Les reprises de l’été: Spike Lee et Mel Brooks

Posté par vincy, le 15 août 2018

Do the right thing de Spike Lee (1989)

L'histoire: À Brooklyn, c’est littéralement le jour le plus chaud de l’année. Mookie, un jeune afro-américain, est livreur à la pizzeria du quartier, tenue par Sal et ses deux fils, d’origine italienne. Chacun vaque à ses occupations, mais la chaleur estivale va bientôt cristalliser les tensions raciales.

Pourquoi il faut le voir? Avant la sortie le 22 août de son dernier film, Blackkklansman, Grand prix du jury à Cannes, il est indispensable de revoir l'un des meilleurs films du cinéaste, un pizza aux saveurs italo-afro-américaine. Ce qui est le plus triste en revoyant cette pépite c'est bien qu'elle est toujours d'actualité. La canicule new yorkaise n'aide pas: la tension grimpe au rythme du thermomètre. Spike Lee évoque déjà la discrimination positive, le whitewashing, le racisme, la violence qui l'accompagne, la brutalité policière évidemment. Déjà il politise son propos avec des citations de Martin Luther King le pacifiste et Malcom X le révolutionnaire. Il questionne la moralité des actes, la justification d'une émeute, et fait dialoguer apôtre de la non violence avec défenseur de la légitime offense. Film controversé pour son message ambivalent et ses dialogues crus (avant Tarantino, Spike Lee avait d'ailleurs abusé du mot Fuck dans ce film), il a quand même récolté pas mal de lauriers dont deux nominations aux Oscars et une sélection en compétition à Cannes. Car, au final, beaucoup considère que c'est le meilleur film du réalisateur. En tout cas son plus fondateur. Peut-être aussi parce que, pour la première fois, un cinéaste afro-américain filmait frontalement le cancer de l'Amérique.

Les producteurs de Mel Brooks (1968)  - sortie le 22 août

L'histoire: Jadis célèbre producteur à Broadway, Max Bialystock est désormais contraint de soutirer de l’argent à de riches octogénaires libidineuses en faisant le gigolo. Un jour débarque le timide et névrosé Leo Bloom, chargé de vérifier ses comptes. Constatant certaines irrégularités, le comptable fait remarquer qu’il y aurait beaucoup d’argent à se faire en montant un spectacle qui s’avérerait être un flop immédiat. Les deux comparses décident de s’associer et tombent sur le projet parfait : une comédie musicale intitulée Le Printemps d’Hitler, écrite par un certain Franz Liebkind, faisant l’apologie du Troisième Reich. Max et Leo sont persuadés qu’ils tiennent là un four assuré. Mais le public sera-t-il du même avis ?

Pourquoi il faut le voir? D'abord parce que c'est toujours un régal de voir un Mel Brooks, d'autant plus que c'est son premier long métrage. Avec son réalisateur inexpérimenté, le tournage connu pas mal de mésaventures. Et pourtant, c'est délirant, déjanté, fou, absurde, hors-limites. Influencé par le Dictateur de Chaplin, il va d'ailleurs très loin avec sa chanson-tube Springtime for Hitler. Pas étonnant que le film ait été censuré en Allemagne. Brooks a par ailleurs obtenu l'Oscar du meilleur scénario pour cette fantaisie parodique où il se moque de l'industrie de l'entertainment, des Nazis et d'une Amérique sans valeurs (il reproduira le même schéma avec le remake de To be or not to be). C'est aussi le plaisir de revoir Gene Wilder dans un de ses plus grands rôles. Le film, aujourd'hui considéré comme l'une des plus grandes comédies américaines, a failli passer à l'as. La première à été un échec. le studio voulait d'emblée s'en débarrasser. Il a fallu que Peter Sellers fasse un peu de pub pour que Les producteurs survive. Malgré tout, les critiques étaient divisées entre ceux qui haïssaient cette proposition et ceux qui l'adoraient. Avec le temps, ce film fou est rentré dans le patrimoine. Et une comédie musicale a été mise en scène à Broadway au début des années 2000. Mel Brooks a écrit une version pour la scène, avec Nathan Lane et Matthew Broderick, qui a tenu 2500 soirs et gagné 12 Tony Awards. Puis il a écrit une adaptation de la comédie musicale de Broadway pour le cinéma, toujours avec Lane et Broderick, et Uma Thurman en bonus, en 2005. C'est hystérique et dingue depuis le début cette histoire...

