Le futur s’annonce animé

Posté par MpM, le 15 avril 2008

Voir des films d'école permet souvent de se faire une idée générale, à défaut d'être précise, de ce à quoi ressemblera la production cinématographique des années à venir. Et parfois, il y a vraiment de quoi être optimiste. On l'est en tout cas à la vision de la carte blanche que la SACEM offrait lundi à la toute jeune école du film d'animation la Poudrière (créée à Valence en 1999) dans le cadre des journées célébrant le centenaire de la musique de films. Au programme, une demi-douzaine de courts métrages de fin d'études (toutes promotions confondues) ainsi que la présentation en avant-première des dix films d'une minute réalisés par les actuels élèves de première année sur le thème de l'insolite au quotidien.

Ce qui frappe tout de suite, c'est l'énergie et l'imagination qui se dégagent des œuvres. Malgré un format très court, chaque réalisateur parvient à imposer son univers et créer une atmosphère extrêmement personnelle. Poétique, avec Chanson aux pommes de Gian-Maria Leroy (2001), un petit conte sans parole sur l'absurdité et la folie du monde. Inquiétant avec Picore de François Bertin, ou la transformation inéluctable d'un homme en oiseau. Parodique avec The end de Camillelvis Théry, dans lequel un personnage de film noir se retrouve propulsé dans les nuages, où le poursuivent d'étranges hommes-poissons. Mais également une comédie musicale... dans un train (Bouts en train d'Emilie Sengelin), une vision météorologique des différends familiaux (L'oeil du cyclone de Julien Bisaro), les Temps modernes à la sauce numérique et informatique (Bob de Jean-Pierre Poirel) et une variation jouissive sur ce qui aurait pu être une fable de La Fontaine opposant une minuscule souris à un gros tigre féroce (La queue de la souris de Benjamin Renner). Les intrigues sont drôles et intelligentes, le rythme est enlevé, l'animation est fluide et graphique... un pur régal.

Du côté de l'insolite au quotidien, on n'est pas en reste. Les réalisateurs sont encore débutants, mais certains scénarios retiennent l'attention : la mascotte d'un paquet de céréales qui dévore les membres d'une famille, un colporteur qui monnaye... des insultes, un auto-stoppeur confronté à la concurrence déloyale d'un blessé sur un brancard... En une minute il faut aller à l'essentiel, accrocher l'attention du spectateur et l'emmener crescendo vers une chute humoristique ou glaçante. On est un peu au-delà du simple exercice de style, et déjà la technique s'affine (presqu'exclusivement du dessin animé) et les premières tendances apparaissent. Aucun doute, la relève est assurée. Côté musique (le prétexte de la séance), les étudiants ont la chance de travailler avec des compositeurs qui leur écrivent des œuvres originales. C'est bien sûr pour beaucoup dans la tenue "professionnelle" des films.

La science des sons

Posté par Claire Fayau, le 15 avril 2008

Divan du monde, Paris, France, un mercredi soir sur la Terre… Ambiance rouge et noir, interlope mais cosy et jazzy.
Dans un coin des serveuses de dinner US, Brenda et Kelly, dans l’autre un (faux) nain en habit rouge, derrière un stand rouge un auteur de polar, en face la scène avec un cadavre dans un sac plastique… Décor lynchien prêt a accueillir Monsieur Audin et son orchestre pour un concert spécial Angelo Badalamenti - BO Twin Peaks …
Mais avant, une mise en bouche avec la projection de la Tartine, court métrage musical inventif et drôle tout en rimes (un film de Guillaume Colomb et Olivier Derivière. www.la-tartine.com/), et deux courts de David Lynch.
Après les courts, les discours et le tirage au sort. "- Ah bon ? Il y avait des trucs à gagner ? - Oui, et pas des trucs, de vrais prix : rencontres avec David Lynch le 5 mai, biographies de Lynch, DVD et CD d’Elephant man ou Mulholland Drive… Oui même qu‘un ex -star académicien a eu quelque chose..."
Place au spectacle : le concert d’abord… Musique jazzy décalée mais contrôlée par Audin, avec extraits de ''Twin Peaks'', et pour finir le passage d’un ange : Laura Palmer… L’écran de cinéma tombe sur les musiciens -Bye bye Laura! -et le film de David Lynch Fire Walk with me commence…Une cinéparty au divan moelleux et vénéneux.

