European Film Awards: La Favorite prend les devants

Posté par redaction, le 19 novembre 2019

Après les nominations principales (film, réalisateur, prix du public...), la European Film Academy et EFA Productions a révélé ses premiers lauréats en vue de la cérémonie des European Film Awards, qui se tiendra à Berlin le 7 décembre. Ces prix "techniques" sont décernés par un jury composé de huit professionnels: Nadia Ben Rachid, monteuse, Vanja Cernul, directeur de la photographie, Annette Focks, compositrice, Gerda Koekoek, coiffeuse & maquilleuse, Eimer Ní Mhaoldomhnaigh, créatrice de costumes, Artur Pinheiro, chef décorateur, Gisle Tveito, ingénieur du son, et István Vajda, superviseur effets visuels.

La Favorite, en lice pour cinq prix dont celui du meilleur film, par décidément favori. le film de Yorgos Lanthimos a récolté le prix de la meilleure photographie (Robbie Ryan), le prix du meilleur montage (Yorgos Mavropsaridis), le prix des meilleurs costumes (Sandy Powell) et le prix des meilleurs coiffure-maquillage (Nadia Stacey).

Antxon Gomes repartira avec le prix des meilleurs décors pour Douleur et Gloire de Pedro Almodovar (qui est en lice dans 5 catégories principales). John Gürtler est récompensé pour sa musique de Benni (SystemSprenger) de Nora Fingscheidt, nommé dans 3 catégories (Ad Vitam sort le film en mars prochain). Le meilleur son revient à Eduardo Esquide, Nacho Royo-Villanova & Laurent Chassaigne pour Companeros, d' Alvaro Brechner. Les meilleurs effets visuels sont pour Martin Ziebell, Sebastian Kaltmeyer, Néha Hirve, Jesper Brodersen & Torgeir Busch pour leur film About Endlessness de Roy Andersson, qui sortira en avril 2020 chez KMBO.

Parité, égalité, diversité : le cinéma s’engage derrière le collectif 5050

Posté par redaction, le 18 novembre 2019

En pleine affaires Haenel et Polanski, les Assises sur la parité, l'égalité et la diversité dans le cinéma et l'audiovisuel, organisées par le Collectif 50/50 en partenariat avec le CNC tombaient à pic jeudi dernier. Le ministre de la Culture, Franck Riester, a d'ailleurs fait le déplacement, tant le sujet est désormais au cœur du secteur. Rappelant qu'il serait toujours du côté des créateurs pour leur liberté de créer, le ministre a concédé qu'il fallait redistribuer les pouvoirs et renforcer les moyens. Mais surtout il a annoncé le conditionnement du versement de "toutes les aides du CNC" au "respect d’obligations précises en matière de prévention et de détection du harcèlement sexuel". De plus il a assuré la mise en place d’une cellule d’alerte à destination des victimes de violences sexuelles dans le secteur du spectacle vivant, de l’audiovisuel et du cinéma dès le 1er janvier 2020.

Car pour le ministre, toutes les affaires qui secouent actuellement le cinéma français sont avant tout les symptômes de la faillite d'un système. Deux ans après #MeToo, la société française semble enfin prendre la mesure des dérives de sa culture patriarcale. Certains se désoleront de cette moralisation voire du puritanisme ambiant, de cette américanisation des mœurs. Mais la France est encore loin des Etats-Unis concernant son rapport au sexe. On ne boycotte pas Gauguin. J'accuse de Roman Polanski a attiré 500000 spectateurs lors de sa première semaine. On peut encore montrer des fesses, un pénis ou des seins sans être interdits aux moins de 16 ans. Les rares appels au boycott sont suivis de peu d'effets, même si quelques ligues religieuses font modifier le classement des films où la sexualité est explicite.

Il était en revanche nécessaire et urgent que la profession se dote de règles et protège ceux et celles victimes de harcèlement ou de violences. Que le créateur soit libre, c'est ce qu'on peut espérer. Que le prédateur qui est potentiellement en lui, puisse agir en toute impunité, on peut légitimement ne pas l'excuser. Dominique Boutonnat, Président du CNC, soutient ainsi la création de sessions spécifiques de formation pour accompagner les professionnels afin de prévenir et agir face à des comportements inappropriés, sur les tournages comme lors de la promotion d'un film.

Lors de ces Assises, deux annonces ont été faites. Tout d'abord, la mise en place d'une Charte pour l'inclusion dans le Cinéma et l'audiovisuel pour adapter la loi française à l "inclusion rider" américain et l'appliquer dans les contrats français. Cette charte a été signée par neuf syndicats (producteurs, agents, cinéastes, scénaristes...). Cette charte est accompagnée d'une base de données de professionnels issus des minorités, la Bible 5050.

Ensuite, la mise en place d'une autre Charte pour la parité et la diversité dans les sociétés des distribution, d'édition et d'exploitation cinématographique. "La diversité c'est un constat, l'inclusion c'est un acte" a rappelé la réalisatrice Rebecca Zlotowski. Cette charte a été signée par 40 sociétés de distribution, d'exploitants et d'édition. La circuit CGR a signé la charte lors des Assises.

Le collectif 5050 propose par ailleurs la nomination systématique d'un référent sur les plateaux de tournages, l'inscription d'un rappel à la loi sur le harcèlement dans les contrats, l'implication des assureurs du secteur pour prendre en charge le dommage économique lié à un arrêt de tournage à cause d'un cas de harcèlement, l'inscription de la hotline 3939 "Violences Femmes Info" sur les feuilles de route par les sociétés de production.

Cela ne résoudra pas tous les problèmes (homophobie et racisme sont un peu mis à l'écart), mais en intégrant le concept de discrimination positive et en prenant acte des violences faites aux femmes, il semblerait que le cinéma français se réforme et assimile enfin l'émancipation des femmes.

