Julie Delpy se lance dans une série pour Canal + et Netflix

Posté par vincy, le 13 février 2020

Julie Delpy se lance à son tour dans la série. La réalisatrice et actrice a convaincu Canal + et Netflix de la suivre pour sa série On the Verge, sur laquelle elle travaille depuis 2016. L'intrigue tourne autour de quatre femmes célibataires ou aux prises avec des relations compliqués, toutes dans la quarantaine et résidant à Los Angeles.

La cinéaste et comédienne confiait à Variety il y a quelques années: "Je voudrais les montrer d'une manière que nous n'avons jamais vue auparavant, montrer à quel point elle peuvent être crues et folles quand elles parlent des hommes, du sexe et des relations humaines."

Julie Delpy a écrit la série avec sa co-scénariste de 2 Days in New York, Alexia Landeau. Elle incarnera l'une des quatre femmes, aux côtés d'Elisabeth Shue qui s'est ajoutée au casting et à la liste des coproducteurs aujourd'hui. La série comportera 12 épisodes.

Delpy, 50 ans, a présenté son dernier film, My Zoe, au festival de Toronto en septembre. Il n'y a toujours pas de date de sortie prévue en France.

L’Adieu et Uncut Gems triomphent aux Spirit Awards 2020

Posté par vincy, le 9 février 2020

Les 35e Independent Spirit Awards ont été traditionnellement remis la veille des Oscars. L'adieu et Uncut Gems, oubliés par les Oscars, ont raflé les principales récompenses. Avec The Lighthouse et Marriage Story, ce sont les seuls films à avoir emporté au moins deux prix. Au passage, on est assez en phase puisque ces quatre films font partie de ceux qu'on a préféré ces derniers mois.

Renée Zellweger et Parasite devraient réussir le doublé avec un Oscar dans la nuit.

Meilleur film: L'Adieu (The Farewell)
Meilleur réalisateur: Benny Safdie, Josh Safdie pour Uncut Gems
Meilleur premier film: Booksmart
Meilleure actrice: Renée Zellweger pour Judy
Meilleur acteur: Adam Sandler pour Uncut Gems
Meilleur second-rôle féminin: Zhao Shuzhen pour L'Adieu
Meilleur second-rôle masculin: Willem Dafoe pour The Lighthouse
Meilleur scénario: Noah Baumbach pour Marriage Story
Meilleur premier scénario: Fredrica Bailey, Stefon Bristol pour See You Yesterday
Meilleure image: Jarin Blaschke pour The Lighthouse
Meilleur montage: Uncut Gems
Prix John Cassavetes: Give Me Liberty
Prix Robert Altman: Marriage Story
Meilleur documentaire: American Factory
Meilleur film international: Parasite
Prix Piaget du meilleur producteur: Mollye Asher
Prix meilleur espoir (Someone to Watch): Rashaad Ernesto Green pour Premature
Prix "plus vrai que la fiction": Nadia Shihab pour Jaddoland
Prix Bonnie: Kelly Reichardt

Le patron du CNC veut revoir les aides, la chronologie des médias et investir dans l’écriture

Posté par vincy, le 31 janvier 2020

Dominique Boutonnat, le nouveau président du CNC a accordé un entretien au journal Le Monde, en dévoilant quelques axes de sa politique. Sa nomination l'été dernier avait été accompagnée de grincements de dents, suite au rapport qu'il avait rendu deux mois avant sur le financement de la production et de la distribution pour les œuvres audiovisuelles.

Une refonte des aides

Il rappelle que l'enjeu de ce rapport était "de trouver de nouveaux moyens de renforcer notre secteur, fragilisé par la baisse des autres financements, et non de remplacer les fonds publics". Aussi, il lancera en février, "pour une durée de six mois, une révision générale de l’ensemble des dispositifs d’aides et de soutien", conscient que certains sont obsolètes et d'autres inexistants pour répondre aux besoins actuels: "il faudra peut-être en supprimer, en fusionner et en créer."

Recréer le lien avec le public de moins de 35 ans

Avec une exportation fragile, des jeunes qui se détournent de la salle et encore plus des films français, des nouveaux paramètres à intégrer comme l'égalité homme-femme et l'environnement, et le surgissement des plateformes telles Netflix, Disney + ou Amazon Prime, tout le monde comprend que le cinéma est en période de mutation, malgré une fréquentation toujours au dessus des 200 millions d'entrées annuelles. La diminution de la part des jeunes dans le public en salles est un enjeu stratégique. En se détournant des œuvres culturelles françaises, la jeunesse se coupe d'un pan de sa propre culture. Aussi le président de l'institution veut en faire "un enjeu culturel majeur." "Nous allons travailler avec des groupes d’experts (sociologues, philosophes, chercheurs en sciences sociales) pour comprendre comment l’image a une influence sur le développement d’une culture commune. Cela fera partie des objectifs de la revue générale des aides du CNC" annonce-t-il.

Revoir la chronologie des médias

Ainsi sur Netflix, Dominique Boutonnat explique qu'il faut trouver un compromis: Netflix "demande à ce que ses films soient diffusés sur sa plate-forme plus tôt dans la chronologie des médias, avant les dix-sept mois actuellement prévus. Il faut une discussion pour les rapprocher de Canal+ et d’OCS. On ne peut pas travailler sur un projet de loi de cette envergure sans rouvrir le sujet. L’idée, cette fois, est d’aller assez vite. Si l’on s’y prend bien, tout le monde devrait y gagner." A discuter pendant les débats sur la Loi de l'audiovisuelle, promise pour ce printemps, où il faudra bien donner quelque chose en échange de l'exigence voulue par le ministre, celle que les plateformes devront investir un quart de leur chiffre d'affaires dans la production.

