Isild Le Besco réalise un clip contre les violences conjugales

Posté par kristofy, le 6 avril 2020

La Fondation Des Femmes alerte à propos des violences conjugales : "Pendant cette période de confinement, les violences conjugales ne cessent pas. Pire encore, elles peuvent s’accentuer et il peut être difficile pour les femmes d’appeler à l’aide lorsqu’elles sont confinées avec leur agresseur. Agissez, faites un don." Parce qu’il peut être vital de fuir un conjoint violent, des associations s'engagent par exemple à assurer une aide par téléphone et à trouver des chambres où se réfugier...

Pour soutenir cette cause l'actrice/réalisatrice Isild Le Besco partage une chanson  de sensibilisation inciter à faire un don à la Fondation des Femmes (sur leur site), avec le soutien de Kering.

  • Quelques numéros de téléphone utiles:
    39 19 (Violences Femmes Info)
    0800 059595 (SOS Viols Femmes Informations)
    119 (Allô Enfance en Danger)

Les paroles de cette chanson « En Mon Cœur » sont de Isild Le Besco, et elle a réalisé sa mise en image avec une chorégraphie dansée par une dizaine de femmes, dont celles qui ont prêtée leur voix à l'enregistrement de la chanson : Isild Le Besco donc, les actrices Julie Gayet, Caroline Ducey, Rachel Khan, l'humoriste Kee-Yoon Kim, et la chanteuse de Sylvie Hoarau (moitié de Brigitte).

[Adèle Haenel] Le cinéma apporte son soutien, le parquet réagit et l’accusé Christophe Ruggia nie

Posté par vincy, le 7 novembre 2019

adele haenel

Les révélations d'Adèle Haenel à propos du comportement du réalisateur Christophe Ruggia sur le tournage des Diables - emprise, attouchements et harcèlement sexuel. alors qu'elle était mineure - n'en finissent pas d'ébranler (enfin?) le monde du cinéma français. Deux ans après #MeToo, le courage de la comédienne a permis de remettre en pleine lumière la situation des femmes victimes d'abus psychologiques, tactiles ou sexuels.

Le Parquet de Paris s'est auto-saisi hier et a ouvert hier une enquête préliminaire pour "agressions sexuelles" sur mineure de moins de 15 ans "par personne ayant autorité" et "harcèlement sexuel". L'Office central de la répression de la violence faite aux personnes sera chargé de l'enquête.

Une victime sur dix porte plainte

Cette décision est intervenue quelques heures après la déclaration de la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, au micro de France Inter: "Je pense au contraire, surtout avec ce qu'elle a dit, qu'elle devrait saisir la justice, qui me semble être en capacité de prendre en compte ce type de situations". Or, justement, Adèle Haenel n'a pas porté plainte, expliquant à Mediapart que la justice condamne trop peu souvent ce genre d'affaire et reprochant "une violence systémique faite aux femmes dans le système judiciaire". "Je crois en la justice mais elle doit se remettre en question pour être représentative de la société" avait-elle ajouté.

Selon la lettre de l'Observatoire des violences faites aux femmes, 94000 femmes, majeures, ont déclaré avoir été victimes de viols et/ou de tentatives de viol sur l'année 2017. Seulement 18 % se sont rendues dans un commissariat et, parmi elles, 12 % ont décidé de porter plainte. Ce qui fait une victime sur dix.

Le bourreau se fait victime

Christophe Ruggia, l'accusé, a réagit lui aussi, et sans passer par ses avocats. Cramé à coup sûr, exclu de la SRF, il a reconnu l'erreur d'avoir joué avec elle "les pygmalions avec les malentendus et les entraves qu'une telle posture suscite". En gros d'avoir été trop présent. Il réfute toujours les violences qui lui sont imputées. "Je n'avais pas vu que mon adulation et les espoirs que je plaçais en elle avaient pu lui apparaître, compte tenu de son jeune âge, comme pénibles à certains moments. Si c'est le cas et si elle le peut, je lui demande de me pardonner", explique-t-il dans son droit de réponse.

Il nie mais il sait qu'il est déjà jugé. "Mon exclusion sociale est en cours et je ne peux rien faire pour y échapper, Le Moyen-Age avait inventé la peine du pilori mais c'était la sanction d'un coupable qui avait été condamné par la justice. Maintenant, on dresse, hors de tout procès, des piloris médiatiques tout autant crucifiants et douloureux" affirme-t-il. Cette réaction est aussi typique dans ce genre de cas: le bourreau se fait passer pour victime, et démonétisant ainsi la parole, forte et courageuse, de celle qui a parlé et qui a souffert.

Le milieu du cinéma en soutien

Du côté du cinéma, les diverses représentations ont décidé de réagir à leur tour. L'ARP (Auteurs, réalisateurs, producteurs) soutient ainsi "Adèle Haenel dans cette démarche courageuse". La CGT Spectacle affirme: "Il ne faut plus que le cinéma, l'audiovisuel, le spectacle soient des espaces tolérant +au nom de l'art+ la destruction des corps et des vies de celles et ceux qui les fabriquent". Unifrance a condamné "sans réserve tout fait de violence ou de comportement inapproprié" et indique "que l’association restera particulièrement vigilante sur ces points et annoncent l’élaboration prochaine d’une charte à l’attention des artistes et professionnels amenés à participer aux manifestions organisées ou initiées par" l'organisme.

Dans son "soutien sans faille à l'actrice", l'AFAA (Actrices Acteurs de France Associés) rappelle qu'une telle charte existe: "Nous disons aussi qu'il est urgent maintenant que nos partenaires, producteurs audiovisuels et du spectacle vivant, directeurs de théâtre, réalisateurs, scénaristes, musiciens, techniciens, bref toutes les organisations représentatives de nos métiers,se saisissent également du moment."