Oscars 2019 : L’Académie annonce une petite révolution

Posté par wyzman, le 10 août 2018

Dans un message adressé aux membres, John Bail et Dawn Hudson (respectivement président et directrice générale de l'Académie des arts et des sciences du cinéma) ont annoncé que la cérémonie des Oscars allait subir quelques changements majeurs.
Bienvenue aux blockbusters ?
La première et principale raison du buzz autour des Oscars consiste en la création future d'une catégorie dédiés aux films populaires. Une décision qui a de quoi faire sourire. En effet, depuis plusieurs années, les votants sont vivement critiqués pour leurs choix, autant sur le plan de leur diversité de sujets et de protagonistes que sur leur caractère intellectuel. Malgré les changements déjà effectués sur l'éligibilité des votants, ces derniers demeurent majoritairement blancs, vieux et de sexe masculin.
Un facteur qui, pour certains, explique l'absence récurrente de films populaires et commerciaux parmi les nommés. L'an dernier, la moyenne des recettes générése par les nommés dans la catégorie meilleur film était la plus basse que l'on avait connue depuis 2011. Il va sans dire que la naissance d'une catégorie concentrée sur les blockbusters pourrait rendre la cérémonie plus alléchante pour le public jeune dont les annonceurs manquent cruellement. Mais cette décision a surtout engendré un sentiment de colère parmi de nombreux cinéphiles ces dernières heures. Pour beaucoup, l'Académie envoie ici un message clair : les films commerciaux ne sont pas dignes des récompenses majeures aux Oscars. Un affront !
Et bien que des films tels que Les Gardiens de la Galaxie, Star Wars : Le Réveil de la Force ou encore Suicide Squad aient récemment été récompensés, il s'agissait toujours de prix techniques. Un constat qui a de quoi surprendre lorsque l'on sait que quelques années plus tôt, Titanic et Gladiator repartaient avec les honneurs. La question est dès lors de savoir si ces dernières années, les membres de l'Académie et les votants ne se seraient pas un peu trop embourgeoisés. Cela expliquerait sans doute pourquoi ils préfèrent nommer des films "plus admirés que vus".
Persuadés que les blockbusters et les films commerciaux tuent le cinéma, les votants ont sans doute tout intérêt selon eux à perpétuer un tel entre-soi. Quel a dû être leur choc lorsqu'en 2009 la catégorie phare est passée de 5 à 10 films ! En attendant de connaître les premiers nommés de cette nouvelle catégorie, la direction de l'Académie a tenu à préciser qu'un blockbuster nommé dans sa catégorie pourrait toujours conquérir parmi les meilleurs films.
Faire revenir le public
Afin de redevenir plus attractive aux yeux des téléspectateurs et des annonceurs, l'Académie a également annoncé que la cérémonie ne durerait désormais plus que 3 heures au lieu des 4 presque atteintes lors de l'édition 2018. Pour parer à ce manque de temps, certains prix seront désormais remis pendant les coupures pub. Certains de ces moments seront rajoutés au montage et visibles plus tard. Si cette mesure a du sens, force est de reconnaître que les organisateurs sont dans une impasse.
L'an dernier, les Oscars ont connu leur plus basse audience historique avec "seulement" 26,5 millions de téléspectateurs branchés devant le sacre de The Shape Of Water. On est dès lors très loin des 57,2 millions de curieux pour Titanic en 1997 et des 43,7 millions de cinéphiles pour 12 Years A Slave en 2013. Et comme l'Académie ne fait jamais les choses à moitié, la cérémonie a été avancée de trois semaines, dès 2020. Considérée comme l'ultime cérémonie de remises de prix, les Oscars ont aujourd'hui lieu après d'autres cérémonies tells que les Golden Globes, les Screen Actors Guild Awards et Critics' Choice Awards. Fin d'un suspense pour certains, l'enchaînement donne à beaucoup l'impression que les Oscars ne sont que l'ultime couronnement, un événement plus très attendu car trop prévu et prévisible.
Si les Oscars 2019 se tiennent toujours le 24 février prochain, l'édition 2020 aura donc lieu le 9 février. Dans cette configuration, elle aura lieu avant les Satellite Awards, les BAFTA et les Spirit Awards et pourrait redevenir un moment synonyme de surprises. Il faut néanmoins se demander si la cérémonie parviendra à garder son âme malgré tous ces changements. Devenue particulièrement politique au cours de la dernière décennie, elle pourrait devoir faire face à une nouvelle controverse en cas de non nomination de Black Panther. Le film de Ryan Coogler et Marvel sorti en février dernier est d'ores et déjà donné gagnant dans la catégorie meilleure blockbuster - "une victoire de seconde classe".