Pour lui, les liaisons entre le grand et le petit écran doivent évoluer: publicité de films à la télévision, abandon des jours interdits... "Les jours interdits n’ont plus de sens aujourd’hui. On peut voir des films partout, quand on veut. Même les salles ne sont plus hostiles à ce principe" affirme-t-il.

Réinvestir dans l'écriture et donner de l'oxygène aux producteurs

Côté production comme diffusion, il est partisan là aussi d'une évolution. "A l’heure où la demande explose grâce aux plateformes, je ne peux pas dire qu’il y a trop d’œuvres de cinéma. Ce que l’on voit, c’est que le budget moyen des films a diminué. Certains films ne sont pas assez travaillés, pas assez préparés, notamment le scénario, par manque de temps ou d’argent. (...) Nous allons mieux soutenir la phase d’écriture (...). Certains films pourraient trouver une exploitation immédiate sur d’autres supports que la salle" détaille le patron du CNC.

Enfin, avec le fonds de 225 millions pour les industries culturelles et créatives de BpiFrance, il espère que les producteurs développeront "davantage leurs entreprises, donc leurs projets, avec plus d’autonomie envers les diffuseurs."

Klaus et J’ai perdu mon corps triomphent aux Annie Awards

Posté par vincy, le 26 janvier 2020

Netflix ne dominera pas les Oscars mais la plateforme s'est octroyée le droit de surclasser les studios historiques aux 47e Annie Awards, les récompenses annuelles du film d'animation. Netflix a récolté 19 trophées dont celui du meilleur film d'animation avec Klaus et en tant que distributeur américain celui du meilleur film d'animation indépendant avec J'ai perdu mon corps, premier film de Jérémy Clapin, Grand prix à la Semaine de la critique à Cannes en mai dernier. A eux deux ils ont reçu 10 Annie Awards.

Klaus a remporté sept Annies, sur sept nominations: de la réalisation de Sergio Pablos au montage, en passant par l'animation de personnage, de dessin de personnage, les décors et le storyboarding.

Trois prix pour J'ai perdu mon corps

J'ai perdu mon corps a non seulement triomphé dans la catégorie reine du meilleur film indépendant, mais il est reparti avec l'Annie Award de la meilleure musique pour le compositeur Dan Levy et celui du meilleur scénario pour Jérémy Clapin et Guillaume Laurant.

C'est un triomphe pour le cinéma d'animation européen puisque Klaus est hispano-britannique et J'ai perdu mon corps français.

Notons aussi, parmi les triomphes de Netflix, le succès de la série Love, Death & Robots (4 Annies).

Un Oscar très ouvert

Derrière Disney traîne avec 5 Annies, dont celui de la meilleure performance vocale (Josh Gad pour Olaf dans La Reine des Neiges 2) et celui de l'animation de personnages dans un film en prises de vues réelles (Avengers:Endgame).

Oncle Thomas: la comptabilité des jours, coproduction franco-canadienne, a été distingué par le prix du meilleur court métrage animé (que vous pouvez voir ici, sur Arte).

Avec ce palmarès, les Annie Awards relancent le suspens pour l'Oscar du meilleur film d'animation. Les Golden Globes ont voté pour Monsieur Link, la Guilde des producteurs a choisi Toy Story 4 et désormais Klaus et J'ai perdu mon corps ont regagné des points. Les quatre sont en lice pour les Oscars, aux côtés de Dragons 3 (un seul Annie).

Jean-Pierre Jeunet, Bigbug sur Netflix et deux autres projets

Posté par vincy, le 23 janvier 2020

jean pierre jeunet helena bonham carter

Jean-Pierre Jeunet en dit un peu plus sur son nouveau film à travers un texte mis en ligne sur son compte Facebook. BigBug, produit par Eskwad et le réalisateur et diffusé sur Netflix, sera une "comédie de SF, en lieu clos, avec des humains et des robots, androïdes et mécaniques."

Il dévoile son casting: Claire Chust ("Scènes de ménages"), Elsa Zilberstein, Alban Lenoir, Manu Payet, Isabelle Nanty, Youssef Hadji, Claude Perron, François Levantal, Marysol Fertard et Helie Thonnat. Le tournage débutera le 20 avril pour une diffusion en mars 2021.

Un script rejeté partout

Surtout, il se justifie de pactiser avec Netflix et répond aux réfractaires: "Non, les plate-formes ne vont pas tuer le cinéma, car les choses s’empilent, se complètent, ne se remplacent pas. Le cinéma n’a jamais tué le théâtre, il y a même encore des films en noir et blanc…"

"J’ai vécu pour ce projet, (toute proportion gardée) un peu la même histoire que Scorsese avec The Irishman. J’ai traîné ce script en France pendant 4 ans, me suis vu rejeté par tous, comme l’avait été en leur temps Délicatessen et Amélie Poulain. Et comme Amélie, Brigitte Maccioni de UGC en est tombée amoureuse et a voulu le produire. Mais elle n’a pas réussi car visiblement des robots dans une comédie française, ça ne rentre pas dans une case. Et un jour David Kosse de Netflix m’a écrit de Londres me demandant si je n’aurais pas un projet. Le “oui” avec un grand sourire est revenu 24 heures après !" explique-t-il.