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Vendredi, c’est la clôture parisienne du beau Béo… On finit en effet en beauté avec la totale : courts métrages, interviews deux concerts, remise de prix et soirée de clôture pour danser, bébé ! World music touchante et orientalisante du film La Maison jaune par Faical SALHI pour concert intimiste puis concert (pas) BOF de Michel Gondry par Jean-Michel Bernard qui a signe les bandes originales de Human Nature, La Science des rêves et de Soyez sympas , rembobinez. En avant -première, l’auditoire a eu droit a la musique du film Cash d’Eric Besnard. Chanteur américain jazzy, funky et énergique ou douce et fine chanteuse japonaise accompagnent musiciens déchaînés (pour l’anecdote, Jean-Michel Bernard s’est même blesse au doigt en pianotant comme un fou).

Les Prix furent remis par Jean-Michel Bernard, toujours sympa, président du jury et lauréat l'année dernière. MpM d'Ecran noir a récompensé Alex Beaupain (Les Chansons d'amour) et Cinezik a décerné le Prix Découverte à ''Para One'' pour le film que nous avons tant soutenu Naissance des pieuvres.

Après la remise des prix, DJ, James Bond Girls, astronaute et filles de joies ont animé la soirée ... toujours avec des musiques de films .

NB :Le festival n'est pas vraiment fini, vous pouvez toujours vous rendre ce vendredi 18 avril , 20 h 30 , au théâtre des Amandiers - Maison de la musique - Nanterre(92) pour voir les dispositifs vidéo de Pierrick Sorin entendre Pierre Bastien et son album '' Téléconcerts ''

Une planète métisse qui se mêle aux hommes

Posté par Claire Fayau, le 14 avril 2008

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En pénétrant dans la galerie ouest du musée du quai Branly, le spectateur est accueilli par une citation de Montaigne : ''Un honnête homme, c'est un homme mêlé.''

Un auteur classique dans le musée des arts premiers ? D'emblée, l'exposition se veut éclectique ! Logique quand il s'agit de traiter du métissage...

La première section de l'exposition, ''Métis ?'' donne quelques définitions visuelles du métissage en opposant /rassemblant statues, tableaux, robes de diverses origines. Difficile, pour nos yeux occidentaux, de distinguer l'exotique du traditionnel.

La seconde partie "Chocs et rencontres des mondes" et la troisième "La fabrique des métissages" s’intéresse au fameux choc des cultures et mélanges qui en résultent, par un jeu d’influences variées.

Enfin la dernière partie, plus accessible, plaira au plus grand nombre et surtout aux cinéphiles :

Au centre d’un cercle, le spectateur peut visionner via trois "split screens" les représentations, aller-retour et mélanges entre les cinémas d’Asie et d' Hollywood. Extraits projetés : Les sept samouraï d’Akira Kurosawa, Les sept mercenaires de John Sturges, Cleopatra Jones de Jack Starrett, La rage du tigre de Chang Cheh, Happy Together de Wong Kar-Wai, Wedding Banquet, Garçon d’honneur et Brokeback Mountain d’Ang Lee ou encore Ghost in the shell 2 de Mamuro Oshi…

Intéressante réflexion sur la mondialisation, la globalisation, l’import-export- fusion des cultures, l’exposition souffre peut-être d’un traitement trop académique surtout au début… Cela manque un peu de folie, pourtant le titre et l’affiche présageaient d’une belle originalité. Pourquoi ne pas avoir été plus loin, et par exemple "mixer" les ambiances avec de la musique du monde, des photos, des vidéos, du "morphing" ? D’autant plus que dans ses expositions permanentes le Quai offre différentes présentations et supports innovants.

Cependant, Planète métisse reste un événement dépaysant, et les objets présentés sont magnifiques et curieux. Le cinéma y a sa part avec le cycle de rencontres mensuelles (le derneir samedi du mois à 16h) "villes métisses". Mexico et Amours chiennes, Rio et Orfeu Negro, Buenos Aires et Bolivia, ou encore Dakar et Kinshasa...