Vanessa Redgrave honorée à Venise

Posté par vincy, le 24 juillet 2018

L'immense comédienne britannique Vanessa Redgrave recevra un Lion d'or pour l'ensemble de sa carrière à la 75e Mostra de Venise. A 81 ans, l'actrice est honorée pour ses "performances sensibles, aux infinies facettes". "Son élégance naturelle, son pouvoir de séduction inné et son talent extraordinaire ont fait qu'elle est passé nonchalamment du cinéma art et essai européen aux productions hollywoodiennes" souligne Alberto Barbera, directeur artistique du festival.

Vanessa Redgrave a reçu un Oscar (meilleur second-rôle féminin pour Julia en 1977) et 5 nominations (Retour à Howard's end, The Bostonians, Mary Queen of Scots, Isadora et Morgan). Côté Golden Globes, elle a aussi été récompensée pour Julia, mais également pour la télévision pour If These Walls Could Talk 2. Les Golden Globes l'ont aussi citée pour Camelot, A Month by the Lake et Prick Up Your Ears et quatre fois dans la catégorie minisérie. Véritable légende britannique, elle a reçu deux fois un prix d'interprétation à Cannes (Morgan en 1966 et Isadora en 1969). Son documentaire, Sea Sorrow, a été en sélection officielle l'an dernier. A Venise, elle avait déjà re!u un prix d'interprétation pour son second rôle dans Little Odessa.

Le grand public l'a vu dans des films comme Deep Impact et Mission: Impossible, le premier film de la franchise où elle jouait la "méchante". Redgrave a tourné ces dernières années avec Bennett Miller, Jim Sheridan, Joe Wright, Sean Penn, Paul Auster, James Gray...

A 81 ans, cette grande dame (1m81 au passage), fille du comédien Michael Redgrave et sœur des acteurs Corin et Lynn Redgrave, a eu une vie mouvementée: ex-épouse du metteur en scène et cinéaste Tony Richardson (leur fille Natasha Richardson, mariée à Liam Neeson, est morte en 2009), qui la quitta pour Jeanne Moreau, ex-compagne de Timothy Dalton (qui fut James Bond deux fois) et actuelle femme de Franco Nero, tombeur d'actrices mondialement connues, acteur et metteur en scène italien, avec qui elle a eu un fils, Carlo Gabriel Nero, réalisateur et scénariste.

Amazon Studios dévoile la bande-annonce de Beautiful Boy avec Timothée Chalamet et Steve Carell

Posté par wyzman, le 27 juin 2018

Il y a quelques minutes, la division d'Amazon spécialisée dans la production et distribution de contenus audiovisuels a dévoilé la première bande-annonce du nouveau drame de Felix van Greoningen Beautiful Boy. Au casting, on retrouve Timothée Chalamet, Steve Carell, Maura Tierney et Amy Ryan.

En route pour les Oscars ?

Ecrit par Luke Davies, Beautiful Boy est un film dramatique adapté des mémoires de David Sheff, Beautiful Boy et de celles de son fils, Nic Sheff, Tweak. Le film du belge déjà auteur de Belgica raconte len somme 'expérience particulièrement déchirante d'une famille touchée par les addictions et dépendances pendant plusieurs années. Timothée Chalamet et Steve Carell incarneront respectivement Nic et David Sheff. Attendu pour le 12 octobre aux Etats-Unis, Beautiful Boy sera visible en France à partir du 21 novembre.

Sacré d'un César 2014 du meilleur film étranger pour Alabama Monroe, Felix van Groeningen est reparti de Sundance 2016 avec un Prix de la mise en scène pour Belgica. Cette année, son Beautiful Boy fait déjà office de candidat sérieux pour les prochains Oscars. Et cela, notamment parce que son acteur principal Steve Carell n'en finit plus de surprendre. Après avoir impressionné dans Foxcatcher, il a prouvé qu'il était bien plus qu'un acteur comique en apparaissant dans The Big Short et Battle of the Sexes. Sa performance de père en pleine perte de contrôle pourrait lui valoir sa seconde nomination en tant que meilleur acteur.