138 millions d'abonnés et pas le stress du box office

Il justifie aussi la non diffusion sur grand écran. "Le fait que BigBug ne sortira pas en salle n’est pas un problème, car contrairement par exemple à TS Spivet qui était tourné en 3D dans les grands espaces américains, celui-ci se prête particulièrement au petit écran, au format télé. Et je dois avouer que l’idée de ne pas avoir à affronter la sortie salle, avec les chiffres couperets qui tombent à 10h du matin, est plutôt un soulagement. Et savoir que 138 millions d’abonnés pourront le voir est extrêmement excitant !"

Sa "liberté totale", son "budget suffisant", ses "équipes enthousiastes" sont autant de satisfactions pour un cinéaste autrefois adulé et toujours culte (l'expo à la Halle saint-Pierre sur son œuvre a été un vif succès). Après sa traversée du désert (projets refusés, fiasco de l'adaptation d'Amélie en musical), il ne peut que se réjouir d'avoir trouver le bon partenaire en taclant un système qui l'a adoré et qui l'a aussi renié.

Il en profite pour annoncer deux autres projets: une série et un faux documentaire pour les 20 ans d'Amélie Poulain, "totalement délirant et poilant" !

Une année 2020 sous le signe de Ghibli

Posté par vincy, le 20 janvier 2020

Alors que Netflix a annoncé vouloir investir cette année 17 milliards de dollars dans les contenus, la plateforme a frappé un beau coup ce matin en dévoilant un partenariat avec les Studios Ghibli.

Les chefs-d'œuvres d'Hayao Miyazaki et d'Isao Takahata, disparu il y a près de deux ans, pourront donc être redécouverts, du studio japonais seront disponibles sur Netflix en Europe, Afrique, Asie (sauf au Japon) et Amérique latine dès le 1er février.

21 films du studio seront diffusés en japonais sous-titrés dans 28 langues et doublés dans 20 langues. Pour les USA, Ghibli avait déjà signé en octobre dernier les droits de diffusion en SVàD avec HBO Max (Warner Bros) alors que la distribution en salles est assurée par le groupe Disney.

Cela se fera par étapes: sept films - Mon voisin Totoro (1988), Porco Rosso (1992), Kiki la petite sorcière (1989), Souvenirs goutte à goutte (1991), Je peux entendre l’océan (1993), Les Contes de Terremer (2006) et Le Château dans le ciel (1986) - le 1er février, 7 autres - Princesse Mononoké (1997), Voyage de Chihiro (2001), Nausicaä de la vallée du vent (1984), Mes voisins les Yamada (1999), Le Royaume des chats (2002), Arrietty, le petit monde des chapardeurs (2010) et Le Conte de la princesse Kaguya (2013) - le 1er mars, et les 7 derniers à partir du 1er avril - Pompoko (1994), Si tu tends l'oreille (1995), Le Château ambulant (2004), Ponyo sur la falaise (2008), La Colline aux coquelicots (2011), Le vent se lève (2013) et Souvenirs de Marnie (2014).
L'offre ne comprendra pas les courts métrages diffusés au Musée Ghibli, qui resteront ainsi une exclusivité pour les visiteurs.

Cette annonce tombe alors que Ghibli avait marqué une longue pause dans la production, se concentrant essentiellement sur la publicité pour maintenir l'activité.

2020 signe le retour à la production de longs métrages. Avec celui d'Hayao Miyazaki, 6 ans après son dernier film, qui travaille actuellement sur son nouveau (et sans doute dernier) long métrage, Kimi-tachi wa D? Ikiru ka ? (How Do I Live?). Aucune date de sortie n'est prévue mais ce ne sera sûrement pas avant le printemps 2021.

Son fils Gor? Miyazaki s'est lui aussi remis à l'ouvrage en s'attelant à la production d'un autre long métrage, son premier depuis 8 ans, que devait réaliser Hayao.

D'ici là, en mai la construction d'un parc d'attraction près de Nagoya sera lancée, avec comme principales attractions et décors les univers des films d'animation du studio. Ouverture en 2022.

Netflix, Amazon: le gouvernement français très gourmand

Posté par vincy, le 15 janvier 2020

Franck Riester continue de préparer sa réforme de l'audiovisuel, qui doit passer devant le parlement au printemps. Le ministre de la Culture a annoncé vouloir fixer à 25% du chiffre d'affaires réalisé en France le taux minimum que les plateformes de vidéo en ligne comme Netflix et Amazon, spécialisée dans les fictions, devront investir dans la production française et européenne. C'est un niveau largement supérieur à celui évoqué auparavant. Pour les plateformes de flux généralistes, le taux minimal serait de 16%.

Il s'agit de revoir le modèle de financement des films et des œuvres audiovisuelles en France alors que les aides du CNC devraient être plus sélectives, et ne sont pas extensibles, et que les budgets des chaînes de télévision, notamment Canal +, ne sont plus au top, et s'orientent davantage vers les séries. L'objectif est d'ailleurs de rééquilibrer les règles entre ces chaînes TV déjà soumises à de nombreuses obligations réglementaires, et ces plateformes en ligne, qui captent une large audience sans règlementation contraignante.

Le ministère annonce également des exceptions que pour le service public, les chaînes thématiques, ou les services de vidéo à la demande.

Ces taux ne seront appliqués que si les négociations entre les filières du secteur ne trouvent pas d'accord.

