une polémique depuis fin janvier quand on a appris que le personnel d'accueil était géré par une société externe, City One, qui impose des conditions de travail où harcèlement, chantage et pressions font mauvais ménage (lire l'article paru dans Libération à ce sujet et le témoignage d'une employée).

Lors de la Matinale de France Culture le 9 février (à réécouter ici), le nouveau directeur de la Cinémathèque française, Frédéric Bonnaud, ancien directeur de la rédaction des Inrocks où il était très soucieux des inégalités et très en colère contre le régime policier, expliquait qu'il n'avait pas à signer des CDI "pour que quelqu’un vende des billets” et souhaitaient que les postes de billetterie et d'accueil restent dévolus à “des jobs étudiants“. "Je pense qu’hôtesse d’accueil, caissier, guichetier ou ouvreuse, ça doit rester des petits jobs d’étudiants, au risque de choquer. Moi, je ne me vois pas signer un CDI à vie pour que quelqu’un vende des billets à la Cinémathèque" a-t-il expliqué précisément.

Reste le symbole lourd et gênant d'un établissement connu pour ses hauts faits d'armes durant Mai 1968. En effet, pour la première fois depuis la création de la Cinémathèque en 1936, et à la demande de la direction qu'on croyait plutôt du côté des victimes, à été évacuée de force par la police. Bref une "mala noche" pour ce temple de la cinéphilie.