L’acteur comique Gene Wilder ne nous fera plus sourire (1933-2016)

Posté par MpM, le 30 août 2016

L'acteur américain Gene Wilder, grand complice de Mel Brooks, s'est éteint ce lundi 29 août à l'âge de 83 ans. Il souffrait depuis plusieurs années de la maladie d'Alzheimer, une pathologie qu'il avait choisi de garder secrète, d'après son neveu Jordan Walker-Pearlman.

Célèbre pour sa chevelure bouclée et ses grands yeux bleus, Gene Wilder avait débuté au théâtre avant d'apparaître dans le Bonnie and Clyde d'Arthur Penn en 1967 et surtout dans Les Producteurs de Mel Brooks en 1968. Ce rôle lui avait valu une nomination à l'Oscar et une reconnaissance immédiate du public.

Au début des années 70, il avait enchaîné trois de ses plus grands succès : Charlie et la Chocolaterie de Mel Stuart, dans lequel il campe un inoubliable Willy Wonka, Le shérif est en prison de Mel Brooks et Frankenstein junior de Mel Brooks dont il avait co-écrit le scénario et pour lequel il avait reçu sa deuxième nomination à l'Oscar.

Gene Wilder avait également joué devant la caméra de Woody Allen (Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe sans jamais oser le demander), Stanley Donen (Le petit prince), Arthur Hiller (Transamerica express et Pas nous, pas nous au côté de Richard Pryor), Robert Aldrich (The Frisco kid) ou encore Sydney Poitier (Faut s'faire la malle, La folie aux trousses). Il avait également réalisé deux films : La fille en rouge en 1984 (remake d'Un éléphant ça trompe énormément de Yves Robert) et Nuit de noce chez les fantômes en 1986.

Son dernier grand rôle remontait à la fin des années 1990, dans une adaptation pour la télévision d'Alice au pays des merveilles.

Sur Twitter, Mel Brooks a salué en ces termes celui qui fut véritablement son acteur fétiche : "Gene Wilder - l'un des vrais grands talents de notre époque. Il a gratifié de sa magie tous les films que nous avons faits et il m'a gratifié de son amitié"

Jacqueline Pagnol s’en est allée rejoindre Marcel (1920-2016)

Posté par MpM, le 24 août 2016

Elle était née Jacqueline Bouvier et avait commencé sa carrière au début des années 40, devant la caméra du réalisateur belge Albert Valentin (La maison des sept jeunes filles, 1942) puis de Pierre Prévert (Adieu Léonard, 1943) et Jean Faurez (Service de nuit, 1944). Devenue Jacqueline Pagnol, elle a survécu plus de 40 ans à son illustre époux et vient de s'éteindre à l'âge de 95 ans.

A la fin de la guerre, la jeune actrice croise pour la seconde fois Marcel Pagnol, qui lui propose de jouer Naïs aux côtés de Fernandel et Raymond Pellegrin. Elle illumine le film, et séduit l'écrivain-réalisateur avec lequel elle se marie la même année. Il dira souvent d'elle qu'elle était "son brin de poésie et de tendresse". Elle l’inspire, et il lui confie le rôle féminin principal de La belle meunière (avec Tino Rossi) puis de Topaze. Elle apparaît également devant la caméra de Jean Boyer (Le rosier de Madame Husson) et Fernandel (Adhémar ou le jouet de la fatalité).

Mais c'est dans Manon des sources, écrit et réalisé pour elle par Marcel Pagnol, qu'elle marquera définitivement les esprits. Par la suite, on la voit à nouveau chez Jean Boyer (La terreur des dames) et dans Carnaval d'Henri Verneuil.

Après le décès de Marcel Pagnol en 1974, elle veille à faire exister son oeuvre et à honorer sa mémoire, en créant notamment le Prix Littéraire Marcel Pagnol. L'Académie des César lui avait rendu hommage à travers un César d'honneur pour l'ensemble de sa carrière en 1981.

Le réalisateur de « Love Story » Arthur Hiller est mort (1923-2016)

Posté par vincy, le 17 août 2016

Le réalisateur canadien Arthur Hiller, connu pour l'immense succès Love Story, est mort à l'âge de 92 ans. Né le 22 novembre 1923 à Edmonton (Alberta), cet ancien navigateur dans l'Armée de l'air canadienne durant la Seconde Guerre mondiale puis étudiant en psychologie à l'Université de Toronto a réalisé son premier film en 1957, The Careless Years, avec Dean Stockwell.

