La palme d’or, un Disney et Omar Sy forment le trio gagnant de l’année 2016 selon le sondage annuel de Médiamétrie

Posté par vincy, le 30 mars 2017

L'Etude annuelle 75000 Cinéma de Médiamétrie explore les habitudes cinéphiles des Français, entre autres. L'année 2016 est, selon l'institut, un succès.

41,5 millions de personnes, soit 1,5 million de plus que l’année précédente, ont fréquenté les salles de cinéma l'an dernier "Le pouvoir du cinéma ne se dément pas et résulte d’une combinaison de facteurs qui attirent toujours plus de spectateurs. Nous analysons dans notre étude, toutes les composantes qui font du cinéma un média toujours plus dynamique", déclare Marine Boulanger, Directrice du Pôle Cinéma de Médiamétrie.

Les spectateurs occasionnels en force: incluant notamment les familles, ces spectateurs n’ont jamais été aussi présents en représentant 68% des spectateurs (soit 28,3 millions de Français) et 30,4% des entrées de l’année.
Les habitués (32% des spectateurs par conséquent) sont essentiellement des 50 ans et +, des 15-24 ans et des étudiants.
Les deux catégories de spectateurs sont "particulièrement satisfaits de leur salle de cinéma à qui ils attribuent en moyenne une note de 7,6 sur 10". Les deux tiers fréquentent un seul complexe, par fidélité ou proximité. Ainsi les parisiens, plus cinéphiles que la moyenne française, fréquentent près de trois établissement à l'année, en moyenne.

La salle de cinéma reste le premier lieu d'information, avec les supports promotionnels et les bande annonces. Viennent ensuite Internet et la télévision. Ce résultat est à relativiser: pour le cinéma d'art et d'essai, qui est peu promu sur le petit écran, la presse écrite doit encore avoir un rôle à jouer, tout comme les radios publiques.

En 2016, les spectateurs ont accordé un score moyen de satisfaction de 76% aux films de l’année, avec, en tête Moi, Daniel Blake (95%), Zootopie (94%) et Demain tout commence (90%). Et à voir ce qui motive les spectateurs en salles, ce n'est pas étonnant: l'histoire, le genre et la bande annonce sont les facteurs déterminants. La critique n'est incitative que pour 16% des sondés.

Cannes 70 : El Sur de Víctor Erice, inachevé à jamais

Posté par cannes70, le 30 mars 2017

70 ans, 70 textes, 70 instantanés comme autant de fragments épars, sans chronologie mais pas au hasard, pour fêter les noces de platine des cinéphiles du monde entier avec le Festival de Cannes. En partenariat avec le site Critique-Film, nous lançons le compte à rebours : pendant les 70 jours précédant la 70e édition, nous nous replongeons quotidiennement dans ses 69 premières années.

Aujourd'hui, J-49. Et pour retrouver la totalité de la série, c'est par .


Un des plus beaux films de l’histoire du cinéma en général et de Cannes en particulier, El Sur (Le Sud, Víctor Erice, 1983), est un film inachevé. Il a été présenté en compétition en 1983, à côté d’autres œuvres merveilleuses, telles que L’Argent de Robert Bresson et Nostalghia d’Andreï Tarkovski qui, par ailleurs, allaient recevoir le Grand Prix du cinéma de création ex-aequo, à l’unanimité du jury.

El Sur est un film basé sur le récit homonyme d’Adelaida García Morales, qui raconte la relation entre un père et sa fille, Estrella, dans un petit village au nord de l’Espagne, quelques années après la fin de la guerre civile espagnole. Estrella, adolescente, se réveille un matin en apprenant que son père, Agustín, vient de se suicider.

Mais pourquoi dit-on que c’est un film inachevé ? Víctor Erice répondait à cette question dans un reportage de Televisión Española : « El Sur a eu beaucoup de succès auprès du public et de la critique mais, pour moi, il restera à jamais un film inachevé. On ne s’en rappelle pas toujours quand on en parle mais c’est tellement évident, on ne peut pas le nier ». Le tournage de El Sur commença le 6 décembre 1982 à Ezcaray (La Rioja, Espagne). Le tournage fut soudainement interrompu au bout du 48e jour, alors que la société de production, dirigée par Elías Querejeta, avait prévu 81 jours de tournage.

Que s’est-il vraiment passé ? La société de production avait avancé comme raison majeure le défaut de gestion du budget de la part du réalisateur. Elle prétendait que celui-ci avait trop tourné et qu’elle ne pouvait plus assumer les coûts de production. José Luis Alcaine, chef opérateur de El Sur, contesta ces propos avec une extrême vigueur, lors d’une interview accordée au journal El Mundo en 2012 : « C’est complètement faux. Il s’agissait d’un problème personnel. Erice et Querejeta ne s’entendaient pas bien, et ce dès le début. Erice en a payé le prix fort car la version officielle disait qu’il avait dépensé beaucoup trop d’argent. Ces déclarations lui ont fait du mal ».