Plus d'informations sur le site de l'expo.

Un roman policier : plus fort que MR 73?

Posté par geoffroy, le 14 avril 2008

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Sortie : 16 avril 2008.

Synopsis: La banlieue, de nuit. Dans un petit commissariat, Emilie Carange, lieutenant de police en proie à des frustrations, voit débarquer Jamil Messaouden, jeune stagiaire, aux méthodes peu orthodoxes. Elle s'éprend de désir pour lui.
Une petite grand-mère arabe se dit témoin d'un grand trafic de drogue. Viard, le flic de la brigade des stups, qui devrait logiquement les traquer a "la tête et le coeur ailleurs".
L'équipe se retrouve dans une affaire qui les dépasse. Plus les nuits filent, plus le désir d'Emilie pour Jamil grandit.
L'affaire de drogue dérape, Emilie aussi...

Un roman policier est le premier long métrage de la réalisatrice Stéphanie Duvivier. Plongée étonnante au cœur d’un petit commissariat de quartier de la banlieue marseillaise, cette immersion territoriale est courageuse, bien foutue et ose décrire une réalité un peu à la manière du cinéma anglo-saxon. Sans artifices, ni digressions abusives sur les difficultés qu’éprouvent les flics dans le bon fonctionnement de leurs missions, la réalisatrice épuise le quotidien de ces agents de l’ordre confrontés aux pressions d’un environnement parfois hostile. Représentatif de la société d’aujourd’hui dans sa mixité sociale, identitaire et sexuelle, le commissariat devient un personnage à part entière dans lequel s’expose des fonctionnaires de l’Etat qui doutent, ont peur et répondent bien souvent aux urgences d’une situation sociale de plus en plus inextricable.

Un roman policier marque en continu un commissariat semblable à beaucoup d’autre dans la froideur de vestiaires vétustes. Quotidien d’un travail souvent plus administratif qu’opérationnel par manque de moyens et d’effectifs, les patrouilles s’enchaînent et les enquêtes font du sur place. Réalité d’une administration rigide laissée à la démerde de ceux qui sont sur le terrain, le moral des troupes de la commissaire Carange est au plus bas. Nous sentons la fatigue, le désespoir et même la résignation. Seul l’arrivée du stagiaire Messaouden redynamisera cette équipe moribonde. Si la mise en place d’une atmosphère tendue est maîtrisée par un choix de mise en scène direct, proche des corps dans leur frustration et leur humanité, elle occulte une partie enquête un peu redondante et manquant de rythme. Peu importe car tel n’est pas le propos de Stéphanie Duvivier. Ce qui l’intéresse c’est de filmer des gueules triturées par ce boulot hors norme, entre l’expérience désabusée des uns et la jeunesse frondeuse du stagiaire (Olivier Marchal, dans le rôle de l’inspecteur désabusé, évite la caricature pour nous livrer, in fine, un flic cassé terriblement attachant).

L’intimité de chacun est alors mise à nu. Ils répondent aux évènements qui traversent un quotidien chaque jour plus usant. Entre coup de blues, remontrance hiérarchique, rixes et autre beuverie d’un soir, leurs histoires de flics s’inscrivent dans celles du quartier et la vie du quartier déborde sur leur travail de flics. Mélange des uns avec les autres – le flic Viard a une relation avec Fati la patronne d’un bar au cœur de la cité –, attirance coupable de la commissaire pour son stagiaire, tout s’effrite et se modifie au rythme des nuits qui s’enchaînent. Cette prise de risque scénaristique vient renforcer les tensions, les solitudes… et les rapprochements.  La réalisatrice capte à merveille ce territoire français – souvent laissé à l’abandon par le cinéma – pour nous offrir des scènes sincères, fortes et terriblement humaines. Tout comme cette scène où les policiers de la brigade dansent avec les clients du bar de Fati. L’ombre de Kechiche n’est pas loin, la réussite du film est là.

Alors peu importe les quelques maladresses scénaristiques d’un long métrage qui remplit aussi bien les vides, les silences et les peurs de chacun. Ouverture sur une réalité de tous les jours, Un roman policier est plus que prometteur, il trace une voie qu’il faudra suivre.