Voir ou ne pas voir « J’accuse »

Posté par redaction, le 13 novembre 2019

Nous avons vu J’accuse au Festival de Venise, où il a remporté le Grand prix du jury. Ses qualités cinématographiques sont indéniables : Roman Polanski est un des grands talents du cinéma depuis les années 1960, accumulant les prix les plus prestigieux dans le monde. Son destin, du ghetto de Cracovie au meurtre de sa femme Sharon Tate, est un mélange d’ombres et de lumières, de tragédie et de consécration.

Cependant, avec l’affaire Samantha Geimer, du nom d’une jeune fille de 13 ans qu’il a droguée et violée (au total six chefs d’accusation mais une seule retenue pour laquelle Polanski a plaidé coupable), la justice et la morale s’en sont mêlés. On pourra reprocher le silence (complice) de la profession ou arguer d’un débat (perpétuel) distinguant l’œuvre de l’artiste. Mais la personnalité de l’homme, dans sa quarantaine, avant qu’il ne connaisse le bonheur de la paternité, était, pour le moins trouble. L’affaire a été jugée (même si elle n’a pas été clôturée, les procureurs successifs cherchant son scalpe) et la victime a longuement expliqué (y compris dans un documentaire) qu’elle lui pardonnait, jusqu’à le féliciter quand il a reçu le Lion d’argent en septembre.

Cul-de-sac

Polanski est ainsi comme un prisonnier en conditionnelle, libre de ses mouvements, mais de moins en moins apte à sortir de France, sous crainte d’être extradé aux Etats-Unis.

Quelques jours avant la sortie de J’accuse, Le Parisien a révélé le témoignage de la photographe Valentine Monnier, 18 ans en 1975, battue et violée par le réalisateur dans sa résidence de Gstaad en Suisse. Le récit de la photographe est stupéfiant et brutal. Quatre autres femmes, toutes adolescentes dans les années 1975-1983, avaient déjà porté de telles accusations, prescrites par la loi (elles ont toutes attendu les années 2010 pour s’exprimer). Les confidences de Valentine Monnier sont confortées par d’autres témoignages. Cela a entraîné deux réactions : la suspension de la promotion du film par les interprètes de celui-ci, la réaction de l’avocat du cinéaste, qui réfute ces témoignages et menace d’une riposte judiciaire à la clé : « cette accusation concerne des faits vieux de quarante-cinq ans. Que jamais cette accusation n’a été portée à la connaissance de M. Polanski et pas davantage à l’institution judiciaire, si ce n’est un courrier au procureur général californien il y a deux ans. »

Répulsion

Nous ne sommes pas juges. C’est à eux de trouver la vérité et les sanctions qui vont avec. Nous ne sommes pas non plus détenteurs d’un ordre moral, nous ne sommes pas censeurs et l’ostracisme populaire n’a rien à voir avec notre métier. O tempora, o mores comme écrivait Cicéron. Nous ne sommes que des critiques de cinéma. Si l’on juge quelque chose, c’est bien son film. Même si, et cet avant-propos le confirme, les affaires autour de Roman Polanski provoquent en nous un sentiment de malaise profond. On ne peut pas rester indifférent à ces révélations, et il est nécessaire d’écouter ces femmes, qui souvent se sont tues par peur ou pour évacuer le trauma. Zola en lançant son J’accuse défendait une minorité opprimée par un système. Il est sain depuis #MeToo que les femmes (une meurt tous les trois jours en France de violence conjugale, à peine 5% portent plainte pour viol) aient le courage de parler de la brutalité dont elles sont victimes. Adèle Haenel a ouvert la voie dans le cinéma français il y a quelques jours. Mais cela se passe dans tous les milieux, dans toutes les classes sociales.

Mais si l’avocat de Polanski s’émeut (c’est son rôle) des révélations de Valentine Monnier (c’est son droit) à quelques jours de la sortie d’un film à 22M€, il ne peut s’en prendre qu’aux irresponsables qui ne veulent pas voir de problème Polanski. Déjà,  dans le dossier de presse dévoilé à Venise, l’écrivain Pascal Bruckner faisait le lien entre les affaires Polanski et ce film, évoquant même les « féminazies », terme abject et point Godwin de l’année (un comble quand on parle de Polanski dont la mère a terminé à Auschwitz). Dans le même dossier de presse, il est écrit qu’il s’est inspiré de « bon nombre de mécanismes de persécution qui sont à l’œuvre dans ce film ».

Carnage

Dès lors que, dans la promotion même du film, on établit un lien entre l’affaire Dreyfus et ces affaires Polanski, que celui-ci se voit comme persécuté, on perturbe le spectateur, qui voit dans le Colonel Picquart un messager du réalisateur pour revendiquer son innocence à travers une affaire vieille de plus d’un siècle et autrement plus lourde de conséquences. Un tribunal militaire et un complot d’Etat ne sont pas équivalents à un devoir de justice et des plaintes de victimes. Dreyfus était irréprochable. Polanski non (juridiquement). Le combat de Zola et Picquart étaient juste et essentiels pour la Nation. Aussi grands soient ses films, Polanski n’est là qu’un citoyen ordinaire accusé de crimes sexuels.

En accentuant le pont entre Dreyfus et lui, Polanski réduit même son message à une affaire personnelle quand son film veut démontrer le contraire. C’est même insultant de relier les deux, et la production, forcément consciente du problème, assume de mettre au même niveau une affaire d’Etat scandaleuse et des agressions sexuelles illégales. Ce ne peut pas être 50% pour un film sur une erreur judiciaire contre 50% d’un homme jugé coupable de viol sur mineur.

D’après une histoire vraie

Il dilue ainsi les qualités de son film historique, thriller rondement maîtrisé, avec ce message subliminal, avec Zola comme référence, tout en s’exonérant de son passé. Ce n’est pas Jean Valjean. Et c’est ce qui est embarrassant. En fuyant les accusateurs, les procureurs, les journalistes, Polanski s’enferme dans un piège qu’il s’est construit, tout en nous coinçant, nous cinéphiles et critiques, dans un dilemme intime et moral.

