Festival Lumière 2012 : et le prix va à … Ken Loach!

Posté par Morgane, le 12 juillet 2012

Il a fallut patienter quelques semaines avant de connaître le nom du prix du Festival Lumière cette année, à Lyon. Finalement, il est sorti de l'ombre ce matin : le prix Lumière sera décerné à Ken Loach qui succèdera à Clint Eastwood (2009), Milos Forman (2010) et Gérard Depardieu (2011).

Le Prix lui est attribué « pour l’ensemble de son oeuvre, pour son regard personnel sur la société industrielle et pour sa contribution à l’histoire du cinéma anglais, européen et mondial (et aussi parce qu’il aime le foot !). »

Le Prix Lumière a été créé par Thierry Frémaux, lui-même grand amateur de ballon rond, dans le but de récompenser une oeuvre et de rendre hommage à une personnalité du septième art, qu'elle soit devant ou derrière la caméra. Le Prix Lumière est une façon de dire merci à ceux qui nous ont fait vibrer et continuent de le faire à travers le grand écran.

Cette année, ce sera donc Ken Loach. Né en 1936, réalisateur d'une vingtaine de longs métrages, récompensé en mai à Cannes par le Prix du Jury pour son dernier film La part des anges, qui a déjà séduit 300 000 cinéphiles français, le cinéaste sera présent à Lyon pour présenter certains de ses films, rencontrer le public et également parler des films des autres qui l'ont marqués en tant que cinéphile comme le veut la tradition Lumière.

Le Prix Lumière lui sera remis le samedi 20 octobre à l'Amphithéâtre du Centre des Congrès de Lyon.

Cannes 2012 : Une absurde accusation de corruption contre le jury de Nanni Moretti

Posté par vincy, le 3 juin 2012

Il y avait un précédent à l'affaire qui suivit la remise des prix cannois dimanche soir. Souvenez-vous en 2004, Quentin Tarantino remettait la Palme d'or à Fahrenheit 9/11, le documentaire de Michael Moore. Or Tarantino et Moore ont le même producteur, Harvey Weinstein. Il n'en suffisait pas plus pour croire à une connivence, un cadeau, que renforça le Lion d'or que Tarantino, alors président du jury de Venise, décerna à son ex-copine Sofia Coppola en 2010.

Un complot? une corruption passive? De quoi était accusé le jury de Moretti? Que de grands mots! En effet, selon un article du Monde, si "la Palme d'or décernée à Michael Haneke pour Amour n'a guère souffert de contestation", sur internet,  "les critiques se sont concentrées sur le reste des prix attribués. Quatre des six films récompensés par le jury présidé par Nanni Moretti sont en effet coproduits et/ou distribués par une même société, Le Pacte." Le quotidien établissait ainsi un lien insidieux entre la société de production et de distribution Le Pacte et Nanni Moretti, dont le dernier film Habemus Papam a également été produit (et distribué en France) par Le Pacte.

Certes, on pouvait s'étonner de la concentration par un distributeur des films primés ; d'autant que le film de Mungiu a récolté deux prix, le très contesté (pour ne pas dire rejeté) Reygadas a eu les honneurs de la mise en scène et l'italien Matteo Garonne, moyennement apprécié par les festivaliers, a hérité du Grand Prix. Mais Le Pacte, créé par Jean Labadie en 2007, monte en puissance années après années. Rien d'étonnant donc à le voir avec autant de films en compétition. En 2011, le distributeur avait 7 films sur la Croisette (dont le Moretti, Drive, Les bien-aimés, ...). Cette année, idem : 7 films (dont cinq en compétition et le film d'ouverture de la Semaine de la critique).