Cannes 2019: désobéissance, violences, romances et déchéances en compétition

Posté par vincy, le 27 mai 2019

Il est temps de faire le bilan de ce 72e Festival de Cannes. Peu importante les récompenses ou même nos préférences, il s'agit de voir les tendances vers lesquelles les cinéastes ont voulu nous emmener cette année.

Dans une compétition finalement assez sombre, on remarque que les réalisateurs ont malgré tout choisi de nous donner un peu d'espoir ou, au minimum, emprunter au cinéma de genre les recettes du divertissement pour ne pas trop nous plomber. Car une chose est certaine: le monde tourne mal. Pas étonnant que mélancolie, amours contrariés, ou différentes addictions s'invitent dans ce tableau plus engagé que romanesque. Cela explique aussi pour quoi le cinéma de genre (avec parfois de surprenants artifices: ovnis, drones, plantes psychotropes, ...) a été formellement si utilisé, entre fiction du réel et anticipation des bouleversements.

Ultra-violence

Le sang a fusé à Cannes. Et les cadavres ne se comptaient plus à la fin du festival. Des zombies qui massacrent un bled normal de l'Amérique de Trump (The Dead d'on't Die), des gamins qui mettent le feu à leur banlieue (Les Misérables), des occidentaux un peu racistes qui s'apprêtent à "génocider" un village entier (Bacurau), une agression banale mais pas anodine (Sorry We Missed You), des crimes épouvantables pour sauver sa peau (Le lac des oies sauvages), un tir au pigeon sans pitié (Les siffleurs), une attaque, récidiviste, d'un gamin contre sa prof (Le jeune Ahmed), le final au lance-flamme d'un carnage annoncé (Once Upon a Time in Hollywood), la folie meurtrière des déclassés (Parasite), la série de meurtres et l'attentat terroriste de la Cosa Nostra (Le traître)...

Ce Festival n'était pas particulièrement bienveillant. Peu importe les motifs de tant de haine ou de sang versé, les cinéastes n'ont pas lésiné sur la violence. Décapitations (dans plusieurs films), coups de couteau, éventrement avec un parapluie, explosion d'autoroute, carnage canin, ... l'agressivité générale était palpable, comme pour mieux traduire le chaos qui nous entoure et la perte de repères qui nous envahit.

Avis de dépression

A ce monde sans pitié, s'ajoute un ennemi invisible mais omniprésent: le capital. Ce n'est pas le seul, mais celui-là est bien présent. D'ailleurs, le président du jury, Alejandro González Iñárritu, l'a bien indiqué: "le cinéma doit essayer d'élever la conscience sociale globale."

Pessimistes ou nihilistes, les réalisateurs en ont même souvent fait la cause majeure des dysfonctionnements de la société, des luttes de classes à la fracture sociale, de l'incapacité à vivre ensemble. C'est la métaphore des zombies dans un monde qui s'effondre (The Dead don't Die), l'impasse où s'affrontent flics et jeunes, dont le seul lien est la misère, dans une cage d'escalier (Les Misérables), l'exploitation économique révoltante des travailleurs (Sorry We Missed You), le franchissement de la ligne rouge hors de la loi (Le traitre, Le Lac des oies sauvages, Les siffleurs), l'affrontement idéologique entre deux populations antagonistes (Once Upon a Time in Hollywood, Une vie cachée), le radicalisme religieux contre l'esprit de tolérance (Le jeune Ahmed), la rage des femmes contre ceux qui ont poussé les hommes à fuir la pauvreté (Atlantique), la lutte quotidienne contre les petits délits qui pourrissent la vie dans une ville ultra-pauvre (Roubaix, une lumière), les inégalités sociales et le mépris de classe (Parasite, Bacurau). Qu'ils soient dans une précarité persistante ou dans l'envie d'avoir accès à des richesses, les personnages, cette année, étaient en colère ou prêts à tout pour avoir une part de richesses.

Et quand ils l'avaient, ils n'étaient pas forcément très heureux. Car l'autre versant de la compétition révélait une dépression psychologique. Ça ne va très fort dans la famille de Sorry we Missed You. Dans Little Joe, il faut une fleur génétiquement modifiée pour évacuer nos douleurs et névroses. Le cinéaste de Douleur et Gloire ne va pas très bien, au point de tester un autre paradis artificiel, l'héroïne. Il y a beaucoup de craquages de nerfs dans Le jeune Ahmed. La mort annoncée de la mère entraîne toute une famille dans un voyage où la déprime l'emporte dans Frankie. Que dire de cette star d'Hollywood désormais has-been qui se noie dans l'alcool (Once Upon a Time in Hollywood)? La psy Sibyl perd pieds et renoue aussi avec l'alcool parce qu'elle n'a pas digéré une vieille passion. Matthias et surtout Maxime errent également au bord du précipice psychologique par manque d'amour. Enfin, Elia Suleiman s'égare à Paris et New York, désespéré et ahuri par la situation en Palestine dans It must be Heaven, portrait d'un monde aliéné et sursécurisé.

Résistance

Mais un trait commun relie pas mal de ces films, et donc de ces situations volcaniques et de ces personnages rincés. Pour la plupart, ils résistent. Et cela donne souvent les meilleurs films de la compétition, même si certains échouent. Alors que ceux qui ne se battent pas (Sorry We Missed You, Le jeune Ahmed) courent à la catastrophe.

Les flics de The Dead don't Die ne s'avouent pas vaincus même si l'extra-terrestre préfère quitter la bataille, faute de sauvetage possible. Les deux camps dans Les Misérables s'affrontent jusqu'au dernier, quitte à s'autodétruire. Les femmes de Dakar font leur loi face au riche promoteur qui ne paye pas (Atlantique). Dans Little Joe, celle par qui la catastrophe arrive essaie de réparer les effets de sa monstrueuse fleur, ni bio ni éthique. Douleur et Gloire est davantage un acte de résistance personnelle: à la douleur, à la dépression et au déclin. Pas loin de Sibyl, même si elle semble plus vulnérable.