Le bonheur, c’est simple comme une BO de film !

Posté par MpM, le 14 avril 2008

Centenaire de la musique de films100 ans, décidément, ça se fête ! Après le BéO festival la semaine passée, c'est au tour de la SACEM et du cinéma Le Balzac de célébrer le centenaire de la musique de films, composante indispensable au plaisir cinématographique. Pour bien commencer ces trois jours anniversaires, on a pu assister dimanche soir à un ciné-concert de haute volée sur Schastye (Le bonheur) du réalisateur russe Alexandre Medvedkine. Le film, datant de 1934, suit les aventures rocambolesques d'un petit paysan malchanceux en quête du bonheur. Sous couvert de farce moqueuse, il se pose surtout en critique féroce du système qui, quel qu'il soit, tape toujours sur les plus faibles.

L'originalité de la partition qui accompagnait cette fable aux accents surréalistes est d'avoir été entièrement improvisée lors d'une Master Class organisée conjointement par la SACEM et le Festival international du film d'Aubagne. En huit jours, le pianiste et compositeur Stephan Oliva et les huit compositeurs instrumentistes qu'il avait sélectionnés ont ainsi dû s'approprier le film de Medvedkine et lui imaginer un habillage musical moderne et expressif qui dynamise l'intrigue. Les plaintes terribles du didjeridoo et les voix brouillées de la musique assistée par ordinateur, mêlées aux accords graves du violoncelle et de la contrebasse, apportent une véritable émotion au film. Au contraire, les instruments à vent, la guitare et les percussions pimentent les passages plus légers de bruitages qui ajoutent aux aspects comiques. Combinés, ces effets apportent au film une dimension supérieure, à mi-chemin entre la satire dramatique et la réflexion politique.

Les 10 ans du Festival Nemo

Posté par Claire Fayau, le 11 avril 2008

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Rendez-vous multimédia incontournable pour les amateurs de création audiovisuelle, le festival Nemo fête ses 10 ans et, selon les dires des organisateurs, "se fait plaisir'' et du coup, nous fait plaisir. Le festival des nouvelles images se tient du 10 au 20 avril à Paris et en région parisienne.

Début grandiose le jeudi 10 avril au soir par une folle nuit à l'Elysées Biarritz ( pour quelques 250 ''happy few''). Au menu : Paranorama ''paranormal '' international, performance audiovisuelle japonaise et Dj - Vj set allemand ! Voila qui donne le ton du festival.

Pour le reste de la programmation, c'est ouvert à tous (remarquons qu'on peut emmener ses enfants, car il existe un programme "3D Kids''.)

A noter : l'entrée est gratuite ! (dans la limite des places disponibles).

Le programme détaillé se trouve sur le site de l'Arcadi (Action régionale pour la Création artistique et la Diffusion en Ile-de-France )

Les séances se dérouleront : du 10 au 13 avril 2008 à l'Elysées Biarritz (22-24, rue Quentin Bauchart - 75008 Paris), du 15 au 20 avril 2008 à la Bellevilloise (19-21, rue Boyer - 75020 Paris) et du 16 au 19 avril 2008 au Cube (20, cours Saint-Vincent - 92130 Issy-les-Moulineaux)

La programmation en quelques mots:

  • les Panoramas internationaux : animation 2D/3D, clips, cinéma expérimental, art vidéo, design et architecture animés, jeux vidéo ;
  • installations au Cube, à la Bellevilloise( et à Montréal !) ;
  • les ''Music video'' - une très belle série de documentaires sur John Cage et Philip Sigur Ros, les Smiths, Saint Etienne, Daniel Johnston, Scott Walker et Rechenzentrum !
  • les ''Focus'' portent a notre connaissance des productions telles que Motion Theory (USA), Blink Ink (Royaume-Uni), Platige (Pologne) et sur Zarathustra Studios et Fling Films, studios de machinimas ;
  • et de nombreuses performances audio et visuelles qui vont valoir le coup d'œil, c'est certain.

Pour prolonger le plaisir : Le DVD '' best of '' du festival 2008 est disponible avec la revue REPÉRAGES (numéro 60 , 12 euros 90 ).

