L’acteur japonais Ren Osugi est mort (1951-2018)

Posté par vincy, le 22 février 2018

L'acteur japonais Ren Osugi est mort le 21 février 2018 à l'âge de 66 ans d'une attaque cardiaque. Figure récurrente du cinéma de Takeshi Kitano, il avait été de plusieurs de ses films comme les beaux Kids Return et Hana-bi, mais aussi dans Sonatine, mélodie mortelle, Aniki mon frère, Dolls, Glory to the Filmmaker, Achille et la tortue, Takeshis, Getting Any? et Outrage coda ( l'an dernier). Il avait été nommé comme meilleur second-rôle aux Awards of Japanese Academy pour Hana-bi. Le Festival de Yokohama lui avait décerné un prix du meilleur second-rôle pour l'ensemble de ses films de la saison 1997-1998.

Ren Osugi a aussi tourné régulièrement avec Takashi Miike (Ley Lines, Audition, Dead or Alive 2, MPD Psycho, Zebraman) et Kiyoshi Kurosawa (Cure, Licence to live, Charisma, Loft). Second-rôle à la filmographie impressionnante, on l'a aussi vu chez des cinéastes connus comme Yoichi Sai (Inu Hashiru), Hirokazu Kore-eda (Maborosi), Masayuki Suo (Shall we dance?), Sabu (Monday, Blessing bell, Ten no Chasuke), Yoji Yamada (Le Samouraï du crépuscule)...

Sa carrière de près de 45 ans, aussi bien sur le petit que le grand écran, l'a mené à jouer les yakusas, les pères de famille comme les chauffeurs de taxi ou les gérants d'hôtel. Très populaire dans l'archipel nippon, il avait cette capacité de passer en un instant du rire au drame, de l'idiot à l'autoritaire, de l'amoureux au mélancolique.

Berlin 2018 : Steven Soderbergh angoisse la Berlinale avec Unsane

Posté par MpM, le 21 février 2018

Steven Soderbergh est de retour à Berlin hors compétition, cinq ans après Effets secondaires, avec un nouveau thriller efficace et tendu dont la particularité est d’avoir été tourné avec un IPhone. Unsane est clairement dans l’air du temps puisqu’il suit le parcours de Sawyer Valentini (interprétée avec subtilité par Claire Foy), une jeune femme qui a dû fuir sa ville et ses amis après avoir été harcelée par un homme qui s’était épris d’elle. Toujours traumatisée, la jeune femme se rend dans une clinique privée pour une consultation psychologique, et se retrouve internée contre son gré.

Si le réalisateur américain ne révolutionne ni le cinéma, ni la série B avec cette histoire relativement classique d'une héroïne prise au piège d'un dangereux psychopathe, il propose un film à la fois anxiogène et divertissant qui ne manque pas de panache. Sa mise en scène très découpée et précise offre une grande fluidité au récit qui se déroule sans temps morts ni essoufflement. Le réalisateur est évidemment très fort pour ménager ses effets et donner le sentiment d'une machine infernale qui se referme peu à peu sur son personnage. Il lance ainsi plusieurs pistes de salut possible, avant de les refermer sèchement une à une jusqu'à placer Sawyer (Claire Foy, révélée par la série The Crown) dans une impasse mortifère dont elle est semble ne jamais pouvoir sortir.

Il est à ce titre intéressant de constater que le réalisateur lève assez rapidement l'ambiguïté sur l'existence réelle du harceleur pour se concentrer au contraire sur l'état mental de Sawyer, qui multiplie les crises de violence et les comportements déviants. Il y a chez elle une ambivalence qui persiste jusqu'à la toute fin, destinée à faire réfléchir le spectateur à la notion toute relative de "happy end". Il montre en substance les réalités de la vie d'une victime de harcèlement, à la fois lors d'un flash-back ahurissant de détails (et l'apparition réussie de Matt Damon en spécialiste de la protection) et dans la persistance des conséquences bien au-delà du danger réel.

Le film s'inscrit évidemment dans un climat social particulier, à une époque où les violences faites aux femmes et la notion de harcèlement sont clairement sur le devant de la scène, et il montre (avec la puissance mais aussi les faiblesses d'une oeuvre de fiction) ce que cela peut signifier concrètement au quotidien. Ce faisant, cela ne l'empêche pas de recourir aux codes du cinéma de genre (avec notamment une très prenante musique répétitive et des cadres inquiétants qui suggèrent la présence d'un prédateur aux aguets) et de proposer un film grand public, certes minimaliste, mais qui propose toutes les émotions fortes propres au thriller traditionnel.