Aussi, même si nous aimons les films de Roman Polanski – il serait dommage de ne pas voir quelques uns des chefs d’œuvre du cinéma -, nous ne chercherons pas à vous convaincre d’aller voir J’accuse. Chacun dispose d’un droit le plus élémentaire : le choix. Aller voir J’accuse c’est se souvenir de l’Affaire Dreyfus, comprendre la montée de l’antisémitisme, voir un Etat français aveugle et injuste ; c’est aussi soutenir des centaines de personnes qui ont travaillé sur ce film avec passion. Après tout, le lecteur de Voyage au bout de la nuit peut admirer la langue de Céline tout en étant répugné par les idées de l’écrivain (dont les pamphlets antisémites ne sont pas publiés).

Ne pas y aller est tout aussi compréhensible : difficile de cautionner un réalisateur, qui n’a jamais caché sa préférence pour les jeunes filles à cette époque, un homme dont les mœurs étaient choquantes et les pratiques sexuelles illégales (l’affaire Samantha Geimer, encore une fois, le prouve). La justice ne fera jamais la lumière sur ces cinq accusations, puisque les faits sont prescrits. Mais si le spectateur a l'impression, en allant voir J'accuse, d'être complice du réalisateur, il doit se sentir libre et légitime de ne pas y aller. Pour paraphraser l'article de Zola: "Notre devoir est d'en parler, nous ne voulons pas être complices".

Il n’est pas question d’accuser ici qui que ce soit. Mais il est certain que le témoignage de Valentine Monnier nous interpelle, nous touche et nous trouble. Il nous conduit à une simple conclusion : ne vous sentez pas coupable d’aller voir J’accuse, mais sentez vous libre de ne pas aller le voir. Si la honte ne doit se situer que dans un seul camp, c’est celui de l’accusé.

Les 36 révélations en lice pour les César 2020

Posté par redaction, le 12 novembre 2019

Le Comité des révélations de l’Académie des César vient dévoiler la liste de 36 comédiens et comédiennes préconisées pour les nominations dans la catégorie espoir.

Cette liste, n'a aucun caractère d'obligation, mais elle contribue fortement à une possible nomination. Quelques films cumulent plusieurs nominations dont Les misérables, Hors normes et La vie scolaire (deux côté masculin), C'est ça l'amour (deux côté féminin), Seules les bêtes et Atlantique (une de chaque côté).

Les Révélations 2020 – Comédiennes :

  • Luàna Bajrami dans Portrait de la jeune fille en feu
  • Mya Bollaers dans Lola vers la mer
  • Shirine Boutella dans Papicha
  • Céleste Brunnquell dans Les Éblouis
  • Manon Clavel dans La Vérité
  • Jennifer Decker dans Un beau voyou
  • Zéa Duprez dans Les Météorites
  • Mina Farid dans Une fille facile
  • Nora Hamzawi dans Doubles vies
  • Sarah Henochsberg dans C’est ça l’amour
  • Lyna Khoudri dans Papicha
  • Louise Labèque dans Zombi Child
  • Justine Lacroix dans C’est ça l’amour
  • Lise Leplat Prudhomme dans Jeanne
  • Nina Meurisse dans Camille
  • Mama Sané dans Atlantique
  • Nadia Tereszkiewicz dans Seules les bêtes
  • Maud Wyler dans Perdrix

Les Révélations 2020 – Comédiens :

  • Anthony Bajon dans Au nom de la terre
  • Idir Ben Addi dans Le jeune Ahmed
  • Bastien Bouillon dans Debout sur la montagne
  • Djanis Bouzyani dans Tu mérites un amour
  • Mathieu Capella dans Deux fils
  • Jean-Christophe Folly dans L’Angle mort
  • Soufiane Guerrab dans La Vie scolaire
  • Hakim Jemili dans Docteur ?
  • Benjamin Lesieur dans Hors Normes
  • Alexis Manenti dans Les Misérables
  • Amadou Mbow dans Atlantique
  • Tom Mercier dans Synonymes
  • Bryan Mialoundama dans Hors Normes
  • Guy Roger N’Drin dans Seules les bêtes
  • Liam Pierron dans La Vie scolaire
  • Thimotée Robart dans Vif-argent
  • Thomas Scimeca dans Bêtes blondes
  • Djebril Zonga dans Les Misérables

Les nominations aux European Film Awards 2019

Posté par vincy, le 9 novembre 2019

Les nominations des 32e European Film Awards ont été annoncé ce samedi 9 novembre au Festival du film européen de Séville en Espagne. Quelques catégories avaient été dévoilées en amont depuis la fin de l'été. La remise des prix aura lieu à Berlin le 7 décembre, avec un Prix pour sa contribtion au cinéma mondial à Juliette Binoche et un Prix Européen de la meilleure série de fiction pour Babylon Berlin.

Si les films sélectionnés à Cannes constituent l'essentiel des sélectionnés, quelques films présentés à Berlin et à Venise (2018 autant que 2019) sont en bonne position. Le cinéma français est cité dans les principales catégories. Il reste quelques catégories (techniques) mais aussi honorifiques (prix européen pour l'ensemble d'une carrière, prix Eurimages de la co-production) à connaître.

Meilleur film européen
J'accuse ; Les misérables ; Douleur et gloire ; Benni ;  La favorite ; Le traitre

Meilleur réalisateur
Pedro Almodovar (Douleur et gloire) ; Yorgos Lanthimos (La favorite) ; Marco Bellocchio (Le traitre) ; Roman Polanski (J'accuse) ; Céline Sciamma (Portrait de la jeune fille en feu)

Meilleure actrice
Viktoria Miroshnichenko (Beanpole) ; Noémie Merlant (Portrait de la jeune fille en feu) ; Trine Dyrholm (Dronningen) ; Helena Zengel (Benni) ; Olivia Colman (La favorite)

Meilleur acteur
Jean Dujardin (J'accuse) ; Levan Gelbakhiani (Et puis nous danserons) ; Antonio Banderas (Douleur et gloire) ; Pierfrancesco Favino (Le traitre) ; Ingvar E. Sigurdsson (A white white day) ; Alexander Scheer (Gundermann)