Les « Cahiers » sont à vendre

Posté par vincy, le 10 avril 2008

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La presse écrite spécialisée dans le cinéma est toujours dans la tourmente. Première en sursis, Ciné Live qui a rejoint Studio au sein de Roularta... Entre Internet, les gratuits des salles de cinéma et le robinet à images sur la télé, le cinoche n'est plus affaire de chapelles et de fidèles. Dernier épisode en date : dans le cadre de sa restructuration, le groupe Le Monde (par ailleur propriétaire de Télérama) a décidé de vendre les éditions de l'étoile, qui possèdent les mythiques Cahiers du cinéma. Ironiquement la récente couverture du mensuel titrait en rouge "Etat d'alerte".

Selon les chiffres les plus récents de l'OJD, Les Cahiers tirent à 42 000 exemplaires. Seulement 25 600 sont diffusés mensuellement, c'est à dire achetés, en France et à l'étranger. Plus de la moitié de cette diffusion est due aux abonnements. Seulement 7 000 exemplaires sont achetés en kiosque en France!

Première reste leader avec 174 100 exemplaires vendus en France et à l'étranger, contre 94 200 pour Studio Magazine, 93 200 pour Cine Live, 43 900 pour Les années Laser et 24 800 pour Mad Movies. A l'étranger, Première est le seul mensuel de cinéma à dépasser les 8 000 exemplaires quand Les Cahiers, Studio et Cine Live sont tous autour de 4 000/ 5 000 exemplaires. Ce remarquable score dans le monde a conduit logiquement les dirigeants des Cahiers à se traduire en anglais sur le web... L'autre force des Cahiers ce sont ses 13 200 abonnés quand Les années Laser n'en ont que 11 800 et Cine Live 20 400. Première reste malgré tout le magazine le plus envoyé par la poste avec 68 300 adresses dans son fichier.

Reste que le mensuel qualifié d'élitiste va devoir trouver un modèle économique hors du groupe Le Monde, qui pouvait lui assurer une certaine pérennité. Pour le moment, aucun de ces magazines n'est parvenu à s'installer confortablement sur un autre support que le papier : ni la télé, ni le web. Surtout, le cinéma est devenu une rubrique incontournable pour tous les magazines. On aurait d'ailleurs pu rajouter Telerama (groupe Le Monde) avec ses 519 200 abonnés et ses 103 300 exemplaires vendus en kiosque tous les mercredi. Ou encore Les Inrockuptibles et ses 21 900 abonnés (soit la moitié de sa diffusion!).

C'est dans ce contexte tendu où le lecteur cinéphile se fait volage que Le Monde a décidé de se séparer de cette belle marque, sans doute pas assez rentable ni essentielle à son développement.

BIFFF 2008 this is the end…

Posté par denis, le 10 avril 2008

La fin du BIFFF approchait tandis que les fans patientaient. En effet, en cette veille de clôture le dernier film de Stuart Gordon, Stuck, était projeté en avant première. Connu pour ses délires sexe et gore du début de sa carrière, il a depuis quelques années modifié et affiné son style pour construire des films à portée sociale. Non qu’il se soit transformé en Ken Loach ou Mike Leigh, Gordon a opté pour un style visuel appauvri volontairement enfin de coller au plus près aux déliquescents modes de vie de ses concitoyens américains. Excepté Dagon, adaptation magnifique d’un récit de Lovecraft, Edmond, King of the ants et aujourd’hui Stuck sont des films utilisant les gimmicks des films d’horreur pour mettre en image l’horrible quotidien de l’individu lambda.

Ainsi Stuck est tiré d’un fait divers. Selon l’intéressé "c’est une  histoire vraie qui s’est passée il y a 7 ans , une infirmière  travaillant dans une  nursery a renversé un sans-abri,puis est rentré chez elle avec le blessé accroché à la voiture, puis a fait  l’amour avec son compagnon sans s’inquiéter de l’homme blessé. Contrairement au film, cet homme n’a pas survécu, alors que si l’infirmière l’avait amené à l’hôpital il s’en serait" sorti. A la lecture de ce fait divers Gordon fut atterré par un tel comportement. Je ne comprenais pas comment une femme qui d’habitue s’occupe des gens à pu faire une chose pareille. Rapidement il décida d’en tirer un film, modifiant seulement quelques éléments en imaginant comment cet homme aurait essayé de s’en sortir. Selon lui on doit se prendre en charge dans toutes les situations, surtout dans cette société où plus personne n’aide autrui, nous vivons dans une époque très égoïste donc nous devons survivre par tous les moyens.

