Last ride pour Peter Fonda (1940-2019)

Posté par vincy, le 18 août 2019

Fils de. Frère de. Peter Fonda a toujours été dans l'ombre de son père, Henry, légende hollywoodienne, et de sa sœur, Jane, star mondiale. Même sa fille, Bridget, lui a piqué la vedette. Pourtant, il a su être, à sa manière, une icône, celle de la contre-culture, égérie masculine des hippies, figure emblématique du Nouvel Hollywood. Il a suffit pour cela d'un film, le cultissime Easy Rider, réalisé par Dennis Hopper et présenté à Cannes en 1969 (et primé comme meilleure première œuvre). Co-scénariste du film, Fonda reçoit sa première nomination aux Oscars dans la catégorie scénario.

Biker à jamais, casque vissé sur la tête, filant vers sa destinée d'Est en Ouest, à la fois anticonformiste et sexy... Easy Rider est un hymne à la liberté, un film anti-réactionnaire, un manifeste à la Kerouac. Easy Rider peut-être aujourd'hui regarder comme une utopie contestataire, un point de bascule. Tarantino d'ailleurs évoquait le film dans ses récentes interviews. 1969, année où se déroule Once Upon a Time in Hollywood, c'est la fin des hippies, la fin de l'innocence, l'arrivée d'un nouveau cinéma et de cinéastes qui allaient transformer l'industrie. C'est le meurtre de Sharon Tate et le carton d'Easy Rider. C'est l'échec des rêves américains... Il s'apprêtait à fêter les 50 ans du film.

Né le 23 février 1940 à New York, Peter Fonda est mort des suites d'un cancer à Los Angeles le 16 août à l'âge de 79 ans. 50 ans après le surgissement de sa Captain America sur les grands écrans.

Peter Fonda n'a jamais eu la carrière de son père et de sa sœur. Il a tourné pour Roger Corman dans les années 1960, notamment Les Anges sauvages en 1966, une histoire de gangs de motards. Après un rôle de shérif dans The Last Movie de Dennis Hopper, il se lance dans la réalisation, avec un western, L’Homme sans frontière. En tant que comédien, on le croise dans Brève rencontre à Paris (Two People) de Robert Wise, Colère froide (Fighting Mad) de Jonathan Demme, L'Équipée du Cannonball (The Cannonball Run) de Hal Needham, où il parodie son personnage d'Easy Rider, Los Angeles 2013 (Escape from L.A.) de John Carpenter, L'Anglais (The Limey) de Steven Soderbergh, Le Livre de Jérémie d'Asia Argento, Ghost Rider de Mark Steven Johnson, 3 h 10 pour Yuma de James Mangold... Souvent des seconds-rôles, souvent dans des films oubliés. Il est néanmoins nommé pour l’Oscar du meilleur acteur et lauréat d'un Golden Globe du meilleur acteur dans L’Or de la vie de Victor Nuñez (1997), pour un personnage de père de famille apiculteur. Il était d'ailleurs militant écologiste et n'hésitait pas à produire le documentaire The Big Fix en 2012 sur la gigantesque marée noire du Golfe du Mexique.

"We Blew it" disait-il dans Easy Rider. Amer constat d'un homme qui n'avait jamais lâché ses convictions ni caché ses colères, que ce soit contre Obama ou Trump.

On le verra une dernière fois au cinéma dans The Last Full Measure, qui Lionsgate sort le 25 octobre aux USA, film de Todd Robinson, avec Samuel L. Jackson, William Hurt, Ed Harris, Sebastian Stan, Christopher Plummer, et Jeremy Irvine.

Pedro Costa triomphe à Locarno

Posté par vincy, le 17 août 2019

Avec 246 films présentés, des honneurs allant d'Hilary Swank à SONG Kang-ho en passant par John Waters et Kiyoshi Kurosawa qui présente To the Ends of the Earth en clôture, le festival de Locarno, pour la première fois dirigé par Lili Hinstin, a persévéré dans son mélange des genres, de l'expérimental au grand public (avec 9500 personnes se précipitant pour voir le dernier Tarantino).

Le jury présidé par Catherine Breillat a couronné Vitalina Varela de Pedro Costa (initialement prévu à Un certain regard à Cannes avant d'être retiré de la liste à la demande du cinéaste portugais) en lui attribuant le Léopard d'or et le prix d'interprétation féminine. Ce drame autour d'une cap-verdienne de 55 ans qui arrive au Portugal trois jours après les funérailles de son mari... Cela fait alors 42 ans que son mari, Joachim, est parti de leur île pour travailler à Lisbonne. Pendant tout ce temps, elle a vécu seule, cultivant la terre de la ferme du couple, qui finalement ne se réunira jamais.Elle découvre alors les bidonvilles de Lisbonne, ces ouvriers capverdiens et leurs histoires.