En parlant de seconde nomination, Timothée Chalamet est également concerné. Acclamé par la critique et adoré par le public, il était la révélation de 2017 aux Etats-Unis. En jeune Italien qui découvre sa sexualité et l'amour, il a ému la planète entière dans Call Me By Your Name avant de briser le cœur des spectateurs de Lady Bird. Un acteur à suivre, on ne cessera jamais de vous le dire !

Oscars: toujours plus de femmes et de minorités

Posté par vincy, le 26 juin 2018

Chaque année, les nouveaux membres sont plus nombreux. L'Académie des Oscars continue de bouleverser son collège de votants en ajoutant plus de femmes, plus de jeunes, et plus de personnalités issues des minorités (et plus d'étrangers aussi, devenant chaque année plus globale). Cette année ce sont 928 nouveaux électeurs qui ont été invités (contre 774 l'an dernier et 683 en 2016), de 14 à 86 ans. Parmi les invités, 92 ont été nommés à l'Oscar et deux ont reçu la Palme d'or.

Cela influencera forcément les votes futurs. Les (désormais) 9226 membres (s'ils acceptent tous l'invitation) ne son plus si mâles, vieux et blancs. On compte dorénavant 16% de "personnes de couleur" (expression américaine pour toute personne non-caucasienne) contre 13% l'an dernier, 31% de femmes (contre 28% l'an dernier). 9 branches de l'Académie (interprétation, costumes, montage, production, ...) sont majoritairement féminines.

On notera la présence de nombreux européens (français et espagnols notamment) mais aussi l'influence du Festival de Cannes dans certains collèges où de nombreux cinéastes et techniciens sélectionnés font partie de la liste, et particulièrement du côté asiatique et français. Et si Polanski a été évincé de l'Académie malgré son Oscar, son épouse arrive parmi les membres invités.

Acteurs/Actrices: Hiam Abbass, Gemma Arterton, Eileen Atkins, Sofia Boutella, Alison Brie, Timothée Chalamet, Aurore Clément, Rossy De Palma, Taron Egerton, Isla Fisher, Eva Green, Jennifer Grey, Toby Jones, Daniel Kaluuya, Anil Kapoor, Shah Rukh Khan, Kim Min-hee, Diane Kruger, Andy Lau, Blake Lively, Jena Malone, Carmen Maura, Angela Molina, Eduardo Noriega, Tahar Rahim, Alba Rohrwacher, Amy Schumer, Emmanuelle Seigner, Léa Seydoux, Jada Pinkett Smith, Emma Suarez, Saïd Taghmaoui, Miles Teller, Juno Temple, Liv Tyler, Daniela Vega, Quvenzhané Wallis, Damon Wayans, Ben Whishaw, Evan Rachel Wood...

Directeurs/Directrices de la photo: Thimios Bakatakis, Christophe Beaucarne, Céline Bozon, Benjamín Echazarretta, Hossein Jafarian, Irina Lubtchansky, Claire Mathon, Sayombhu Mukdeeprom, Fredrik Wenzel, Alexis Zabé...

Costumes: Gabriela Diaque, Caroline Eselin, Jo Sang-gyeong, Fabienne Katany, Pierre-Jean Larroque, Virginie Montel, Isabelle Pannetier, Anaïs Romand, Luis Sequeira...

Décors: Paul Denham Austerberry, Aline Bonetto, James Chinlund, Douglas Harlocker, Hwarng Wern Ying, Deborah Jensen, Ilt Jones, Véronique Melery, Cecilia Montiel, Ryu Seong-hie...

Cinéastes: Sean Baker, Laurent Cantet, Ziad Doueiri, Michel Gondry, Luca Guadagnino, Hong Sang-soo, Jean-Pierre Jeunet, Wanuri Kahiu, Nadine Labaki, Lee Chang-dong, Lou Ye, Ruben Östlunf, Alice Rohrwacher, Béla Tarr, Chloé Zhao, Rebecca Zlotowski...

Montage: Laurence Bawedin, Valerio Bonelli, Walter Fasano, Jon Gregory, Anna Mass, Marion Monnier, Nelly Quettier, Elísabet Ronaldsdóttir, Hervé Schneid, Cristiano Travaglioli...

Musique: Joe Bonn, Ted Caplan, Benoît Charest, Sneha Khanwalkar, Kendrick Lamar, Lee Byung-woo, Lim Giong, Daniel Pemberton, Eric Serra, Rob Simonsen, Sufjan Stevens...