On attend cependant la nature des sanctions promises par le ministre si les plateformes ne respectaient pas leur obligation. La menace d'une interdiction de diffusion de leurs contenus en France parait hautement improbable. Cette décision serait impopulaire et techniquement hasardeuse, ouvrant la voie au piratage: Netflix compte plus de 6 millions d'abonnés et vient de signer un partenariat avec Canal +, Amazon lie sa plateforme à son service de fidélité pour les achats de biens de consommation et culturels en ligne. Cela devrait aussi concerner Disney + lancé ce printemps, et HBO Max, attendu pour 2021.

On n'en arrivera certainement pas là. Netflix a déjà annoncé plusieurs projets français (et européens) dont l'investissement est à la fois important pour eux et une infime partie de ses milliards dépensés annuellement dans tous les contenus de fiction. Et ça ne change rien pour l'instant au réel problème de la chronologie des médias, qui empêche les cinéphiles français de voir ses films en salles.

Oscars 2020 : Joker de Todd Phillips domine (légèrement) les nominations

Posté par wyzman, le 13 janvier 2020

Netflix domine les nominations, avec 24 citations, même si on ajoute Fox Searchlight à Disney (17+6). C'est une razzia pour la plateforme de streaming qui place plusieurs de ses films dans les catégories reines. C'est aussi un bouleversement qu'il faut suivre, tant cela bouscule les stratégies actuelles de "branding" des majors. A l'inverse, l'indépendant "hype" A24 est complètement absent. On notera par ailleurs la belle performance des studios classiques: Sony avec 20 nominations, Warner Bros avec 12 et Universal avec 13 si on prend en compte les 2 pour Focus Features.

C'est le retour des auteurs. Scorsese, Mendès, Tarantino avec 10 nominations chacune pour des films très personnels, auxquels ont peut ajouter les quatre fois six nommés : Jojo Rabbit, Les filles du docteur March, Marriage Story et Parasite. On regrettera l'absence de réalisatrice dans la catégorie du meilleur réalisateur. Et dans la catégorie du meilleur film, seule une productrice émerge. Mais il est clair que, loin du box office, les votants aux Oscars, de plus en plus divers (sexe, nationalité, âge, ...), préfèrent toujours les films non issus de franchises et aux tons personnels, les sagas romanesques et les œuvres aux soustexte politique et solcial aux divertissements purs.

Bataille ouverte avec 4 films plus de 10 fois nommés, dont le Joker, 11 fois cité.Le Lion d'or de Venise fait la course en légère tête et pourrait être le premier film basé sur un comics à remporter l'Oscar. L'enjeu est complexe puisque The Irishman vaudrait aussi à Netflix son premier Oscar du meilleur film et Once upon a Time in Hollywood le premier couronnement de Tarantino. Par défaut, 1917, Golden Globe du meilleur film dramatique, pourrait emporter la mise. Les quatre ont, en plus, l'avantage, d'avoir été des succès en salles. Avec la Palme d'or, Parasite et le Tarantino, en plus des Misérables, Douleur et Gloire (deux fois cité) et J'ai perdu mon corps, le Festival de Cannes s'offre une belle représentation aux Oscars cette année.

Il y a peu de chance qu'un film fasse une razzia cette année. Une grande partie des principaux nommés repartira avec au moins une statuette. Scarlett Johansson sera à la fois la grande gagnante et la grande perdante. Peu de chances qu'elle reparte avec un Oscar alors qu'elle rentre dans le club select des double nommés la même année (actrice et second-rôle féminin) avec deux films d'auteurs formellement différents. On peut reprocher le manque de visibilité des minorités dans cette liste (une seule actrice noire, un seul acteur latino, un réalisateur asiatique et un autre d'origine maori), mais il est clair que la globalisation continue. De la Nouvelle-Zélande au Royaume-Uni, de la France, avec 5 nominations (musique, film international, film d'animation, court métrage animé, court métrage de fiction) à l'Espagne, de la Corée du sud à la Syrie, les Oscars veulent représenter un certain cinéma mondial, qui pour l'instant a toujours son plafond de verre dans les catégories reines.

Ce manque de visibilité, on le constate notamment parmi les snobés, ces favoris primés dans divers palmarès et évincés de la liste: Jennifer Lopez, Awkwafina, Danny Glover, Lupita Nyong'o, Alfre Woodward, Jamie Foxx, Eddie Murphy, Kang-Ho Song... Mais c'est aussi le cas de Taron Egerton, pourtant Golden Globe du meilleur acteur dans une comédie/musical, Adam Sandler, plébiscité par la critique, George McKay, ou d'habitué des Oscars, Robert De Niro, Christian Bale, Matt Damon, Saoirse Ronan... Les électeurs ont préféré surprendre avec Antonio Banderas, Jonathan Pryce, Anthony Hopkins, Kathy Bates, Cynthia Erivo ou Florence Pugh. Les deux plus grosses surprises restent du côté de Disney avec l'absence de La Reine des neiges 2 (en film d'animation) et de Spirit, la chanson de Beyoncé dans Le Roi Lion. Elton John est quand même représenté avec Rocketman, film finalement assez snobé, tout comme et Ad Astra de James Gray et The Lighthouse de Robert Eggers (une citation chacun). Sans parler d'Uncut Gems des frères Safdie, L'adieu de Lulu Wang, The Last Black Man in San Francisco de Joe Talbot, complètement ignorés. Et on pourrait en citer une dizaine d'autres, de Portrait de la jeune fille en feu à Waves, de Clemency à Booksmart, d'Une vie cachée à Wild Rose, d'Her Smell à Apollo 11. Et bien entendu d'Atlantique.