Meilleur scénariste
Pedro Almodovar (Douleur et gloire) ; Céline Sciamma (Portrait de la jeune fille en feu) ; Marco Bellocchio, Ludovica Rampoldi, Valia Santella & Francesco Piccolo (Le traitre) : Robert Harris & Roman Polanski (J'accuse) ; Ladj Ly, Giordano Gederlini & Alexis Manenti (Les Misérables)

Les lauréats:

  • Meilleure photo
  • Meilleur montage
  • Meilleurs décors
  • Meilleurs costumes et maquillages
  • Meilleur son
  • Meilleure musique
  • Meilleurs effets visuels


Meilleur documentaire
For Sama ; Honeyland ; Putin's Witnesses ; Selfie ; La Scomparsa du mia madre (La disparition de ma mère)

European Discovery - Prix Fipresci

Aniara de Hugo Lilja, Pella Kågerman ; Atlantique de Mati Diop ; Blind Spot de Tuva Novotny ; Irina de Nadejda Koseva ; Les Misérables de Ladj Ly ; Ray & Liz de Richard Billingham

People's Choice Award - Prix du public

Border de Ali Abbasi ; Cold War de Pawel pawlowski ; Dogman de Matteo Garrone ; Les animaux fantastiques; les crimes de Grindelwald de David Yates ; Girl de Lukas Dhont ; Heureux comme Lazzaro d'Alice Rohrwacher ; Mamma Mia! Here We go again d'Ol Parker ; Douleur et Gloire de Pedro Almodovar ; Le grand bain de Gilles Lellouche ; Parvana de Nora Twomey ; La Favorite de Yorgos Lanthimos ; Les enquêtes du département V: Dossier 64 de Christopher Boe

Prix de la comédie

Ditte & Louise de Niclas Bendixen ; Tel Aviv on Fire de Samej Zoabi ; La Favorite de Yorgos Lanthimos

European University Film Award - Prix des étudiants

Et puis nous danserons de Levan Akin ; Dieu existe, son nom est Petrunya de Teona Stugar Mitevska ; Piranhas de Claudio Giovannesi ; Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma ; Benni de Nora Fingscheidt

Prix de l'animation

Bunuel après l'âge d'or de Salvador Simo ; J'ai perdu mon corps de Jérémy Clapin ; L'extraordinaire voyage de Marona d'Anca Damina ; Les hirondelles de Kaboul de Zabou Breitman et Eléa Gobbé-Mévellec

Prix du court métrage

Dogs barking at birds de Leonor Teles ; Reconstruction de Jiri Havlicek et Ondrej Novak ; The Christmas Gift de Bodan Miresanu ; Les extraordinaires mésaventures de la jeune fille de pierre de Gabriel Abrantes ; Watermelon Juice de Irene Moray

[Adèle Haenel] Le cinéma apporte son soutien, le parquet réagit et l’accusé Christophe Ruggia nie

Posté par vincy, le 7 novembre 2019

adele haenel

Les révélations d'Adèle Haenel à propos du comportement du réalisateur Christophe Ruggia sur le tournage des Diables - emprise, attouchements et harcèlement sexuel. alors qu'elle était mineure - n'en finissent pas d'ébranler (enfin?) le monde du cinéma français. Deux ans après #MeToo, le courage de la comédienne a permis de remettre en pleine lumière la situation des femmes victimes d'abus psychologiques, tactiles ou sexuels.

Le Parquet de Paris s'est auto-saisi hier et a ouvert hier une enquête préliminaire pour "agressions sexuelles" sur mineure de moins de 15 ans "par personne ayant autorité" et "harcèlement sexuel". L'Office central de la répression de la violence faite aux personnes sera chargé de l'enquête.

Une victime sur dix porte plainte

Cette décision est intervenue quelques heures après la déclaration de la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, au micro de France Inter: "Je pense au contraire, surtout avec ce qu'elle a dit, qu'elle devrait saisir la justice, qui me semble être en capacité de prendre en compte ce type de situations". Or, justement, Adèle Haenel n'a pas porté plainte, expliquant à Mediapart que la justice condamne trop peu souvent ce genre d'affaire et reprochant "une violence systémique faite aux femmes dans le système judiciaire". "Je crois en la justice mais elle doit se remettre en question pour être représentative de la société" avait-elle ajouté.

Selon la lettre de l'Observatoire des violences faites aux femmes, 94000 femmes, majeures, ont déclaré avoir été victimes de viols et/ou de tentatives de viol sur l'année 2017. Seulement 18 % se sont rendues dans un commissariat et, parmi elles, 12 % ont décidé de porter plainte. Ce qui fait une victime sur dix.

Le bourreau se fait victime

Christophe Ruggia, l'accusé, a réagit lui aussi, et sans passer par ses avocats. Cramé à coup sûr, exclu de la SRF, il a reconnu l'erreur d'avoir joué avec elle "les pygmalions avec les malentendus et les entraves qu'une telle posture suscite". En gros d'avoir été trop présent. Il réfute toujours les violences qui lui sont imputées. "Je n'avais pas vu que mon adulation et les espoirs que je plaçais en elle avaient pu lui apparaître, compte tenu de son jeune âge, comme pénibles à certains moments. Si c'est le cas et si elle le peut, je lui demande de me pardonner", explique-t-il dans son droit de réponse.

Il nie mais il sait qu'il est déjà jugé. "Mon exclusion sociale est en cours et je ne peux rien faire pour y échapper, Le Moyen-Age avait inventé la peine du pilori mais c'était la sanction d'un coupable qui avait été condamné par la justice. Maintenant, on dresse, hors de tout procès, des piloris médiatiques tout autant crucifiants et douloureux" affirme-t-il. Cette réaction est aussi typique dans ce genre de cas: le bourreau se fait passer pour victime, et démonétisant ainsi la parole, forte et courageuse, de celle qui a parlé et qui a souffert.