Costa avait déjà été récompensé à Locarno du prix de la mise en scène en 2014 avec Cavalo Dinheiro.

A noter que le premier film sénégalais Baamum Nafi (Nafi’s Father) de Mamadou Dia repart avec deux prix dont le Léopard d'or de sa section, Cinéastes du présent. Le film raconte l'histoire de deux frères qui se disputent à propos du mariage de leurs enfants.

Palmarès Concorso internazionale

Léopard d’or, Grand Prix du Festival de la Ville de Locarno
Vitalena Varela de Pedro Costa, Portugal

Prix Spécial du jury des Villes d’Ascona et de Losone
Pa-go (Height of the Wave) de Park Jung-bum, Corée du Sud

Prix de la mise en scène de la Ville et de la Région de Locarno
Damien Manivel pour Les enfants d'Isadora, France/Corée du Sud

Léopard pour la meilleure interprétation féminine
Vitalina Varela pour Vitalena Varela de Pedro Costa, Portugal

Léopard pour la meilleure interprétation masculine
Regis Myrupu pour A Febre de Maya Da-Rin, Brésil/France/Allemagne

Mentions Spéciales
Hiruk-Pikuk Si Al-Kisah (The Science of Fictions) de Yosep Anggi Noen, Indonésie/Malaisie/France
Maternal de Maura Delpero, Italie/Argentine

Palmarès Concorso Cineasti del presente

Léopard d'or Cinéastes du présent
Baamum Nafi (Nafi’s Father) de Mamadou Dia, Sénégal

Prix du réalisateur émergent de la Ville et de la Région de Locarno
143 Rue du Désert de Hassen Ferhani, Algérie/France/Qatar

Prix Spécial du jury
Ivana the Terrible de Ivana Mladenovi?, Roumanie/Serbie

Mention spéciale
Here For Life de Andrea Luka Zimmerman et Adrian Jackson, Grande-Bretagne

Palmarès Premiers films

Prix pour la meilleure première oeuvre
Baamum Nafi (Nafi’s Father) de Mamadou Dia, Sénégal

Swatch Art Peace Hotel Award
La Paloma y el Lobo (The Dove and the Wolf) de Carlos Lenin, Mexique

Mentions spéciales
Instinct de Halina Reijn, Pays-Bas
Fi Al-Thawra (During Revolution) de Maya Khoury, Syrie/Suède

[Passions américaines] La fièvre au corps (1981) avec William Hurt et Kathleen Turner

Posté par vincy, le 17 août 2019

La fièvre au corps. Film noir, d’un genre nouveau, plus cru, datant de 1981. C’est surtout un film de débutants. Il s’agit du premier film de Lawrence Kasdan, de la première fois où William Hurt et Kathleen Turner sont en tête d’affiche au cinéma. On y croise aussi un vétéran comme Richard Crenna et un espoir nommé Mickey Rourke.

Le film rappelle en de nombreux points, Assurance sur la mort, de Billy Wilder. Mais ici le casting lui ajoute une tension érotique irrésistible. L’alchimie sera si bonne que Turner et Hurt rejoueront chez Kasdan dans Voyageur malgré lui en 1988.

Ici aucun diable au corps, il s’agit d’un jeu machiavélique, très bien construit. Un mécano où les détails ne seront révélés qu’à la fin, un de ces films à « twist », c’est à dire que la fin nous oblige à revoir l’histoire différemment.
Joli succès à l’époque, cette œuvre pour cinéphiles avertis a redoré le blason du genre, un peu éteint depuis Chinatown

Quand Lawrence Kasdan écrit et réalise ce film, il était juste connu pour avoir scénarisé le deuxième volet de La Guerre des étoiles. La même année que La fièvre au corps, il est aussi l’auteur des Aventuriers de l’arche perdu. On lui devra aussi le scénario de Bodyguard. Comme cinéaste, il a laisse son empreinte dans le cinéma des années 80 avec Les copains d’abord, Silverado et Voyageur malgré lui. Les autres films, Grand Canyon ou Wyatt Earp, étaient plus ambitieux, mais moins populaire. Il n’a trouné que deux films dans les années 2000, Dreamcatcher et Darling Companion. Il continue à travailler sur Star Wars. En cachette, il faut savoir que George Lucas a financé une partie du film, tout en ne voulant pas associer le nom de Lucasfilm à un film si sulfureux.