Thierry Frémaux, délégué artistique du Festival, a remis les pendules à l'heure, sur Twitter, en jouant la transparence. Déjà il est revenu en arrière en mentionnant le soupçon qui pesait sur le jury de Tarantino : « Sans enquête et en se faisant l'écho "des réseaux sociaux", Le Monde affirme l'existence d'un supposé conflit d'intérêt Moretti/Palmarès. C'est oublier que Moretti n'a qu'une voix sur 9, c'est mal le connaître que le croire corrompu, comme le serait tout le jury. Aggravant son cas, Aureliano Tonet dénonce Tarantino accordant en 2004 la Palme à Michael Moore produit comme lui par Harvey Weinstein. En 2004, Michael Moore l'avait emporté 5 voix à 4 contre Park Chon-wok (Old Boy). Il y a prescription: TARANTINO N'AVAIT PAS VOTE MOORE! »

Voilà, désormais, on le sait, Park Chan-wok a frôlé la Palme, et ce n'est pas la faute de Tarantino. Frémaux a raison de rappeler qu'un jury est une somme d'individualités. Même si Gilles Jacob a rappelé dans ses livres que certains Présidents avaient une autorité parfois trop pressante, que certains choix ont divisé et même déchiré des jurys, il reste qu'il faut choisir 7 ou 8 films sur 22. Le reproche que l'on peut faire à Moretti et son jury, outre l'absence du Carax, c'est d'avoir gâché un prix en en remettant deux à un même film ou encore de ne pas avoir utilisé le cadeau bonus du prix du 65e anniversaire. Mais reconnaissons que le Mungiu, le Garrone et le Loach avaient toute légitimité d'être sur scène dimanche soir.

Il a fallu 8 ans pour connaître les détails des délibérations du jury de Tarantino. Le temps est souvent long à Cannes. Il y a une sorte de durée de prescription respectée par la direction du Festival. Peut-être qu'en 2020, on saura pourquoi et à cause de qui Reygadas l'a emporté sur Carax.

Thierry Frémaux rappelle le bon sens de ce jeu injuste qu'est une délibération de jury : « Que le jury fasse bien ou mal, c'est une chose et on peut le juger. Le soumettre à cette culture du soupçon, c'en est une autre ». Il ajoute : « Vous savez quoi? A Cannes comme ailleurs, les jurés votent selon leurs… convictions. Décevant, non? Rassurant, plutôt, hein. »

Concentration et transparence

Rien n'empêche le public d'aller voir ailleurs, les films préférés par les critiques ou les festivaliers par exemple (même si trois des primés ont fait plutôt consensus). Le palmarès n'est pas parole d'évangile. Le Festival de Cannes cette année fut bon, mais son palmarès n'en est pas la meilleure illustration.

Quant au soupçon généralisé, il traduit deux choses : les films présentés dans les festivals sont de plus en plus liés à un petit nombre de sociétés qui misent encore sur une politique d'auteurs et de cinéma art et essai (c'est le cas du Pacte comme celui des frères Weinstein) ; et puis, il y a ce diktat contemporain de la transparence. Les rumeurs cannoises le dimanche font partie du jeu, mais celui-ci devient de plus en plus agressif. Comme si la frustration de ne pas en être - ce qui explique pourquoi on fait payer si cher un jury qui se serait égaré - accentuait la nervosité de chacun. Faut-il skyper ou webcamer les délibérations? Les diffuser le lendemain comme on filme le moindre pas d'une campagne électorale? En cela, pas sûr que les tweets ludiques et légers de Gilles Jacob, Président du Festival, photographiant les jurés dans leur conclave, révélant l'animation des débats avec des gestes saisis sur le vif, arrangent les choses : les médias en voudront toujours plus, encore plus, insatiables.

Ce serait regrettable d'aller plus loin. Le mystère et la surprise ont du bon. Cela sert un certain suspens. Et par conséquent, le plaisir (ou pas) de découvrir le palmarès, à égalité avec tous les téléspectateurs. Journalistes, nous avons quand même eu l'immense privilège de voir ces films avant tout le monde. C'est aussi notre rôle de ne pas se soucier des prix (les Oscars et les Césars ont rarement récompensés les meilleurs films de l'année) et de convaincre le public, parce que nous avons vu ces films dans des conditions exceptionnelles, de nous faire confiance en suivant nos recommandations.

Mise à jour 4 juin 2012

Cannes 2012 : Amour, Palme d’or normale pour un palmarès frustrant

Posté par vincy, le 27 mai 2012

=> Tous les prix remis à Cannes cette année.