Le milieu du cinéma en soutien

Du côté du cinéma, les diverses représentations ont décidé de réagir à leur tour. L'ARP (Auteurs, réalisateurs, producteurs) soutient ainsi "Adèle Haenel dans cette démarche courageuse". La CGT Spectacle affirme: "Il ne faut plus que le cinéma, l'audiovisuel, le spectacle soient des espaces tolérant +au nom de l'art+ la destruction des corps et des vies de celles et ceux qui les fabriquent". Unifrance a condamné "sans réserve tout fait de violence ou de comportement inapproprié" et indique "que l’association restera particulièrement vigilante sur ces points et annoncent l’élaboration prochaine d’une charte à l’attention des artistes et professionnels amenés à participer aux manifestions organisées ou initiées par" l'organisme.

Dans son "soutien sans faille à l'actrice", l'AFAA (Actrices Acteurs de France Associés) rappelle qu'une telle charte existe: "Nous disons aussi qu'il est urgent maintenant que nos partenaires, producteurs audiovisuels et du spectacle vivant, directeurs de théâtre, réalisateurs, scénaristes, musiciens, techniciens, bref toutes les organisations représentatives de nos métiers,se saisissent également du moment."

Sortie DVD : La petite chanteuse de Ladislas Starewitch

Posté par MpM, le 5 novembre 2019

Ladislas Starewitch, cinéaste russe exilé en France, fut un pionnier de l'animation de marionnettes et un précurseur des effets spéciaux réalisés directement devant la caméra. Ses films les plus célèbres (Le rat des villes et le rat des champs, Fétiche mascotte ou encore Le roman de Renard) ont été réalisés en à peine plus d'une décennie, du début des années 20 au milieu des années 30.

Installé à Fontenay-sous-Bois où il installe son propre studio, le réalisateur tourne alors beaucoup (environ deux films par an) et expérimente tout autant. Il poursuit notamment son travail mêlant prise de vues continue et animation, dans des courts métrages réalisés en famille, avec sa fille aînée Irène comme assistante et la cadette, Jeanne, à l'écran, sous le nom de Nina Star. Quatre de ces films (L'épouvantail, Le Mariage de Babylas, La Voix du rossignol, La reine des papillons) ont déjà été édités en DVD en 2013 par Doriane Films. Les trois suivants, La Petite chanteuse des rues (1924), La petite parade (1928) et L'Horloge magique (1928), composent le nouveau programme proposé par l'éditeur sous le titre La petite Chanteuse.

Étrangement, La petite Chanteuse des rues est l'un des films les moins "animés" du cinéaste. On y suit une jeune adolescente (incarnée par Jeanne Starewitch, donc) qui décide de chanter dans la rue en compagnie de son singe pour aider sa mère à payer ses dettes et récupérer la maison dont les a expulsées un usurier plus qu'antipathique. Le fond éminemment social de l'intrigue n'empêche pas une certaine forme d'humour, porté justement par le personnage du singe, tantôt réel, tantôt marionnette animée.

C'est d'ailleurs lui qui finit par sauver la situation en terrorisant au passage le personnage du "méchant". Pris par l'espièglerie du récit autant que par sa dimension tragique, on oublie bien vite que le singe n'est pas toujours réel pour ne voir que ses tentatives audacieuses pour sauver sa maîtresse (et au passage retrouver sa liberté). L'animation est ici entièrement au service du film, destinée à demeurer invisible pour ne pas gâcher le plaisir et l'émerveillement du spectateur.

Moins atypique dans l'oeuvre de Starewitch, La petite parade est au contraire animé à 90%. Inspiré d'un conte d'Andersen (L'intrépide soldat de plomb), il met en scène une danseuse, ses deux soupirants (le Casse-Noisette et un soldat) et le diable, échappé de sa boîte grâce à l'intervention malicieuse d'une poupée de chiffon. Interviennent également des rats et même une sirène. Ce que l'on admire dans ce récit plein de fantaisie au rythme effréné, ce sont les multiples métamorphoses qui y sont présentées, à l'image de ces cigares qui deviennent des danseuses, et du diable qui ne cesse lui-aussi de se transformer devant la caméra, comme autant de tours de magie.

L'autre élément frappant est la vitesse de l'animation, qu'il s'agisse d'une foule de rats attaquant un château-fort ou d'une course poursuite frénétique entre la petite danseuse, le diable déguisé en rat, et un chat valeureux. Le récit semble ainsi ne jamais reprendre son souffle, jusqu'à la conclusion à la fois poétique (deux âmes enfin unies) , morale (la punition du casse-noisettes) et légèrement inquiétante : retourné dans sa cachette initiale, le diable est prêt à sévir à nouveau.

Incontestablement, L'horloge magique est le plus abouti des trois films, et c'est d'ailleurs le plus long. Plusieurs récits s'y mêlent étroitement : la réalité, filmée en prise de vues réelles, le monde de l'horloge, d'inspiration médiévale, et l'univers fantastique de la forêt dans lequel sera possible la rencontre entre la petite-fille de l'horloger et le valeureux chevalier de l'horloge. En plus de la tonalité singulière du récit, qui joue ironiquement avec la vie et la mort de ses personnages ("Réveille-toi, tu vas rater l'heure de ta mort !" s'exclame un personnage), on est frappé par cette horloge monumentale qui semble une allégorie de l'existence. D'autant que lorsque la fillette recule l'heure du destin, les personnages redeviennent de simples figurines que l'on peut jeter par la fenêtre. Certes sauvées d'une mort certaine, elles connaissent l'humiliation d'être des pantins privés de libre arbitre.

Pour réaliser cette histoire ambitieuse aux multiples niveaux de lecture, Starewitch fait une démonstration de sa maîtrise des effets spéciaux, à grands renforts de surimpressions, de rétro-projections et de technique du "cache-contre cache" qui permettent aux créatures de toutes sortes de cohabiter dans un même plan. L'un des passages les plus impressionnants est d'ailleurs celui où Nina rétrécit sous nos yeux puis est hissée, minuscule, dans la main du monstre de la forêt. Il ne faudrait pourtant pas réduire L'horloge magique à un catalogue de prouesses techniques. Au contraire, le spectateur oublie en un instant cet aspect du récit pour se concentrer sur son humour, sa vivacité et son irrévérence. C'est pour cette raison que l'on peut revoir l'oeuvre de Starewitch presque un siècle plus tard, à l'ère du tout numérique, et y trouver un plaisir inchangé : chez lui, le trucage, l'effet spécial et les rouages de l'animation demeurent en permanence au service d'une certaine idée de la poésie et du cinéma de divertissement.