Ses premières armes, il les a faites à la télévision, avec des séries TV comme Alfred Hitchcock présente, Perry Mason, La famille Addams, et L'homme à la carabine.

Une filmographie très inégale

Il tourne beaucoup et varie les genres: film de guerre (Tobrouk, commando pour l'enfer, avec Rock Hudson), biopic (The Babe, avec John Goodman), drame psychologique (Making Love), comédie musicale (L'homme de la Manche, avec Peter O'Toole et Sophia Loren), comédie (Les Jeux de l'amour et de la guerre, avec James Garner et Julie Andrews, Escapade à New York, avec Jack Lemmon, Plaza Suite, avec Walter Matthau, Transamerica Express, avec Gene Wilder, Ne tirez pas sur le dentiste, avec Peter Falk) ou encore mise en abyme du métier (Avec les compliments de l'auteur, avec Al Pacino).

Entre deux succès, Escapade à New York et Plaza Suite, deux films se sont distingués dans sa carrière: L'Hôpital, avec George C. Scott et Diana Rigg, Oscar du meilleur scénario, et Love Story. Un grand chelem durant quatre ans.

Love Story c'est cinq Golden Gobes, un Oscar pour six nominations et surtout 106 millions de dollars de recettes (l'équivalent de 600 millions de dollars aujourd'hui), soit l'un des 40 plus grands succès du box office américain. Le mélo est un phénomène. C'est le film le plus vu de l'année 1971.

Un fiasco industriel

L'avant-dernier film qu'il réalise pour le cinéma (on passe sous silence Pucked, en 2006, avec Jon Bon Jovi), en 1998, est en revanche un accident industriel. An Alan Smithee Film est réalisé sous le pseudonyme utilisé par un réalisateur voulant renier son œuvre et met en scène un réalisateur anglais nommé Alan Smithee qui doit mettre en scène Trio, un film d'action à gros budget avec notamment Sylvester Stallone, Whoopi Goldberg et Jackie Chan.

Ironiquement, Hiller avait été Président de la Directors Guild of America durant quatre ans puis Président de l'Académie des Oscars juste avant le tournage de ce film qui n'apparaît plus dans sa filmographie. Après cet épisode, il avait préféré devenir discret, sans doute un peu fâché qu'on ait maltraité un si loyal serviteur de manière aussi brusque.

Le réalisateur de Pretty Woman Garry Marshall s’éclipse (1934-2016)

Posté par vincy, le 20 juillet 2016

Le réalisateur, acteur et producteur américain Garry Marshall est décédé mardi à l'âge de 81 ans. Né le 13 novembre 1934 à New York, il est mort hier soir. Le président de la Guilde américaine des réalisateurs, Paris Barclay, lui a rendu hommage, saluant son talent pour raconter des histoires "qui ont amené la joie et les rires (...) sur tous les écrans, petits et grands".

Garry Marshall a créé de nombreuses séries TV, et notamment la culte Happy Days, avec un certain Ron Howard, qui dura dix saisons à partir de 1974. Au cinéma, il fut inégal mais a signé, au scénario comme à la réalisation, quelques grands films populaires. Il devient réalisateur sur le tard, en 1982 avec Docteurs in Love puis Le Kid de la plage deux ans plus tard, dans la lignée des films de John Hugues, avec un public déjà là. En 1986, il tourne avec le jeune Tom Hanks, Rien en commun, qui révèle le comédien. Mais le film qui deviendra sa marque de fabrique, sera Un couple à la mer (1987), avec le couple à la ville et à l'écran, Goldie Hawn et Kurt Russell. Cet enchaînement de bonnes recettes le conduit à s'aventurer sur un autre terrain.

Car c'est, étrangement, avec un mélo au féminin, Beaches (Au fil de la vie) réunissant Bette Midler et Barbara Hershey, qu'il connaît un premier hit au box office, en 1988. Cette histoire d'amitié sans retour sera aussi accompagné d'une BOF très vendue cette année-là.

Pretty Success

En 1990, Garry Marshall reprend un scénario plutôt dramatique qu'il transforme en comédie romantique pour une filiale de Disney. C'est Pretty Woman, le Cendrillon de la fin du XXe siècle. Richard Gere en est la star mais c'est Julia Roberts qui explose aux yeux des spectateurs. Son rire éclatant, son regard irrésistible et quelques séquences cultes en font un énorme succès mondial, et le plus important de sa carrière. 465 millions de $ de recettes (de l'époque) dans le monde, 4 millions d'entrées en France.

