Tarak Ben Ammar cherche-t-il à se racheter avec un film sur Mohamed Bouazizi?

Posté par vincy, le 10 février 2011

Le producteur de cinéma tunisien Tarak Ben Ammar a annoncé qu'il préparait un film sur le jeune Tunisien Mohamed Bouazizi, dont l'immolation par le feu a déclenché les révoltes conduisant à la chute du régime du président Zine El Abidine Ben Ali. Alors qu'il produit actuellement La soif noire, dont le tournage vient de s'achever en Tunisie, Ben Ammar est suspecté d'avoir fricoté d'un peu trop près avec l'ancien régime du dictateur (voir actualité du 19 janvier).

En lançant un projet 100% tunisien autour du héros de la "révolution de jasmin", Ben Ammar cherche-t-il à se racheter ou n'est-ce-qu'une opportunité pour remettre le cinéma tunisien sur la carte de la planète du 7e art? Le film sera réalisé par le cinéaste tunisien Mohamed Zran (Le casseur de pierres, sélectionné à Un certain regard à Cannes en 1990). Selon lui, cela ne peut-être qu'un film fait par des tunisiens. Comme on doute de la sincérité des intentions du producteur, on serait tenté de croire qu'opportunisme rime avec nationalisme.

L'événement a beau dater de décembre, l'écriture du scénario, une adaptation libre, donc très romancée, serait déjà en cours. Profiter de l'émotion devient un leitmotiv pour le cinéma. Des mineurs chiliens à l'affaire Bettencourt, le 7e art ne se laisse même plus le temps de prendre un peu de distance avec l'Histoire.

Le tournage devrait commencer en mai sur les lieux même du suicide de Mohammed Bouazizi. C'est à Sidi Bouzid, au centre du pays, que le 17 décembre un jeune vendeur de fruits et légumes, Mohammed Bouazizi, s'est immolé par le feu après une énième humiliation policière, marquant le déclenchement de la révolution tunisienne qui a culminé avec la fuite de Ben Ali le 14 janvier.

Ben Ammar, sans doute pour anticiper ses futurs rapports avec les autorités tunisiennes, cherche à séduire le peuple. Il déclare à l'AFP que "les recettes du film iront à sa famille et ses descendants à vie. Ce film est une manière de rendre son nom universel, d'en faire un symbole".

"Je veux produire ce film afin que nos enfants n'oublient pas la révolution et son symbole qui n'est ni un homme d'affaires, ni un intellectuel, mais un simple citoyen", ajoute le producteur.

À coup sûr, le film sortira le 17 décembre 2011, en guise d'anniversaire. Rien de mieux pour le marketing.

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La vie de Mohamed Bouazizi (wikipédia)

Berlin 2011 a du cran en ouvrant avec True Grit un Festival pressenti austère…

Posté par MpM, le 10 février 2011

Berlin 11C'est True Grit d'Ethan et Joël Coen qui lancera ce soir les festivités du 61e Festival de Berlin. Le film, qui sortira en France le 23 février, réunit Jeff Bridges, Matt Damon, Josh Brolin et la toute jeune Hailee Steinfeld dont c'est le premier rôle au cinéma.

Il s'agit de l'adaptation (relativement fidèle) par les frères Coen du roman culte de Charles Portis (True grit, 1968) qui raconte comment la jeune Mattie Ross remue ciel et terre pour venger la mort de son père, embarquant dans une aventure périlleuse un shérif fédéral porté sur la boisson et un Texas Ranger aux airs de boyscout.

En 1969, Henri Hathaway s'était emparé de l'histoire pour en faire Cent dollars pour un shérif, qui valut à John Wayne son unique Oscar du meilleur acteur. Une version qui gommait sensiblement le point de vue de sa jeune héroïne (et tout le décalage satirique qui en découle) et s'inscrivait assez classiquement dans les codes du western traditionnel. Pour les curieux ou les nostalgiques, le film est disponible en version Blu-Ray depuis le 8 février.