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La petite chanteuse de Ladislas Starewitch, 1924-1928, Doriane Films

Suite aux révélations d’Adèle Haenel, la SRF exclut Christophe Ruggia

Posté par vincy, le 4 novembre 2019

C'est une première. La Société des réalisateurs de films a décidé de lancer aujourd'hui la procédure de radiation de l'un de ses membres, Christophe Ruggia. Suite à l’enquête parue dans Médiapart, la SRF a exprimé "son soutien total, son admiration et sa reconnaissance à la comédienne Adèle Haenel, qui a eu le courage de s’exprimer après tant d’années de silence. Nous tenons à lui dire que nous la croyons et que nous en prenons acte immédiatement, sans nous dérober à notre propre responsabilité et sans faire l’économie de notre remise en question collective." Christophe Ruggia pourra s'expliquer ou contester son exclusion face au conseil d’administration.

Dans cette enquête de plusieurs mois, réalisée et publiée par Mediapart, l'actrice doublement césarisée et d'autres témoins ont confié les agissements du réalisateur lors du tournage et de la promotion de son film Les Diables. Christophe Ruggia réfute les accusations, et a fait savoir, par ses avocats n'avoir "exercé un harcèlement quelconque ou toute espèce d’attouchement sur cette jeune fille alors mineure". Adèle Haenel, qui avait alors entre 12 et 15 ans (Christophe Ruggia avait entre 36 et 39 ans) a expliqué que le cinéaste avait exercé son emprise sur elle, des attouchements et du harcèlement sexuel.

"Je veux dénoncer le système de silence et de complicité qui, derrière, rend cela possible"

La SRF explique qu'elle a été "est un des lieux qui a fait exister Christophe Ruggia fortement depuis 2003". Celui-ci en a été le co-président en en 2006, 2001, 2013, 2014 et 2018. "La grande majorité des membres du Conseil d’Administration ignorait tout de cette histoire, certain.e.s connaissaient la dynamique d’emprise révolue, tous ignoraient la dimension sexuelle de cette affaire" précise l'organisation.

"D’abord, il y a eu la « honte », profonde, tenace, indélébile. Puis la « colère », froide, qui ne l’a pas quittée pendant des années. Et enfin l’apaisement, « petit à petit », parce qu’il a bien fallu « traverser tout cela ». En mars 2019, la colère s’est ravivée, « de manière plus construite », à l’occasion du documentaire de la chaîne HBO sur Michael Jackson, qui révèle des témoignages accablants accusant le chanteur de pédocriminalité, et met à jour une mécanique d’emprise" raconte Médiapart. "La honte isole. La prise de parole nous met en commun, ça fait de nous un peuple. C'est important de constituer ce peuple militant, actif qui contribue à la société" explique l'actrice dans son interview vidéo sur Médiapart.

Adèle Haenel a finalement exprimé sa colère. "Je veux raconter un abus malheureusement banal, et dénoncer le système de silence et de complicité qui, derrière, rend cela possible" explique-t-elle au site. Celui-ci a vérifié son témoignage auprès de ses proches, de la directrice de casting, de membres de l'équipe du film, dont l'acteur Vincent Rottiers et de la réalisatrice Mona Achache, ex-compagne de Christophe Ruggia. dèle Haenel, à l'époque, décide de renoncer au cinéma face à cette violence: "J'avais le jeu dans les tripes, c'était ce qui me faisait me sentir vivante. Mais pour moi, c'était lui le cinéma, lui qui avait fait que j'étais là, sans lui je n'étais personne, je retombais dans un néant absolu."

"En tant que cinéastes nous devons questionner notre pouvoir et nos pratiques"

"Comprendre et mettre au jour les mécanismes d’impunité est la grande leçon et le sens même de la démarche de la comédienne. Adèle Haenel a décidé de porter une parole politique en offrant son histoire à autopsier et investiguer. Nous saluons sa générosité et son courage.  Nous nous engageons pleinement dans cette dynamique. En tant que cinéastes nous devons questionner notre pouvoir et nos pratiques, sur les plateaux et comme collectif. C’est aussi notre vocation et notre responsabilité" rappelle la SRF.

En pleine affaire Weinstein, la Société des réalisateurs de films s’engageait à "œuvrer pour une révolution des rapports hiérarchiques dans l’industrie du cinéma ncore trop inégalitaire, fortement hiérarchisée", contre les "abus de pouvoir, centralisation du pouvoir dans les mains des mêmes, dérives sexuelles s’appuyant sur la part affective à l’œuvre dans le processus de fabrication des films." En France, peu d'affaires ont été révélées, hormis le cas de Luc Besson et celui, plus récent de Patrick Bruel, sans que cela n'affecte réellement, pour l'instant leur carrière. Ruggia, quant à lui, n'a rien tourné depuis dans la tourmente en 2012.

"Je dois le fait de pouvoir parler à celles qui ont parlé avant dans le cadre de #Metoo"

Une relation, selon les termes de Médiapart, "exclusive" et "trop affective", qui aurait conduit à l’occasion de la tournée promotionnelle du film à du "harcèlement sexuel". Pour l'actrice, la justice n'était pas la réponse, car, selon elle, les tribunaux condamnent peu les agresseurs: "La justice nous ignore, on ignore la justice" déclare-t-elle. "Je dois le fait de pouvoir parler à celles qui ont parlé avant dans le cadre de #Metoo. C'est un responsabilité pour moi, aujourd'hui je ne suis pas dans la même précarité que la plupart des gens à qui ça arrive. Je voulais leur parler à eux. Leur dire qu'ils ne sont pas seuls" clame-t-elle dans la vidéo mise en ligne sur Mediapart.