La cérémonie du 65e Festival de Cannes commençait pourtant bien avec la Caméra d'or pour Les bêtes du sud sauvage de Benh Zeitlin, projeté à Un certain regard. Coup de coeur d'Ecran Noir, nous ne pouvions que retrouver le sourire après un dimanche de rumeurs agaçantes, de spéculations hasardeuses. Heureusement Gilles Jacob twittait et même "twitpicait', Thierry Frémaux faisait un heureux parallèle entre la Palme d'or et Roland Garros, qui débutait aujourd'hui.

Et cette année, la première surprise de ce palmarès était de n'avoir vu aucune Palme d'or d'honneur décernée, et finalement aucun prix du 65e anniversaire, une première depuis sa création en 1982 (ce prix est remis tous les 5 ans).

Le jury était donc sûr et certain : sur les 22 films présentés, seulement 6 allaient se partager 7 prix. On oublie le Audiard, soit. Mais le Loznitsa (prix de la critique internationale) et le Carax (prix de la jeunesse) ? Carax repart donc les mains vides alors même que son film était l'un des plus réussis, les plus audacieux, les plus "amoureux". Un prix aurait été nécessaire pour sa carrière. Au lieu de cela on donne un prix du jury à Ken Loach (qui n'en a pas besoin pour séduire le public tant sa comédie est réjouissante), même si La part des anges méritait d'être au tableau d'honneur (le scénario aurait été plus juste).

Mais le scénario a été remis à celui de Cristian Mungiu, pour Au delà des collines. On reste stupéfaits tant le film a justement une faille, son scénario. Celui-ci tourne autour de la psychologie intime des deux rôles féminins principaux sans jamais aborder frontalement leur lesbiannisme et se perd dans sa dernière heure, dans une histoire répétitive, parfois vide, et mal emboîtée. Le prix d'interprétation féminine pour les deux comédiennes semblait plus évident. Il s'agit du premier film de Cristina Flutur et de Cosmina Statran. Deux prix pour le Mungiu, c'est un de trop.

Heureusement, le jury présidé par Moretti a eu du bon sens en récompensant Mads Mikkelsen d'un prix d'interprétation masculine. Dans La chasse, son jeu subtil prend une dimension presque tragique face aux accusations qui pèsent sur lui. On peut être également content de voir Matteo Garrone remporter son deuxième Grand prix, après Gomorra. Reality était l'un des films les plus intéressants, malgré ses maladresses, de la Compétition. Mais un Grand prix du jury, n'est-ce pas un peu trop haut?

A contrario, la Palme d'or pour Amour de Michael Haneke (qui rejoint le club des double palmés, composé de l'Américian Francis Ford Coppola, du Danois Bille August, du Serbe Emir Kusturica, du Japonais Shohei Imamura et des frères belges Dardenne), est un choix évident. D'autant que Moretti a bien spécifié qu'il y associait Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva "pour leur contribution fondamentale en tant que comédiens". Favori des critiques, ce film épuré et bouleversant nous avait conquis. C'est sans doute l'oeuvre la plus maîtrisée du cinéaste avec La pianiste et Le ruban blanc.

En revanche, on ne peut que contester le prix de la mise en scène pour Carlos Reygadas nous glace. Post tenebras Lux est un film où la forme, incompréhensible, parfois grotesque, écrase un fond, assez banal sous son apparence ésotérique. "Il faut parfois accepter de ne pas tout comprendre et de se laisser porter par les sensations générées par un film" écrivions-nous. Mais l'exaspération nous gagnait face à cette oeuvre aussi opaque qu'égocentrique (partiellement autobiographique, obsessionnelle, et peu généreuse). En soutenant ce genre de propositions, on comprend les louables intentions du jury, qui se doit aussi de défendre le cinéma dans toute sa diversité. Mais dans ce cas, il ne faut pas oublier les cinéastes qui savent allier la forme et le fond (ou le genre), à l'instar d'Anderson, de Loznitsa ou de Carax, pour ne prendre que trois exemples. Reygadas peut toujours ironiser sur les critiques qui n'y comprennent rien : il sera difficile d'inciter les spectateurs à subir une telle purge.