Dès lors, Julia Roberts sera sa muse. De nouveau avec Richard Gere (mais cette fois-ci elle est la star), avec Just married (ou presque) (Runaway Bride) en 1999, 2e plus gros succès du cinéaste dans sa carrière, et dans un film puzzle, Valentine's Day, en 2010, 3e plus gros succès du réalisateur.

La comédie romantique sera son domaine, avec une manière bien à lui d'exploiter les névroses de chacun de ses personnages (et une seule morale: ensemble, on peut surmonter tous les problèmes). Tous ses films montrent qu'un couple, un duo, une paire de désaxés peuvent réussir à s'affranchir de leurs angoisses, peurs ou hantises. Pas pour rien que sa première série TV s'appelait The Odd Couple (1970). Il aime les duels impairs, différents par l'âge, la condition sociale ou le caractère.

Princesses modernes

Professionnel apprécié et respecté, il tourne avec les plus grands comédiens américains : Al Pacino et Michelle Pfeiffer (Frankie and Johnny , 1991), Dan Aykroyd (Exit to Eden, 1994, son plus magistral flop), Greg Kinnear (Escroc malgré lui, 1996, autre fiasco), Juliette Lewis et Diane Keaton (L'Autre Sœur, 1999), Kate Hudson (Fashion Maman, 2004), Lindsay Lohan et Jane Fonda (Mère-fille, mode d'emploi, 2007)... C'est surtout avec Anne Hathaway (une de plus qu'il place au firmament) et Julie Andrews dans le diptyque Princesse malgré elle (2001) / Un mariage de princesse (2004) qu'il retrouve son style si vintage de la comédie américaine des années 1950, ces contes de princesses modernes. Les deux films cumulent 300 millions de $ de recettes dans le monde.

Il signe une trilogie avec Valentine's Day, Happy New Year et le récent Joyeuse fête des mères, où de multiples personnages se croisent (et le tout Hollywood au passage) pour une journée spéciale du calendrier. Malheureusement, la recette fait long feu et décline dès le deuxième film.

Boudé par les grands prix et les festival, Garry Marshall aura quand même reçu un prix pour l'ensemble de sa carrière en 2014 à la Writer's Guild of America. Mais, s'il a été un brillant scénariste, on ne peut s'empêcher de penser qu'il a parfois été très très inspiré en tant que réalisateur, trouvant les bons angles et le bon timing pour nous faire rire avec une scène d'escargot à la française dans un restaurant américain, par exemple.

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Hector Babenco (1946-2016) en liberté dans les champs du seigneur

Posté par vincy, le 14 juillet 2016


Hector Babenco est mort à 70 ans dans la soirée du mercredi 13 juillet, à Sao Paulo (Brésil), annonce confirmée par Denise Winther, associée du cinéaste dans HB Films.

Né à Mar del Plata en Argentine le 7 février 1946, le réalisateur, scénariste et producteur brésilien a été l'une des figures de proue du cinéma latino-américain des années 1970 et 1980.

Il a commencé sa carrière en réalisant O Fabuloso Fittipaldi en 1973, documentaire sur le pilote automobile brésilien Emerson Fittipaldi. Deux ans plus tard, il réalise son premier long métrage de fiction intitulé O Rei da Noite. Son deuxième long métrage, Lucio Flavio en 1977 remporte le prix du meilleur film au Festival de Sao Paulo. Mais c'est en 1981 qu'il se fait remarquer avec un film réaliste sur un enfant abandonné et l'environnement carcéral brutal, Pixote, la loi du plus faible. Le film reçoit un Léopard d'argent à Locarno et le prix du meilleur film en langue étrangère des critiques de Los Angeles et ceux de New York. Avec ce film, le cinéaste rompt avec le cinéma Novo et inscrit le cinéma brésilien dans un registre presque documentaire, dont Walter Salles et Kleber Mendonça Filho sont les actuels héritiers. Le film est considéré comme une référence aujourd'hui.

Suite à ce succès international, il réalise Le Baiser de la femme araignée (Kiss of the Spider Woman). En compétition au Festival de Cannes, Babenco sera aussi le premier cinéaste latino-américain nommé à l'Oscar du meilleur réalisateur. Adaptation du roman éponyme de Manuel Puig, le huis-clos dans une cellule en pleine période de la dictature en Argentine se focalise sur Molina, un étalagiste homosexuel arrêté pour détournement de mineurs, évoque chaque soir de vieux films romantiques à son compagnon d'infortune, Valentin, un prisonnier politique. A la manière d'un Borges en littérature, Babenco évade ses "prisonniers" grâce à un univers fantasmagorique. Le film vaut à William Hurt l'Oscar du meilleur acteur et le Prix d'interprétation masculine au Festival de Cannes mais aussi à Sonia Braga (récemment à Cannes pour Aquarius) une reconnaissance internationale et Raul Julia. Ce drame à la fois intime et allégorique est sans aucun doute son chef d'œuvre tant il synthétise toutes ses obsessions: la souffrance des minorités, l'étouffement des déviants et rebelles, l'humanité qui transcende l'animosité.