Production: Caroline Benjo, Saïd Ben Saïd, Graham Broadbent, Hugues Charbonneau, J. Miles Dale, Jeremy Dawson, Charles Gillibert, Marie-Ange Luciani, Sean McKittrick, Rebecca O’Brien, Oh Jung-wan, Jacky Pang Yee Wah, Sylvie Pialat, Carole Scotta, Antoun Sehnaoui, Vibeke Windelov...

Scénario: Roy Andersson, Sean Baker, Marco Bellocchio, Pablo Berger, Bertrand Bonello, Emmanuel Bourdieu, Robin Campillo, Stephen Chbosky, Arnaud Desplechin, Ziad Doueiri, Michael Green, Alain Guiraudie, Hong Sang-soo, Jeong Seo-kyeong, Guillaume Laurant, Rebecca Lenkiewicz, Gonzalo Maza, Valérie Müller, Jonathan Nolan, Ruben Östlund, Christian Petzold, J.K. Rowling, Fernando Solanas, Béla Tarr, Vanessa Taylor, Joachim Trier, Pierre Uytterhoeven, Chloé Zhao...

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L’affaire Weinstein plombe l’ambiance des Oscars 2018

Posté par wyzman, le 5 mars 2018

Avec Jimmy Kimmel de retour aux manettes, nous pensions que cette 90e édition des Oscars serait complètement folle. A l'image du micmac qui a eu lieu l'an dernier, au moment de remettre le prix du meilleur film. Malheureusement, plombée par l'affaire Weinstein et les déclarations chocs de Donald Trump, cette soirée fut anormalement molle. Au niveau du palmarès comme des sketches du  présentateur, il n'y avait pas grand-chose à se mettre sous la dent.

Points forts :

  • La performance de Sufjan Stevens. Venu interpréter "Mystery of Love", un morceau extrait de la bande originale de Call Me By Your Name, l'auteur-compositeur-interprète de 42 ans a mis tout le monde d'accord à l'aide de son banjo.
  • Le discours de Guillermo Del Toro, vainqueur dans la catégorie meilleurs décors : "May I keep dreaming up your monsters and their wonderful storiess so people like us can help share their worlds."
  • La bonne humeur communicative de Timothée Chalamet. Nommé pour son incroyable performance de jeune Italien amoureux dans Call Me By Your Name, le Franco-américain de 22 ans était la caution jeune et cool de cette cérémonie.
  • Le retour de Faye Dunaway et Warren Beatty. L'an dernier, ils avaient commis la plus grosse bourde de l'histoire des Oscars : annoncer que La La Land avait remporté le Graal et non Moonlight... L'affaire a fait la Une pendant des semaines. Crucifiés à tort en 2017, il était temps que les organisateurs rendent justice à ces deux monuments du cinéma américain.
  • La chemise de James Ivory. Si la presse people aime se délecter des robes des actrices aux Oscars, il convient de préciser qu'hier soir le scénariste de Call Me By Your Name était particulièrement stylé. Avec le visage de Timothée Chalamet dessiné sur lui, il a fait sensation.
  • Guillermo Del Toro lorsqu'il découvre qu'il a remporté l'Oscar du meilleur film. Aussi abasourdi que nous (qui espérions une victoire surprise de Get Out), le réalisateur de The Shape of Water avait tout d'un enfant un matin de Noël.

Points faibles :

  • Dire que l'on aime Jimmy Kimmel serait un doux euphémisme. D'ordinaire drôle et couillu, il semblait pourtant complètement au fond du trou hier soir, épuisé sous le poids de la pression. Dans son viseur dès le début de la cérémonie, le président américain en a pris pour son grade. Mais n'était-ce pas un peu facile ?
  • Le moment anti-Trump juste avant la performance de Gael Garcia Bernal, Miguel et Natalia Lafourcade. Venus interpréter leur titre "Remember Me" présent sur la bande originale de Coco, ils étaient précédés par des propos pro-immigrants et pro-Mexique peu subtils et trop attendus.
  • Un palmarès trop prévisible : Dunkirk vainqueur côté montage, mixage et montage son, qui aurait pu le prédire ? Tout le monde. Allison Janney récompensée pour son second rôle dans Moi, Tonya ? C'était annoncé. Blade Runner 2049 vainqueur côté effets spéciaux ? Une évidence ! James Ivory enfin oscarisé pour le scénario adapté de Call Me By Your Name ? Sans blague.
  • Une cérémonie trop longue que même Jimmy Kimmel n'a su rendre plus dynamique. Incitant les vainqueurs à être brefs leurs discours de remerciement, l'animateur phare de ABC est allé jusqu'à offrir un jet ski d'une valeur de 18.000$ au costumier de Phantom Thread, Mark Bridges, pour son speech de seulement 30 secondes.