A l’arrivée Stuck, malgré un début un peu lent, se met rapidement en place, ou plutôt dans le surplace, et écorche à vif l’égoïsme forcené d’une société qui n’a que faire de savoir si des cadavres s’amoncellent dans le garage du voisin. Comme le dit un des personnages, « ce ne sont pas nos affaires », même quand la vie d’un homme est en jeu. Se laissant aller à deux trois plans assez gores, le pauvre homme dans le pars brise est dans un très mauvais état et jamais Gordon ne fera un film dénué d’hémoglobine, Stuck insiste sur l’aberration de la situation jusqu’à la rendre drôle. 13 Beloved jouait aussi sur ce registre. A croire que plus l’on se penche sur les dérives du monde et plus le rire devient l’ultime bouée de sauvetage de l’individu. Ces aberrations font penser aux dramaturges scandinaves pour leur capacité à fouiller les tréfonds obscurs de l’âme humaine avec en filigrane un humour à froid. Rire du pathétique, sourire pour dédramatiser. Car en général cela se termine souvent mal. Et si Stuck rend justice à l’injustice, il n’en laisse pas moins une impression amère dans la bouche. Après le rebelle Carpenter, Joe Dante la tête brûlée et Romero l’éternel psychologue du vivant zombifié, il faudra dorénavant compter sur Gordon en tant que sociologue du pathétique horrifique.

Enfin, film de clôture censé peindre un imaginaire entre Jodorowsky et Bunuel, The Fall de Tarsem Singh échoue à emporter le spectateur loin des rivages narratifs et des histoires rationnelles malgré son postulat de départ. Dans un hôpital à Los Angeles vers 1940, une petite fille se voit racontée par un cascadeur cloué au lit une histoire de pirates et d’amour. Le film alternera entre ces deux mondes. Fort de son premier film, The Cell plongeait Jennifer Lopez dans l’esprit d’un serial killer, occasion pour le réalisateur de construire nombres de séquences dantesques dans un monde mental cauchemardesque et esthétiquement bluffant, Tarsem récidive dans un registre plus enfantin et s’abandonne dans une image léchée se voulant de véritables odes à l’imaginaire. Bien mal lui en prend, son film ne dépasse jamais le statut de pelloche boursouflée, où, se prenant pour le nouveau maître du conte-mystico-païen, tout est fait pour en mettre plein la vue à coup de paysages sortis de l’Eden et de costumes stylisés à outrance. Certes c’est très beau, mais l’histoire reste très plan-plan, tant dans l’hôpital que dans cette plate histoire d’amour (le monde imaginaire ici n’est pas très imaginatif), et surtout on ressent cette envie de la part du metteur en scène de plagier les grands maîtres psychédéliques sans avoir le discours approprié. Faire un beau film c’est bien, mais faut-il avoir encore quelques chose à dire sans que ce dit film paraisse pour un trip arty prétentieux. A aucun instant une quelconque émotion émerge de ce charabia faussement jodorowskien, et le film continue de dérouler sa logorrhée visuelle en arc-en ciel sans tenir compte de ce manque à ressentir. The Fall, oui, mais pas dans le sens où l’entendait le réalisateur.

Quand Lynch viendra…

Posté par vincy, le 9 avril 2008

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Mardi soir, le divan du monde était transformé en décor lynchien : un club façon jazz, des assiettes "Peaks" à base de hot dogs et de muffin, des serveuses façon "diners" américains. L'ouverture du BéO festival nous a donné l'occasion de découvrir un court métrage de David Lynch, aussi décalé qu'hilarant : The Cowboy and the Frenchman (1988). Belle introduction avant de se laisser envahir par la musique sensible et émouvante d'Angelo Badalamenti grâce à un concert unique et mémorable qui rendait hommage au compositeur des musiques de Lynch.