Il enchaîne avec un film hollywoodien, Ironweed, histoire d'un couple de SDF - lui alcoolique, elle en phase terminale, qui vaudra à Jack Nicholson et Meryl Streep, une nomination aux Oscars chacun. Puis tourne En liberté dans les champs du seigneur, qui met en scène le conflit entre les Indiens d'Amazonie et "l'homme blanc", toujours avec un casting américain. Il revient en Amérique du sud avec Cœur allumé, flirtant toujours entre aspiration artistique, folie et huis-clos. Babenco aimait opposer la liberté individuelle, celle qui est dans nos têtes, à des systèmes concentrationnaires ou tyranniques. C'est ainsi qu'en 2003, il revient en compétition à Cannes avec Carandiru, prison gigantesque brésilienne où un médecin décide de mener un programme de prévention contre le sida. Le propos est humaniste mais le lieu n'est pas anodin puisque cette prison a réellement vécu l'un des pires massacres en centre pénitencier (111 morts). Le film emporte la plupart des grands prix du continent sud-américain dans différents festivals.

Par la suite, il ne réalise que deux films, El pasado en 2007, avec Gael Garcia Bernal, inédit en France malgré une sélection à Toronto, et My Hindu Friend, l'an dernier, avec Willem Dafoe.

Hector Babenco fut aussi membre du jury du Festival de Cannes en 1989 et de la Mostra de Venise en 1998.
Filmographie

Le vent emporte Abbas Kiarostami (1940-2016), Palme d’or en 1997

Posté par vincy, le 4 juillet 2016

Abbas Kiarostami est mort, selon une annonce de l'agence Isna. Palme d'or pour Le goût de la cerise en 1997, il avait 76 ans. Il était atteint d'un cancer, diagnostiqué il y a quelques mois.

Emblème d'un cinéma iranien ouvert sur le monde, il est né en 1940 à Téhéran. Il a d'abord étudié la peinture à l'Université de la capitale iranienne et a débuté en réalisant plusieurs publicités. Il entre dans le cinéma en 1969 en dirigeant le département du film du Centre pour le développement intellectuel des enfants et jeunes adultes, le Kanun, où il a travaillé durant deux décennies. Par ailleurs, il réalise des courts et des moyens métrages.

Le résident iranien

Il faut attendre 1977 pour qu'il signe son premier long métrage, Le rapport, en plein avènement de la révolution de Khomeini. Il doit alors composer avec la censure et préfère rester dans son pays, malgré l'oppression sur les artistes. Pour lui, le déracinement était synonyme de perte de personnalité, d'authenticité.

Suivent Cas numéro un, cas numéro deux en 1979, Le Concitoyen en 1983, deux films de moins d'une heure, Les premiers en 1984. Avec Où est la maison de mon ami ? en 1987 il amorce sa trilogie appelée Koker. Il emporte un Léopard de bronze à Locarno, ce qui l'installe parmi les cinéastes à suivre au moment où le cinéma iranien réémerge sur la scène internationale. Après Devoirs et Close-up, il tourne le deuxième volet, Et la vie continue, en 1992, entre documentaire et fiction, expérimentation qui l'a toujours fasciné, sur les effets dévastateurs du tremblement de terre qui frappa son pays en 1990. Il achève le cycle avec Au travers des oliviers, en 1994, sélectionné en compétition à Cannes.

Le couronnement international

Parallèlement, il écrit de nombreux scénarios et produits des films de ses compatriotes, notamment Le ballon blanc, premier film d'un certain Jafar Panahi, en 1995. La même année, il participe au projet À propos de Nice, la suite, film documentaire français réalisé et écrit par Catherine Breillat, Costa-Gavras, Claire Denis, Raymond Depardon, Pavel Lungin, Raoul Ruiz et lui-même, hommage au cinéaste de L'Atalante, Jean Vigo. Mais surtout, il a du quitter le Kanun à cause d'une censure toujours plus sévère.

L'ascension parvient à son couronnement en 1997 avec le poétique et métaphorique Goût de la cerise, Palme d'or ex-aequo en 1997 au Festival de Cannes. Un homme cherche quelqu'un pour l'aider à se suicider... Tout un symbole.