Cependant, tout cela peut se comprendre, a un sens pour ne pas dire une grande cohérence. Les films choisis, hormis le Loach, évoquent tous la mort ou/et la folie de manière parfois radicale ou clinique. La pluie aura donné des idées grises anthracite à ce jury, qui, en passant à côté d'autres propositions plus harmonieuses, a donné une tonalité grave et frustrante à une édition presque aussi bonne que celle de l'an dernier.

Comptez sur nous pour défendre les films que nous avons aimés, même s'ils ne sont pas dans la liste de M. Moretti.

Au Royaume Uni, le nouveau Ken Loach sortira simultanément en salles, en VOD et à la télé

Posté par vincy, le 28 janvier 2011

Sortie multiplateformes le 18 mars au Royaume Uni pour Route Irish, le nouveau film de Ken Loach, ajouté au dernier moment en compétition officielle au dernier festival de Cannes.

Les Britanniques pourront voir le film dans une salle de cinéma, sur une chaîne de télévision payante (Sky Anytime, Sky Movies Box Office), durant deux semaines, et sur deux canaux de Vidéo à la demande, Curzon on Demand et FilmFlex.

L'objectif est de toucher le public le plus large possible durant les premières semaines d'exploitation. Cela aura certainement un impact sur le box office cinéma du film. Mais face à des blockbusters américains, le film, sans palmarès ni stars, avait peu de chance de rivaliser. La semaine du 18 mars, en Grande Bretagne, sont prévus en salles : le Woody Allen (Vous allez rencontrer...), Benda Bilili, The Eagle (un péplum à gros effets de Kevin Macdonald), Limitless (avec Bradley Cooper et Robert de Niro) et The Lincoln Lawyer (avec Matthew McConaughey et Marisa Tomei).

Pour les chaînes de télévision et les canaux de VOD, c'est un beau coup marketing : leurs abonnés et clients ont ainsi l'impression d'être privilégiés.

Mais, on insiste, découvrir un film sur grand écran ou sur petit écran, ce n'est pas la même chose...

Cannes 2010 – la scène hot du jour : masochisme dans Route Irish

Posté par vincy, le 20 mai 2010

Ken Loach filme rarement des ébats amoureux. On peut comprendre pourquoi en regardant son dernier film, Route Irish. Fergus a tout partagé avec son ami d'enfance, Frankie, sauf sa femme, Rachel. Mais après la mort de Frankie, Fergus et Rachel semblent irrésistiblement attirés l'un par l'autre, malgré les tensions entre eux et un deuil qui les ronge.

Un soir, Fergus embrasse soudainement Rachel qui ne se débat pas. Se sentant coupable, l'homme demande à la jeune femme de le gifler. "Plus fort". Elle répète le geste. "Plus fort." Encore. Puis une vraie baffe. "Frappe-moi." Elle n'ose pas. Le poing s'arrête à quelques centimètres du visage de Fergus. Il lui mord le poignet. Elle lui balance un bon crochet du droit. la lèvre saigner. En réaction, l'homme arrache le chemisier de la femme, l'embrasse fougueusement...Et s'interrompt.

Là où il y a de la gène, y a pas de plaisir.

Cannes 2010 : Ken Loach en compétition

Posté par vincy, le 10 mai 2010

ken loach route irishDepuis vendredi, la rumeur évoquait un ajout de dernière minute dans la compétition cannoise. Les festivaliers espéraient un film américain. Et c'est en fait un film britannique de Ken Loach qui s'ajoute à la liste. Route Irish rejoint ainsi Another Year de Mike Leigh (et Tamara Drewe de Stephen Frears, hors-compétition) dans le contingent d'un cinéma anglais décidément très en forme. C'est la première fois que les trois grands cinéastes de l'île sont présents simultanément dans un grand festival.

Ken Loach rejoint aussi Mike Leigh et Abbas Kiarostami dans la liste des "déjà palmés" de la Compétition. A l'origine, selon des sources internes, il avait décliné l'invitation du Festival pour présenter son film cette année, un an après Looking for Eric. Il aurait donc changé d'avis. Mais est-ce un événement tant le réalisateur est un habitué de la Croisette?