Que ce soient Les siffleurs, Le traître ou Le Lac des oies sauvages, les "héros", pas forcément des gentils, cherchent à survivre malgré leurs torts. Ils résistent à leur façon contre une justice corrompue, une mafia toute-puissante ou un Etat-policier impitoyable. On se bat contre son ennemi: le cancer (Frankie), les conventions (Portrait de la jeune fille en feu), les hippies illuminés (Once Upon a Time in Hollywood), les délinquants et menteurs (Roubaix, une lumière), la domination masculine (Mektoub My Love Intermezzo), les sociétés sécuritaires (It Must Be Heaven). On combat aussi pour accéder, par tous les moyens, à une vie meilleure même si on nous traite comme des cafards (Parasite).

Mais la plus belle bataille est sans doute du côté d'Une vie cachée et de Bacurau, où la résistance rime avec désobéissance civile. Chez Malick, elle emprunte la voie de la Foi, une élévation spirituelle d'un objecteur de conscience préférant se sacrifier plutôt que de se compromettre. Chez Mendonça Filho et Dornelles, c'est plutôt une désobéissance civile, à la Astérix, où tout un village est prêt à en découdre pour faire justice.

Romances et (im)pudeurs

Pour alléger tout ça, certains films tentaient la voie plus convenue de l'amour. Sous toutes ses formes. Pourtant, le sexe était assez absent. Pas la tête au cul semble-t-il. Hormis quelques plans suggérés dans Bacurau, les draps qui recouvrent les corps nus des deux amantes dans Portrait de la jeune fille en feu, un sicilien qui assume sa libido, sans montrer grand chose, dans Le Traitre, il n'y a eu que quatre moments où le sexe était visible ou palpable. Xavier Dolan s'offre ainsi un hommage à la scène de sexe de Titanic avec Matthias et Maxime, dans une buanderie. On ne voit pas grand chose puisque le couple s'arrête au moment d'arriver au slip mais on devine les triques. Trop de pudeur. On préfèrera l'enlacement sensuel du couple de riches dans Parasite, assumant parfaitement une sexualité hédoniste sans pénétration, mais non dénuée de fantasmes. Dans Les Siffleurs, la femme fatale simule un scène de sexe assez classique avec un flic. Beau déhanché. Mais fake. Virginie Efira (Sibyl) se donne davantage à Niels Schneider en exposant son sexe, doigté par l'amant, puis à cheval sur lui devant un feu de cheminée. De l'érotique soft. Tellement soft que pour une fois Gaspard Ulliel ne montre que son bassin moulé dans un boxer de bain. Finalement, il ne reste que le quart d'heure de cunnilingus dans Mektoub My Love: Intermezzo. Le kamasutra y passe. Bon pour Pornhub ou presque puisque le docile lécheur, bien soumis, et qui ne semble pas la faire jouir malgré son acharnement, ouvre à peine son jean's et ne paraît même pas bander.

Mais cela ne manquait pas de romances et même de bromances (Tarantino, Dolan), gays, lesbiennes, hétéros, bisexuelles. Cependant, une fois les 21 films vus, on note que tous les amours sont contrariés, n'aboutissent pas ou finissent en lambeaux. Dans Atlantique, le petit ami s'exile. Dans Sorry We Missed You, le mari fuit vers sa perte. Dans Little Joe, le couple Emily Beecham-Ben Whishaw ne conclue pas. Dans Douleur et Gloire, le réalisateur ne fait que ressasser ses amants passés et vit seul. Son grand amour - sa mère - est ce qui le maintient à flot. Dans Le Lac aux oies sauvages, l'homme traqué court à sa perte, laissant sa femme et sa maîtresse à quai. Avec Portrait de la jeune fille en feu, les deux femmes vivent une passion étincelante mais sans issue. Côté Frankie, les couples se défont, parce qu'ils ne partagent pas les mêmes intérêts ou parce que la mort est au bout du chemin. La mort est aussi la faucheuse idéale pour séparer des couples unis et amoureux dans Parasite. On ne sait pas trop ce qu'il adviendra de Matthias et Maxime, qui traversent le film profondément ébranlés par leur baiser, mais une chose est certaine: Matthias devra faire un choix entre sa femme ou son ami. Chez Kechiche, tous les personnages de Mektoub My Love: Intermezzo s'interrogent sur la sincérité de leurs sentiments. Dans Sibyl, ce n'est qu'adultère, passion impossible, séparation attendue et finalement amours trahis.

Il reste malgré tout l'histoire d'amour inattendue dans Les siffleurs. La seule fin réellement positive de tout ce festival. Puisque dans Une vie cachée, le choix du mari, accepté par l'épouse, est fatal. C'était pourtant le grand et beau couple de cinéma de ce Festival.

Miroir

La compétition cannoise a donc reflété un état du monde ébranlé et un portrait de gens déstabilisés, quand ils n'étaient pas déséquilibrés. Les cinéastes ont pour cela puisé dans l'imaginaire inspiré du réel, et même de leur propre vie. Autofiction ou mise en abyme de leur réalité. Douleur et gloire en est la quintessence mais ce n'est pas le seul puisqu'on pourrait citer Portrait de la jeune fille en feu (autoportrait déguisé), Once Upon a Time in Hollywood (nostalgie narcissique assumée), Frankie (univers personnel revendiqué), Mektoub My Love: Intermezzo (jeunesse et obsessions revisitées) et It Must Be Heaven (autobiographie transformée). On peut même aller plus loin avec la cité des Bosquets de Ladj Ly (Les misérables), le Montréal de Dolan (qui se met en scène) dans Matthias et Maxime, la ville de Desplechin dans Roubaix une lumière, ou le Nordeste de Mendonça Filho dans Bacurau.