Il allie ainsi une intrigue ancrée dans l'actualité à des choix formels facilement accessibles, et mêle à tout cela un regard extrêmement critique sur les dérives de la psychiatrie et sur l'exploitation éhontée des assurances maladies, thème qu'il avait déjà abordé dans Effets secondaires. Voilà sans doute pourquoi Unsane s'avère si impliquant émotionnellement. Pour le spectateur, c'est en effet comme se retrouver dans un cauchemar éveillé mêlant ses pires angoisses : être interné contre son gré, perdre le contrôle de son existence, frôler la folie et se retrouver à la merci de son pire ennemi. La recette n'est peut-être pas extraordinairement originale, mais elle porte une nouvelle fois ses fruits, et avec élégance.

Berlin 2018 : Lav Diaz est de retour avec une tragédie musicale statique et obsédante

Posté par MpM, le 20 février 2018

La durée est une donnée fondamentale du cinéma de Lav Diaz, qui nous a habitués à des films de cinq ou huit heures. Season of devil, présenté en compétition dans cette 68e Berlinale, fait donc pour lui figure de moyen métrage, puisqu’il dure « seulement » 4h. Quatre heures dont on ressent malgré tout chaque minute dans un processus à la fois épuisant (on s’ennuie beaucoup, il ne faut pas le nier) et efficace, consistant à faire physiquement ressentir au spectateur la pesanteur, l'immobilisme et l’inéluctabilité de la situation dans laquelle il se retrouve immergé.

C’est que Lav Diaz situe son intrigue à la fin des années 70, sous la dictature de Ferdinand Marcos, lorsque des milices paramilitaires sont créées, officiellement pour faire régner l’ordre, et en réalité plutôt pour tyranniser les civils. Il dépeint la vie d’un petit village tombé sous la coupe de l’une de ces milices toutes-puissantes. La dictature se manifeste ainsi par des exécutions, des viols et des actes de violence gratuite qui instaurent un climat d’angoisse permanente. Comme si cela ne suffisait pas, la milice agit aussi insidieusement sur les consciences, tentant d’imposer l'obscurantisme à travers de nouvelles croyances et surtout de nouvelles craintes fantasmatiques. Elle renforce ainsi sa main mise sur un peuple qui n’a pas les armes (au sens propre comme au figuré) pour se défendre.

Season of devil n’est donc ni romanesque, ni rythmé, et propose une progression dramatique si limitée que la situation de fin sera sensiblement la même que celle du début, à l’exception de la disparition de quelques personnages. Dès le départ, on nous avait prévenu qu’il s’agissait d’un conte : on aurait plutôt penché pour le cauchemar éveillé. La situation s’avère en effet sans issue et sans le moindre embryon d’espoir d’amélioration. La force brutale triomphe. Les faibles et les sages sont humiliés et annihilés. L’Humanité tout entière court à sa perte dans une irrépressible fuite en avant.

Le plus saisissant, peut-être, n’est pas cet hommage rendu par Lav Diaz aux victimes de la répression, mais le parallèle qu’il tisse avec notre époque, et le régime de Rodriguo Dutertre. Les références à la drogue, notamment, sont assez transparentes, puisque le président actuel a autorisé une guerre sans merci contre la drogue, autorisant les milices à tuer. On ne sait donc pas trop si le réalisateur nous plonge dans le passé, ou dans sa vision de l’avenir.

Dans les deux cas, la noirceur et le pessimisme sont de rigueur. Et ce malgré l’étonnant choix formel de Lav Diaz de remplacer tous les dialogues par des chansons. De très beaux chants qui deviennent de plus en plus lancinants au fur et à mesure que le récit avance. Chaque couplet est d’ailleurs répété deux fois, plusieurs chants reviennent à plusieurs reprises, et un terrible refrain formé de « la, la, la, la » hante tout le film comme une menace. On ne sait ce qui est le plus surprenant, voir les soldats psalmodier avec morgue des paroles parfois extrêmement poétiques, ou entendre chanter en chœur oppresseurs et oppressés.