Sorti le 22 décembre aux USA, le film des frères Coen connaît quant à lui un énorme succès public. Avec plus de 150 millions de dollars engrangés, il a déjà rapporté quatre fois son budget. C'est déjà deux fois plus que No country for old men (4 Oscar en 2008, dont meilleur film et meilleurs réalisateurs) pendant toute sa période d'exploitation. Sans compter que True grit pourrait créer la surprise lors des Oscars 2011 où il est nommé dans dix catégories dont meilleur film, meilleurs réalisateurs, meilleur acteur et meilleur adaptation. Quel que soit le résultat, le film est déjà un gigantesque succès (156 millions de $ en Amérique du nord), et Berlin a eu du nez de le sélectionner... et de la chance de l'obtenir !true Grit

D'autant que cette ouverture prestigieuse ne semble pas tellement à l'image du reste de l'édition, qui fait la part belle à un cinéma d'auteur exigeant et peu médiatisé. Même le cinéma américain est surtout présent avec des films indépendants et des premiers films. Pour les avant-premières "glamour" ou attendues, il faudra repasser.

Pourtant, on a dû mal à croire que Berlin, l'un des trois plus grands festivals européens, n'ait pas eu la possibilité de sélectionner de "gros films" parmi les sorties du premier trimestre. On pense par exemple à The Adjustment Bureau avec Matt Damon, qui sort le mois prochain en France. Il faut donc probablement voir dans cette orientation de la programmation une volonté de Berlin de se démarquer de ce type de cinéma qui, il est vrai, n'a pas particulièrement besoin d'un festival (aussi important soit-il) pour se lancer en Europe.

En attendant, cette 61e Berlinale s'annonce d'autant plus excitante que l'on a le sentiment, à quelques heures de son ouverture, que la compétition est très ouverte, laissant une place importante aux surprises et aux découvertes. N'est-ce pas tout ce qu'on demande d'un festival ?

Vesoul 2011 : interview de Kim Dong-ho, créateur du festival de Pusan

Posté par kristofy, le 10 février 2011

Kim Dong-hoKim Dong-ho (à gauche, et ci-dessous avec Jean-Marc Thérouanne, délégué général du Festival)  a reçu du 17ème FICA de Vesoul un Cyclo d’Or d’honneur pour ses actions pour la promotion du cinéma. Il est notamment l'un des membres fondateur du NETPAC (Network for the Promotion of Asian Cinema) en 1990. D’ailleurs, chaque année à Vesoul, il y a un jury du NETPAC (cette année le président est Dharmasena Pathiraja).

Kim Dong-ho est aussi et surtout le Directeur honoraire du Festival International du film de Pusan en Corée du Sud. Ce festival né de son initiative est devenu le plus important festival de cinéma en Asie à la fois en tant que marché du film et en tant qu’espace de découverte de nouveaux talents. L’occasion d’une interview pour évoquer près de 60 ans d’histoire du cinéma coréen.

Ecran Noir : Présentez-nous le festival de Pusan…

Kim Dong-ho : Le festival de Pusan a été créé en 1996, c’est un festival international qui présente des films du monde entier, et en particulier qui fait découvrir aussi un très large panorama de films asiatiques. L’année dernière, nous avons montré à Pusan 304 films. Ce festival a aussi mis en place un système de soutien aux jeunes cinéastes et jeunes producteurs.

EN : Dans les années 1960, il y a eu un mouvement de renaissance du cinéma coréen, puis une tendance inverse dans les années 1970, que s’est-il passé ?

Kim Dong-ho : Il est vrai qu’entre 1956 et la décennie des années 60, il y a eu un âge d’or du cinéma coréen avec des cinéastes très talentueux, comme Kim Su-yong. A partir des années 70, on peut dire en effet qu'on a connu une régression de notre cinéma à cause de plusieurs facteurs. Tout d’abord avec l’apparition de la télévision, le cinéma coréen a perdu beaucoup de spectateurs, une tendance dans le monde entier d’ailleurs. Ensuite, on peut penser évidement aux censures exercées par le gouvernement de l’époque, la censure était particulièrement sévère pendant les années 70 et aussi les années 80. Cette censure avait pour effet une non-liberté dans le choix des sujets, de plus la liberté d’expression en général était réduite.

EN : Comment le cinéma coréen est devenu ces Kim-Dong-ho
dernières années non seulement un géant du cinéma asiatique mais aussi mondial ? avec Park Chan-wook, Bong Joon-ho, Kim Ki-duk, Lee Chang-dong, Kim Jee-woon…