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L'occasion était trop belle pour manquer l'annonce de la soirée. "A l'occasion de la sortie de son autobiographie "Mon histoire vraie", les éditions Sonatines et le Divan du Monde, vous proposent d'assister à une rencontre exceptionnelle avec David Lynch qui aura lieu au Divan du monde le 5 mai (uniquement sur invitation)." On reviendra plus longuement sur cette nouvelle maison d'édition spécialisée dans le cinéma. Mais ne manquez pas la soirée de ce mercredi 9 avril, au Divan, pour venir gagner des places!

Game in Thailand & Cottage in U.K.

Posté par denis, le 8 avril 2008

Le déferlement des productions fantastiques asiatiques au BIFFF est tel qu’il est maintenant habituel de redouter le pire, entre l’énième film de fantômes, de malédictions, ou d’horror-action mou du genou. D’autant plus que la Thaïlande n’est pas réputé pour son panel cinématographique exportable (si ce n’est un Ong Bak renvoyant Van Damme jouer avec ses petits soldats ou un Tropical malady enchanteur pas sa poésie naturaliste). Et à la vision de 13 Beloved, on ne peut que faire la révérence devant ce thriller psychologique et manipulateur, empruntant tout autant à The Game et à Saw et ne lâchant pas son spectateur jusqu’à la dernière seconde pour une conclusion malheureusement bien contemporaine. Un pauvre quidam a qui rien ne réussit se voit proposer un jeu en 13 épreuves qui, s’il parvient à les franchir, le rendront riche. A lui de savoir s’il acceptera de jouer jusqu’au bout. Si ce pitch n’a rien de très original, le traitement thématique quant à lui se démarque par un comique de situation parfois irrésistible entrecoupé de réflexions sur la place de l’homme dans cette société capitaliste. Est-ce que tout est consommable, que vaut l’homme dans une époque où le divertissement peut devenir meurtrier pour le simple plaisir du jeu (cette thématique fut abordé brillamment dans Le prix du danger et son remake Running man) sont des questions revenant sans cesse au fil des épreuves subies par le héros. Seront aussi égrenés des thèmes comme l’abandon des personnes âgées, la violence urbaine, le voyeurisme. Bref, c’est un portrait bien noir du monde que brosse le jeune réalisateur, mis en image avec intelligence, humour et énergie, et dont le savant mélange rend d’autant plus percutant le propos ( les scènes gores désamorcent d’ailleurs à chaque fois la noirceur du propos). Et le final, sans être un banal twist, débouche sur une morale imparable. 13 Beloved aurait donc beaucoup de chose à apprendre à de nombreuses productions occidentales ultra-balisées et codifiées. Que dire de plus, si ce n’est de lui souhaiter un distributeur français avant que les américains s’en emparent pour encore une fois en faire un remake.

Autre style plus léger mais versant avec allégresse dans les tripailles, The cottage est un film anglais appartenant au genre de la comédie horrifique qui, depuis le succès de Shaun of the dead, est de nouveau bien accueilli par les producteurs et le public. Et comme son aîné ou Severance, The cottage ne se veut rien d’autre qu’un hommage au genre, instillant ici où la des dialogues ciselées et des situations rocambolesques pour justement sortir du genre. Ainsi Shaun of the dead est initialement un film de zombies, Severance un survival, et The cottage un film de gangster. Sauf lorsqu’un fermier psychopathe se met en colère et décime tous ces intrus qui n’ont rien à faire en pleine campagne. Equilibrant parfaitement les ambiances, Paul Andrew Williams réussit un patchwork tout ce qu’il y a de plus réjouissant grâce au traitement de ses personnages et aux liens les unissant. L’humour reposera pour beaucoup sur la relation fraternelle, et les acteurs sont tous suffisamment pittoresques pour que leurs personnages ne soient jamais pris au sérieux. Et c’est après avoir décrédibilisé la pseudo tension du début du métrage que le réalisateur fait verser The cottage dans le gore horrifique avec ce mutant attardé découpant tout ce qui lui tombe sous la main. Le film ne fait pas peur, ce n’est pas le but, mais amuse énormément grâce à cet esprit B loufoque qui ne se prend pas au sérieux. Rire de bon cœur ...