L'errance cinématographique

De là, le cinéma de Kiarostami va prendre une longueur d'avance sur celui de ses compatriotes, expérimentant le tournage en voiture avant Jafar Panahi, tournant à l'étranger quand d'autres sont muselés dans son pays. Il y a toujours une forme de poésie dans ses films, de romantisme même, mais son style est ancré dans l'héritage du néo-réalisme italien.

Sa carrière va devenir plus erratique, une errance formelle, géographique et narrative avec Le vent nous emportera (Venise, 1999), le documentaire Five (2003, dédié au cinéaste japonais Ozu), Ten (2002, Cannes, 13 ans avant Taxi Téhéran de son ami Panahi, pour lequel il écrit au même moment Sang et or, son chef d'œuvre) et 10 on Ten (2004), comme deux faces d'un même miroir où il analyse la société iranienne autant qu'il s'introspecte, ou Tickets, film à segments dans un train, par Ermanno Olmi, Ken Loach et lui-même, filmant une femme endeuillée.

Aller voir ailleurs

Après cela il se fait plus rare. Revient aux courts, aux vidéos pour des musées où il expose ses photos et ses poèmes comme au Louvre en 2012. En 2008, il signe Shirin, où des spectatrices sont filmées en train de réagir à la projection d'un mélo. Epuisé par la censure, deux ans plus tard, il s'évade en Italie avec Juliette Binoche pour Copie conforme, romance existentialiste qui vaut un prix d'interprétation à Juliette Binoche à Cannes et en 2014, il transpose Ten à Tokyo avec Like Someone in Love, où un vieil homme très enraciné dans le passé et les traditions dialogue avec une jeune étudiante. C'est sans doute un film testament, malgré lui.

Car il y a quatre ans il affirmait: "Tout mouvement, toute action que nous faisons, dérive de notre tradition culturelle. Même rompre avec la tradition est une façon de la reconnaître". Pas plus beau requiem de la part d'un artiste qui a voulu croire en la transmission puis rompre avec la tradition pour explorer la liberté, au sens absolu du terme. Finalement la vie était toujours hantée par la mort, en décor, et l'humanisme perçait la carapace d'une société étouffée. La parole surgissait du silence forcé. L'émotion des personnages trahissait les régimes qui voulaient les taire.

Le producteur Charles Gillibert avait annoncé à Cannes le prochain projet du cinéaste iranien, 24 Frames, un film de 24 heures dont 24 Frames compilerait certains moments.

Roger Dumas (1932-2016), de L’Homme de Rio à Capitaine Flam en passant par Johnny et Gabin

Posté par vincy, le 3 juillet 2016

Difficile de faire plus "variété" que Roger Dumas, éternel second-rôle du cinéma français, saltimbanque assumé, troubadour méconnu et finalement artiste intégral. Né le 9 mai 1932 au fin fond de l'Ardèche, département sans train, il est décédé à Paris à l'âge de 84 ans samedi 2 juillet.

Difficile de résumer sa carrière prolifique. Au théâtre, il a été sur les planches durant 60 ans, interprétant du Sam Shepard, le Monte Cristo d'Alexandre Dumas, du Harold Pinter, du Samuel Benchetrit (empochant un Molière au passage), et même "Hysteria" mise en scène par John Malkovich, et écrivant même une pièce en 2010," A propos de Martin". Sa dernière apparition fut dans L'Etudiante et Monsieur Henri il y a quatre ans.

Au cinéma, après quelques figurations, notamment dans un Arsène Lupin, chez Hossein et chez Cayatte, il se fait remarquer dans Rue des prairies, en 1959, aux côtés de Jean Gabin. Les années 1960 lui seront profitables. Avec son bagout de chansonnier, sa sensibilité perceptible et son physique passe-partout, on le retrouve dans le délirant Pouic-Pouic, avec Louis De Funès et Jacqueline Maillan, en copain de régiment de Belmondo dans L'homme de Rio (avec la réplique finale fabuleuse, "Quelle aventure!"), dans quelques Chabrol mineurs (Le tigre aime la chair fraiche et Le tigre se parfume à la dynamite), le culte Caroline chérie.