William Hurt a 30 ans quand il tourne La fièvre au corps. Il doit cette "chance" au refus de Christopher Reeve. Il est alors l’incarnation du jeune américain sexy, ni idiot, ni trop beau. Le film le rend célèbre, alors qu’il a déjà une côte montante à Hollywood après avoir tourné chez Ken Russell (Au-delà du réel). Il a eu ses plus beaux rôles dans les années 80 : Le baiser de la femme araignée, Les enfants du silence, Broadcast news, … Un temps compagnon de Sandrine Bonnaire, il a souvent tourné avec des comédiennes françaises : Charlotte Gainsbourg, Juliette Binoche, Catherine Deneuve… Récemment, Hollywood l’a redécouvert en lui offrant des seconds rôles dans des films comme History of Violence, Into the Wild ou L’incroyable Hulk. Et bien sûr dans Captain America et Avengers...

Il faut entendre Kathleen Turner en version originale. Il s'agit de son premier rôle au cinéma. Cette femme fatale, superstar dans les années 80, était considérée comme la plus sexy d’Hollywood, au point de la faire incarner la mythique Jessica Rabbit dans Qui veut la peau de Roger Rabbit. Elle fut aussi la reine du box office grâce à Michael Douglas dans A la poursuite du diamant vert et La guerre des Rose. Entre temps, elle fut aussi une tueuse à gage chez John Huston (L'honneur des Prizzi) et une femme qui remonte le temps chez Francis Coppola (Peggy Sue). Au début des années 90, l’actrice alterne le théâtre, où elle triomphe à Broadway et à Londres, et les films indépendants comme Serial Mother ou Virgin Suicides. Mais sa performance la plus surprenante fut sans doute d’interpréter le père travesti d’un des héros de la sitcom Friends. Atteinte par la maladie, elle a du se résigner à ne plus être un sex-symbol. Elle apparaît ici et là sur les écrans, mais c'est sur les planches qu'elle s'épanouit le plus.

Turner incarnera souvent les manipulatrices, les femmes fatales, celles sur qui on ne peut pas tout à fait compter. Dans La Fièvre au corps, outre cette sensualité qui trouble, c'est bien un jeu de faux-semblants qui révèlent avant tout comment notre raison s'effrite sous les coups de la passion. Lawrence Kasdan n'a jamais caché qu'il voulait filmer le film comme un rêve moite (le film a été tourné en Floride par un froid de canard malgré tout). Tantôt effroyable, pour ne pas dire castrateur, tantôt érotique (de nombreuses scènes ont d'ailleurs été coupées par la monteuse Carol Littleton, engagée pour apporter un fort point de vue féminin à ce film noir).

On ne résiste pas non plus à la mélodieuse musique de John Barry. Le film ne manquant pas de style, entre mélo et thriller, la musique lui donne une tonalité particulière. Après tout c'est une histoire d'infidélité, de sexe, de fric, de meurtre, d'emprise. Le genre redeviendra à la mode (notamment Liaison fatale et Basic Instinct, tous deux avec Michael Douglas). Mais Kasdan signe ici plutôt un film hommage aux grands classiques, comme Le port de l'angoisse avec Lauren Bacall, en le modernisant avec une sexualité plus crue, juste avant la vague du conservatisme sous Reagan et l'arrivée du SIDA. La chair deviendra plus triste.

Mars films et Ocean films dans la tempête

Posté par vincy, le 16 août 2019

A une semaine d'écart, Le Film Français a annoncé que deux distributeurs indépendants hexagonaux étaient en difficulté, quelques mois après l'abandon de la distribution par Europacorp.

Mercredi, l'hebdomadaire révélait qu'Océan Films Distribution avait été placé en liquidation judiciaire le 31 juillet dernier par le Tribunal de commerce de Nanterre.

La société est en cessation de paiements depuis le 1er février 2018. Le distributeur n'a programmé aucun film pour les mois qui viennent et n'avaient sorti que Paradise beach de Xavier Durringer et Maguy Marin : l'urgence d'agir de David Mambouch au premier trimestre, avec des scores décevants au box office dans les deux cas. En avril, le président Philippe Aigle avait démissionné.

Selon Le Film Français, le seul film qu'Océan devait distribuer cette année, Tu ne tueras point (Bluebird) de Jérémie Guez, sera finalement en salles sous la bannière de The Jokers. L'an dernier, elle avait distribué, entre autres, L'homme qui tua Don Quichotte de Terry Gilliam et The Happy Prince de Rupert Everett.

Au début des années 2000, Océan était un distributeur majeur avec des films comme In The Mood for Love, No Man's Land, Millenium Mambo, Samsara, Le retour, Good Bye Lenin!... Elle avait déjà été liquidée en 2013, avant de renaître avec l'apport capitalistique de Star Invest Films France en 2016.

Le 1er août, c'est Mars films qui a été placée en période d’observation par les tribunaux parisiens à la suite d’une cessation de paiement.

Le Film Français a annoncé le 6 août que le Tribunal de Commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire puisque la société productrice et distributrice était en cessation de paiement depuis le 8 juillet 2019. Selon les informations de l'hebdomadaire, la date d’expiration de la période d’observation est fixée au 1er février 2020.