Le cinéma indépendant, la narration non conformiste et les films de femmes sont finalement les grands perdants de cette sélection pourtant très classe.

Résultat des courses le 9 février.

Voici la liste complète des nominations:

Meilleur film

Ford v Ferrari
The Irishman
Jojo Rabbit
Joker
Little Women
Marriage Story
1917
Once Upon a Time in Hollywood
Parasite


Meilleur réalisateur

Martin Scorsese, The Irishman
Todd Phillips, Joker
Sam Mendes, 1917
Quentin Tarantino, Once Upon a Time in Hollywood
Bong Joon Ho, Parasite

Meilleur acteur

Antonio Banderas, Pain and Glory
Leonardo DiCaprio, Once Upon a Time in Hollywood
Adam Driver, Marriage Story
Joaquin Phoenix, Joker
Jonathan Pryce, The Two Popes


Meilleure actrice

Cynthia Erivo, Harriet
Scarlett Johansson, Marriage Story
Saoirse Ronan, Little Women
Charlize Theron, Bombshell
Renee Zellweger, Judy

Meilleur acteur dans un second rôle

Tom Hanks, A Beautiful Day in the Neighborhood
Anthony Hopkins, The Two Popes
Al Pacino, The Irishman
Joe Pesci, The Irishman
Brad Pitt, Once Upon a Time in Hollywood

Meilleure actrice dans un second rôle

Kathy Bates, Richard Jewell
Laura Dern, Marriage Story
Scarlett Johansson, Jojo Rabbit
Florence Pugh, Little Women
Margot Robbie, Bombshell

Meilleur scénario original

Knives Out, Rian Johnson
Marriage Story, Noah Baumbach
1917, Sam Mendes and Krysty Wilson-Cairns
Once Upon a Time in Hollywood, Quentin Tarantino
Parasite, Bong Joon-ho, Jin Won Han

Meilleur scénario adapté

The Irishman, Steven Zaillian
Jojo Rabbit, Taika Waititi
Joker, Todd Phillips, Scott Silver
Little Women, Greta Gerwig
The Two Popes, Anthony McCarten

Meilleurs décors (et direction artistique)

The Irishman, Bob Shaw and Regina Graves
Jojo Rabbit, Ra Vincent and Nora Sopkova
1917, Dennis Gassner and Lee Sandales
Once Upon a Time in Hollywood, Barbara Ling and Nancy Haigh
Parasite, Lee Ha-Jun and Cho Won Woo, Han Ga Ram, and Cho Hee

Meilleurs costumes

The Irishman, Sandy Powell, Christopher Peterson
Jojo Rabbit, Mayes C. Rubeo
Joker, Mark Bridges
Little Women, Jacqueline Durran
Once Upon a Time in Hollywood, Arianne Phillips

Meilleurs maquillages et coiffures

Bombshell
Joker
Judy
Maleficent: Mistress of Evil
1917

Meilleure photographie

The Irishman, Rodrigo Prieto
Joker, Lawrence Sher
The Lighthouse, Jarin Blaschke
1917, Roger Deakins
Once Upon a Time in Hollywood, Robert Richardson

Meilleur montage

Ford v Ferrari, Michael McCusker, Andrew Buckland
The Irishman, Thelma Schoonmaker
Jojo Rabbit, Tom Eagles
Joker, Jeff Groth
Parasite, Jinmo Yang

Meilleur montage son

Ford v Ferrari, Don Sylvester
Joker, Alan Robert Murray
1917, Oliver Tarney, Rachel Tate
Once Upon a Time in Hollywood, Wylie Stateman
Star Wars: The Rise of SkyWalker, Matthew Wood, David Acord

Meilleur mixage de son

Ad Astra
Ford v Ferrari
Joker
1917
Once Upon a Time in Hollywood

Meilleurs effets visuels

Avengers Endgame
The Irishman
1917
The Lion King
Star Wars: The Rise of Skywalker

Meilleure chanson originale

“I Can’t Let You Throw Yourself Away”, Toy Story 4
“I’m Gonna Love Me Again”, Rocketman
“I’m Standing With You”, Breakthrough
“Into the Unknown”, Frozen 2
“Stand Up”, Harriet

Meilleure musique de film

Joker, Hildur Guðnadóttir
Little Women, Alexandre Desplat
Marriage Story, Randy Newman
1917, Thomas Newman
Star Wars: The Rise of Skywalker, John Williams*The King, Nicholas Britell

Meilleur film en langue étrangère

Corpus Christi, Jan Komasa
Honeyland, Tamara Kotevska, Ljubo Stefanov
Les Miserables, Ladj Ly
Pain and Glory, Pedro Almodovar
Parasite, Bong Joon Ho

Meilleur film d’animation

How to Train Your Dragon: The Hidden World, Dean DeBlois
I Lost My Body, Jeremy Clapin
Klaus, Sergio Pablos
Missing Link, Chris Butler
Toy Story 4, Josh Cooley

Meilleur film documentaire

American Factory, Julia Rieichert, Steven Bognar
The Cave, Feras Fayyad
The Edge of Democracy, Petra Costa
For Sama, Waad Al-Kateab, Edward Watts
Honeyland, Tamara Kotevska, Ljubo Stefanov

Meilleur court-métrage de fiction

Brotherhood, Meryam Joobeur
Nefta Football Club, Yves Piat
The Neighbors’ Window, Marshall Curry
Saria, Bryan Buckley
A Sister, Delphine Girard