Oscars 2018: La forme de l’eau rafle l’Oscar du meilleur film et du meilleur réalisateur

Posté par vincy, le 5 mars 2018

Jimmy Kimmel a présenté la 90e cérémonie des Oscars. Une soirée qu'il a amorcé avec un prologue très sérieux, rappelant les mouvements activistes récents qui ont ébranlé Hollywood: la montée en puissance des afro-américains, #MeToo, Time'sUp et donc évidemment Harvey Weinstein. C'est donc les Oscars du changement qui ont été célébrés ce soir.  "A tous les rêveurs nous sommes avec vous" disaient Lupita Nyong'o et Kumail Nanjiani Enfin pas tout à fait. Parce que le meilleur gag était évidemment celui qui faisait écho au problème d'enveloppe l'an dernier: par courtoisie, les Oscars ont demandé à Faye Dunaway et Warren Beatty de présenter de nouveau l'Oscar du meilleur film.

Mais malgré toutes ces bonnes intentions, et en l'absence de suspens dans 90% des catégories, ce fut sans aucun doute l'une des soirées les plus ennuyeuses des Oscars en 90 ans! Sans doute à cause de la trop belle qualité des nommés, la concurrence était si rude que les votants ont préféré éparpiller les prix sans distinguer de véritable vainqueur. Une année où trop de bons films ont tué toute idée de razzia. Un peu comme toute la saison des prix qui n'a connu aucun consensus entre les guildes professionnelles, les critiques et le public.

On notera que Frances McDormand entre dans le club très fermé des acteurs/actrices deux fois primés, que Roger A. Deakins a attendu 14 nominations pour être récompensé, que James Ivory a du patienter jusqu'à l'âge de 89 ans pour être le plus vieil oscarisé de l'histoire, que Netflix a reçu son premier Oscar (en documentaire), tout comme le Chili (avec le film en langue étrangère), qu'Alexandre Desplat est le seul français oscarisé dans un palmarès très latino-américain, que les minorités et les femmes n'ont pas été oubliés.

Avec 4 Oscars, soit un peu plus que les autres, La Forme de l'eau repart comme le vrai triomphateur de cette course aux Oscars. C'est aussi le triomphe d'un cinéma fantastique, de genre, et d'un cinéma mexicain, décidément dans son âge d'or.

Governors Awards: Charles Burnett, Owen Roizman, Donald Sutherland et Agnès Varda ; prix spécial pour Carne y Arena (Virtually Present, Physically Invisible), le film en réalité virtuelle de Alejandro G. Inarritu.
MEILLEUR FILM: LA FORME DE L'EAU
Meilleur réalisateur: Guillermo del Toro pour La forme de l'eau
Meilleure actrice: Frances McDormand pour 3 Billboards, les panneaux de la vengeance
Meilleur acteur: Gary Oldman pour Les heures sombres
Meilleur second-rôle féminin: Allison Janney pour Moi, Tonya
Meilleur second-rôle masculin: Sam Rockwell pour 3 Billboards, les panneaux de la vengeance
Meilleur scénario: Jordan Peele pour Get Out
Meilleur scénario (adaptation): James Ivory pour Call Me By Your Name d'après le roman d'André Aciman
Meilleur film en langue étrangère: Une femme fantastique de Sebastian Lelio (Chili)
Meilleur court métrage: The Silent Child de Chris Overton et Rachel Shenton
Meilleur documentaire: Icarus de Bryan Fogel et Dan Cogan
Meilleur court métrage documentaire: Heaven is a Traffic Jam on the 405 de Frank Stiefel
Meilleur film d'animation: Coco de Lee Unkrich et Adrian Molina
Meilleur court métrage d'animation: Dear Basketball de Kobe Bryant et Glen Keane
Meilleure musique: Alexandre Desplat pour La forme de l'eau
Meilleure chanson originale: Remember Me dans Coco
Meilleure photo: Roger A. Deakins (enfin) pour Blade Runner 2049
Meilleur montage: Lee Smith pour Dunkerque
Meilleurs décors: Paul D. Austerberry, Shane Vieau et Jeffrey A. Melvin pour La forme de l'eau
Meilleurs costumes: Mark Bridges pour Phantom Thread
Meilleurs maquillages & coiffures: Kazuhiro Tsuji, David Malinowski et Lucy Sibbick pour Les heures sombres
Meilleurs effets visuels: John Nelson, Gerd Nefzer, Paul Lambert et Richard R. Hoover pour Blade Runner 2049
Meilleur montage son: Alex Gibson et Richard King pour Dunkerque
Meilleur mixage son: Gregg Landaker, Gary A. Rizzo et Mark Weingarten pour Dunkerque