Malgré quelques échecs récents (Persona non Grata, Roxane), Mars films est le 8e distributeur en entrées en France avec 4,97 millions d'entrées depuis janvier, notamment grâce au succès de Grâce à Dieu de François Ozon. Il est le 3e distributeur français cette année derrière UGC et Pathé. Il doit encore sortir cette année Fourmi de Julien Rappeneau, Un jour de pluie à New York de Woody Allen, J’irai où tu iras de Géraldine Nakache, Play d'Anthony Marciano et Les traducteurs de Régis Roinsard. Dans son catalogue, il a aussi en stock les prochains films d'Harmony Korine, Richard Linklater, Nicole Garcia, Viggo Mortensen et Emmanuel Carrère.

Quel futur pour DC Comics sur grand écran?

Posté par vincy, le 15 août 2019

On a beaucoup parler de Marvel avec l'annonce de la Phase IV du Marvel Cinematic Universe au Comic-con de San Diego. Mais qui s'est soucié de l'absence de DC Comics? Pour certains professionnels, le concurrent de Marvel ne sait plus trop bien où il en est. Après la trilogie flamboyante et sombre de Christopher Nolan autour du chevalier noir, les nouveaux films avec Batman et Superman n'ont jamais pu rivaliser avec ceux de Marvel, ni en qualité ni en dollars. Que ce soit Man of Steel, Justice League ou même le combo Batman v Superman, rien n'a égalé les éloges et le milliard de dollars de The Dark Knight et de The Dark Knight Rises.

C'est finalement avec un environnement plus pop et moins poli que DC Comics a semblé trouver la martingale. Suicide Squad puis Wonder Woman et surtout Aquaman (recordman mondial des recettes de DC Comics avec 1,15 milliard de dollars) ont prouvé que la marque avait du potentiel, avec plus de fun et moins de psychologie. Wonder Woman est même, avec les deux Dark Knight, le seul non Marvel du Top 10 historique nord-américain.

On sent que la construction d'un univers étendu des super-héros de DC a du mal à se mettre en place. L'ordre des films est moins maîtrisé que chez Disney/Marvel.  La Justice League qui aurait pu être un lien entre les différents films n'a pas su s'imposer comme Avengers. Shazam!, au succès relatif mais prometteur, est le deuxième film consécutif avec un nouveau super-héros, sans qu'il n'y ait de débouchés pour lui dans un avenir proche.

A cela s'ajoute un nombre de films qui chaque année, et une faible fidélisation des spectateurs.

DC Comics expérimentateur, précurseur

Pourtant la Warner a bien l'intention vouloir combattre Disney. Et n'a peut-être pas envie de calquer le modèle DC sur celui de Marvel. Après tout, les Dark Knight ont été encensés et ont rarement été égalés en qualité (hormis par les Spider-Man de Sam Raimi , chez Sony, et Black Panther, chez Disney), tout en étant dans un registre esthétique très différent des Marvel.

C'est aussi DC Comics qui a initié la mort tragique d'un super-héros (en l'occurrence Superman dans Batman v Superman), bien avant que Thanos n'élimine la moitié d'entre eux dans Avengers Endgame.

Et on doit également à Warner/DC le premier mélange hybride animation/super-héros avec les Légo, bien avant l'excellent Spider-Man de Sony.

Ensuite le carton de Wonder Woman a été précurseur pour Hollywood, arrivant avant ceux de Black Panther et de Captain Marvel: c'est bien la Warner qui a prouvé qu'une super-héroïne était bankable et que l'ère du super-héros masculin blanc était révolue. Le film a aussi révélé une actrice. Idem pour Aquaman, le studio a imposé un "nouveau" nom, avec succès.

Mais ces deux cartons ont aussi changé l'orientation de Warner/DC Comics. Terminé le noir: la franchise DC se met au bling-bling et aux couleurs. Bref le spectateur veut du pop-corn, on va donc lui en donner, peu importe si les scénarios sont plus simplistes voire incohérents.

Ça part un peu dans tous les sens côté récit, comme côté stratégie, en apparence. On se demande comment tout les projets du studio vont s'imbriquer. Surtout que DC Comics, contrairement à Marvel, ne parvient pas à conserver ses acteurs. Will Smith a déjà abandonné la Suicide Squad. Et on ne compte plus le nombre de Batman et de Superman, qui, à chaque fois, provoquent l'hystérie des fans pro ou contre.

Les versions alternatives et arty

Le studio promet de rationaliser tout ça. En voyant le programme, on s'interroge malgré tout. Prochaine sortie : The Joker de Todd Phillips, en compétition à Venise, avec Joaquin Phoenix. On revient à l'esprit de Nolan mais avec un spin-off déconnecté des autres films. Bref, un épisode "arty" pour les Oscars plus que pour les dollars. Ou une version alternative, à la manière du film d'animation Spider-Man sorti en décembre dernier.