A Cannes, on voyage toujours. Cette année ce fut une exploration de l'intimité des cinéastes et une aventure sociologique de ce qu'ils ont observé. De la douleur et aucune gloire. Un paradis qui a les allures de l'enfer. Des misérables et des traîtres. Même s'il y a un peu de lumière au bout des tunnels, on revient du festival avec le sentiment que la planète est en feu.

Le rapport Mary préconise une nouvelle classification des films

Posté par vincy, le 29 février 2016

loveAudrey Azoulay a hérité d'une patate chaude quand elle a succédé à Fleur Pellerin au ministre de la Culture et de la Communication. Ce lundi 29 février, elle a reçu le rapport commandé par Pellerin, et signé Jean-François Mary, Président de la Commission de classification des œuvres cinématographiques.

Ce rapport sur les conditions d'interdiction des œuvres de cinéma aux moins de 18 ans, dans le cadre de la procédure de délivrance des visas accordés aux œuvres cinématographiques, fait suite a plusieurs décisions judiciaires qui annulaient les visas émis pour des oeuvres violentes ou des oeuvres qui montraient des scènes de sexe explicite. L'Association Promouvoir a gagné presque toutes ses batailles, malgré deux récentes déconvenues pour Bang Gang et Les Huit salopards.

"Cette réflexion a porté sur l'automaticité de cette interdiction et sur la durée des procédures applicables" explique le ministère qui a "décidé d’engager une réforme des textes en vigueur afin d’assurer la meilleure protection possible du jeune public.

Deux axes sont retenus:

- adapter les critères qui encadrent actuellement l’interdiction aux mineurs de -18 ans pour conforter le rôle et élargir le pouvoir d’appréciation de la Commission de classification, qui représente l’ensemble des composantes de la société.

- engager une réflexion visant à simplifier les voies de recours pour réduire les délais de la procédure devant la justice administrative pour assurer la détermination de la classification d’un film.

Préalables

Le rapport de Jean-François Mary a prix en compte que "la classe d'âge entre seize et dix huit ans correspond à une étape importante du développement de l'individu sur le plan de l’autonomie personnelle et psychologique, et la classification appliquée doit respecter un équilibre entre la maturité et la fragilité des individus à cet âge de la vie."

Il considère que "les mesures de classification les plus restrictives déterminent toute l’échelle des mesures de classification en aval" et que "le choix d’une classification à seize ans ou à dix-huit ans par le ministre chargé de la culture a des effets sur la projection du film en salles bien au-delà du public des mineurs." En effet, "nombre de distributeurs et d’exploitants renoncent purement et simplement à projeter le film dans leurs salles", ce qui "tue" le film commercialement. Enfin "le choix de la classification à seize ans ou à dix-huit ans étend ses effets sur la diffusion des films à la télévision et sur la sortie des films en DVD et sur les autres supports numériques ou analogiques", ce qui a un impact considérable aussi bien sur le financement que sur l'audience du film.

Le cinéma, un "objet" pas comme les autres

Le rapport conserve l'idée que les oeuvres cinématographiques doivent bénéficier "d'un régime d'exception" en matière de censure. Il propose l'ajout d'un alinéa: "(...) il est tenu compte de l’intention ou de la démarche artistiques de son auteur, ainsi que des éventuel les mesures administratives délivrées en vue ou à l’occasion de sa diffusion."

"Cette formulation serait donc le rappel utile d’une vérité qui est déjà acquise en jurisprudence. Elle aurait le mérite de consolider l’attitude du juge
en faveur du respect de la liberté de création
."

Les mineurs majeurs sexuellement

Personne n'a réclamé la suppression de la classification X  mais le rapport souligne que "la suppression de l’interdiction aux moins de dix-huit ans peut
s’autoriser des évolutions du droit pénal lui-même en ce qui concerne ce que l’on appelle d’une expression impropre la « majorité sexuelle ».
"

Sachant que l’évolution du droit pénal ne remet certes pas en question le principe de la protection des adolescents face à certaines images, une "solution pourrait être la réécriture de l’article R. 211-12", notamment, "en tenant compte de la récente jurisprudence du Conseil d’État sur les films Love et Saw 3D."

Nouveau système de classification

La nouvelle rédaction de l’article R. 211-12 pourrait donc être : "Le visa d'exploitation cinématographique s'accompagne de l'une des mesures
de classification suivantes, en fonction du trouble que l’oeuvre ou le document est de nature à produire sur la sensibilité des personnes mineures :

1° Autorisation de la représentation pour tous publics ;

2° Interdiction de la représentation aux mineurs de douze ans ;

3° Interdiction de la représentation aux mineurs de quatorze ans ;

4° Interdiction de la représentation aux mineurs de seize ans ;

5° Interdiction de la représentation aux mineurs de dix-huit ans, lorsque l'oeuvre ou le document comporte sans justification de caractère esthétique
des scènes de sexe ou grande violence qui sont de nature, en particulier par leur accumulation, à troubler gravement la sensibilité des mineurs, à
présenter la violence sous un jour favorable ou à la banaliser

6° Interdiction de la représentation aux mineurs de dix-huit ans avec inscription de l'oeuvre ou du document sur la liste prévue à l'article L. 311-2."

Il est donc envisagé "de créer une catégorie intermédiaire entre douze et seize ans. En effet, il est clair que les capacités de distance critique à douze ans sont inférieures à ce qu’elles peuvent être entre seize et dix-huit ans. L’introduction d’une restriction à quatorze ans permettrait d’introduire une plus grande liberté d’appréciation, car le choix est souvent délicat lorsque le risque est de viser trop bas à douze ans et trop haut à seize ans."