Kim Dong-ho : A partir de 1995, on peut parler de la deuxième renaissance du cinéma coréen, avec la combinaison de plusieurs facteurs qui ont été bénéfiques. Déjà, il y a eu une abolition de la censure, les cinéastes ont eu la liberté de choisir de traiter le sujet qu’ils voulaient. Ensuite, il y a eu aussi un système d’aides de l’état avec des subventions pour la production des films. Et surtout ces conditions ont encouragé des jeunes cinéastes à prendre la relève et à participer à faire du cinéma coréen leur cinéma. Vers la fin des années 90, diverses insitutions se sont engagées pour la promotion et la diffusion du cinéma coréen, bien entendu il y a le festival de Pusan mais aussi le KOFIC (Korean Film Council, équivalent à notre CNC). Une chose intéressante est que notre patrimoine cinématographique n’est pas oublié avec par exemple l’organisation de rétrospective des films des années 60. Le film La Servante de Kim Ki-young qui date justement de 1960 a été restauré et a de nouveau été un succès en salles (d’ailleurs en sélection Cannes Classics en 2008). C’est un classique qui a aussi fait l’objet d’une nouvelle version par Im Sang-soo : The Housemaid était à Cannes en 2010.

EN : Les screen quotas en Corée ont connu quelle évolution ?

Kim Dong-ho : Le système de screen quotas a en fait commencé durant les années 70, ce système a été créé pour protéger la part de marché du cinéma coréen face aux films occidentaux et notamment américains. En 1984, les distributeurs américains ont obtenus plus de liberté en pouvant distribuer eux-mêmes leurs films en Corée sans passer par l’intermédiaire d’un distributeur coréen, à partir de ce moment-là le gouvernement a renforcé le système de screen quotas. Il s’agissait d’imposer un nombre de films coréens dans les salles de cinéma pour éviter trop de films étrangers et ainsi soutenir notre production. Ce quota était de 146 jours par an. Mais en 2004, un nouveau gouvernement en Corée a cédé à la pression des Etats-Unis qui veulent que leurs films américains occupent le maximum d’écrans, le screen-quota a donc été réduit à la moitié, soit 73 jours par an. Cette réduction a provoqué des inquiétudes pour le cinéma coréen… Cependant, en même temps, notre cinéma a gagné en compétences et en talents, alors cet assouplissement des screen quotas a eu peu d’influence car les films coréens rencontrent par leurs qualités des grands succès en salles et en même temps aussi à l’international.

 Merci à Cho Myoug-jin pour la traduction.

Crédits photos Christophe Maulavé & Michel Mollaret

Vesoul 2011 : le jury international

Posté par MpM, le 9 février 2011

jury

Le jury international est arrivée à Vesoul, prêt à découvrir les neuf longs métrages qui sont en compétition pour le Cyclo d'or 2011. De gauche à droite sur notre photo, on reconnaît Darina Al Joundi (réalisatrice, actrice et scénariste libanaise), Lee Myung-se (réalisateur coréen et président du jury), Roshane Saidnattar (réalisatrice cambodgienne) et Mojtaba Mirtahmasb (réalisateur iranien).

C'est le long métrage Wang Liang’s Ideal du Chinois Gao Xiongjie qui ouvrira les hostilités lors de la séance officielle de ce soir. Le palmarès sera annoncé lors de la soirée de clôture le 15 février prochain.

Crédit photo : Michel Mollaret

Incendies et Les Amours Imaginaires primés par le public de Rotterdam

Posté par vincy, le 9 février 2011

Le Festival du film de Rotterdam a plébiscité les deux films québécois de l'année : Incendies, de Denis Villeneuve, a remporté le prix du public, tandis que Les amours imaginaires de Xavier Dolan a obtenu le prix du jeune public (15-18 ans), qu'il avait déjà reçu pour son précédent film l'an dernier, J'ai tué ma mère.

Incendies a devancé This is England et Biutiful.

Le trophée du meilleur film des Tiger Awards a été décerné à trois films :  The Journals of Musan, du Sud-Coréen Park Jung-bum, Finisterrae, de l’Espagnol Sergio Caballero, et Eternity, du Thaïlandais Sivaroj Kongsakul, qui a, en plus,  reçu l’appui du Fonds Hubert Bals.

Le Festival, essentiellement dédiés aux premiers et deuxièmes films ainsi qu'au cinéma d'auteur, a attiré 340 000 spectateurs cette année, soit une baisse 3,6% par rapport à l'an dernier. 2 472 professionnels et artistes ont été accrédité, là encore le chiffre est en baisse (2 717 en 2010).  Seul le nombre de journalistes étrangers (179 contre 163) a progressé, parmi toutes les catégories.

Vesoul 2011 : liaison sans escale avec Pusan, Corée du sud

Posté par kristofy, le 9 février 2011

Kim Dong-hoOuverture aux couleurs de la Corée du Sud pour cette 17e édition du Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul qui a débuté mardi soir avec la remise d'un Cyclo d'or d'honneur à Kim Dong-ho (notre photo), créateur et directeur honoraire du Festival de Pusan.