Dans le même registre, Warner a dégainé The Batman, réalisé par Matt Reeves. Robert Pattinson a été choisi pour être le chevalier noir dans ce film qui doit se concentrer sur sa jeunesse. Une autre version alternative. Ou un reboot en attendant un Justice League 2 convaincant? Pour l'instant rien de tout ça. Juste un Batman de plus où on reverra sans doute ses parents tués en sortant du cinéma. Ce sera le 25 juin 2021.

Girl Power

Le 19 février prochain, c'est un autre spin-off autour de la badass girl Harley Quinn (Suicide Squad) qui va profiter de la notoriété de son actrice (Margot Robbie) qui déclenchera les hostilités avec Birds of Prey. Harley Quinn se battra aux côtés de Black Canary (Jurnee Smollett-Bell), Huntress (Mary Elizabeth Winstead), la détective Renée Montoya (Rosie Perez) pour sauver Batgirl (Ella Jay Basco, choix définitif?) des mains de Black Mask (Ewan McGregor) et le tueur Victor Zsasz (Chris Messina). Tout un programme au féminin.

Avant que Marvel ne démarre sa phase IV, le 1er mai, avec son longtemps attendu Black Widow. Mais le 5 juin, DC Comics pourrait emporter ce match féminin avec son autre super-héroïne, Wonder Woman 1984. On se demande juste comment Patty Jenkins va ressusciter Chris Pine. Et, en même temps, il ne s'agirait pas d'une suite (on va se perdre à force). Mais il n'est pas impossible que DC gagner la guerre du box office sur Marvel en 2020 grâce à Margot Robbie et Gal Gadot.

Aquaman 2 dans trois ans

En août l'année prochaine, on retrouvera un reboot de Suicide Squad (cinq ans après l'unique film de l'équipe) par James Gunn (transfuge Marvel), avec Margot Robbie, Joel Kinnaman, Jai Courtney, Viola Davis mais pas Will Smith. Idris Elba héritera d'un nouveau personnage, avec une fille incarnée par Storm Reid. Ce qui augure peut-être d'un revirement narratif pour construire (enfin) un univers DC au cinéma, surtout si le script prend en compte le personnage d'Harley Quinn. Pour l'instant le programme s'arrête à décembre 2022 avec la suite d'Aquaman, face à un Star Wars. Pari risqué. Aucun Justice League, pas de troisième Wonder Woman, nul Superman à l'horizon. On sait juste que le super-héros Black Adam, antithèse de Shazam!, est en préparation (il devait d'ailleurs apparaître dans Shazam). Dwayne Johnson a été enrôlé pour être le super-héros et Jaume Collet-Serra devrait réaliser ce film, sans date précise pour l'instant.

Mais Warner décline différemment son partenariat avec DC Comics. D'un côté des films pop-corns pour lui assurer des grosses recettes mondiales (et consolider son statut de 2e studio hollywoodien). De l'autre des films plus dramatiques, avec des acteurs de premier niveau, à la manière de "hors-série" classieux. Et enfin des spin-offs autour de super-héros plutôt bad-ass, moins sages que ceux de Marvel en tout cas.

Cependant, à l'instar de Disney/Marvel/Fox/Lucasfilms/Pixar avec Disney +, Warner Bros va aussi envisager ses super-héros pour sa future plateforme de streaming, HBO Max. Ainsi les Watchmen débarqueront sur HBO cet automne en série, avec Jeremy Irons, Regina King et Tim Blake Nelson. La nouvelle patronne du studio, Ann Sarnoff, a d'ailleurs reçu pour mission d'étendre le partenariat avec DC Comics et de développer tout azimut les franchises du studio, tous supports confondus.

Elle va devoir faire le ménage et trier dans les cartons du studio, qui a repoussé Justice League Dark, Flashpoint et Batgirl, pourtant annoncés il y a deux ans. Et Warner n'a jamais caché son intention de donner une suite à Aquaman, un spin-off sur Deadshot (Will Smith dans Suicide Squad), ou des films dédiés à la Fosse (Aquaman) et à Nightwing. Ava DuVernay travaillerait sur New Gods. Il y a un scénariste officiellement recruté pour Supergirl, sans date de pré-production. Gotham City Sirens est un peu dans les limbes. On ne sait pas ce qu'il advient de Blackhawk par Steven Spielberg. Enfin le projet Lobo a finalement été orienté en série TV.

Il faut s'attendre à des surprises: le studio a aniticipé six créneaux dans le calendrier entre 2020 et 2022, sans mentionner le titre du film.

NTM: un film et une série en préparation

Posté par vincy, le 14 août 2019

Ils se sont quittés mais le groupe NTM, figure emblématique du rap français, ont été récupérés par le cinéma et la télévision. Le long métrage Suprêmes (du nom de leur énorme carton Suprême NTM, 1998) retracera les débuts du duo composé par JoeyStarr et Kool Shen. Starr sera incarné par Théo Christine (SKAM, La dernière vague, Play, La finale) et Shen par Sandor Funtek (La vie d’Adèle, Dheepan, Nos vies formidables).

Le biopic est écrit par la réalisatrice Audrey Estrougo (Une histoire banale, La taularde) et Marcia Romano. Joey Starr et Kool Shen ont aidé au scénario.

Le récit se déroulera entre la formation du duo en 1988 et leur première grande salle parisienne en 1992. Le tournage de cette production Nord-Ouest est prévu début 2020.

Mais NTM va aussi faire l'objet d'une série et, réjouissons-nous: Katell Quillévéré (Suzanne, Un poison violent, Réparer les vivants) et Hélier Cisterne (Vandal) sont derrière le projet. Là encore Joey Starr et Kool Shen collaboreraient au scénario. Kool Shen a même confié qu'il n'était pas exclu qu'ils fassent une apparition. Netflix et Arte, selon le Parisien, seraient les diffuseurs.

3 raisons d’aller voir Le mystère des pingouins

Posté par MpM, le 13 août 2019

Le pitch : Quand des pingouins apparaissent partout dans sa petite ville, semant au passage une joyeuse pagaille, le jeune Aoyama se dit qu’il y a là une enquête à mener. Ce studieux élève de CM1, accompagné de son meilleur ami, enrôle également sa rivale aux échecs et une énigmatique assistante dentaire pour percer le secret des pingouins. Mais ces petites bêtes ne sont que le premier signe d’une série d’événements extraordinaires. Commence alors pour le jeune garçon une aventure pleine de surprises… et de pingouins !

Un auteur plein de fougue Il ne faut pas s'arrêter au résumé du film ni à son esthétique gentillette : Le Mystère des Pingouins est à l'origine tiré du roman Penguin Highway de Tomihiko Morimi, lauréat du Grand Prix Nihon SF 2010 au Japon. Or on doit notamment à cet auteur l'excellent Night is Short, Walk on Girl qui a donné lieu à une adaptation fougueuse et survitaminée par Masaaki Yuasa. L'histoire ? Celle notamment d'une jeune fille qui écume les bars... Si le livre Penguin Highway était lui-aussi plutôt destiné à un public adolescent et jeune adulte, le choix du réalisateur Hiroyasu Ishida et de son studio Colorido est d'en avoir fait une oeuvre tout public. Sans pour autant gommer certains détails savoureux comme l'obsession du jeune héros pour... les poitrines généreuses.

Humour et étrangeté On est durablement séduit par l'intrigue singulière du film, de même que par sa tonalité pétillante, qui ménagent son étrangeté jusqu'au bout. Des monologues totalement décalés du jeune héros, qui ne cesse de se projeter dans l'avenir, avec un sérieux qui pourrait passer pour de la prétention s'il n'était au fond aussi candide, aux péripéties inattendues qui émaillent le récit, on ne cesse d'être surpris et amusé. Là où d'autres auteurs auraient à tout prix cherché à mettre du "fond" et à dramatiser les enjeux, Hiroyasu Ishida joue systématiquement la carte de la légèreté et d'un humour burlesque qui évacue les passages trop ouvertement "mignons" ou au contraire tragiques. Les aspects les plus fantastiques de l'intrigue s'imbriquent assez naturellement dans le reste de l'intrigue, et lui trouvent même un développement logique au symbolisme discret.

Des personnages ambivalents Cela fait du bien de découvrir, dans un film destiné au jeune public, des protagonistes qui ne sont ni des boy-scouts en puissance, ni des stéréotypes. Si le jeune Aoyama paraît au départ trop parfait pour ne pas être ennuyeux, il se révèle au fil de l'intrigue plus ambivalent et profond qu'on ne l'aurait pensé, à travers notamment sa relation ambigüe avec la jeune assistante dentaire, et sa candeur égale face à la fois à ceux qui le harcèlent et à celle qui le courtise. Les deux rôles féminins tranchent eux-aussi avec ceux que l'on voit traditionnellement dans ce genre de films, avec une pré-ado championne d'échecs et passionnée par la théorie de la relativité, et une adulte légèrement immature qui a bien du mal à prendre la vie au sérieux. Deux personnages singuliers qui font également chavirer le coeur du héros, et lui feraient presque perdre sa rigueur scientifique, participant pour beaucoup à l'équilibre tendre et léger du film.

Raoul Peck s’intéresse à Frantz Fanon

Posté par vincy, le 13 août 2019

Raoul Peck prépare son prochain film, Les cris, qu'il devrait tourner en 2020. Il s'agit d'un film historique sur Frantz Fanon. Le casting est en cours. Le scénario a été écrit par Pascal Bontizer. Le projet a obtenu l'avance sur recettes.

Le réalisateur du documentaire I'm not your Negro sur l'écrivain et poète James Baldwin s'intéressera ici à une figure emblématique de la lutte contre l'oppression coloniale. Frantz Fanon (1925-1961) a aussi été un écrivain engagé, écrivant notamment Peau noire, masques blancs, Les Damnés de la terre, L'an V de la révolution algérienne, Pour la révolution africaine, ainsi que de nombreux articles psychiatriques et scientifiques puisqu'il était également psychiatre en Martinique. Né à Fort-de-France, il a exercé en tant que médecine-chef d'un hôpital en Algérie, durant la guerre, où il soignait les malades mentaux. Proche du FLN, il prend la nationalité algérienne, mais meurt précocement d'une leucémie.

Raoul Peck s'est toujours intéressé à l'Afrique comme aux révolutionnaires, filmant, notamment, Lumumba et Le Jeune Karl Marx. Les cris sera sa 6e fiction pour le grand écran.

Jean-Pierre Mocky: un dernier film pour la route…

Posté par vincy, le 12 août 2019

Décédé jeudi dernier, Jean-Pierre Mocky a été célébré ce matin à Paris lors de ses obsèques. L'église Saint-Sulpice a accueilli le ministre de la culture Franck Riester, le fidèle, Michael Lonsdale, Dominique Lavanant, Agnès Soral, Dominique Pinon, Daniel Russo, Benoit Magimel, Henri Guybet, Bernard Menez, Daniel Prevost, Elsa Zylberstein, Tom Novembre, ou encore le compositeur Vladimir Cosma.

L'AFP rapporte que sa fille, qu'il a eu avec la mannequin Marisa Nuxen, Olivia Mokiejewski, au nom de tous les enfants du cinéaste, a salué "un regard critique qui réveillait d'un monde aseptisé". "Il nous avait convaincu qu'il vivrait cent ans pour faire des films. Rien n'était normal avec lui". S'il n'était "pas vraiment un père et un mari", il était "génial". Elle a relevé qu'ils "ne s'étaient pas habillés en noir" et que, dans son cercueil, lui-même avait voulu qu'on lui mette "une veste orange, un chapeau, un pantalon treillis et un caleçon Playboy".

Sur RTL, vendredi dernier, elle expliquait : "À la maison, on avait les mêmes coups de gueule, les mêmes indignations qu'il poussait sur les plateaux télévisés", espérant même que sa mort allait "lui rendre justice" car de nombreux films qu'il a réalisés ces dernières années sont restés inconnus et peu distribués.

Son dernier film, Tous flics, tourné au printemps à Dreux, est en fin de montage a-t-elle alors déclaré. Mocky y incarne un flic centenaire dans une farce autour des gilets jaunes.

Toujours selon sa fille, il devait aussi reprendre le tournage d'Un drôle de Président avec Gérard Depardieu le 15 septembre.

[Passions américaines] La chatte sur un toit brûlant (1958) avec Elizabeth Taylor et Paul Newman

Posté par vincy, le 11 août 2019

Immense succès de l’époque, La chatte sur un toit brûlant (Cat on a hot tin roof) est un drame quasi passionnel datant de 1958. Réalisé par Richard Brooks, à qui l’on doit le scénario de Key Largo, il s’agit de l’adaptation d’une célèbre pièce de théâtre écrite par le géant Tennessee Williams. Et Johnny Hallyday avait raison quand il chantait « on a tous en nous quelque chose de Tennessee… » Quoi de plus proche qu’un de ces conflits familiaux, qui révèlent le pire et le meilleur de chacun d’entre nous ? Avec Un tramway nommé désir et La ménagerie de verre, La chatte sur un toit brûlant est l’une des trois plus grandes adaptations cinématographiques de son répertoire, sans doute la plus cinglante.

Le film raconte l’histoire d’un couple qui bat de l’aile, dans un contexte familial où la mort du patriarche menace. Avec ses plans très construits, Richard Brooks accentue la symétrie des séquences qui se font écho. Au final, de révélations en réconciliations, les six personnages, trois couples formés de trois personnages principaux et trois secondaires, se confronteront à cette vérité qu’ils renient.

Le couple principal est incarné par deux des beautés les plus incandescentes des années 50 et 60, Elizabeth Taylor et Paul Newman. Un couple en déliquescence. Elle est une garce manipulatrice, dure, cruelle, orgueilleuse, souffrant surtout de ne plus être aimée de lui. Il est une ancienne gloire sportive, aujourd’hui imbibée d’alcool et surtout insensible aux charmes de sa femme. Pour ne pas dire impuissant. Mais cet amour défunt n’a rien d’éteint. Même si Maggie avoue désespérément que « Vivre avec celui qui m’aime est la pire solitude quand l’autre ne vous aime pas», elle veut encore espérer. Après tout ils sont encore insolemment beaux et pas encore fanés. Pas comme ses beaux-parents…

Leur première grande scène n’est autre qu’une partie de ping-pong acerbe où chacun se masquent derrière une forme de méchanceté. D’ailleurs le mensonge s’effondre vite. Après avoir rejeté les avances de Taylor, il succombe en cachette au désir de sentir sa nuisette. Mais la plus cruelle est la belle-sœur, Mae, une vraie peste qu’on n’aurait pas aimé avoir en copine de classe. Un vrai moulin à méchanceté.

La violence des dialogues permet au film, sans trop de mouvements, de créer un climat pesant. Ce film est comme un orage qui couve en permanence. Et on attend qu’il éclate. Et quand la pluie se déverse, c’est pour laver les péchés. Big Daddy transforme des aveux en tribunal familial où les trois personnages principaux, Newman, Taylor et lui, l’excellent Burl Ives, décident que la vérité aura raison de tout. Leur combat contre la dissimulation, leur volonté d’aller « au fond des choses » vont dissiper les malentendus et permettre au couple de renaître doucement.

Il y a deux scènes cruciales pour bien comprendre l’amertume qui déchire Taylor et Newman.

L’une se compose en plusieurs tableaux. C’est le premier vrai dialogue entre Brick et son père. Le père décide de partager un verre de whisky avec son fils, pour faciliter l’échange. De plans en plans, seuls ou à deux, on assiste à une chorégraphie où chacun s’approche et s’éloigne de l’autre jusqu’au moment où l’un boit en regardant le passé, et l’autre en regardant l’avenir. Parfait Janus…

L’autre scène montre le jeune couple sur le balcon, mal à l’aise de surprendre Big Daddy et Big Mamma avouer l’illusion de leur union. Clairement Taylor et Newman se voient finir comme eux, frustrés et distants, et le refusent inconsciemment. Car aucun couple n’est épargné par l’hypocrisie, l’aveuglement et les mensonges qui les rongent. Ils s’expriment à travers la cupidité, l’alcool, un Cancer. Mais seuls s’en sortiront ceux qui ne se mentiront pas.
« La dissimulation mène nos vies » et même si le cinéma est l’art de la dissimulation, ici La chatte sur un toit brûlant essaie de coller au plus près des tourments psychologiques qui brouillent les sentiments des uns pour les autres. Y compris entre adultes et enfants.

Enfin il faut parler de la filiation, a priori morale essentielle et fondamentale à Hollywood. Les enfants de Cooper et Mae sont des monstres sans cou, des singes, des surdosés en sucre détestables. Big Daddy ou Big Mamma ignorent sciemment Cooper ; quant à Brick, il accuse son père de ne jamais l’avoir aimé. Ce manque affectif remonte ainsi les générations jusqu’au père de Big Daddy, un clochard, ou à la pauvreté des parents de Maggie, ce qui les rapproche dès leur première scène. Quand il parle de son père, Big Daddy est ému en avouant qu’il avait été aimé. Mais travers les yeux de son fils, on découvre à quel point il n’avait pas aimé. Le scénario impose alors sa morale. L’argent ne fait pas le bonheur. A cette époque on croyait encore à de bien plus grandes valeurs.

Cette réalisation très sobre, un huis-clos théâtral où seul le cadrage met en scène, sans effet particulier, a énormément déplu à Tennessee Williams qui trouvait le film ringard comparé à la mise en scène d’Elia Kazan à Broadway. Pourtant, pour la première fois, afin de magnifier le regard violet de Taylor et celui très bleu de Newman, une adaptation de Williams fut filmée en couleurs. Peut-être que le dramaturge voyait trop les artifices du studio, comme lorsque Taylor, chat trempé sous la pluie, est, la scène suivante, complètement sèche et bien coiffée. Ou alors, il reprochait que le script ait gommé les références à l’homosexualité, présentes dans la pièce. Ironiquement, il était arrivé la même chose à l’adaptation du roman de Richard Brooks, The Brick Foxholes, quelques années auparavant, où la discrimination homosexuelle avait été remplacée par l’antisémitisme. Hollywood était moins courageux que Broadway. On devine juste que l’amitié de Brick avec Skipper était « vraie » et « profonde ».

« La vérité c’est renoncé à ses rêves et mourir inconnu ». Tout le contraire du cinéma.