Trouble et sexe

Il appartiendrait toujours à la commission et au ministre chargé de la culture d’élaborer une doctrine pour les critères de classification des niveaux inférieurs, en "en fonction du trouble que l ’oeuvre ou le document est de nature à produire sur la sensibilité des personnes mineures."

On modifierait aussi l'intitulé définissant l'oeuvre: "Le remplacement du critère de « scènes de sexe non simulées » par celui de « scènes de sexe »: le critère de la « non simulation » des scènes de sexe a évidemment perdu son intérêt au cours des récentes années, avec le développement des techniques numériques de mise en scène. Une scène peut être tout à fait explicite à l’écran tout en ayant été simulée lors du tournage. Plus généralement, certains films justifient une interdiction aux moins de 18 ans quant à l’effet produit sur de jeunes spectateurs sans comporter de telles scènes, et le raisonnement inverse peut tout aussi bien être tenu dans le cas où un film comportant de telles scènes ne justifie qu’une interdiction de moindre sévérité. C’est d'ailleurs ce que le Conseil d'Etat avait relevé dans l’arrêt rendu à propos du film Le pornographe cité plus haut."

Incitation à la violence

Le rapport souhaite aussi modifier la définition de la "violence dans les oeuvres cinématographiques. "L'intégration de la prévention à « l'incitation » à la violence vient en en écho aux dispositions de l'article 227-24 du code pénal. Cet ajout vise à montrer qu’au regard de la psychologie des mineurs,
l’incitation à la violence est une question en elle-même qui revêt une importance particulière.
" Sans entrer "dans le débat controversé sur le
caractère addictif des images de violence extrême
," puisqu'il "est raisonnable de penser que la société souhaite à bon droit en prémunir les jeunes", le rapport constate "que dans la période actuelle, l’on prête à la fiction cinématographique plus de pouvoir sur les comportements individuels qu’elle n’en a sans doute et l’on entend proscrire dans les films toute incitation des mineurs à la drogue, à l’alcool, au tabac etc.."

Nouvelles voies judiciaires

Enfin, en cas de contestation, ce rapport suggère de "laisser le tribunal administratif de Paris juge en premier et dernier ressort de ces affaires et de supprimer la voie de l’appel pour n’ouvrir que la faculté de saisir le Conseil d’Etat, juge de cassation. Cette solution aurait l’avantage d’établir un parallélisme entre la procédure du référé suspension de l’article R. 521-1 du code de justice administrative et le règlement de l’affaire au fond. "

Antichrist de Lars von Trier victime à son tour de l’association Promouvoir

Posté par vincy, le 3 février 2016

Et de 4. Après Saw 6, Love et La vie d'Adèle, l'association Promouvoir, proche des milieux catholiques intégristes, a réussi une fois de plus à faire plier la justice. Pendant ce temps le ministère de la Culture et de la Communication promet toujours, depuis cet été, une réforme qui ne vient pas concernant la réglementation des films.

Cette fois-ci la victime est Antichrist de Lars von Trier, avec Charlotte Gainsbourg (qui emporta le prix d'interprétation féminine au Festival de Cannes) et Willem Dafoe. A l'époque, le film avait attiré 145 000 spectateurs en France. Il était interdit aux moins de 16 ans. Cela ne suffisait pas puisque la Cour administrative d'appel de Paris vient d'annuler le visa d'exploitation de ce film de 2009 (autant dire que l'impact commercial est bien moindre que l'offense morale), à cause de "scènes de très grande violence" et de "scènes de sexe non simulées", soit "Un degré de représentation de la violence et de la sexualité qui exige, au regard des dispositions réglementaires applicables, une interdiction de ce film à tous les mineurs".

Pour la justice, la ministre de la Culture de l'époque, Christine Albanel, "a commis une erreur d'appréciation en se bornant à interdire sa diffusion aux seuls mineurs de moins de seize ans". Ainsi, la cour concède à une Association qui veut limiter la liberté de création au nom de principes moraux que Antichrist aurait du être interdit aux moins de 18 ans.

Le visa du film avait déjà été annulé par deux fois pour vice de forme par le Conseil d’État, en 2009 et 2012, et un nouveau visa avait été accordé à chaque fois par la ministre, rappelle l'AFP. Cette fois-ci le coup est plus rude: l'annulation du visa d'exploitation empêche la diffusion du film sur tout support, jusqu'à ce qu'un nouveau visa soit accordé (et par conséquent il ne pourra l'âtre que si le film est de facto interdit aux mineurs).

On le rappelle: un individu de 16 ans a le droit de faire l'amour mais désormais, selon la justice, il n'a pas le droit de voir un film où l'on y fait l'amour. Surtout lorsque les scènes sont explicites. Pure hypocrisie. Ou alors les juges ne vont jamais sur Internet. Quant à la violence, cela reste une affaire d'appréciation subjective. Mais à partir de 16 ans, on peut estimer que le cerveau est capable de différencier la fiction du réel, sauf pour les personnes très émotives qui, de toute façon, n'iront pas voir ce genre de films.

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Lire aussi:
Au nom du fils privé de salles à Paris
Love de Gaspar Noé finalement interdit aux moins de 18 ans
Saw 3D Chapitre final désormais interdit aux moins de 18 ans

L’instant court : Fred et Marie, avec Jean-Jacques Rausin

Posté par kristofy, le 30 novembre 2013

Fred Et MarieComme à Ecran Noir on aime vous faire partager nos découvertes, alors après le court-métrage Aningaaq réalisé par Jonas Cuaron (avec la voix de Sandra Bullock de Gravity), voici l’instant Court n° 122.