Ce climat musical contribue quoi qu'il en soit à créer une atmosphère étrange et irréelle, à mi-chemin entre la réalité et le fantasme, le monde des vivants et celui des esprits. Comme ce dirigeant qui a littéralement deux visages, dont un toujours endormi, les choses, les situations et les gens sont doubles. Même les séquences les plus tragiques finissent par tourner à la farce, et les discours les plus guerriers à la blague, quand ils ne sont pas tout simplement incompréhensibles. Il faut d'ailleurs saluer l'audace de Lav Diaz qui ose aller vers cette ambivalence permanente (le ridicule et le tragique, le grotesque et le profond) pour traiter un sujet aussi sensible.

Le cinéaste continue ainsi de creuser son sillon singulier sans se soucier de la tyrannie du marketing ou des attentes des spectateurs. Une politique qui, jusque-là, l'a plutôt bien servi en festival. Après un Léopard d'or en 2014 pour From what is before, un lion d'or en 2016 pour La femme qui est partie, et si 2018 était l'année de l'Ours ?

10 millions de visionnages pour MyFrenchFilmFestival 2018

Posté par vincy, le 20 février 2018

Le festival en ligne d’UniFrance, MyFrenchFilmFestival, a dévoilé son palmarès et surtout a annoncé un record de fréquentation, pour la 3e année consécutive. La 8e édition, qui s’est tenue du 19 janvier au 19 février, a enregistré plus de 10 millions de vues dans le monde (6,7 millions de vues en 2017). Les 5 pays comptabilisant le plus de visionnages sur la plateforme sont le Mexique, le Brésil, l'Argentine, la Pologne et la Russie.

Hier soir, Isabelle Giordano, directrice générale d'UniFrance, et le Secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé du Numérique Mounir Mahjoubi ont décerné les prix du jury, de presse et du public.

Le Prix du Jury des Cinéastes, présidé par Paolo Sorrentino, a distingué Les Derniers Parisiens de Hamé & Ekoué, avec vec Reda Kateb, Slimane Dazi, Mélanie Laurent . Sorti il y a un an, le film avait déjà reçu le prix FIPRESCI au Festival de Turin.

Une Mention Spéciale, "afin de saluer la proposition artistique singulière des réalisateurs", a été remise à Willy 1er, de Ludovic Boukherma, Zoran Boukherma, Marielle Gautier et Hugo P. Thomas.

Le Jury de la Presse Internationale composé de Fabio Ferzetti (Italie), Fernando Ganzo (Espagne), Finn Halligan (Royaume-Uni), Sabine Mann (Allemagne), Yana Labushkina (Russie) et le public (50000 votes!) ont choisi les mêmes lauréats: Noces de Stephan Streker pour les longs métrages et La Mort, Père & Fils de Winshluss et Denis Walgenwitz pour les courts métrages.

Les films primés seront diffusés à bord des avions Air France pour une durée de 6 mois, à partir de cet été.

160 cinéastes européens demandent une politique européenne ambitieuse pour le 7e art

Posté par vincy, le 19 février 2018

Droits d’auteur, piratage, territorialité, financement, fiscalité, diffusion : à l'occasion de l'intervention de la Commissaire européenne Mariya Gabriel au Festival de Berlin, plus de 160 cinéastes européens listent dans une tribune trilingue publiée sur le site de l'ARP (Société civile des auteurs réalisateurs-producteurs) leurs priorités à l’heure où la Commission de Bruxelles doit rendre des arbitrages sur sa politique médias.

"La culture européenne est la mise en commun de toutes les singularités, façons d’être et de voir, traditions, langues et histoires propres à chaque pays. A l’heure du Brexit et des nationalismes montants, l’Europe doit comprendre que sa force demeure dans sa capacité de dialogue entre union et identités spécifiques. C’est notre force et non pas notre faiblesse : ne pas comprendre cette dualité nous mènera à notre perte" rappelle cette tribune en préambule

"Cinéastes, nous portons le projet d’une véritable Europe de la création, guidée par l’Exception culturelle. Nous sommes convaincus que le numérique est une chance immense pour la création et la circulation des œuvres : la diversité peut ainsi être exposée dans chaque Etat-Membre, auprès de tous les spectateurs. Il n’y a pas de petit ou grand état européen de la création ; il y a une formidable richesse de regards" expliquent les signataires, parmi lesquels les frères Dardenne, Costa Gavras, Claude Lelouch, Abderrahmane Sissako, Agnès Joaui, Cédric Klapisch, Euzhan Palcy, Michel Ocelot, Bertrand Tavernier, Fatih Akin, Joachim Trier, Bela Tarr, Cristian Mungiu, Isabel Coixet, Ursula Meier, John Boorman, Ken Loach...