Meilleur court-métrage d’animation

Dcera, Daria Kashcheeva
Hair Love, Matthew A. Cherry
Kitbull, Rosana Sullivan
Memorable, Bruno Collet
Sister, Siqi Song

Meilleur court-métrage documentaire

In the Absence, Yi Seung-Jun and Gary Byung-Seok Kam
Learning to Skateboard in a Warzone, Carol Dysinger
Life Overtakes Me, Kristine Samuelson and John Haptas
St. Louis Superman, Smriti Mundhra and Sami Khan
Walk Run Cha-Cha, Laura Nix

[2019 dans le rétro] Les 50 films qu’il fallait voir en 2019 (4/5)

Posté par redaction, le 29 décembre 2019

Douleur et gloire de Pedro Almodovar

Il y a une forme de triple mise en abime: un réalisateur et son double, un cinéaste et son œuvre, le cinéma et la vie. Douleur et Gloire est un grand Almodovar. Par sa richesse narrative, sa complexité psychologique, par ce tour de force où Antonio est Pedro et Banderas incarne son mentor. Histoire d'une dépression, d'un mal-être physique et psychique, d'une panne d'inspiration. Une panne sexuelle finalement. Une impuissance à retrouver le désir. Tout un chemin pour y parvenir, en fouillant dans l'enfance (jusqu'à la scène la plus érotique de l'année), en retrouvant les "éloignés", en cherchant ce qu'il peut encore raconter. Ce drame lumineux et sombre, coloré et noir, est presuqe un tableau de maître. Une peinture des sentiments.

La cordillère des songes de Patricio Guzmán

Patricio Guzman conclut sa trilogie entamée en 2010 avec Nostalgie de la lumière et complétée en 2015 avec Le Bouton de nacre par une réflexion puissante sur les réalités contrastées du Chili. Il poursuit ainsi son travail de mise en lumière et de documentation de l’Histoire de son pays, et notamment des années noires de la dictature, tout en annonçant prophétiquement les récentes manifestations populaires réclamant une société plus égalitaire. “Le système de Pinochet perdure aujourd’hui” déplore justement l'un des protagonistes. D'où la nécessité de témoigner, toujours plus impérieuse, qui ne cesse d'animer le réalisateur, et  l'amène une nouvelle fois à “confronter les hommes, le cosmos et la nature” dans un film-expérience unique et indispensable.

Cutterhead de Rasmus Kloster Bro

Au nord de l’Europe il y a aussi des films remarquables. Du Danemark est venu ce claustrophobe Cutterhead de Rasmus Kloster Bro. Il y a un chantier en profondeur dans le sol pour creuser un tunnel, il y a un accident qui emprisonne dans un réduit de quelques mètres une photographe avec deux ouvriers qui parlent une autre langue. Pas de nourriture, l’oxygène baisse comme les chances de survivre, la lutte que pour soi, avec et contre les deux autres commence. L’angoisse qui monte est filmée au plus près des visages pour oppresser aussi le spectateur, avec des dilemmes à faire suffoquer la morale.

Us de Jordan Peele

Après le succès de Get Out, Jordan Peele était largement attendu au tournant. Un acteur comique qui a surpris la critique avec un thriller horrifique peut-il vraiment surprendre deux fois ? Force est de reconnaître qu’à 40 ans, celui que l’on a découvert dans la série Key & Peele semble au sommet de son art. Grâce à une Lupita Nuyong’o plus impressionnante que jamais, il signe avec Us un sublime film d’horreur sur une Amérique qui a peur de son ombre. Une manière de figurer la dualité qui repose en chaque citoyen ainsi que les traumatismes du passé. Une vraie réussite !

Le voyage du prince de Jean-François Laguionie

Avec malice et ironie, le merveilleux Jean-François Laguionie se moque de nos lâchetés, de notre mesquinerie et de notre étroitesse d'esprit dans un film d'aventures tout public qui est à la fois poétique et drôle. Impossible, en découvrant cette société régie par la peur et le consumérisme, terrorisée à l'idée qu'il existe d'autres peuples que le leur, de ne pas penser à la tragédie qui se joue quotidiennement en Méditerranée et à notre indifférence complice.

Yesterday de Danny Boyle

Tout le monde a oublié l’existence des Beatles, tout le monde sauf Jack... C’est écrit sur les différentes affiches du film : la comédie feel-good par les créateurs de Slumdog millionaire et de Love actually. C’était l’équation idéale : film britannique, Richard Curtis et Danny Boyle derrière, devant les yeux, la révélation Himesh Patel (qu'on retrouvera dansTenet de Christopher Nolan), Lily James et même le chanteur Ed Sheeran. Et dans les oreilles le souvenirs des chansons des Beatles. Peut-être plus musical que romantique Yesterday est en effet la comédie de l’année qui fait sortir de la salle avec un grand sourire.

Chambre 212 de Christophe Honoré

Christophe Honoré ne nous a jamais fait autant rire et sourire. Il signe là un film proprement emballant sur le couple, la fidélité, l'émancipation féminine, inversant ainsi les codes ancestraux du Vaudeville, rompant avec le sexisme et le patriarcat. Ici sont convoqués les rois de la screwball comedy américaine, Bernard Blier , Woody Allen, Alfred Hitchcock et autres grands maîtres du huis-clos surréaliste où les répliques fusent comme des balles pour toucher l'autre ou se protéger des attaques. Chiara Mastroianni trouve son plus beau rôle dans une chorale à quelques voix dissonantes. Un film à la croisée des chemins d'un couple, hors des sentiers battus cinématographiques, passant par des chemins de traverse narratifs. Un petit régal.