Le 25 novembre, c’était la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, qui nous invite à porter quelque chose de couleur orange pour appeler à « l’élimination sans réserve, hésitation ni délai de la violence contre les femmes ». Il s’agit d’une campagne internationale soutenue par les Nations Unies.

Cette année, cette Journée en orange est prolongée par 16 jours d'action contre la violence liée au genre, jusqu’au 10 décembre qui sera la Journée des droits de l'Homme.

Quelques chiffres statistiques :

- Jusqu’à 70 pour cent des femmes sont victimes de la violence au cours de leur vie.
- Entre 500 000 et 2 millions de personnes font l’objet de traite tous les ans à des fins de prostitution, de travail forcé, d’esclavage ou de servitude, selon les estimations. Les femmes et les filles représentent près de 80 pour cent des victimes découvertes.
- On estime que plus de 130 millions de filles et de femmes actuellement en vie ont subi des mutilations génitales, principalement en Afrique et dans certains pays du Moyen-Orient.
- Le coût de la violence perpétrée par un partenaire intime, aux États-Unis seulement, dépasse 5,8 milliards de dollars par an : 4,1 milliards pour frais médicaux et soins directs et près de 1,8 milliard pour les pertes de productivité.

Nos voisins belges ont mené l'année dernière une campagne de prévention contre la violence conjugale qui a mis en scène une forme de violence conjugale à la fois répandue et difficile à définir, la violence psychologique sur l’autre. Un premier court-métrage montrait que "la violence psychologique, c'est de la violence tout court", et un second que "la violence conjugale, pour en sortir, il faut réagir".

Pour le rôle difficile de l’homme violent, il s’agit de l’acteur Jean-Jacques Rausin déjà souvent remarqué dans des courts-métrages, comme par exemple Chambre double récompensé au BIFFF ou encore En attendant le dégel récompensé au Festival de Cannes. Il sera le rôle principal du long-métrage Je me tue à le dire que prépare Xavier Séron…

Voici donc le court-métrage Fred et Marie, avec Jean-Jacques Rausin et Erika Sainte :

…et la suite, le court-métrage Marie et Fred :

L’instant Court : College Boy, le clip réalisé par Xavier Dolan

Posté par kristofy, le 12 mai 2013

college boyComme à Ecran Noir on aime vous faire partager nos découvertes, alors après le court-métrage The Dance de Pardis Parker, voici l’instant Court n° 110.

Le jeune cinéaste canadien Xavier Dolan qui a été révélé au festival de Cannes avec ses trois films est depuis une semaine aussi un réalisateur de clip qui fait sensation : son premier clip est presque partout sur internet et dans les médias. Il s’agit d’images pour la chanson College Boy du groupe Indochine (auparavant Dolan avait voulu incorporer une de leurs chansons dans son film Laurence Anyways).

Le clip arrive en écho direct de l’actualité des diverses manifestations de la part de groupes dits catholiques contre le mariage pour tous : un jeune garçon (supposé homosexuel) est harcelé et violenté dans une école catholique sans la défense de personne (ni autre élève, ni prof, ni police). « Je serai trop différent pour leur vie si tranquille, pour ces gens… J’aime pourtant tout leur beau monde, mais leur monde ne m’aime pas, c’est comme ça. Et souvent j’ai de la peine quand j’entends tout ce qu’ils disent derrière moi… »

Les images font débat et internet de s’agiter pour ou contre, le chanteur du groupe Nicola Sirkis ayant dès l’origine indiqué que le clip peut ne pas convenir à des enfants de moins de 14 ans.

Le buzz sur le web (médias et réseaux sociaux) provoque un effet boule de neige et dans la foulée un début de polémique avec le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel par la voix de Françoise Laborde (membre du CSA pour le groupe de travail sur la jeunesse et la protection des mineurs) qui voudrait en interdire la diffusion à la télévision aux moins de 16 ans ou 18 ans (avec pour conséquence une diffusion possible seulement après 22h30 ou durant la nuit), alors que le clip est visible n’importe quand sur internet.

Françoise Laborde s’offusque d’une collegeboy« violence insoutenable, la violence ce n'est pas esthétique, la torture ce n'est pas esthétique... On ne dénonce pas la violence en montrant de la violence».

Réaction en chaîne : le clip devient le plus regardé et discuté du moment, et il est vu par environ un million d’internautes ! Nouvelle vérification du fameux "effet Streisand" : plus on cherche à censurer une information, plus elle est diffusée.

De son côté, le réalisateur Xavier Dolan a répondu à Françoise Laborde avec une lettre ouverte :

« Votre recommandation, davantage que de préserver l'imaginaire des jeunes, officialisera une posture sociologique sur les notions actuelles de censure, et sur l'inaptitude de l'adulte moderne à tolérer la mise en images des phénomènes sociaux dont il est directement ou indirectement responsable. Empêcher de diffuser la vidéo, c’est enfiler le bandeau que les personnages portent dans le clip, en allégorie de l'aveuglement volontaire de la société face à ces enjeux. Paradoxalement, nos seuls véritables détracteurs sont les bureaux de censure et les chaînes de télédiffusion, qui refusent de passer notre vidéoclip avant même d'avoir eu votre recommandation. Je constate qu'il existe au sein de vos groupes une culture de la lâcheté, presque instinctive, camouflée par une fausse outrance, qui font d'eux, et de vous, des complices de la stagnation. Je ne pourrai, dans cette mesure, jamais assez vous remercier de l'exceptionnelle visibilité que vous avez donné à mon travail, bien qu'il soit dommage que cette polémique n'origine non pas de votre soutien, mais de votre refus de contrer la violence par l'action plutôt que par le silence ».

collegeboyAuparavant, c’étaient les chaînes de télévision qui étaient le principal support de diffusion des clips, depuis une dizaine d’année c’est désormais d’abord internet.