Acteur éclectique

Il reste dans la comédie dans les années 1970 avec Tendre poulet de Philippe de Broca (Girardot, Noiret), en inspecteur sérieux mais drôle. Retrouve Bébel dans Le Marginal de Jacques Deray. Se glisse dans le casting prestigieux de Fort Saganne d'Alain Corneau (Depardieu, Deneuve, Marceau). Reviens à la comédie avec Edouard Molinaro, Claude Zidi, retourne chez De Broca (Chouans!) et chez Chabrol (Masques). Bizarrement, c'est à la fin des années 1980 que Dumas change de registre avec Enki Bilal (Bunker Palace Hotel, Tykho Moon), Olivier Assayas (Une nouvelle vie, Les destinées sentimentales), Roger Hanin (Soleil), Claude Berri (Ensemble, c'est tout), Yasmina Benguigui (Inch'Allah dimanche), Samuel Benchetrit (J'ai toujours rêvé d'être un gangster), Rémi Bezançon (le grand père dans Le premier jour du reste de ta vie), Radu Mihaileanu (Le concert) ou encore Safy Nebbou (L'autre Dumas). Le grand public l'aura surtout vu en Maître Valoche dans le deuxième opus des Visiteurs.

Il n'appartenait à aucune église, aucune chapelle. Solide, il a donné la réplique à toutes les stars françaises à travers les époques, de Sophia Loren à Jean-Louis Trintignant, de Huppert à Tautou en passant par Béart ou Mélanie Laurent. Cet homme réputé sympathique  et gentil, discret et éclectique, aimait jouer. Pour le petit écran, il a été invité dans différentes séries ("Un village français", "Les cinq dernières minutes", "Navarro", "Commissaire Moulin", "Vénus et Apollon",...) et  joué dans Les Misérables et Le Comte de Monte-Cristo de Josée Dayan, qui l'a régulièrement enrôlé dans ses téléfilms.

Parolier prolifique


Il avait également joué régulièrement à la télévision, notamment dans des séries ("Les Cinq dernières minutes", "Navarro", "Julie Lescaut", "Un village français") ou des téléfilms de Josée Dayan ("Les Misérables", "Le Clan des Lanzac").

Mais c'est peut-être sa carrière de paroliers qu'il faut souligner. Il a écrit des chansons pour Dani, Richard Anthony, Patachou, Carlos, Marie Laforêt, mais surtout Johnny Hallyday ("Deux amis pour un amour"), Sylvie Vartan ("Comme un garçon" entre autres) et Chantal Goya. Oui, c'est à ce grand monsieur de la scène, ce comédien capable d'être généreux, inquiétant, empathique, que l'on doit des dizaines de chansons pour enfant. Et surtout c'est à cause de lui qu'on connaît tous ces paroles...

Michael Cimino (1939-2016), fin du voyage entre enfer paridisiaque et paradis infernal

Posté par vincy, le 2 juillet 2016

Il était l'un des prodiges (et perfectionnistes) du cinéma américain des années 1970. Selon un tweet de Thierry Frémaux ce samedi 2 juillet, Michael Cimino est mort à l'âge de 77 ans.

Michael Cimino, né le 3 février 1939 à New York, et mort le 2 juillet 2016, il était devenu l'un des grands cinéastes de son époque avec Voyage au bout de l'enfer, son deuxième film en 1978 et l'un des premiers films américains à traiter de la guerre du Viêt Nam. Deux ans plus tard, il signe l'ambitieux western La Porte du paradis dont l'échec commercial a conduit la société United Artists à la faillite au début des années 1980. Pourtant, il n'aura tourné que 7 films, dont le dernier, The Sunchaser date d'il y a 20 ans. Le fiasco des Portes du Paradis avait entraîné une mésentente profonde entre les studios et lui.

Scénariste pour Eastwood

Le new yorkais, très douté à l'école et assez bagarreur, est diplômé en peinture de l'Université Yale avat de s'engager puis de vadrouiller en agence de publicité en tant que réalisateur de spots publicitaires pour la télévision. Michael Cimino débute dans le cinéma en tant que scénariste avec Silent Running, drame de science-fiction réalisé par Douglas Trumbull en 1972 puis avec le deuxième volet de la saga de l'Inspecteur Harry, Magnum Force, réalisé par Ted Post. Il a aussi collaboré au scénario de The Rose.

Il passe à la réalisation en 1974 avec Le Canardeur, un film d'action produit par Clint Eastwood et mettant en vedette Eastwood et Jeff Bridges. Vaste fresque de plus de trois heures, Voyage au bout de l'enfer (The Deer Hunter) sort en 1978 et rencontre un immense succès critique et commercial, cinq Oscars dont celui du meilleur film et du meilleur réalisateur.