Palmarès, films à suivre et animation russe : retour sur la 15e édition de Mon premier festival

Posté par MpM, le 4 novembre 2019

La 15e édition de Mon Premier Festival s'est achevée mardi 29 octobre par l'annonce très attendue du palmarès. C'est le film néerlandais Fight girl de Johan Timmers (sans date de sortie pour le moment) qui a séduit le jury composé d'enfants. Il s'agit de l'histoire de Bo, une jeune fille en souffrance, qui retrouve un équilibre à travers la pratique de la boxe.

Pour la première fois, le jury a également récompensé la meilleure musique de film. Fabien Leclercq (alias Le Motel) a ainsi été distingué pour Binti de Frederike Migom (sans date de sortie) qui aborde à hauteur d'enfants la question des sans-papiers. Le public avait lui aussi la possibilité de voter, et c'est La dernière vie de Simon de Léo Karmann (attendu en salle en 2020) qui a été plébiscité par les jeunes spectateurs. On y suit Simon, 8 ans, un orphelin qui rêve d'être adopté. Mais Simon a un pouvoir secret : celui de pouvoir prendre l’apparence de chaque personne qu’il a déjà touchée.

Le Festival fut également l'occasion de repérer les films à suivre parmi les avant-premières. Pour les plus jeunes, le programme Zibilla ou la vie zébrée raconte avec douceur et humour des histoires d'exclusion qui font toujours écho d'une manière ou d'une autre avec leur vécu. Zibilla, l'héroïne du court métrage principal, est une enfant adoptée qui vient s'installer dans une nouvelle ville. Problème : elle est une zèbre dans un monde de chevaux. Mais c'est en affirmant sa personnalité bien à elle qu'elle viendra à bout des moqueries et des préjugés.

A voir à partir de 5 ans, Le monde animé de Grimault permet de redécouvrir 4 films du maître de l'animation française : L'épouvantail, Le Voleur de paratonnerres, La Flûte magique et Le Petit soldat. Des histoires drôles et subversives dans lesquelles le faible défie systématiquement le fort ou l'autorité, et qui sont un formidable moyen de (re)nouer avec l'oeuvre sautillante, ironique et poétique de Grimault. A redécouvrir sur grand écran dès le 6 novembre, accompagné d'un autre programme, destiné aux plus grands, qui comporte quatre autres films donnant un large aperçu de la palette sensible du réalisateur.

Pour les plus grands (à partir de 8 ans), le festival a également permis de découvrir L'extraordinaire voyage de Marona d'Anca Damian plusieurs mois avant sa sortie (8 janvier). Le film qui a enchanté Annecy, et dont nous avons déjà eu l'occasion de vous dire le plus grand bien, à la fois en raison de sa sensibilité, de sa fantaisie, et de sa liberté, figure définitivement parmi les incontournables de 2020.

Enfin, Mon Premier festival est toujours l'occasion de se pencher sur une cinématographie particulière, et cette année les jeunes festivaliers étaient particulièrement gâtés puisqu'il s'agissait de l'animation russe ! Ils ont ainsi pu se régaler toute la semaine avec différents programmes de courts métrages, un focus sur le réalisateur Garri Bardine et la (re)découverte de deux très beaux longs métrages : Tout en haut du monde de Rémi Chayé (2016) et La Reine des neiges de Lev Atamanov (1957).

Garri Bardine demeure irrémédiablement l'un des cinéastes d'animation russes les plus captivants de ces trente dernières années. En plus de son humour et de sa fantaisie, flagrante dans l'ode à l'imagination et à l'enfance qu'est La Nounou, dans lequel un petit garçon se crée de toutes pièces une nounou aux nombreux pouvoirs magiques, on est frappé par la manière dont il utilise les conventions de l'animation comme éléments de l'intrigue, notamment en jouant sans cesse sur les matériaux, ou la matière, qui constituent ses personnages.

Dans La Nounou, on assiste à rien de moins que la mise en abyme du processus de création de la marionnette. Dans Le Loup gris et le petit chaperon rouge, ce sont les corps qui s'étirent, s'allongent, se déforment au gré de l'histoire et de ses péripéties, jusqu'à l'explosion finale du ventre du loup. Dans Hop-là badigeonneurs, les multiples accidents provoqués par les apprentis-peintres les obligent sans cesse à se remodeler eux-mêmes. Dans Adagio, allégorie anxiogène sur le rejet de l'Autre et le fanatisme, les personnages sont de simples feuilles de papier pliées, uniformément grises, qui renvoient à une humanité universelle. Il y a ainsi chez le réalisateur une volonté d'améliorer sans cesse la réalité grâce aux artifices de l'animation qui lui permettent d'ajouter des niveaux de lecture complémentaires.

Il faut enfin souligner l'oeuvre d'un autre maître de l'animation russe, Youri Norstein, dont étaient présentés deux courts métrages : Le Héron et la cigogne et Le Hérisson dans le brouillard. On entre avec ces deux films dans l’œuvre particulière du cinéaste russe à qui l’on doit également le magnifique Conte des contes. Dépouillé, dans un registre de couleurs qui se cantonne à un camaïeu de gris, de verts foncés, de marron, de noirs et de blanc, les deux films sont des démonstrations de la finesse et de la poésie mélancolique de Norstein. Dans le premier, un héron et une cigogne ne cessent de se courtiser puis de se refuser, à tour de rôle. Dans le second, un petit hérisson se rend chez son ami l’ourson pour observer les étoiles, mais se trouve pris dans une nappe de brouillard qui rend inquiétant le décor familier.

Dans les deux films, les éléments météorologiques (la pluie dans l’un, le brouillard dans l'autre) influent sur l’ambiance feutrée et intimiste des récits, brouillent l’image, et vont dans le cas du hérisson jusqu’à plonger le spectateur dans une angoisse diffuse. Dans ce dernier, on est par ailleurs émerveillé par le rendu duveteux du brouillard, le travail sur les ombres, et la tension anxiogène créée à partir d’un jeu de « caméra » subjective qui nous met à la place du hérisson, soudain plongé dans un monde flou où tout est menace potentielle. Un conte délicat qui se termine bien mais laisse malgré tout notre hérisson songeur et mélancolique, et le spectateur stupéfait par une telle splendeur.  D'ailleurs, entre les enfants qui assistaient à la projection, et les adultes présents, on ne saurait dire lesquels étaient les plus émerveillés.