Il faut savoir que les télévisions fonctionnent déjà sur le mode de l’auto-censure (c’est aussi le cas de YouTube et DailyMotion qui suppriment certains clips de leurs sites). Les sujets sensibles par rapport aux ‘bonnes mœurs’ sont pluriels : la sexualité, la drogue, le sang, la religion, la politique…

A l’international, MTV et BBC ne diffusent pas certains clips de Madonna, Rihanna, Nine Inch Nails, Marilyn Manson… C’est pareil en France : M6 a même recalé un clip du gentil Raphaël, qu'en sera-t-il du dernier clip de David Bowie The next day ? …

Avec College Boy réalisé par Xavier Dolan l’explication du CSA sera délicate : comment justifier l’interdiction d’un clip qui dénonce des violences contre un enfant ? Le CSA risque de servir de paravent derrière lequel vont se retrancher les chaînes de télé qui de toute façon n’avaient à priori pas vraiment l’intention de diffuser ce clip…

Peut-être serait-il mieux de simplement se souvenir que "la télévision c’est mieux quand on en parle", comme le conseillait justement le CSA dans l'une de ses campagne, soulignant que : « L’impact des images violentes peut être minimisé lorsque l’enfant peut dire ce qu’il a ressenti. C’est donc aux adultes d’engager la conversation avec lui. Ce sera aussi l’occasion de consolider ses repères, sa représentation du normal et de l’anormal, du juste et de l’injuste».

Voici donc ici le clip College Boy, réalisé par le cinéaste Xavier Dolan pour une chanson du groupe Indochine :

Crédit photo : image modifiée, d’après un extrait de College Boy.

Hollywood annule ses soirées glam après la tuerie de Newton

Posté par vincy, le 20 décembre 2012

C'est Noël au box office, mais les traditionnelles avant-premières festives ont été annulées. Après la tuerie de l'école élémentaire de Newton, les studios ont préféré faire preuve d'humilité, de gravité, et la rigueur financière n'est pas pour leur déplaire.

Bref, pas question pour les stars de fouler le tapis rouge et de défiler au bar à cocktails. The Weinstein Company a a annulé la soirée prévue pour l'avant-première de Django Unchained. La Fox a rayé de l'agenda "people" l'avant-première et la soirée de Parental Guidance (titre ironique faisant référence aux niveaux de censure des films aux USA) et retardé l'avant-première de Pittsburgh de Jack Reacher.

Il faut dire que le débat est passionnel aux USA. Suite au massacre de Newton, la NRA (National Rifle Association) a logiquement accusé Hollywood d'être responsable de la violence ambiante du pays et rappelé que le droit de posséder une arme était constitutionnel en Amérique. Aucune étude ne prouve les propos de ce lobby surpuissant. C'est d'ailleurs Absurde quand on sait que la violence dans les films ou les jeux est encadrée par un système de "protection" des mineurs assez rigoureux, même si ce système de classification est très hypocrite, plaçant un sein dénudé au même rang qu'un meurtre de sang froid...

Mais, quelques mois après la folie meurtrière d'Aurora à une avant-première de The Dark Knight Rises, les Américains commencent à s'interroger sur ce droit constitutionnel d'accéder facilement à des armes lourdes. Tous les Américains ne s'en plaignent pas puisque les armes à feu ont été l'un des cadeaux vedette de Noël. Entre ceux qui sont partisans d'un contrôle plus strict et d'autres qui préfèreraient donner des armes aux enseignants, le président Obama, qui tend vers la première option, devra faire preuve de pédagogie.

On n'y croit moyennement. Déjà après le carnage de Columbine (qui a inspiré le roman puis le film We need to talk about Kevin, la Palme d'or Elephant et le documentaire Bowling for Columbine), on imaginait que les mentalités allaient changer. Michael Moore a d'ailleurs diffusé gratuitement son docu sur le Net juste après les événements de Newton. Et pourtant les mentalités ne changent pas et une étude récente montrait même que le nombre d'actes gravement violents avait doublé en 50 ans dans les James Bond.

Toujours plus? Mais jusqu'à quand?

James Bond est devenu deux fois plus violent depuis Dr.No

Posté par vincy, le 11 décembre 2012

james bond sean connery dr no daniel craig quantum of solaceSelon une étude de l'université d'Otago (la plus ancienne Nouvelle Zélande), des chercheurs ont constaté que la violence des James Bond a plus que doublé entre Dr No (1962) et Quantum of Solace (2008).

Dans le premier film, 109 actes violents légers ou sérieux (voire mortels) ont été répertoriés. Dans l'avant-dernier film de la série, les chercheurs en ont comptabilisé 250. Entre temps, le système de censure n'a jamais varié : 007 est vu par des enfants comme des adolescents. Car il s'agissait bien de l'objectif des chercheurs : rendre James Bond moins accessibles aux mineurs, ou en tout cas, alerter les parents que 007 n'est pas un héros plus familial que les Rambo et autres Batman.

L'étude démontre d'ailleurs que les violences légères sont stables tandis que les violences sérieuses (attaques armées, coups et blessures, mors) ont triplé. Selon le graphique publié, le film le moins violent de la série est Live and let die (Vivre et laisser mourir), qui date de 1973. C'était le premier film avec Roger Moore dans le rôle de James Bond. Et le plus violent est Tomorrow never dies (Demain ne meurt jamais) en 1997, avec Pierce Brosnan. L'acteur n'a pas ménagé sa peine, puisque le 2e du classement est Die Another day (Meurs un autre jour).