La cassure avec Hollywood

Fort de ce succès, Cimino obtientle contrôle total pour son film suivant, La Porte du paradis (Heaven's Gate), dont le tournage beaucoup plus long et coûte beaucoup plus cher que prévu et la sortie désastreuse vont couler le film, le studio et la carrière du réalisateur. Pourtant ces deux films, radicalement différents, sont des chefs d'œuvre dans leur genre.

En 1985, il revient avec L'Année du dragon (Year of the Dragon), adaptation du roman de Robert Daley, qui est un polar violent sur la mafia chinoise. Puis, en 1987, il réalise Le Sicilien (The Sicilian), adaptation du roman de Mario Puzo et biographie du hors-la-loi Salvatore Giuliano. Une seconde version, plus courte et désavouée par Cimino, sera exploitée aux États-Unis.

Après cela, il ne tournera que deux longs métrages - La Maison des otages (Desperate Hours), remake du film réalisé par William Wyler, et The Sunchaser, récit initiatique sélectionné à Cannes.

"Un des problèmes de Hollywood, c'est que trop de réalisateurs font trop de films identiques. Six ans sans tourner, c'est énorme, mais je ne suis pas un cas unique. Voyez Stanley Kubrick, Milos Forman... Et David Lean, qui, lui, a dû attendre quatorze ans pour faire La Route des Indes..." rappelait-il.

Durant vingt ans, il ne sera pas forcément silencieux. Il écrit des poèmes, des chansons et son premier roman Big Jane, prix littéraire Lucien Barrière lors du festival du cinéma américain de Deauville, filme le segment No Translation Needed du film "Chacun son cinéma" réalisé à l'occasion des 60 ans du Festival de Cannes. Et il sera souvent invité dans les festivals.

Le culte a grandit, notamment lorsqu'on ne l'a plus reconnu physiquement. Amaigri, botoxé, presque féminin, Cimino était méconnaissable. Mais ses films étaient, dans le même temps, réhabilités. De restaurations en "director's cut", tous les grands festivals ont redoré son blason. Maudit à Hollywood, il était adulé en Europe, dans le cercle cinéphile. Enfant terrible du cinéma, politiquement pas très correct dans la langue de bois des studios, ce "martyr" qui a su entretenir sa légende aura quand même signé quelques uns des plus beaux plans du 7e art américain. Pour Les Portes du Paradis, il a même exigé qu'on repeigne à la bombe aérosol toute l'herbe d'une prairie, pas assez verte à son goût. L'esthétique de ses films contribue énormément au charme qu'ils produisent.

On ne peut s'empêcher qu'un grand talent a été gâché, autant à cause du système que de son propre caractère. Le plus surprenant sans doute est que sa filmographie rejoint son personnage: des solitaires, un peu cow-boy, souvent hors-la-loi, dans des récits où le rêve se brise immanquablement. Il aimait les hommes mystérieux, il vouait un certain son culte à la force et soulignait les paradoxes et les ambiguïtés de la vie. Après tout, il a vécu l'enfer en flirtant avec le Paradis, le Paradis en voyageant dans l'enfer.

Salut l’ami! Bud Spencer (1929-2016) est mort

Posté par vincy, le 28 juin 2016

Il était le double de Terrence Hill. Le Hardy de Laurel des Western spaghetti. L'acteur italien Bud Spencer est décédé hier à Rome à l'âge de 86 ans, selon sa famille.

Carlo Pedersoli pour l'état civil était né à Naples le 31 octobre 1929. Avec Terence Hill, il avait tourné 18 films de 1959 à 1994, des western spaghetti ou des films policiers tous burlesques ou comiques. Il faisait rire les enfants, les ados. Ses baffes faisaient des bruits synthétisés accentués. Leur duo a longtemps, inégalement certes, attiré les foules en salles. Premier gros succès de la pair, On l'appelle Trinita en 1971 a atteint les 2,6 millions d"entrées, suivis de Cul et chemise en 1979 a séduit 2,2 millions de spectateurs en France, Salut l'ami, adieu le trésor en 1981 a frôlé 1,9 million d'entrées, Quand faut y aller, faut y aller dépasse en 1983 et Attention les dégâts en 1984 ont drainé 1,3 millions de fans. Mais leur plus gros hit reste On continue à l'appeler Trinita en 1972 avec plus de 3 millions de français dans les salles.

Avec son physique et sa bonhomie à la Obélix, la barbe en plus, il excellait dans les grosses beignes et l'humour potache. De Rome à Rio de Janeiro, il passe une jeunesse tranquille, brillant étudiant et excellent nageur. Ses qualités athlétiques vont lui permettre d'entrer à Cinecittà pour figurer dans des péplums comme Quo Vadis. Jusqu'en 1957, il tourne sous son vrai nom (Un héros de notre temps de Mario Monicelli, L'Adieu aux armes de Charles Vidor). Puis il se consacre à sa carrière sportive.