Avengers : Endgame d’Anthony et Joe Russo

Au rayon des blockbusters offerts par Disney cette année, il y en a deux qu’il ne fallait pas manquer. Le Roi Lion et Avengers : Endgame. Si le premier a surpris par son hyper-réalisme, c’est bien le second qui a été le centre d’attention de toute la sphère cinéphile au printemps. Entre ceux qui détestent cette surenchère d’effets spéciaux et ceux qui raffolent de ce divertissement inimaginable sans pop corn, la bataille a fait rage sur les réseaux sociaux. Du quatrième Avengers, nous retiendrons néanmoins la capacité de Disney et Marvel à rassembler un nombre incroyable d’acteurs nommés ou victorieux aux Oscars et leur intérêt pour la notion même d’héritage. Dans un monde où les divisions sont de plus en plus visibles et les extrêmes de plus en plus populaires, Avengers : Endgame a rappelé à ceux qui en doutaient encore que l’union fait la force et que le choix de ses ennemis est aussi important que sa stratégie d’attaque. Drôle et émouvant, le « final » des Avengers ouvre de nouvelles portes — que l’on ne voyait pas jusque-là.

Marriage story de Noah Baumbach

Il n'y a pas eu de meilleur divorce depuis des lustres. Noah Baumbach ausculte avec précision l'effondrement d'un couple et le système qui va détruire ce qu'il restait d'amour. Avec une intelligence de la mise en scène et une excellence du jeu d'acteurs, Marriage Story nous hante longtemps grâce à l'émotion et la colère qu'il dégage, tout en s'offrant des intermèdes légers et des scènes lourdes de symboles. De petits défauts mignons liés à la routine aux grands combats pour leur survie individuelle, les époux Barber nous semblent familier.Leur histoire est aussi poignante que splendide, banale qu'universelle.

Le lac aux oies sauvages de Diao Yinan

L'envoûtement est immédiat tant l'esthétique du film nous hypnotise. Sous ses allures de polar, ce film noir et tragique, qui en utilise tous les codes, va se révéler tourbillonnant et sans répit. Les eaux de ce lac ne sont pas calmes. L'atmosphère est moite et sanglante, l'intrigue inquiétante et imprévisible. Diao Yinan emprunte à tous ses confrères chinois,d e Jia Zhangke (Boney M remplace les Pet Shop Boys) à Wong Kar-wai (dans ce pas de deux romantique et mutique), en passant par Johnnie To (pour les scènes collectives violentes). Son ambition formelle prend le pas sur le récit, et avec son minimalisme intense, conduit à un film à multiples dimensions sur la Chine, sans acrifier le romanesque.

[2019 dans le rétro] Les 50 films qu’il fallait voir en 2019 (3/5)

Posté par redaction, le 28 décembre 2019

It must be heaven d'Elia Suleiman

Qu'il est bon d'observer les absurdités du monde à travers le regard malicieusement distancié d'Elia Suleiman ! L'éternel Auguste du cinéma palestinien promène son mutisme mélancolique, son air perpétuellement impassible et son auto-dérision touchante de Nazareth à New-York, en passant par Paris, et constate avec résignation et humour que l'obsession pour la sécurité, la dictature des normes et les multiples aberrations du quotidien sont loin d'être l'apanage de la seule Palestine. Il n'y a probablement rien de mieux que son cinéma résolument poétique, visuel et burlesque pour dénoncer les violences en général et les exactions israéliennes en particulier.

Parasite de Bong Joon-ho

C’est la palme d’or inespérée du Festival de Cannes, suive ensuite d’un large succès inattendu (et mondial) : ce nouveau film de Bong Joon-ho est l'une des plus belles surprises de l’année. Ça ressemble à un film d'arnaque, mais c’est bien plus que ça : c’est aussi une affaire de famille, et un drame social. Cherchez l’intrus ! Parasite est une succession de rebondissements et d'escalade, où la misère est enfouie dans les sous-sols. Chaque nouvelle situation bouscule la précédente et rend imprévisible la suite, passant de la comédie au thriller. C’est un film à revoir pour être de nouveau soufflé par son brio. le diable se niche dans les détails. Ce coup de maître de Bong Joon-ho est virtuose et promis à rester l'un des films marquants de la décennie qui s'achève.

J’ai perdu mon corps de Jérémy Clapin

Un récit ténu et intime, à fleur de peau, qui convoque à la fois le cinéma de genre et le récit initiatique, pour une réflexion sur le destin qui n'est dénuée ni d'humour, ni de souffle épique. On se laisse porter par la mise en scène précise et inspirée de Jérémy Clapin qui parvient à rendre bouleversant un simple champ contre-champ entre un livreur de pizza et un interphone, et à donner vie, émotion et personnalité à une main coupée abandonnée à elle-même. Quant à la mélancolie sourde qui hante le récit, sublimée par la musique de Dan Levy, c'est celle des souvenirs et des regrets, ravivés par la nostalgie d’un temps révolu, et le désir indicible de trouver un jour sa place dans le monde.

Les invisibles

Ce succès en salles n'était pas forcément prévisible, lui non plus. Et osons-le dire, ce fut l'un des films français les plus intéressants de l'année, par son scénario, son interprétation et son sujet. La comédie sociale de Louis-Julien Petit, qui penche du côté des laissés pour compte et des marginaux, face à un Etat normatif et déshumanisé, est plus que réjouissante. En mélangeant réalité et fiction, en se mettant du côté des résistants qui tentent de construire des digues pour que certains retrouvent leur dignité, le réalisateur parvient à un équilibre parfait entre drame et comédie, avec des touches de mélo de temps en temps. Une sorte de coup de cœur qui réchauffe justement les cœurs et nous tend un miroir déculpabilisant sur l'horreur économique, tout en restant positif.