Ils affirment qu'"Une grande Europe de la Création est possible si nous affirmons, au cœur de l’économie numérique, la défense de droits fondamentaux, et un partage de valeurs équilibré entre tous les acteurs de la chaîne."

Droit d'auteur et piratage

Pour eux, "le projet de directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique est une occasion unique d’assurer aux auteurs une rémunération juste, proportionnelle et inaliénable lorsque leurs films et œuvres audiovisuelles sont regardés sur des plateformes numériques. Il est temps de mettre en place un mécanisme européen qui garantisse aux auteurs une juste rémunération pour l’exploitation à la demande de leurs œuvres partout en Europe."

"Une plateforme ou un diffuseur qui tire profit de la diffusion d’une œuvre ne peut en aucun cas s’exonérer de contribuer au financement de la création. Dans le cadre de la directive sur les Services de Médias Audiovisuels (SMA), assurons-nous que chaque acteur qui diffuse des œuvres pour les spectateurs d’un Etat-Membre, par quelque mode que ce soit (plateforme, télévision payante ou en clair, hertzien ou numérique, etc.), obéisse impérativement aux règles de ce pays" exigent-ils, réaffirmant par la même occasion que "le principe du pays de destination permettra à chaque Etat-Membre de définir librement l’investissement de tous les acteurs (y compris les plateformes) dans la production d’œuvres nationales, et de conduire ainsi sa politique culturelle au service de la diversité des œuvres. Par ailleurs, le taux de 30% d’œuvres européennes dans les catalogues des plateformes numériques – inscrit dans cette révision de la directive, reste un plancher, laissant aux Etats-Membres toute la latitude de fixer un seuil plus élevé."

Signes inquiétants

"Nous défendons par ailleurs l’idée d’une Europe respectueuse du principe de territorialité, qui refuse qu’une œuvre soit diffusée sur des territoires pour lesquels les droits n’ont pas été acquis. Dans le cadre du règlement Câble-Satellite, garantissons aux créateurs, et aux cinématographies les plus fragiles, les moyens nécessaires au financement de leurs œuvres et combattons toute stratégie de contournement" attendent les producteurs, cinéastes et comédiens auteurs de ce texte.

Ils rappellent, en matière de financement que le programme de financement européen Media "est déjà un des plus petits programmes financés par la Commission européenne et le seul consacré à notre secteur" et "pourraient être encore réduits". "Conscients de son soutien déterminant, tant pour les films que pour les publics qui les découvrent, renforçons et pérennisons ce programme emblématique de l’attachement européen au cinéma" demandent-ils.

Dans le même temps, ils remarquent que les GAFAN (Google, Amazon, Facebook, Apple, Netflix) et certains acteurs globaux accentuent "la concurrence déloyale entre acteurs vertueux et non vertueux". Ils réclament que "L’Europe, si elle veut garder une place majeure dans l’avenir, se doit d’inventer des lois adaptées au monde numérique d’aujourd’hui, afin d’imposer des règles équitables : dans le cas contraire, cela reviendrait à créer, au sein même de l’Union, des « paradis anti-culturels », chevaux de Troie d’une culture dominante."

La quadrature du cercle de la diffusion

Enfin, pour que "Le cinéma, dans toute sa diversité, (irriguent) l’ensemble des territoires", ils proposent d'inventer "un outil européen de référencement des œuvres" qui "encouragerait la circulation des films dans les Etats-Membres où ils seraient encore indisponibles plusieurs années après la sortie initiale." "Travaillons avec les plateformes. Encourageons-les à éditorialiser le cinéma européen et à le valoriser auprès des millions de spectateurs des Etats-Membres. Sur ces services, lors des transpositions en lois nationales, soyons ambitieux et allons, pays par pays, au-delà du plancher de 30% d’œuvres européennes bientôt imposé par la réglementation européenne".

Ils souhaiteraient aussi la création d'un "Festival des cinéastes européens présentant les œuvres primées de chaque pays, et voyageant d’une capitale européenne à l’autre, faisons la promotion de nos plus belles créations. Invitons le public à plébisciter la diversité européenne."