Sportif olympique

Après avoir été demi-finaliste du 100 mètres nage libre aux JO de Helsinki et ceux de Melbourne, et un septième titre de champion d'Italie - il est le premier Italien à descendre sous la minute dans un 100 m nage libre - , il abandonne définitivement la natation et retourne en Amérique du Sud pour fonder une famille avec la fille d'un producteur de cinéma.

A 38 ans, il tourne son premier western, Dieu pardonne, moi pas, de Giuseppe Colizzi, avec un certain Mario Girotti, dit Terrence Hill. Il trouve son pseudo, mélange d'un nom de bière et d'un hommage à Spencer Tracy. Il frappe les méchants durement mais il a un coeur gros comme ça.

Pourtant, il n'aura pas tourné que ce genre de films. Dans sa quarantaine de films, il est souvent inspecteur, shériff, sergent et même génie d'Aladin. Il est tête d'affiche de ses propres comédies, de gros cartons en Italie, signées Michele Lupo ou Steno. En guise de requiem cinématographique, on l'a vu en vieux capitaine dans En chantant derrière les paravents d'Ermanno Olmi, en 2004.

Il avait aussi essayé de se faire élire comme conseiller régional en 2006 sur la liste du parti de Silvio Berlusconi. Depuis quelques années, il écrivait ses Mémoires, dont les deux premiers tomes sont parus en Italie en 2010 puis 2014.

Nicole Courcel (1931-2016), une femme française disparaît

Posté par vincy, le 27 juin 2016

La comédienne française Nicole Courcel, née le 21 octobre 1931, est morte le 25 juin à l'âge de 85 ans. Incarnant la jeunesse française à la Libération, elle a commencé sa carrière après la guerre enchaînant les films d'Henri Decoin (Les amoureux sont seuls au monde), Jean Delannoy (Aux yeux du souvenir), Jacques Becker (Rendez-vous de juillet, après lui avoir fait faire des essais pour Antoine et Antoinette) et Marcel Carné (La Marie du port, une adaptation de Simenon avec Jean Gabin). Dès les années 1950, elle s'impose dans plusieurs succès, devenant une vedette de l'époque. On la voit ainsi dans Si Versailles m'était conté de Sacha Guitry, plusieurs films de Jean-Paul Le Chanois et surtout dans Le Testament d'Orphée de Jacques Cocteau.

Sans jamais avoir été une star, elle a, malgré tout, réussit à séduire des cinéastes de tous horizons. Dans les années 1960, Nicole Courcel tourne avec Paul Vecchiali (Les petits drames, Les ruses du diable), Yves Allégret (Kong Yo), Claude Autant-Lara (Vive Henri IV... vive l'amour), André Cayatte (Le passage du Rhin), Agnès Varda (Les créatures). Au cinéma, elle achèvera sa carrière dans les années 1970 avec Claude Lelouch (L'aventure c'est l'aventure), Claude Pinoteau (La gifle) et en 1979 Jean-Pierre Blanc (L'esprit de famille). Elle est de tous les festivals, de l'URSS à l'Amérique du sud, ambassadrice affranchie du cinéma national.

Sa carrière s'oriente alors cers la télévision. Après avoir incarné Emma Bovary en 1974, on la voit dans des téléfilms comme Credo, de Jacques Deray ou Milady, de Josée Dayan. Elle participe à des séries telles La vallée des peupliers ou Les Thibault.

Elle était aussi présente sur les planches durant plusieurs décennies, passant d'Arthur Miller (Les Sorcières de Salem, avec Signoret et Montand) à Racine, de la comédie de boulevard à Françoise Sagan, de Jean Poiret à Jean-Claude Carrière, travaillant avec des metteurs en scènes aussi différents que Pierre Dux, Félicien Marceau, Pierre Mondy, François Périer, Claude Régy...

Cela faisait douze ans qu'elle avait arrêté le métier. De son vrai nom Nicole Andrieu, elle était à la ville la mère de la journaliste, animatrice de télévision et chroniqueuse culinaire Julie Andrieu. Mère à 42 ans, elle mit alors sa carrière entre parenthèses pour s'occuper de sa fille, qu'elle éleva seule. En 1980, elle lui avait consacré un livre de souvenirs émouvant Julie tempête paru chez Robert Laffont. Elle souffrait d'une maladie cérébrale depuis plusieurs années.