Lewis Gilbert (1920-2018): You Only Live Once

Posté par vincy, le 28 février 2018

Presque centenaire. Lewis Gilbert, réalisateur, scénariste, producteur et acteur britannique, né le 6 mars 1920, est mort le 23 février à l'âge de 97 ans. Réalisateur prolifique qui a commencé en filmant des documentaires durant la seconde guerre mondiale pour la Royal Air Force, Lewis Gilbert s'est surtout fait connaître en réalisant trois James Bond: On ne vit que deux fois (avec Sean Connery), L'espion qui m'aimait et Moonraker (avec Roger Moore).

Mais le cinéaste a aussi été l'auteur d'Alfie le dragueur avec Michael Caine, nommé à l'Oscar et au Golden Globe du meilleur film et prix spécial du jury à Cannes en 1966. Il a prouvé un talent polyvalent avec différents genres, du film de guerre au policier en passant par le drame. On lui doit Visa pour Hong Kong (avec Orson Welles), Coulez le Bismark!, Un si bel été (avec Danielle Darrieux), La septième aube (avec Capucine), Les derniers aventuriers (avec Charles Aznavour), immense coprod internationale, ou encore L'éducation de Rita, qui le vit triompher aux Baftas avec le prix du meilleur films (en plus de deux Golden Globes pour les acteurs Michael Caine et Julie Walters).

Au total, il a réalisé une quarantaine de films entre 1945 et le début des années 2000, avec des acteurs aussi réputés que Kenneth More, William Holden, Dick Bogarde, Ernest Borgnine, Candice Bergen, Olivie de Havilland ou Michael York.

Fils de la balle (ses parents travaillaient dans le music-hall) et lui même acteur quand il était enfant, Lewis Gilbert a connu de nombreux succès au box office, grâce à une mise en scène efficace et des sujets dramatiques intenses. Il a appris son méteir en étant documentariste et assistant réalisateur d'Alfred Hitchcock (La taverne de la Jamaïque).

Lui qui a connu le succès et les cérémonies d'Oscars s'étonnait encore, avec une joie non dissimulée, de voir que certains de ses films continuaient de plaire au public, des décennies plus tard.

Edito: La forme de l’or

Posté par redaction, le 22 février 2018

Que nous disent les Oscars cette année? Au-delà de l'ouverture au genre, d'une féminisation dans certaines catégories et d'une ouverture aux minorités, il y a quelque chose qui frappe: les 9 films nommés traversent l'histoire contemporaine.

On part ainsi de mai 1940 avec Les heures sombres et Dunkerque. Le Royaume Uni, la guerre, Churchill. Puis ce sont les années 1950, dans le chic londonien, avec un couturier et sa muse venue de l'Est dans Phantom Thread. On passe en 1962 en pleine Guerre froide avec La forme de l'eau. A la fin des années 1960 et au début des années 1970, avec un scandale politico-médiatique sur la guerre du Vietnam dans Pentagon Papers. Aux années 1980 en Italie avec un Américain qui se laisse séduire par un jeune prodige polyglotte dans Call Me By Your Name. On bascule en 2002 avec Lady Bird. Et on termine à notre époque avec deux films où la violence et l'humour noir décryptent une Amérique des laissés-pour-compte ou des opprimés avec Get Out et 3 Billboards, les panneaux de la vengeance, deux films qui montrent à la fois le racisme systémique de l'Amérique et le déclin des "whites".

Tout y est: la politique, la sexualité, le féminisme, le racisme, la liberté d'expression, ... C'est un voyage dans le temps mais c'est aussi un décryptage de notre temps. Ces dernières années, les Oscars ont récompensé des films très variés: Argo était un thriller aux allures politiques mais qui parlait d'Hollywood (années 1980), Twelve Years a Slave évoquait l'esclavage et le traitement des afro-américains (19e siècle), Birdman était une introspection du milieu (contemporain), Spotlight une enquête journalistique sur un scandale sexuel au sein de la religion catholique (début des années 2000) et Moonlight un film dense qui plongeait dans les zones troubles de l'homosexualité, de la ghettoïsation des afro-américains et des précaires oubliés par le rêve américain  (sur une vingtaine d'années).