Route Irish raconte l'histoire de deux anciens soldats amoureux de la même femme et qui doivent aller en Irak pour y travailler.  Entre Liverpool et Bagdad, Loach explore les conséquences de cette guerre qui n'en finit pas.Le film serait aussi doté de séquences d'action, genre assez rare pour le cinéaste.Cependant, il insiste : le film est davantage porté sur les êtres humains et les répercussions psychologiques qu'entraînent la guerre sur leurs comportements.

2009 : les douze incontournables de la rédac’ et nos coups de coeur persos

Posté par vincy, le 29 décembre 2009

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fvilm_basterds.jpgfilm_prophete.jpgfilm_500days.jpgfilm_avatar.jpg 

Les 12 incontournables 2009 :
Nous avons privilégié les films qui ont procuré un vrai plaisir de cinéphage avec du sens, de la profondeur, un regard sur l'humain ou notre époque.

Etreintes brisées (Almodovar)
The Wrestler (Aronofsky)
Un prophète (Audiard)
Slumdog Millionaire (Boyle)
Avatar (Cameron)
Gran Torino (Eastwood)
Welcome (Lioret)
Looking for Eric (Loach)
Les noces rebelles (Mendes)
Le temps qu'il reste  (Suleiman)
Inglourious Basterds (Tarantino)
(500) jours ensemble (Webb)

ponyo-bisou.jpgNos coups de coeur persos :

- Marie Pauline, la festivalière : Hotel Woodstock
- Geoffroy, l'eclectique : Still Walking
- Morgane, la spécialiste de l'animation : Mary & Max
- Kristofy, dans le genre :  District 9
- Claire, l'oeil grand public : Bienvenue à Zombieland
- Benoit, l'écume de la nouvelle vague : Les derniers jours du monde
- Benjamin, le cinéma d'avant : Fellini et 8 et demi (reprise)
- Petsss, toujours un temps d'avance : Moon (sortie prévue en 2010)
- et Vincy-le-canadien, qui cherche désespérément des nouveaux talents : J'ai tué ma mère

2000-2009 : Les 10 Palmes d’or

Posté par vincy, le 22 décembre 2009

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L'Europe est la grande puissance dominatrice du palmarès cannois. Seulement deux films venus des Etats-Unis. Les Dardenne ont ajouté une deuxième Palme à leur filmographie. Von Trier, Moretti, Loach et Haneke, grands habitués de la Croisette et vétérans du 7e art d'auteur, ont conquis la récompense suprême, à force de sélections. Une prime à la classe... Finalement seuls le roumain Mungiu et le français Cantet font figure de révélation issue d'une nouveau genre de cinéma, entre documentaire et réalité, ce que représentent aussi très bien les deux Palmes américaines de Van Sant et Moore.

Côté public, il est intéressant de constater la suprématie d'un documentaire devant deux films français (mais un francophone) et une comédie musicale au casting international. Les quatre seuls millionaires. Notons que sans Palme, aucun de ces films n'auraient atteint de tels scores. 300 000 spectateurs pour un film roumain ou les presque 600 000 pour une oeuvre austère en noir et blanc, c'est, dans le contexte de cette fin de décennie, inespéré.

Voici les palmes avec leur box office français entre parenthèses.
2000 : Dancer in the dark (1 120 100)
2001 : La chambre du fils (598 437)
2002 : Le pianiste (1 400 000)
2003 : Elephant (616 771)
2004 : Fahrenheit 9/11 (1 979 186)
2005 : L’enfant (310 720)
2006 : Le vent se lève (876 370)
2007 : 4 jours, 3 semaines et 2 jours (297 558)
2008 : Entre les murs (1 500 677)
2009 : Le ruban blanc (550 000, encore en exploitation)

Les European Film Awards confirment Le Ruban Blanc

Posté par vincy, le 13 décembre 2009

12 décembre, au coeur de l'Allemagne industrielle, les Oscars européens, appelés European Film Awards, ont été décernés dans la plus grande discrétion. Michael haneke en sort grand gagnant. Il avait déjà emporté le trophée en 2005, avec Caché. Son Ruban blanc remporte les trois récompenses les plus convoitées : film, réalisateur, scénario. Il ne laisse au Prophète d'Audiard que l'intérprétation masculine et un prix d'excellence pour le son. Avec les honneurs pour Loach et Huppert, on aurait pu se croire dans une filiale du Festival de Cannes.