Créé en 1996 suite à une volonté politique, le Festival de Pusan s'est imposé au fil des ans comme le plus important festival international du film en Asie, grâce notamment à la qualité du cinéma coréen et l'appui des studios hollywoodiens. En plus de promouvoir un cinéma novateur et clairement "d'auteur", il propose un marché du film extrêmement important. Tous les grands noms du continent asiatique contemporain ont fait leurs débuts à Pusan, qu'il s'agisse de Jia Zhangke, Hong Sang-soo, Kim Ki-duk ou encore Im Sang-soo. C'est donc assez logiquement que Vesoul rendait hommage à son créateur Kim Dong-ho, celui que Jean-Marc Thérouanne, délégué général du festival,  appelle "le Gilles Jacob de Corée".

Les deux autres temps forts de cette ouverture ont été l'ovation faite Aktan Arym Kubatà Jafar Panahi lors de son apparition dans le diaporama présenté en début de soirée (rappelant que le cinéaste iranien, président du jury en 2004, demeure dans les esprits vézuliens) ainsi que la projection du Voleur de lumière du Kirgiz Aktan Arym Kubat (photo de droite). Le film raconte l'histoire d'un homme simple et gentil qui rend des services à tout le monde, souvent à son propre détriment. Cet "être pur" est joué par le réalisateur lui-même, qui a parsemé son film de références politiques et d'une certaine dose de satire sociale.

Un joli coup d'envoi pour ce 17e FICA, à découvrir en salles le 2 mars prochain. En attendant, c'est parti pour sept jours de cinéphilie asiatique durant lesquels plus de 26 000 spectateurs venus de toute la France sont attendus.

Coécrit par MpM
Crédits photos : Michel Mollaret

Vesoul 2011 : l’Asie n’a plus de frontières…

Posté par kristofy, le 8 février 2011

Le plus ancien festival de cinéma asiatique d'Europe se trouve à Vesoul (Haute-Saône, Franche-Comté, autant dire un coin perdu de la France moderne) et il ouvre ses portes aujourd'hui. On y  découvrira les films de toute l'Asie (c'est-à-dire du Proche à l'Extrême-Orient), même si cette 17ème édition du FICA, Festival International des Cinémas d’Asie, mettra particulièrement à l’honneur le Cambodge et la Corée.

Vesoul présentera environ 90 films partagés entre plusieurs sections thématiques, dont une vingtaine de films inédits en France qui seront appréciés par 6 Jurys (le jury International, le jury NETPAC, le jury Musée National des Arts Asiatiques Guimet de Paris, le Jury Langues O'-INALCO, un Jury Lycéen et un Jury Jeunes).

Pour le Cambodge le réalisateur Rithy Panh, artisan de la réappropriation de la mémoire détruite par les Khmers rouges, est attendu à Vesoul avec en même temps 23 oeuvres couvrant 1950-2010.

Le regard sur le cinéma coréen déroulera 65 ans de cinéma (1945-2010) en 27 films clés, avec la présence de Kim Dong-ho, directeur honoraire du Festival de Pusan, le plus important festival de cinéma asiatique.

Certains films sur le thème des "Familles d'Asie" composeront un tableau des familles d'hier et d'aujourd'hui vues par les cinéastes asiatiques. On rendra aussi hommage avec Paprika à Satoshi Kon, le génial cinéaste d'animation récemment disparu.

Enfin, le FICA de Vesoul affirmera son soutien au réalisateur et ami du festival Jafar Panahi, condamné en Iran à 6 ans de prison et 20 ans d'interdiction d'exercer son métier de cinéaste, en projetant son film Le Cercle (lion d'or à Venise) lors de la clôture du Festival.

Festival Ciné Junior : rencontre avec Julie Bertuccelli

Posté par MpM, le 8 février 2011

Le festival Ciné Junior du Val de Marne ferme ses portes ce soir, après presque quinze jours de projections, débats et rencontres destinés au jeune public. 100 films, 300 séances et une compétition principale dont le palmarès a été annoncé dimanche (voir notre actualité). C'est la réalisatrice Julie Bertuccelli (Depuis qu'Otar est parti, L'arbre) qui présidait le jury professionnel. Une expérience de jurée qu'elle affectionne tout particulièrement, puisque c'est l'occasion de voir plein de films !