Les Oscars ne sont pas forcément le reflet de leur époque. Mais ils en sentent les pulsions. Il est fort probable que le gagnant cette année - les trois favoris sont La forme de l'eau, 3 Billboards et Get Out - sera avant tout la consécration du film de genre (fable fantasy, polar décalé ou thriller horrifique). Mais on retiendra surtout qu'hormis Les heures sombres et Dunkerque, les films se lançant dans la course de la statuette suprême donnent avant tout le beau rôle à des femmes (Phantom Thread, Pentagon Papers, Lady Bird, 3 Billboards, La forme de l'eau), à des personnages noir (Get Out) ou homosexuel (Call me by your name).

En cela, l'Académie, qui se diversifie année après année, élargissant son nombre de votants à des professionnels plus jeunes et plus cosmopolites, fait le choix d'en finir avec un certain académisme. Selon le vainqueur, on verra certainement comment Hollywood va réagir une année de Trumpisme, aux affaires Me Too et aux massacres de masse. Moonlight était clairement un message anti-Trump. Il est fort à parier qu'un film faisant l'apologie de la femme forte, de la paix et du respect des minorités sera dans l'air du temps le 4 mars. Une chose est certaine: l'édition 2018 est de haute qualité. Et ce n'est déjà pas si mal.

3 raisons d’aller voir The Greatest Showman

Posté par wyzman, le 24 janvier 2018

Sorti le 20 décembre aux Etats-Unis (où il a déjà récolté plus de 115M$), The Greatest Showman débarque enfin dans les cinémas français. L'occasion de se passionner pour les péripéties de PT Barnum et de découvrir le talent de Michael Gracey.

1. L'histoire est captivante. Les plus critiques d'entre nous se sont certainement arrêtés aux réécritures de la vie de PT Barnum mais ce n'est pas notre cas. Centré sur le quotidien de cet entrepreneur américain du 19ème siècle qui a fait fortune dans les freakshows avant de lancer son propre crique, The Greatest Showman traite des choix ambitieux qu'il faits, de sa démesure et de sa vie sentimentale mouvementée. Très lisse, le scénario convainc difficilement au niveau des dialogues mais se rattrape grâce à des numéros dignes des meilleures comédies musicales (Roméo + Juliette, Moulin Rouge, etc.) Et ce sont ces séquences techniques absolument parfaites qui font tout l'intérêt de ce film. Lors des rares temps morts, Michael Arndt réussit même l'exploit de faire durer le plaisir tout en posant les bases du star-system et des télé-réalités (oui, oui).

2. Hugh Jackman est au sommet de son art. Après nous avoir surpris dans Logan l'an dernier, l'interprète de Wolverine et acteur principal de The Greatest Showman impressionne de nouveau. Sa performance en PT Barnum est d'une force telle qu'elle finit rapidement par éclipser le reste du casting. A ses côtés, Zendaya Coleman, Michelle Williams et Zac Efron font d'excellents seconds rôles, porteurs de sens et toujours là pour alimenter le jeu de l'Australien de 49 ans. Si ses performances de chanteur et de danseur dans Australia et Les Misérables laissaient vite place à des critiques, il est ici incroyablement bon. En plus de porter (et de sauver par moments) cette comédie musicale, il offre à cette dernière tout son savoir-faire d'entertainer d'exception. Plus sexy que jamais, on espère secrètement qu'il s'intéressera davantage à ce sous-genre à l'avenir.

3. C'est un feel-good movie indispensable. En pleine awards season, nous pourrions avoir tendance à oublier la puissance des comédies musicales pour ne privilégier que les drames. Or, The Greatest Showman est l'énième preuve qu'un feel-good movie est la meilleure chose à voir pour bien débuter l'année, après avoir survécu aux fêtes. Dansant et intriguant, le film de Michael Gracey peut se targuer d'avoir une bande originale de grande qualité qui fait oublier le ridicule de certaines transitions musicales. Nommée aux Oscars, "This Is Me" devrait vite intégrer vos playlists quotidiennes. Parce que tendre, divertissant et amusant, on vous recommande de foncer voir The Greatest Showman pour mettre de la couleur dans votre hiver.