Globalement, si l'on suit la courbe, la tendance est à la hausse. Sean Connery avait atteint un pic en 1969, qui fut la "norme" de 1974 à 1989. Avec Brosnan, ce fut l'inflation. Les films avec Craig se situent dans la moyenne mais les actes très violents continuent d'être en hausse.

graphique statistiques violence james bond

Cannes 2012 : I???V??SIBL? – 10 ans après le choc

Posté par matthieu, le 23 mai 2012

Film que l'on ne présente plus et dont le scandale autour a largement contribué à son succès (plus de 500 000 entrées en France tout de même), Irréversible est ce long-métrage français réalisé par le sulfureux Gaspard Noé et qui a bousculé (choqué même) le festival de Cannes en 2002. C'est l'un des rares films à avoir divisé la rédaction d'Ecran Noir au point de publier deux critiques (l'une emballée, l'autre très réticente).

Suscitant indignations et abandons multiples pendant les séances, mais aussi acclamations et étonnements, le film, provocateur et troublant, ne laissa donc personne indifférent. À en croire cette vidéo, l'ambiance de la séance cannoise fut explosive, plaçant Noé tantôt comme un preux chevalier du 7ème art, tantôt comme une monstre anti-artistique à abattre. Si au départ Irréversible ne devait être qu'un projet mineur, celui-ci évolua progressivement vers une oeuvre plus ambitieuse au budget plus conséquent, avant de devenir ce que l'on en garde aujourd'hui... Et justement, quel souvenir dix ans après ? Oeuvre marquante et toujours controversée ?

Dès le début du film, on est happé par ce générique à l'envers qui bascule. L'aura et la réputation toujours intacts précédant le film donne l'impression au spectateur d'assister à quelque chose d'unique qui a autrefois affolé les cinéphiles. Et ce n'est pas la caméra virevoltante durant les vingt premières longues minutes qui vont nous faire dire le contraire. Le rendu est déjà indescriptible, sorte de manège sordide qui slalome entre les corps, sillonnant dans l'obscurité ce baisodrome, pour mieux en dévoiler les tréfonds sexuels de l'espèce humaine.  Ou plutôt d'homosexuels dont la présence relève de l'animal de foire et de vitrine à dégoût (ça se brûle les tétons à la bougie, ça se doigte, ça se masturbe, ça se sodomise dans tous les coins, il ne manque que les "fists" auxquels on échappe de justesse). Vingt premières minutes de mascarade expérimentale autour de sexualités débridées, le tout sur une bande son agressive qui nous oppresse voire nous enferme dans ces couloirs érotiques aux lumières folles où se pavanent des monstres. Un résultat inouï  qui se conclut par une défiguration à couper le souffle. Même dix ans après, l'ultra-violence du film n'a pas prit une ride et les effets visuels n'ont pas perdu de leur vigueur.

"Le temps détruit tout"

Lorsque l'histoire se lance enfin - certainement après que la moitié des salles se soient vidées en 2002 : la ménagère égarée comme l'homosexuel blessé ou encore l'hétérosexuel dégoûté, peu importe, ils auront participé au buzz du film en courant vers un échappatoire - on comprend comment vont s'organiser les scènes selon un ordre antéchronologique. Les mouvements fous de caméras orchestrent cette succession d'histoires qui s'emboitent pour former un récit à l'envers, ça pivote vers le ciel noir à chaque fin de scénettes pour passer à une autre sans coupure. La scène la plus marquante du film est bien évidemment l'interminable et éprouvante scène de viol de Monicca Bellucci aux formes érotisantes dans un décor électrique rouge pétant. Voyeurisme jusqu'au-boutiste. Mais c'est aussi le moment où le récit commence à prendre de la consistance et les personnages gagner en intérêt, à partir de là, on comprend ce qui se trame depuis le début : simple histoire de vengeance en milieu urbain. De même, l'ordre antéchronologique parvient enfin à toucher lorsque l'on sait ce qui va arriver à Bellucci si elle quitte la fête. Irréversible affiche l'horreur de certains faits divers qu'on préfèrerait ne jamais voir.

"Le temps détruit tout" annonce l'un des personnages au tout début, le comble d'Irréversible est alors de parcourir une temporalité inversée pour en appuyer la transgression des repères originaux : ceux de l'amour, de la vie, de l'harmonie. Sorte de fausse catharsis, on va vers le bonheur et le folie disparait au fil des minutes : ce choix artistique du réalisateur d'inverser les évènements. On va de la barbarie vers un état nature, où l'homme et la femme en tant que couple sont complètement nus et ne répondent qu'à la passion qui les unit. L'apothéose finale fait que l'on en ressort épuisé, aveuglé, avec cette sensation de vertige.

Exercices techniques ingénieux, plans séquences de longues durées et réussis avec Cassel, Dupontel et Belluci qui prouvent l'étendue de leur talent, voilà ce que l'on garde encore dix ans d'après d'Irréversible. Alors oui, le long-métrage met toujours une claque au spectateur avec sa violence très dérangeante, un sommet dans son genre, et qui ne laissait en rien présager autant d'entrées en France. Le succès est certainement dû au bouche-à-oreille, à l'entreprise cannoise, aux réactions disproportionnées et aux sélections et quelques prix engrangés par le film (meilleur réalisateur Gaspard Noé au Stockholm film festival et meilleur film étranger au San Diego Film Critics Society Awards). Irréversible s'est également bien exporté à l'étranger puisqu'une quarantaine de pays l'ont distribué - dans un cercle de salles sûrement réduit - et le réalisateur peut remercier le Festival de Cannes, facilitant l'exportation d'oeuvres aussi viscérales. À titre de comparaison, son film précédent, Seul contre tous, était distribué dans une dizaine de pays ; et son tout dernier nommé Enter The Void, dans lequel il continuait l'exploration visuelle, une petite trentaine seulement.

Gaspar Noé est de retour cette année sur la Croisette, dans un film collectif, 7 jours à La Havane, présenté à Un certain regard. Le film est présenté ce 23 mai. Irréversible avait été projeté le 24 mai 2002.