Halloween en restant à la maison avec Little Monsters et Girls with balls

Posté par kristofy, le 31 octobre 2019

C'est la fête d'Halloween! Si vous allez au cinéma avec votre déguisement le plus mortel vous aurez le choix entre Retour à Zombieland (suite en forme de remake de Bienvenue à Zombieland) ou Doctor Sleep (remake en forme de suite de Shinning). Si vous préférez plutôt manger plus de bonbons et de pizza avec différents breuvages "citrouillés" en compagnie d'amis, autour du canapé pour une soirée cinéma, c'est l'une des rares occasions où nous pouvons recommander des films en streaming plutôt que de sortir au ciné.

Voici une suggestion de programme Grindhouse avec 2 films à découvrir chez soi, du cinéma d'horreur qui fait peur mais pas trop et qui fait plutôt rire, parfait donc Halloween...

LITTLE MONSTERS, en e-cinéma :
Le pitch halloweenesque : Dave est un apprenti musicien raté, un presque trentenaire immature et irresponsable, un mec qui se fait larguer par sa copine et qui va devoir squatter sur le canapé de sa soeur déjà maman d'un petit garçon (bref un looser comme on aime). Dave va devoir rendre service et s'occuper de son neveu : ne pas lui montrer des jeux-vidéo violents, faire attention à ses allergies alimentaires, l'emmener à l'école maternelle, bref que des trucs d'adulte vraiment compliqués pour lui. Il découvre que l'institutrice Miss Caroline est très charmante alors comme un idiot il se porte volontaire comme accompagnateur pour une sortie scolaire éducative dans une ferme à découvrir des animaux. Se retrouver à gérer une vingtaine d'enfants en plus de son neveu ressemble à un cauchemar mais si il faut en passer par là pour séduire l'institutrice... Aux environ de cette ferme il y a une base militaire où se déroule un grave incident, grave au point qu'une épidémie de centaine de zombies avides de chair humaine seront autour d'eux . Face à cette invasion de zombies qui mangent des gens il va falloir éviter que les enfants aient trop peur et essayer de les sauver...

Little Monsters de l'australien Abe Forsythe avait fait le buzz en janvier lors du festival de Sundance. Il a ensuite été compétition au célèbre BIFFF (le festival fantastique de Bruxelles), où il a gagné la plus haute récompense le Corbeau d'or. Aux Etats-Unis la sortie du film a comviné une sélection de salles de cinéma et une sortie en vàd sur la plateforme Hulu. En France Little Monsters était à découvrir en avant-première dans certaines salles de cinéma (du réseau CGR) le 18 octobre, mais il sort officiellement ce 31 octobre en e-cinéma, à temps pour Halloween !

Pour les nostalgiques de comédie horrifique bourrée de gags et plein de zombies façon Shaun of the dead, voila enfin un film qui reprend le flambeau de l'humour geek : Little Monsters contient de multiples références à la pop culture, comme Dark Vador et Taylor Swift. Surtout ce film offre un rôle surprenant à la star Lupita Nyong'o (Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle pour Twelve Years a Slave, puis à l'affiche de Black Panther de Ryan Coogler et de Us de Jordan Peele), qui se révèle ici irrésistible de charme et de drôlerie en tant qu'institutrice qui doit toujours garder son sang froid pour amuser les enfants alors qu'ils sont entourés de zombies affamés. Little Monsters est une 'big hearted zombie comedy' et simplement le nouveau film idéal pour débuter une soirée cinéma Halloween...

GIRLS WITH BALLS, sur Netflix :
Le pitch halloweenesque : Une équipe féminine de volley qui est meilleure à se disputer dans le bus qu'à marquer des points sur le terrain et leur entraineur se perdent dans une forêt. La seule auberge du coin est d'autant plus louche qu'elle rassemble une bande de chasseurs amateurs de viande douteuse : la bande de nanas en petits shorts va devenir leurs proies. Elles vont devoir essayer enfin de faire preuve de cohésion ensemble et d'esprit d'équipe pour éviter de ne pas toutes mourir...

Girls with balls est un premier film français de Olivier Afonso, connu pour être le spécialiste des maquillages sanglants et effets spéciaux de quantité d'autres films comme Grave de Julia Ducournau, ou Le Daim de Quentin Dupieux, Zombi Child de Bertrand Bonello, Un couteau dans le cœur de Yann Gonzalez, Rock'n roll de Guillaume Canet, et surtout de la plupart des films de genres français (Frontère(s), Mutants, Vertige, La Horde, Livide, Goal of the dead, La nuit a dévoré le monde...). Il a donc une expertise dans les blessures mortelles et autres carnages physiques. Girls with balls devait sortir en salles après quelques festivals (fantastique à Paris, comédie à l'Alpe d'Huez) mais un problème de distributeur en difficulté fait que le film s'est retrouvé sur Netflix : c'est donc sur cette plateforme qu'il faut le découvrir.

Olivier Afonso réalise ici son premier film, une comédie horrifique telle qu'on n'en a plus vu depuis Severance (de Christopher Smith), avec une équipe de volleyeuses traquées par des chasseurs, guidés par l'inquiétant Denis Lavant. Le film est d'autant plus "séduisant" qu'il réunit une bande d'actrices qu'on voit trop peu et qui trouvent ici chacune plusieurs séquences pour briller : Manon Azem, Louise Blachère, Tiphaine Daviot, Margot Dufrene, Anne-Solenne Hatte, Camille Razat, Dany Verissimo. L'autre bonne surprise est justement que Girls with balls est à sa manière féministe : des héroïnes qui se défendent contre des pervers. C'est un peu violent mais aussi très drôle, parfait pour terminer Halloween...