Ecran Noir : Comment voyez-vous votre rôle de jurée et plus particulièrement de présidente du jury ?
Julie Bertuccelli
: Présidente, pas présidente, c'est un peu la même chose, si ce n'est que j'ai la chance d'avoir deux voix. Mais j'ai déjà été une fois présidente d'un jury et c'est vrai qu'il y a un truc légérement différent dans le sens où on "manage" un peu le débat. J'ai toujours envie de défendre mon avis jusqu'au bout. Sinon, être jurée, c'est un grand plaisir. C'est un cadeau qu'on nous fait à nous "obliger" à voir plein de films dans une durée courte. C'est un peu une épreuve aussi... Ce sont souvent des films que l'on n'aurait pas l'occasion de voir par ailleurs. Bien sûr, c'est un plaisir et un honneur. Pourtant, chaque film passant, il y a une angoisse d'imposture qui monte. On se dit : "mais qui je suis pour décider de donner un prix à un de ces films ?" C'est tellement sujectif... Donc c'est bien d'être plusieurs. Les discussions avec les autres sont passionnantes et passionnées. C'est l'occasion de parler de cinéma d'une manière intéressante. Mais c'est une douleur de ne devoir donner qu'un prix. Il n'y a pas de "meilleur". C'est une question de critères très différents, il y a l'humeur du moment... Pour moi, le choix se fera toujours en fonction du film qui m'a le plus touchée.

EN : Quels sont ces critères, justement ?
JB
: Je ne veux pas choisir que sur des critères formels, ou au contraire uniquement sur le fond. Il faut vraiment qu'il yait une adéquation générale. Il peut y avoir des films très fragiles, et tout à coup il y a quelques scènes qui sont de vrais petits bijoux, et ça peut l'emporter sur des films bien faits... J'ai envie aussi d'aider la diversité et la fragilité de certains films. C'est compliqué en fait ! Si on veut les distinguer, c'est qu'ils méritent d'être vus, on a envie de les partager.

EN : Le fait que le festival soit à destination du jeune public, est-ce que ça change quelque chose dans votre manière de juger ?

JB : Je me demandais justement... Ce qui est difficile, c'est que les films pour enfants, c'est très varié. Ca part des "plus de trois ans" jusqu'à "13-15 ans". Je ne sais pas à quel point nous, en tant qu'adultes, on a le même intêret, le même jugement sur les films pour les tout petits que sur les films pour adolescents, qui peuvent être vus par des adultes aussi. Mais c'est tellement important de faire des films pour les enfants ! Sinon on laisse la place à la télévision et aux films merdiques. Alors que l'enfance, c'est un moment de construction cinéphilique hyper important. Je montre beaucoup de films à mes enfants, mêmpe des films qui parfois ne sont pas faits pour eux. De vieux films, en noir et blanc, muets, des choses qui peuvent paraître ingrates et qu'eux adorent. L'éducation aux enfants, j'en fait beaucoup en organisant des projections de la cinémathèque scolaire. Il y a un vieux fonds de films formidables, plus ou moins éducatifs. J'aime beaucoup ça, ça me parait primordial. C'est aussi pour ça que j'ai accepté de venir dans ce festival car ça me fait très plaisir. C'est un boulot formidable et indispensable qu'ils font. C'est comme ça qu'on prépare les futurs spectateurs, aussi...

=>Lire l'intégralité de l'interview

Les prix Magritte lancent un mauvais sort du cinéma belge…

Posté par vincy, le 8 février 2011

La Belgique n'a jamais aussi été divisée, pour ne pas dire au bord d'une implosion balkanaise ou soudanaise (selon). Les Flamands et les Wallons sont au bord du divorce mais réclament la garde de Bruxelles (comme les Palestiniens et les Israéliens se disputent Jérusalem). Et les professionnels du cinéma francophone belge ont l'idée de copier les Césars (qui eux même ont copié les Oscars) en créant la cérémonie de Magritte. Depuis 2006, les Belges n'avaient plus de prix du cinéma. Les prix Joseph Plateau, créés en 1986, qui récompensaient indifféremment francophones, germanophones et néerlandophones ont laissé un grand vide.

Les prix Magritte ont donc été créé cette année. Problème : ils ne concernent que le cinéma francophone belge (symboliquement remis à Bruxelles quand les Plateau étaient créés dans la ville plus neutre de Gand). La partition de la Belgique continue, même à ce niveau.