The Irishman de Martin Scorsese

En décidant de proposer son dernier film sur Netflix, Martin Scorsese pourrait bien avoir offert au géant du streaming (actuellement en danger) le film qu’il lui manquait dans son roaster. Véritable plongée dans le quotidien d’un vrai tueur à gages mêlé à des syndicats, The Irishman donne aux spectateurs une réelle leçon de cinéma. Pendant 3 heures et 29 minutes, Martin Scorsese filme en effet Robert De Niro comme il ne l’a jamais fait : avec la pudeur des amis de longue date, la franchise des collaborateurs réguliers et l’intelligence des grands cinéastes. Sur plusieurs décennies, Martin Scorsese montre en outre les motivations et les implications du crime organisé dans l’Amérique de l’après-guerre. La légende de 77 ans rassemble ses thèmes phares (crime, famille et foi) dans une oeuvre majeure qui ne manquera pas de faire du bruit aux prochains Oscars !

Mektoub My Love: Intermezzo de Abdellatif Kechiche

C’est l’intermède le plus long et le plus sidérant du cinéma français avec 3h30 de film dont 3h dans une boite de nuit, ça danse, ça se drague, ça se confie ... et ça lèche. La quête narrative absolutiste de Kechiche à capter le ‘vrai’ dans sa durée valorise particulièrement ses actrices qui jouent sans vraiment jouer. Au point de choquer le spectateur ou de le perturber hors de sa zone de confort. C’est le choc polémique de Cannes et de 2019, qui devrait sortir en salles prochainement, sans doute rmeixé, remanié, remonté. En attendant la 3ème partie de cette aventure Mektoub My Love. Une audace formelle absolument captivante, déroutante, rebutante, fascinante.

Bacurau de Juliano Dornelles et Kleber Mendonça Filho

Le cinéma brésilien est entré en résistance. Ce western SF est avant tout un pamphlet politique, dans un cadre presque apocalyptique, un décor de désolation où les pauvres sont menacés d'expropriation, d'exploitation et même d'extinction. A la violence sociale et l'autoritarisme qui règne, arbitraire et crue, les deux réalisateurs opposent la solidarité et la défiance par les armes. Puisque l'époque est sauvage, soyons-le. Cette parabole qui rappelle la trame d'Astérix contre les romains est à la fois un spectacle intimiste et un drame brutal et combattif. En jouant sur les sensations et en manipulant les genres, les deux brésiliens ne dissipent pas nos inquiétudes mais nous montrent qu'il ne faut jamais laisser les bras.

90’s de Jonah Hill

Chronique d’un jeune adolescent qui intègre un groupe de skaters un peu plus âgés que lui. Il va souvent observer et parfois partager leur mode de vie alternatif, évitant ainsi le morne quotidien des autres… Tout dans le film y compris sa mise en scène témoigne de ces années 90 qui ont vu grandir le héros (et l’acteur Jonah Hill devenu ici réalisateur inspiré) à travers différents passages initiatiques. 90’s est une restitution étonnante de l’époque, où on se découvre une possible autre famille avec plus de libertés, sans éviter les dangers. Car grandir a ses risques. Entre insouciance et inconscience, aspiration à couper le cordon et sécurité du refuge qu'est le foyer familial, ce film pas loin de Van Sant, est une fable harmonieuse sur la douleur, celle d'apprendre à être soi-même. Skateboarding is not a crime ?

Give Me Liberty de Kirill Mikhanovsky

Dès les premières minutes, Give Me Liberty déroute. Particulièrement bruyant et agité, le film de Kirill Mikhanovsky nous entraîne dans la ville de Milwaukee (et de manière générale l’Amérique profonde) des laissés-pour-compte : les immigrés, les malades, les handicapés, etc. Fait avec tout l’amour du réalisateur pour ses origines russes, Give Me Liberty mêle à la fois le film social, le drame familial et le documentaire politique. Porté par Chris Galust (une sacrée graine d’acteur) et Lauren ‘Lolo’ Spencer, le film présenté à la Quinzaine des Réalisateur fait rire et émeut par alternance pendant près de 2 heures. Un cinéaste à suivre. Que demander de plus ?

La vérité de Hirokazu Kore-eda

Généralement, les cinéastes étrangers venus filmer Paris et ses comédiens et comédiennes restent dans la carte postale et ses clichés. Sans doute parce que Catherine Deneuve a été l'inspiratrice et l'accompagnatrice du cinéaste japonais, Palme d'or 2018, cette nouvelle affaire de famille est une jolie réussite, gourmande, subtile, délicieuse. Evidemment, La vérité est un hymne à Deneuve, qui trouve ici l'un de ses plus grands rôles, à la fois elle-même tel qu'on se l'imagine, et une autre. En multipliant les références à sa filmographie et en s'amusant avec son image, avec quelques répliques vachardes dignes du théâtre comique français, le réalisateur lui fait un immense cadeau. Mais c'est aussi un film de Kore-eda, dans son ADN, avec cette famille de sang éclatée, cette famille de cinéma hypocrite, où finalement tous les masques vont tomber. Brillante allégorie où la vie et la fiction s'entremêlent jusqu'à ne plus distinguer l'émotion sincère de celle que l'on reproduit.