Le public, sans surprise, a voté poru Slumdog Millionaire. Aussi coloré et vif, contemporain et musical que Le Ruban blanc est en noir et blanc, contemplatif, historien et philosophique.

Le Ruban blanc : meilleur film ; meilleur réalisateur (Michael Haneke) ; meilleur scénario

Un prophète : meilleur acteur (Tahar Rahim) ; prix d'excellence pour le son

The Reader : meilleure actrice (Kate Winslet)

Slumdog Millionaire :  Prix du public ; Meilleure photographie (ex-aequo)

Antichrist : Meilleure photographie (ex-aequo)

Etreintes brisées : Meilleure compositeur musical (Alberto Iglesias)

Katalin Varga : Prix de la découverte

Mia et le Migou : Meilleur film d'animation 

Poste Restante : meilleur court-métrage

The Sounds of Insects - Record of a Mummy : prix ARTE du meilleur documentaire

Tatarak : prix FIPRESCI de la critique

Prix pour l'ensemble d'une carrière : Ken Loach

Prix pour la contribution européenne au cinéma mondial : Isabelle Huppert

Chercher le trait d’union

Posté par vincy, le 28 mai 2009

Le Time du 4 mai évoque le passage réussi d’Eric Cantona, des terrains de football aux toiles du grand écran. Producteur et acteur de Looking For Eric, le plus récent film de Ken Loach, l’artiste, selon le journal britannique, est désormais respecté par l’élite culturelle française, après avoir été longuement méprisé.
Pourtant, ce n’est pas ça qui me surprend le plus. Que Cantona soit désormais un « héros en son pays » importe peu. Les Français aime les outsiders, les excentriques, les anticonformistes. Il est un peu tout ça. En fait, le Time souligne en creux que la France n’a jamais aimé Cantona le footballeur, contrairement aux Anglais, qui, eux, se soucient peu de sa carrière artistique. Mais que l’on soit supporteur du Manchester United ou fan du comédien, tous devraient s’entendre sur son rôle dans Looking for Eric. Il y est à la fois l’incarnation de son mythe sportif et le personnage fictif, imaginaire même, d’un homme désœuvré. Ce double jeu est un double je. Cantona l’acteur tend un miroir à Eric le King.
Ce ne sont pas seulement les Français qui redécouvrent Cantona à travers un film de Ken Loach, cinéaste chéri du public hexagonal. Le transfert sportif est devenu cinématographique. Une icône « frenchy » dans un film typiquement « british ». Malgré la francophobie présumée chez les britanniques, Cantona est une star pour les habitants de Manchester. Preuve qu’on peut dépasser les préjugés, pas seulement culturels mais aussi humains, à travers l’art : celui de faire une passe, de marquer un but, ou de s’imiter avec talent.
Car au-delà de ça, la comédie de Ken Loach est le prototype même de l’entente cordiale entre la France et la Grande-Bretagne. Un hymne à la solidarité profondément européen, avant d’être gauchiste. Le fait que l’anglais Loach mette en lumière le français Cantona est l’exemple parfait d’une collaboration créative transfrontalière : ils sont tous les deux producteurs du film, et ont l’un pour l’autre une admiration sincère.
 

Looking for Eric démontre bien que les étiquettes, et notamment les nationalités, n’ont plus d’importance. Loach réussit surtout le tour de force d’abattre les cloisons entre les classes sociales des deux côtés de la Manche. Si bien que les couches populaires de Manchester et les élites culturelles françaises se retrouvent à aimer le même film, en communion. Il a d’ailleurs reçu le prix du jury œcuménique à Cannes.