Víctor Erice raconte que lors de la deuxième semaine de tournage, Querejeta se présenta sur le tournage pour annoncer que le financement du film, provenant essentiellement de Televisión Española, venait de se compliquer car le nouveau directeur général de la chaîne ne voulait pas assumer les engagements de son prédécesseur, qu’il venait de remplacer. Lors du 48e jour de tournage, Querejeta envoya une lettre à Erice : « On peut faire un film très intéressant avec ce que nous avons déjà tourné. Il nous manque juste la partie plus faible du scénario à tourner, ce n’est donc pas grave si nous ne le terminons pas ». Erice accepta de commencer le montage définitif du film et Querejeta s’engagea à faire aboutir le projet tel qu’il était écrit à l'origine, dès que possible.

Le piège de la sélection cannoise


Le réalisateur, ne voulant soumettre son film à aucun festival de cinéma avant qu’il ne soit complètement terminé, fut surpris de recevoir une invitation de Gilles Jacob pour aller présenter son film au Festival de Cannes 1983. Gilles Jacob serait sorti très ému lors d’une projection du film à Madrid et tenait absolument à que le film soit présent en compétition. Complètement dévasté par cette nouvelle, Erice rédigea une lettre pour annoncer à Jacob qu’il n’assisterait pas au Festival car il considérait que son film était inachevé et ne voulait pas défendre un film qu’il jugeait incomplet.

Cependant, le matin du jour de la projection du film, Pilar Miró, la cinéaste espagnole, alors à la tête de la Direction générale du cinéma, appela Víctor Erice afin de le convaincre de se déplacer. « C’est trop tard », répondit-il. Miró insista : « Va tout de suite à l’aéroport et viens ! ». Lors de la conférence de presse, il ne dit rien sur son désaccord avec son producteur : « Il n’était pas présent et comme il n’était pas présent, je n’avais rien à dire ».

Le bon accueil du public et la critique acheva complètement le rêve d’Erice de finir son projet. Elías Querejeta a toujours utilisé cette bonne réception du film pour défendre sa position et affirmer que le film était très bien comme il était et que « cette histoire d’inachèvement n'intéressait que les intellectuels ». Lire le reste de cet article »

Edito: Une exception française

Posté par redaction, le 30 mars 2017

Juliette Binoche tente une opération grande séduction auprès d'un public populaire et jeune. L'une des rares actrices françaises oscarisées, et la comédienne française de sa génération la plus récompensée dans le monde (Un César pour 9 nominations, deux European Film Awards, et le grand chelem des festivals avec Venise en 1993, Berlin en 1997 et Cannes en 2010) réalise un virage étonnant ce printemps.

Binoche, on a pu admirer ou adorer récemment en Mademoiselle Julie ou en Antigone au théâtre. Au cinéma, elle a brillé chez Godard, Téchiné, Carax, Malle, Kieslowski, Haneke, Boorman, Cronenberg, Dumont, Hsiao-hsien, Gitai, Kiarostami ou Assayas. Une comédienne libre, instinctive, respectée. Juliette fut aussi l'égérie du 63e festival de Cannes. Bref, Binoche, dans l'esprit du public, est une actrice pointue, exigeante mais certainement pas populaire.

Sur le plan des chiffres, sa carrière comporte six-sept succès importants, dominés par deux fresques historiques et romanesques. Une seule comédie se classe dans son box office.

Juliette Binoche opère donc un virage à 180° cette semaine en étant à l'affiche d'un blockbuster américain et d'une comédie française grand public, en plus d'être une des guests de la série TV "Dix pour Cent" (qui sera diffusée à partir du 19 avril sur France 2). Après avoir refusé Jurassic Park et n'être passé que quelques minutes dans Godzilla, Binoche tient enfin un second-rôle étoffé dans une grosse production hollywoodienne. Là encore, elle avait failli passer son tour mais l'univers l'a séduit et le cinéaste Rupert Sanders l'a convaincue, arguant qu'il voulait "une femme authentique, une femme d’émotion". Binoche, malgré son pédigrée, a vu pas mal de films et projets lui passer sous le nez (pour diverses raisons).

En acceptant de faire le grand écart entre une chercheuse expérimentant la cybernétique et une adulescente enceinte tardivement, entre un rôle de "mère" dramatique et celui d'une maman comique (girly et blonde!), elle montre et démontre qu'elle est tout terrain et qu'elle veut plaire. En France, seule Cotillard s'est risquée jusque là à de tels contorsions cinéphiliques, passant de Mal de Pierres à Assassin's Creed à Rock n' Roll, pour prendre ses trois derniers films.

Ce come-back dans le cinéma populaire et ce surgissement sur le petit écran à heure de grande écoute s'accompagne d'une promotion logiquement ciblée sur des émissions comme "Quotidien" (qui a déjà reçu Deneuve, Huppert, ...) ou l'émission de radio de Nagui (et pas celle de Trapenard). Sur les tapis rouges, elle mise sur le glam sexy (décolleté plongeant) plus que sur le chic élégant qu'on imaginerait pour une star quinquagénaire.

On espère que ce triplé printanier permettra aux producteurs et aux réalisateurs de redécouvrir l'une de nos meilleures actrices. Mais une chose est certaine: on est ravi de voir qu'une comédienne de 53 ans (depuis le 9 mars) peut encore être en haut de génériques de films aussi différents, avec des personnages aussi contrastés, alors qu'Outre-Atlantique, toutes ses consœurs se plaignent d'un jeunisme meurtrier, et qu'en France, on range les interprètes dans des cases trop étanches. Binoche, avec Deneuve, Cotillard, Baye, Seydoux et autres, prouve qu'il y a bien une (belle) exception française.