Cette mobilisation n'est pas nouvelle. Régulièrement, à Berlin, Cannes (la dernière date de mai dernier, avec une grande partie de signataires en commun et de nombreuses revendications similaires), ou Venise, les professionnels lancent des appels, des pistes de réflexions, des tribunes pour faire pression sur une Europe relativement absente sur le plan des idées et souvent soumises à des acteurs transnationaux. Le programme Europe Créative ne pèse que 1,46 milliard d'euros pour la période 2014-2020. Rappelons que Netflix va investir 8 milliards de dollars cette année pour la création de contenus originaux.

Austria / Autriche

Barbara Albert

Belgium / Belgique

Dominique Abel, Lucas Belvaux, Jean-Pierre Dardenne, Luc Dardenne, Fiona Gordon, Frédéric Sojcher, Felix Van Groeningen

Bulgaria / Bulgarie

Vera Chandelle, Kristina Grozeva, Tonislav Hristov, Kamen Kalev, Vesela Kazakova, Veselka Kiryakova, Stefan Komandarev, Dimitar Kotsev-Shosho, Milko Lazarov, Tsvetodar Markov, Ilian Metev, Mina Mileva, Elitsa Petkova, Ralitsa Petrova, Mila Turajlic, Vania Rainova, Mira Staleva, Petar Valchanov, Pavel Vesnakov, Maya Vitkova-Kosev, Rositsa Vulkanova

Croatia / Croatie

Hrvoje Hribar, Danilo Šerbedžija

Cyprus / Chypre

Tonia Mishiali

Denmark / Danemark

Ole Christian Madsen, Annette K. Olesen, Christina Rosendahl, Birgitte Stærmose

Finland / Finlande

Saara Saarela

France

Jean Achache, Jérémy Banster, Patricia Bardon, Luc Béraud, Charles Berling, Julie Bertuccelli, Gérard Bitton, Sophie Blondy, Bertrand Bonello, Patrick Braoudé, Catherine Breillat, Dominique Cabrera, Christian Carion, Jean-Michel Carré, Olivier Casas, Elie Chouraqui, Etienne Comar, Catherine Corsini, Dominique Crèvecoeur, Audrey Dana, Edouard Deluc, Claire Denis, Dante Desarthe, Léon Desclozeaux, Jérôme Diamant-Berger, Evelyne Dress, Jacques Fansten, Joël Farges, Frédéric Fonteyne, Philippe Garrel, Costa Gavras, Jacques-Rémy Girerd, Eugène Green, Robert Guédiguian, Agnès Jaoui, Thomas Jenkoe, Lou Jeunet, Arthur Joffé, Pierre Jolivet, Cédric Klapisch, Gérard Krawczyk, Jeanne Labrune, Eric Lartigau, Michel Leclerc, Philippe Le Guay, Claude Lelouch, Jean Marboeuf, Nathalie Marchak, Tonie Marshall, Radu Mihaileanu, Jonathan Millet, Steve Moreau, Philippe Muyl, Olivier Nakache, Michel Ocelot, Euzhan Palcy, Martin Provost, Raphaël Rebibo, Christophe Ruggia, Céline Sallette, Jean-Paul Salomé, Tessa-Louise Salomé, Pierre Salvadori, Manuel Sanchez, Jean-Pierre Sauné, Pierre Schoeller, Arnaud Sélignac, Joël Séria, Charlotte Silvera, Abderrahmane Sissako, Bertrand Tavernier, Cécile Telerman, Danièle Thompson, Eric Tolédano, Arnaud Viard

Germany / Allemagne

Fatih Akin, Emily Atef, Reza Bahar, Peter Carpentier, Nicole Gerhard, Jochen Greve, Brita Knöller, Fabian Massah, Hans-Christian Schmid, Tobias Siebert

Greece / Grèce

Elina Psykou

Hungary / Hongrie

Bela Tarr

Iceland / Islande

Benedikt Erlingsson, Fridrik Thor Fridriksson

Italy / Italie

Giovanni Amelio, Francesca Archibugi, Marco Bellocchio, Cristina Comencini , Emanuele Crialese, Matteo Garrone, Fabio Grassadonia, Luca Guadagnino, Daniele Luchetti, Francesca Marciano, Mario Martone, Ivano de Matteo, