Des propositions pour promouvoir le cinéma en Afrique francophone

Posté par vincy, le 2 juillet 2014

Lundi 30 juin, Unifrance a publié un rapport passionnant, qu'on aimerait lire pour d'autres secteurs culturels comme la musique ou le livre. Pour l'instant, il s'agit de cinéma.

Le groupe de travail Francophonie, présidé par le producteur Eric Névé, constate, d'après les chiffres de l'Organisation Internationale de la Francophonie que 50% des 220 millions de francophones dans le monde résident sur le continent africain. Ce chiffre devrait grimper à 85% à l'horizon 2050 avec 750-800 millions d'habitants. La croissance économique suivra la croissance démographique avec un PIB multiplié par 15 entre 2020 et 2040 (selon la Banque mondiale).

Autant dire que les opportunités sont énormes pour l'industrie culturelle française, surtout avec le numérique qui permet d'abolir les frontières géographiques au profit de territoires linguistiques. Les Anglais ont toujours profité de leur langue pour s'exporter, certes, aidés par la puissance américaine, mais aussi en profitant du Commonwealth. Les Espagnols ne sont pas en reste en ayant vampirisé le continent latino-américain (à l'exception du Brésil). Face à la concurrence américaine, turque, indienne et chinoise, le cinéma français doit s'engager auprès de la filière naissante d'un cinéma en Afrique francophone pour bénéficier d'un relais de croissance à fort potentiel.

Mais l'Afrique francophone souffre de multiples carences que n'ont pas l'Amérique latine ou les puissances émergentes asiatiques. En Afrique francophone, il n'y a pas de distribution et peu de production de films, des salles de cinéma très rares et finalement un public à "former". Il faudrait donc investir dans un réseau complet, des films à l'exploitation en passant par la promotion.

Le rapport d'Unifrance montre cependant que tout évolue très vite.

L'insuffisance des salles de cinéma

Les pays se ressaisissent : il faut bien divertir les nouvelles classes moyennes. Au Maroc, la fréquentation n'a jamais retrouvé ses scores des années 80 (45 millions de spectateurs, 241 salles dans le pays. Alors on reconstruit. En 2012, il n'y avait que 61 salles dans le pays et deux millions de spectateurs. Mais Megarama et ses deux nouveaux multiplexes (Casablanca et Marrakech) a contribué à la construction de 23 de ces 61 écrans et capte la moitié des entrées du pays. En Tuinisie, le CinéVog vient d'être inauguré près de Kram et d'autres salles comme le CinéMadart à Carthage ont récemment émergé.  A Kigali (Rwanda), un multiplexe de 8 salles s'est également ouvert.

Dakar, Abidjan, N'Djamena, Bamako... autant de villes où des salles équipées en numérique ont éclos. A Dakar, le Sea Néma (3 salles) s'est installé dans le centre commercial le plus moderne de la capitale sénégalaise. A Abidjan, on a restauré l'antique salle Ivoire qui est ainsi passée à l'ère numérique. A Bamako (Mali), les deux salles du Ciné Magic sont flambant neuves. L'Institut français numérise aussi ses écrans d'Abidjan, Libreville (Gabon) et Yaoundé (Cameroun). Le Cameroun justement va réouvrir et contruire des salles dans les principales villes du pays. Le Burkina Faso veut réhabiliter 50 salles.

Le petit écran peut-être une solution

La Vidéo à la Demande reste balbutiante mais elle peut aider à la diffusion de films francophones dans un si vaste territoire. Un hit en VàD c'est 1400 téléchargements. Le rapport constate qu'Orange Sénégal a 7,5 millions de clients, mais seulement 1000 en IPTV et 100000 en ADSL. Africafilm.tv est passé à une formule d'abonnement avec un objecif de 10000 abonnés cette année. Une chaîne très populaire comme TV5 Monde est un relais inestimable. Et Canal + Afrique peut aussi servir de tremplin à la promotion et la diffusion de films francophones.

Reste le plus gros problème du continent : la nocivité du piratage. Comme en Asie, les DVD piratés se vendent au grand jour. Cela condamne un segment déjà très fragile de la chaîne du cinéma : la vidéo physique.

La distribution condamnée à être innovante

Pas facile de diffuser des films quand le marché de la distribution est inexistant. Tandis que le belge Cinéart et le suisse Xenix tentent l'expérience, aucun gros distributeur français ne s'aventure sur ce terrain. Certes, la rentabilité est faible. Mais on peut aussi remarquer le manque d'entrain des distributeurs français à aller vers les marchés étrangers, même européens.

Le box office incite à la prudence. La pirogue, pourtant acclamé dans les Festivals, n'a séduit que 932 spectateurs au Sénégal et 949 au Burkina Faso. C'est grâce au cinéma itinérant, le système MobiCiné, qu'il a pu être vu par 8128 spectateurs au Sénégal.

Pour la sortie d'Aya de Yopougon, il a fallu inventer un système de distribution. L'agence Onyx s'est improvisée distributeur : elle a facturée des séances en extérieur (parfois jointes à d'autres événements comme un défilé de mode à Kinshasa) à des sociétés, institutions, etc... qui redistribuaient les tickets à leurs clients, partenaires ou sous forme de jeux concours. 21 273 spectateurs à Abidjan, 8200 dans le reste de la Cote d'Ivoire, 3898 à Dakar, 3350 à Kinshasa, 900 à Ouagadougou. Et le film va encore voyager : Libreville, N'djamena, Douala et Yaoundé.

La production très dépendante de la France

Les choses bougent mais lentement. On le voit chaque année dans les grands festivals, l'Afrique francophone propose deux à trois films par an quand il y a un bon cru. Le Maroc a cependant  augmenté sa production de 70% entre 2004 et 2012. Le Sénegal a annoncé une dotation de 1,5M€ pour le fonds de promotion de l'industrie cinématographique. Idem pour le Mali. Le Gabon vient de mettre en place un fonds d'aide à la production audiovisuelle. Et le Tchad a mis en place une taxe sur la téléphonie mobile pour financer le cinéma.

Mais plus généralement, ce sont les aides européennes et surtout françaises qui, par l'intermédiaire de coproductions, contribue à la surive d'un cinéma africain francophone, qu'il soit magrhébin ou sub-saharien. Les Emirats (Qatar, Emirats Arabes Unis) montent également en puissance avec l'objectif de favoriser un cinéma arabophone et surtout diffusable dans le monde musulman.

Pour l'instant, les grands succès africains de ces dernières années - Les chevaux de dieu, La pirogue, Timbuktu, Grigris - restent dépendants des fonds d'aides français. Au final, c'est loins d'une dizaine de films qui sont produits chaque année.

Deux propositions pour faire bouger le cinéma en Afrique francophone

Le rapport d'Unifrance affirme qu'il ne fait pas se contenter d'être un cinéma simplement exportateur, et de ne pas se contenter des films français. Il faut aussi inclure le cinéma belge, suisse et québécois dans la réflexion. d'etre français

Première proposition : un festival du film francophone itinérant (Dakar, Bamako, N'djamena, Abidjan) avec 2 films majoritairement français, 2 films africains, 2-3 films francophones, un film d'animation et un film de patrimoine. Un festival annuel et transnational destiné au public.

Seconde proposition : les rencontres du cinéma francophone, qui auraient lieu à Dakar en novembre prochain, afin de travailler "à la structuration d'un écosystème favorable à la cinématographie francophone". "Le Sénégal par exemple a fait un travail de titan en un an. Ils ont créé un fonds de production, lancé des rénovations de salles, ils sont en train de créer un centre national sénégalais (sur le modèle du CNC) et une cité du cinéma dans les nouvelles zones industrielles de Dakar!" explique Eric Névé. Dakar accueille un sommet de la Francophonie tous les ans : idéal pour des rencontres professionnelles. Dakar se veut le carrefour du cinéma francophone en Afrique de l'Ouest, comme le Nigéria a su bâtir un Nollywood.

L'objectif est évidemment de créer une Soft Power francophone à l'instar de la Chine, du Japon, de la Corée du sud. La culture est un parfait vecteur pour soutenir l'économie et étendre sa zone d'influence politique et diplomatique. Lire le reste de cet article »

Cri d’alarme de 194 professionnels du cinéma français

Posté par vincy, le 19 juin 2014

92 auteurs (dont Pascale Ferran, Cédric Klapisch, Sébastien Lifshitz, Michel Ocelot, Rithy Panh, Bertrand Tavernier...), 20 distributeurs (Le Pacte, Memento, Diaphana...), 26 exploitants, 33 producteurs, 16 politiques et parlementaires (presque tous à gauche et plutôt à la gauche du gouvernement), 7 professionnels et personnalités (dont Gilles Jacob et Pierre Lescure) estiment que le financement des films est aujourd’hui en danger. À l’approche des arbitrages budgétaires qui pourraient se traduire par de nouvelles ponctions sur le budget du CNC, ils ont signé un cri d'alarme collectif dans le Huffington Post.

Politiquement, le plus amusant est qu'on y retrouve de nombreux soutiens à François Hollande, et même des proches de membres du gouvernement actuel. Leur appel surgit au bon moment puisque les derniers chiffres sur le nombre de tournages en France est en chute libre depuis janvier : 51 longs métrages ont été recensés entre janvier et mai contre 72 à la même période l'an dernier. La baisse est de 32%. Elle est pire si on prend en compte le volume des budgets : -33%. Certains accusent déjà la nouvelle convention collective qui a alourdi les coûts du travail et d'autres s'inquiètent de la nouvelle convention chômage pour les intermittents.

"On ne le sait pas assez mais de 2011 à aujourd'hui, ce ne sont pas moins de 310 millions d'euros qui ont été soustraits au financement du cinéma et de l'audiovisuel" expliquent-ils en préambule. Car tout a commencé en 2011 avec 20M€ en moins, aggravé en 2012 avec 50M€, empiré en 2013 avec 150M€ et un peu calmé cette année avec "seulement" 90 M€.

Les "194" rappellent que "les secteurs aidés par le CNC représentent plus de 16 milliards d'euros en valeur ajoutée et plus de 340 000 emplois."

"Avec le détournement programmé d'une partie du produit des taxes pour combler le budget de l'État, notre pays s'engagerait résolument dans la voie d'une politique dangereuse, déstabilisante et illégitime" considèrent les signataires, qui pensent que cette voie est un "pacte d'irresponsabilité". Au nom de l'exception et de la diversité culturelle, ils demandent que l'Etat ne désarme pas le CNC et les ambitions audiovisuelles du seul pays européen encore capable de résister à l'hégémonie américaine.

Ces 194 personnalités du cinéma signent un appel dont voici l'intégralité du texte.

Trop, c'est trop!

Depuis plusieurs années, notre pays s'est engagé dans un effort sans précédent de réduction de la dette et des déficits publics. Comme beaucoup d'autres, la politique de l'audiovisuel, du cinéma et le Centre National du Cinéma (CNC) ont été mis à contribution.

On ne le sait pas assez mais de 2011 à aujourd'hui, ce ne sont pas moins de 310 millions d'euros qui ont été soustraits au financement du cinéma et de l'audiovisuel.

L'effort était important, il participait d'une démarche de solidarité nationale contre laquelle personne ne s'est élevé en cette période de crise. Mais, il doit désormais aussi trouver une limite : la justice et l'efficacité.

Or, à l'heure des arbitrages pour la loi de finances pour 2015, nous poussons un cri d'alarme.

Nul autre pays en Europe n'a su développer une politique du cinéma et de l'audiovisuel aussi efficace que la France. Qu'on en juge : une fréquentation inégalée en salles de 200 millions de spectateurs chaque année, une création cinématographique supérieure à 200 films par an, une part de marché moyenne des films français de l'ordre de 40% (28% en Italie, 22% en Allemagne), une production audiovisuelle de plus de 5 000 heures par an et exportée à travers le monde entier (+14,8% en 2012), avec notamment une filière animation qui fait de la France le leader européen et la troisième puissance mondiale... Et l'impact économique est également important : les secteurs aidés par le CNC représentent plus de 16 milliards d'euros en valeur ajoutée et plus de 340.000 emplois.

Ces résultats reposent sur un financement public original pesant non pas sur le budget de l'État mais sur des taxes prélevées sur les recettes de tous les diffuseurs du cinéma et de l'audiovisuel. Affectées au CNC, et mutualisées au profit de la création française et européenne, ces taxes sont l'oxygène de la politique cinématographique et audiovisuelle.

L'an dernier, le gouvernement s'était engagé à ne plus ponctionner à l'avenir les ressources du CNC. Ces promesses sont en passe de s'envoler : avec le détournement programmé d'une partie du produit des taxes pour combler le budget de l'État, notre pays s'engagerait résolument dans la voie d'une politique dangereuse, déstabilisante et illégitime.

  • Dangereuse, l'initiative le serait assurément après déjà trois années de ponction conséquente des ressources du CNC. Les réserves, destinées à garantir les créances, ont progressivement disparu et le risque est maintenant réel de mettre en péril le soutien au cinéma et à l'audiovisuel.
  • Déstabilisante aussi car elle autoriserait chaque année l'État à fixer le niveau de ressources qui pourrait être soustrait au CNC, faisant planer de lourdes incertitudes sur une politique du cinéma et de l'audiovisuel, transformée en une simple trésorerie dans laquelle puiser.
  • Illégitime et confiscatoire même : comment justifier que des entreprises mises à contribution pour financer la création audiovisuelle et cinématographique voient finalement ces taxes utilisées pour boucher les trous du budget général ? Ce serait non seulement nier le principe d'affectation de ces taxes mais aussi instiller l'idée destructrice qu'il existe une sur-fiscalité culturelle.

Nous ne voulons pas croire que ce véritable pacte d'irresponsabilité pour notre cinéma et notre audiovisuel puisse dessiner demain les contours d'une politique. À l'heure de la multiplication des écrans et des canaux de diffusion et alors que le besoin d'images, d'œuvres cinématographiques et audiovisuelles continue de croître de façon exponentielle, ce serait un suicide politique et culturel que de désarmer le CNC et de mettre un terme à 70 ans d'ambitions pour le cinéma et l'audiovisuel avec des résultats uniques en Europe et dans le monde.

Nous n'oublions pas qu'il y a un an, notre pays, réuni et rassemblé, défendait l'exception culturelle. Il le faisait avec vigueur et efficacité en obtenant l'exclusion de l'audiovisuel et du cinéma des négociations commerciales entre l'Europe et les États-Unis.

Nul ne comprendrait que la France renonce aujourd'hui à ce qu'elle a défendu avec tant de force et de justesse auprès de ses partenaires européens : sa conviction en une politique ambitieuse en faveur de la diversité culturelle, du cinéma et de l'audiovisuel.
Nul ne le comprendrait car ce serait proprement incompréhensible.

Bilan 2013 : moins de gros budgets mais toujours autant de films français

Posté par vincy, le 27 janvier 2014

lea seydouxLes premières estimations du CNC concernant la production de films français en 2013 ont été publiées mercredi dernier. Le bilan est mitigé : le nombre de films produits est toujours élevé (sans doute trop de l'avis général) et les budgets sont, en moyenne, en baisse. Le nombre de jours de tournage stagne (mais les tournages sont relocalisés en France).

270 films produits en 2013, c'est seulement 9 de moins qu'en 2012. Ce sont d'ailleurs les films européens et les coproductions internationales qui diminuent alors que l'heure est à la coopération et à l'exportation. Au total, 209 films sont d'initiative française, le même chiffre qu'en 2012. Cela représente 5 sorties par semaine. On comprend mieux pourquoi les 2/3 d'entre eux ne trouvent pas leur public.

Cependant, les devis des films d'initiative française sont en baisse de 4%. L'investissement dans les films s'élève à 1,02 milliard d'euros. 45,5 millions d'euros de moins, soit deux gros budgets ou dix films "du milieu". La chute est évidemment plus spectaculaire si l'on prend en compte l'ensemble des productions françaises, incluant les participations minoritaires : 96,5 millions d'euros en moins, soit 7,2% de baisse par rapport à 2012 (pour un investissement total de 1,24 milliard d'euros).

La crise est passée par là. En 2013, un devis moyen est désormais inférieur à 5 millions d'euros, le plus bas niveau en 10 ans. La moitié des films sont produits pour moins de 2,5 millions d'euros, là encore un triste record en dix ans.

Le cinéma français investit moins dans les productions supérieures à 10 millions d'euros : seulement 19 en 2013, contre 33 en 2012. C'est la première fois que le cinéma français produit moins de 20 gros films sur une année. La volonté de ne pas prendre de risque? l'absence d'audace? La résignation à un modèle économique plus raisonnable? Il semblerait que les producteurs préfèrent miser sur le volume de films que sur le volume d'euros dépensés. Une manière de ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier et d'espérer que l'un d'entre eux deviendra une poule aux oeufs d'or.

© CNC 2004 2008 2012 2013
Nombre de films agréés 167 196 209 209
Dont 100% français 130 145 150 154
Investissements totaux (en millions d’euros) 1048,8 1490,4 1342,3 1245,8
Films > 15 millions d’euros 9 18 18 12
Films > 10 millions d’euros 15 17 15 7
Films de 4 à 10 millions d’euros 58 53 47 57
Films de 1 à 4 millions d’euros 65 74 71 79
Films > 1 million d’euros 20 44 58 54

Pour les moins de 14 ans, le ticket de cinéma est à 4€

Posté par vincy, le 2 janvier 2014

Au 1er janvier 2014, la TVA sur les billets de cinéma a été réduite à 5,5%, comme pour les livres ou les billets de spectacle. Cette baisse de la TVA ne devrait pas se faire ressentir sur le prix du ticket. Au mieux cela conduirait à une baisse de 9 centimes par ticket.

Par conséquent, la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) a préféré lancer une opération ciblée vers le jeune public et donc les familles. Depuis hier, un spectateur né dans les années 2000 ne paiera que 4 euros sa place de cinéma.

Cette opération a pour but de relancer la fréquentation des salles. Certes, elle est restée à un haut niveau en 2013 (195 millions de spectateurs), mais elle recule. Il s'agit aussi de promouvoir le cinéma auprès des futures générations de spectateurs, de fidéliser les gamins pour qu'ils continuent d'aller dans les salles quand ils seront plus grands. Les moins de 14 ans représenteraient 8 à 9% des entrées et, en moyenne, le billet de cinéma valait 5,5€ pour eux jusqu'à présent.

Une mesure qui pourrait fragiliser de nombreux films

Pour les parents, c'est une aubaine financière. Pour la profession, ça l'est moins. Cette opération ne sera réussie que si le volume de nouveaux spectateurs compense la perte financière qu'enregistreront les producteurs et les distributeurs.

La mesure a été prise sans concertation réelle, de façon unilatérale même. Et si, en nombre d'entrées, on verra peut-être un effet significatif sur les films familiaux et d'animation, en recettes, le résultat sera très différent et pourrait s'avérer périlleux pour la rentabilité de certains films. Certains films font en effet la moitié de leurs entrées avec des moins de 14 ans. Autant de billets moins chers qui pèseront sur la profitabilité d'une sortie et réduiront les marges des distributeurs et les royalties des ayant-droits.

Dans l'immédiat, les dépenses marketing vont sans doute en souffrir, y compris pour les blockbusters américains, si un distributeur veut rentrer dans ses frais. Ce n'est pas la même chose d'espérer un film réalisant 15 millions d'euros de recettes (La Reine des neiges par exemple) et au final de n'en recevoir que 12 millions. Des films de type Les profs, les Marvel, Belle & Sébastien qui attirent les enfants comme les pré-ados seront fragilisés financièrement. Rien ne dit que les producteurs ne prendront pas en compte cette donnée pour encadrer davantage, en amont, les budgets de production d'un film.

Pour l'instant, on attendra les rapports d'étape pour voir si cette mesure est viable économiquement. Mais le doute est permis. Le blllet à 4 euros ne pourrait vivre qu'un an. Et on pourrait regretter que la FNCF n'ait pas imaginé une mesure forte pour les films art et essais, plus vulnérables et indispensables à la diversité cinématographique. Car, ne nous leurrons pas, ce ticket "low cost" pour les jeunes profitera avant tout à des films populaires, qui n'avaient pas forcément besoin ni de ce coup de pouce en termes de fréquentation, ni de ce coup de couteau en termes de recettes.

Serge Toubiana, nouveau Président de l’Avance sur recettes

Posté par vincy, le 24 décembre 2013

Frédérique Bredin, présidente du CNC a nommé, en accord avec la ministre de la culture et de la communication, Aurélie Filippetti, Serge Toubiana à la présidence de la commission d’avance sur recettes, pour une durée d’un an (renouvelable une fois) à compter du 1er janvier 2014.

Il remplace l'éditeur Paul Otchakovski-Laurens dont le mandat commencé en 2011 arrivait à échéance. Dans son communiqué, Frédérique Bredin "se réjouit que Serge Toubiana ait accepté de lui succéder et d’assumer désormais cette responsabilité à un moment crucial pour l’avenir du cinéma français."

Serge Toubiana a été le rédacteur en chef de la revue Les Cahiers du cinéma avant de devenir le directeur de la Cinémathèque française en 2003.

Dans une tribune publiée dans Le Monde aujourd'hui, Paul Otchakovski-Laurens rappelle les vertus de l'Avance sur recettes alors qu'elle semble critiquée par des professionnels comme par des élus ou haut-fonctionnaires : "nous choisissons, et donc excluons par la force des choses, ce qui explique bien des amertumes, c'est dans la plus grande transparence et avec le souci jamais démenti de l'ouverture et de la diversité de nos choix. Curieusement, cette diversité et cette ouverture sont également critiquées. Un film à gros budget est-il soutenu, nous sommes accusés de voler au secours du succès. Un film d'auteur, comme on dit étrangement ? On nous reproche alors de ne pas tenir compte des goûts supposés du public. Mais il faut savoir que des films ne se feraient pas sans l'Avance sur recettes. Et s'il arrive qu'elle soutienne des films qui se feraient sans elle c'est avec cette conviction qu'ils se feront mieux avec elle."

La commission d’avance sur recettes est composée de trois collèges siégeant séparément, de trois vice-présidents et de 25 membres titulaires. Le président est commun aux trois collèges. Le premier collège examine les demandes d’avance avant réalisation présentées pour une première œuvre cinématographique de longue durée d’un réalisateur. Le deuxième collège étudie les demandes d’avance avant réalisation pour des œuvres de réalisateurs ayant réalisé déjà au moins un long métrage. Le troisième collège est compétent pour examiner les demandes d’avance après réalisation.

Cinéaste, scénariste, producteur, danseur, écrivain, éditeur, techniciens du cinéma plasticien, critique, vidéaste : les collèges fédèrent des passionnés de cinéma venus de tous les horizons. Dans cette commission 2014, on retrouve Marie Darrieussecq, Delphine Gleize, Alain Attal, Olivier Assayas, Jérémie Elkaïm, Hervé de Luze, Xavier Leherpeur ou encore Rebecca Zlotowski.

L’avance sur recettes sur scénario (avant réalisation) a soutenu en 2013, 55 projets de long métrage, sur 647 demandes.

Baisse de la TVA pour les ciné-clubs, cinémathèques, festivals de cinéma

Posté par vincy, le 13 décembre 2013

Ce n'est pas encore Noël mais les cadeaux continuent de pleuvoir pour le cinéma en France. Après avoir baissé la TVA sur les entrées de cinéma à 5,5% (dont l'un des premiers effets a été l'annonce par la FNCF d'un ticket de cinéma à 4 euros pour les moins de 10 ans tout au long de l'année), l'Assemblée nationale a décider d'appliquer ce même taux réduit de 5,5% aux ciné-clubs, cinémathèques et festivals de cinéma.

L'amendement, adopté, permettra d'appliquer ce taux réduit de TVA à la cession de droits de films cinématographiques en vue d'une présentation lors de séances à caractère non commercial, ce qui comprend les Pôles d'éducation à l'image.

Cet amendement avait été proposé par le groupe écologique au Sénat dans le cadre de la Loi de finances 2014. Une fois voté, il a été soumis aux députés de l'Assemblée nationale, qui l'ont voté hier.

Les députés votent la baisse de la TVA sur les tickets de cinéma

Posté par vincy, le 18 octobre 2013

TVA Cinéma 5,5%L’Assemblée nationale a voté hier la baisse de la TVA sur les tickets de cinéma. La taux appliqué (7%) depuis avril 2012 sera réduit à 5,5% à partir du 1er janvier 2014. Aurélie Filippetti avait d'ailleurs confirmé cette baisse du taux de TVA en septembre, mais à l'époque, tout le monde pensait que ce taux réduit serait de 5%.

Car les députés ont également décidé de maintenir le taux réduit de TVA à 5,5% au lieu de le baisser à 5% comme l'avait prévu le gouvernement en décembre 2012.

Cependant c'est une victoire pour les exploitants, les distributeurs et les producteurs. Lorsque le gouvernement avait décidé de modifier les taux de TVA (5%, 10% et 20%), les tickets de cinéma étaient dans la catégorie des produits taxés à 10%, ce qui avait suscité la colère de la profession. Le député Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles, a eu gain de cause. «Le cinéma soit traité comme le livre et le spectacle vivant» avait-il justifié, deux secteurs culturels taxés à 5,5% depuis janvier 2013.

La mesure coûtera 60 millions d'euros au budget de l'Etat, mais une majoration des tickets de cinéma aurait sans doute, comme en Espagne, impacté sur le nombre de spectateurs dans les salles (ce qui aurait réduit d'autant les rentrées fiscales).

A cela s'ajoute un autre argument de bon sens, en plein conflit avec la Commission européenne qui négocie un accord de libre-échange avec les Etats-Unis. Le député socialiste Pierre-Alain Muet l'a résumé en une phrase : «Si le cinéma n’était pas traité comme le livre et le spectacle vivant, alors l’Europe pourrait être tentée de le considérer comme ne le faisant pas partie de l’exception culturelle?»

Reste à savoir si cette baisse de 1,5 points du taux de TVA se traduira sur le prix du ticket de cinéma, autrement dit si le consommateur sortira gagnant de cette décision.

Almodovar accuse (encore) le gouvernement espagnol

Posté par vincy, le 14 octobre 2013

Pedro Almodovar attaque une fois de plus le gouvernement espagnol dans une tribune parue sur le site InfoLibre.es. Il accuse même le ministre du budge Cristobal Montoro d'ignorant. Celui-ci a déclaré la semaine dernière que "les problèmes du cinéma ne sont pas seulement liés aux subventions, mais aussi à la qualité des films qui se font, à leur commercialisation et à beaucoup d'autres choses." Almodovar y voit un complot organisé : "Le gouvernement a établit un plan parfaitement tracé pour asphyxier lentement le cinéma espagnol".

La colère du cinéaste n'est pas neuve (lire : La crise espagnole va faire mal au cinéma, qui se rebelle), mais les arguments font toujours aussi mal. Il rappelle ainsi que 4 des 10 films les plus vus la semaine dernière étaient espagnols. On pourrait ajouter que le cinéma espagnol a récolté 16 nominations aux Oscars depuis 1970 et plus de 30 prix à Cannes, Berlin et Venise depuis 1960, que la part de marché du cinéma national est supérieure à 20% en 2012, soit le meilleur résultat en 27 ans, et que l'industrie a généré l'an dernier un total de 151 millions d'euros de recettes à l'étranger, soit bien plus que dans son propre pays (lire aussi : 40 films pour défier la crise du cinéma espagnol).

La colère d'Almodovar provient de l'annonce du budget 2014 pour la culture qui va enregistrer une baisse de 12,4%, après une forte baisse l'an dernier de près de 23% dans le budget 2013. L'opposition socialiste dénonce une chute de 58 % du budget public destiné depuis 2011 au cinéma.

Dénonçant la hausse brutale du taux de la TVA sur le billet de cinéma (de 8 à 21%), le cinéaste constate que les entrées ont chuté (141 millions de spectateurs en 2002, 94 millions dix ans plus tard) et que les salles de cinéma ont fermé (1223 en 2002 et seulement 841 l'an dernier). "Le problème n'est pas que les spectateurs ne vont pas voir le cinéma de leur pays, mais bien qu'ils ont arrêté d'aller au cinéma" explique-t-il. "Pour la majorité des jeunes il n'est pas vital d'aller au cinéma, ils possèdent une multitude d'appareils avec lesquels s'amuser et qui sont reliés entre eux ; mais je connais quelques jeunes touchés par la maladie terrible de la cinéphilie. Pour tous et plusieurs autres des générations adultes, tous aussi cinéphiles, ces mesures ont non seulement abaissé son économie mais ils accentuent leur désespoir."

Pour Almodovar, l'explication est simple et n'a qu'un objectif, l'extermination du cinéma espagnol : "Toutes les prédictions faites à l'époque de cette hausse de la TVA, (que le public arrêterait d'aller au cinéma, que beaucoup de salles fermeraient), se sont vérifiées, sauf celles du gouvernement qui pensait augmenter ainsi ses recettes, écrit-il. Si le résultat est contraire à leurs prévisions : pourquoi les ministres du secteur et le gouvernement en général se montrent-ils aussi euphoriques ? Il ne peut y avoir qu'une seule réponse : parce qu'ils punissent le cinéma espagnol jusqu'à ce qu'il n'en reste plus rien. Parce que tout cela suit un rigoureux plan d'extermination."

Pour lui le gouvernement de droite ne veut que prendre sa revanche : "Depuis notre 'Non à la guerre' [d'Irak, ndlr], le cinéma espagnol est devenue la bête noire des gouvernements du PP (Parti populaire). Les coupes et le mépris actuels résultent de ce 'Non', dont je ne pourrais jamais me repentir même s'il ne devait plus rester un cinéma ouvert"

Boom de la fréquentation en Chine : le cinéma français s’y attaque enfin!

Posté par vincy, le 14 juillet 2013

Le premier semestre 2013 confirme que la Chine est bien le 2e plus important marché mondial du cinéma. Alors qu'aux USA, les recettes ont baissé de 2% par rapport au premier semestre 2012, que la fréquentation en France subit un coup de froid de plus de 6%, le box office chinois a vu ses recettes progresser de 36%! 11 milliards de Yuans soit 1,36 milliards d'euros sont entrés dans les caisses des 13 000 salles de l'Empire du milieu ces six premiers mois de l'année.

Cela a essentiellement profité aux films chinois (+144%) alors que les films étrangers ont vu le public les bouder (-21%). Déjà les analystes pensent que le marché chinois sera plus important que le marché américain (leader historique) d'ici la fin de la décennie. Le box office US a quand même récolté 4,2 milliards d'euros du 1er janvier au 30 juin 2013.

A date, les champions de l'année sont le nouveau Stephen Chow (200 M$ de recettes), Iron Man 3 (123M$) et le romantique So Young (117M$).

Les films européens sont inexistants. Pour remédier à cette régression (il fut un temps où il allait jusque dans les campagnes chinoises) liée notamment à un manque de films d'action ou d'aventures mais surtout aux limites protectionnistes imposées par le gouvernement de Pékin (quotas de 80 films étrangers par an, censure), Eric Garandeau (futur ex-président du CNC) a profité d'un déplacement en Chine pour jouer les Ambassadeurs, changer de stratégie et convaincre ses homologues. Depuis la signature d'un accord de coproduction entre les deux pays en 2010, les choses bougent un peu. Même François Hollande a évoqué le dossier lors de sa visite en Chine en avril (lire notre actualité). Le Festival du Film français en Chine a rencontré un beau succès, public comme professionnel.


Visas simplifiés, partenariats multipliés

Fin juin, la Commission du film d'Ile-de-France a annoncé que les ressortissants chinois qui viennent tourner des films en France obtiendront des visas plus facilement. Le texte précise que "les demandes groupées sont désormais instruites par le consulat dans le ressort duquel une entreprise chinoise a son siège social et non en fonction du lieu de résidence des employés."

On note une augmentation des tournages audiovisuel dans l'Hexagone ; récemment Jackie Chan a profité d'un château en région parisienne. Et l'inverse est aussi vrai. En visite récemment en Chine, Aurélie Filippetti, ministre de la Culture et de la Communication, s'est rendue sur les plateaux de Portrait de femme, de Charles de Meaux, avec Melvil Poupaud et Fan Bingbin.

Europacorp a signé un accord avec le distributeur chinois Fundamental pour 15 films à venir, dont 3 seront coproduits par son partenaire chinois. La comédie noire maffieuse Malavita (de Luc Besson, avec De Niro et Pfeiffer) sera le premier film à bénéficier de ce partenariat de distribution. Pierre-Ange le Pogam a créé en mai une coentreprise avec le Chinois Bruno Wu pour développer des films d’action. Jean-Jacques Annaud a choisi un best-seller chinois, un producteur chinois et un tournage dans la région de la Mongolie intérieure pour son prochain film, Wolf Totem.

Les producteurs et les cinéastes chinois accèdent ainsi à des financements extérieurs et, surtout, au savoir-faire français. Les français de leurs cotés gagnent des écrans pour diffuser leur film, mais avant tout, ils créent des oeuvres qui sont certaines de plaire au public local et à la censure.

Reste à vérifier d'ici quelques années, la réussite de cette stratégie.

Madrid de Cine 2013 : 40 films pour défier la crise du cinéma espagnol

Posté par vincy, le 23 juin 2013

logo madrid de cine 2013La 8e édition de Madrid de Cine, l'équivalent des rendez-vous d'Unifrance pour le cinéma espagnol, avait lieu la semaine dernière, du 17 au 19 juin, dans la capitale des Ibères. L'occasion pour la presse internationale et plus de 400 professionnels de découvrir 40 films locaux prêts à être exportés.

Carmina o revienta de Paco Leon (3 fois nommé aux Goyas), Encierro 3D : Bull Running in Pamplona, documentaire de Olivier van der Zee, Alpha de Joan Cutrina, Esto no es una cita de Guillermo Fernández Groizard, The extraordinary tale of the times table de Jose F. Ortuño, Ali de Paco R. Baños, avec Veronica Forque, Somos Gente Honrada de Alejandro Marzoa et Una pistola en cada mano ont été parmi les films les plus vus durant ces journées d'après l'organisation.

Ainsi la comédie de Cesc Gay, Una pistola en cada mano, sortie fin 2012, portée par un casting alléchant - Ricardo Darín, Luis Tosar, Javier Cámara, Eduardo Noriega, Cayetana Guillén et Candela Pena, qui a remporté un Goya du meilleur second-rôle féminin pour ce film - a trouvé un distributeur en France. On a aussi appris que le duo de Cellule 211, Daniel Monzon et Luis Tosar, tourne un autre polar, El niño ; ou que L'orphelinat, le film phénomène de Juan Antoni Bayona, va faire l'objet d'un remake aux USA.

Pendant 3 jours, acheteurs de 29 pays, producteurs, journalistes (35 médias) se sont croisés dans un lieu unique pour rencontrer réalisateurs et comédiens des films participants.

Box office en chute libre

Ce succès croissant de Madrid de Cine a consolé une industrie cinématographique déprimée. Le box office est en chute libre depuis le début de l'année, après une année 2012 déjà désastreuse. Depuis 2009, le cinéma en Espagne est passé de 110 millions de spectateurs à 94 millions l'an dernier! En cause : la hausse de la TVA sur les billets de cinéma qui rend le ticket hors de prix (voir notre actualité du 4 octobre 2012). Le plus gros succès de l'année, The Croods, a rapporté 18 millions de $ quand l'an dernier déjà deux films avaient dépassé les 20 millions de $. Côté espagnol, le film le plus populaire cette année, à l'exception de Mama, reste le Pedro Almodovar, Les amants passagers, avec 6,5 millions de $ de recettes et une modeste 10e place dans le classement annuel.

Le nombre de tournage s'effondre avec seulement 43 productions lancées entre janvier et début juin, soit 25% de moins qu'en 2012 et 56% de moins qu'en 2011. Les mois à venir risquent de ne pas être plus réconfortants. Les budgets moyens par films sont eux aussi en forte baisse : 3 millions d'euros en 2010, à peine 1,8 million d'euros en ce début d'année.

Un cinéma tiré par ses recettes internationales

Cependant, la part de marché des films espagnols augmente (de 11,5% pour les six premiers mois de 2012 à 17,9% pour le premier semestre 2013). Cela confirme la tendance enregistrée l'année dernière, où le cinéma espagnol avait battu son record de 27 ans avec une part de marché de 19,3%. The Impossible a même été le plus gros succès de l'année avec 5,86 millions d'entrées.

Et l'exportation des films espagnols n'a jamais été aussi dynamique - ce qui renforce la nécessité d'un rendez-vous comme Madrid de Cine. En 2012, les recettes internationales ont rapporté 150 millions d'euros à l'industrie du cinéma espagnol, soit largement plus que les recettes du cinéma espagnol dans le pays (110 millions d'euros); au total, 141 films ont été vendus en 2012 pour des marchés étrangers (soit une trentaine de plus qu'en 2011) alors que le nombre de films produits diminue.