Boycott de Cécile de France

Par conséquent, elle est déjà au centre d'une polémique. Ignorer le cinéma flamand alors que les tensions communautaires augmentent s'apparente à une faute politique, surtout quand de nombreux films se font en parfaite harmonie avec des Belges issus de tout le pays (et même d'ailleurs). Ainsi, Cécile de France, originaire de Namur, a refusé de participer à la cérémonie. Le directeur du Centre du Cinéma et de l'Audiovisuel de la Communauté française Frédéric Delcor a reconnu que "si l'on voulait être précis, il faudrait parler de la cérémonie des Magritte du Cinéma belge dans la communauté française". Oops.

Il serait souhaitable que les Magritte s'ouvrent au cinéma flamand. Au lieu de cela, ils ont récompensé la production internationale anglophone de Jaco Van Dormael, Mr Nobody. Au delà des mérites du film, là encore, les Magritte se révèlent hypocrites et provocateurs en primant un film qui n'a de belge qu'une partie minoritaire de son ADN. Cumulant les fautes, ils ont ainsi snobé de nombreux films belges (mais flamands) qui avaient été reconnus dans des festivals internationaux.

On ajoute un problème d'éthique à cette pathétique histoire. C'est l'Académie André Delvaux qui a créé ce prix. Delvaux reçoit comme par hasard un Magritte d'honneur. Et qui retrouve-t-on dans le conseil d'administration de cette académie? Jaco Van Dormael, principal gagnant de la soirée.

À peine 30 films par an

La Belgique se ridiculise une fois de plus. La grosse douzaine de festivals internationaux qui prend place dans la Belgique francophone (notamment le Festival du film francophone de Namur) suffirait à mettre en avant la production nationale. Le pays est doté d'infrastructures solides et de formations reconnues, mais souffre d'un manque de salles qui bloque la croissance de la fréquentation (22 millions de spectateurs en 2009, mais c'est sensiblement le même chiffre depuis plusieurs années). Les films belges, à peine une trentaine de productions par an, ne représentent que 8 à 10% de part de marché du box office annuel (chiffre OEA).

Dans ces conditions, les Prix Magritte n'ont aucun avenir s'ils se ferment à une communauté et jouent le jeu du "partitionnisme". À moins de suivre l'exemple canadien : un prix pour les films québécois (les Jutra) et un autre pour l'ensemble du Canada, y compris le Québec (les Génie).

Palmarès :

Mr. Nobody : meilleur film, réalisateur, scénario original, image, montage, musique originale

Illégal : meilleure actrice (Anne Coesens), second rôle féminin (Christelle Cornill)

Elève libre : meilleur acteur (Jonathan Zaccaï), espoir féminin (Pauline Etienne)

Panique au village : meilleur son, décor

Looking for Eric : meilleure coproduction

Les barons : meilleur second rôle masculin (Jan Decleir)

La régate : meilleur espoir masculin (Joffrey Verbruggen)

Soeur Sourire : meilleurs costumes

Nuit blanche : meilleur court métrage

Les chemins de la mémoire : meilleur documentaire

Magritte d'honneur : André Delvaux

Prix du public : Benoit Poelvoorde

Rachid Bouchareb ne manque ni de projets ni de stars pour les faire

Posté par vincy, le 8 février 2011

Hors-la-Loi a été snobé par les César, par le public aussi, d'une certaine manière (430 000 entrées), mais il a donné à Rachid Bouchareb une troisième nomination aux Oscars (après Poussières de vue et Indigènes). Fait assez rare pour être souligné. Le cinéaste franco-algérien ne se décourage pas : il réalisera sans aucun doute le dernier épisode de sa trilogie sur les relations franco-algériennes.

Mais, d'ici là, son agenda est chargé. Au printemps, il tournera Just like a Woman, avec Sienna Miller, road-movie qui s'étire du Michigan au Nouveau-Mexique. Il s'agit d'un voyage où une américaine coexiste avec une jeune maghrébine.

Début 2012, il retrouvera Jamel Debbouze, face à Queen Latifah, dans Belleville Cop, une comédie bilingue de type "buddy movie". Duo (d)étonnant pour ce scénario coécrit avec Larry Gross, habitué au genre (48 heures mais aussi Prozac Nation et le remake de Master Class).

Enfin, il travaille sur French Connection, qui contrairement à ce qu'indique son titre, est un film en français, qui se déroulera dans les années 70, et traitera des relations complexes entre le Vietnam et la France, en remontant à la Guerre d'Indochine et l'histoire de l'opium. Le scénario devrait être achevé d'ici la fin de l'année.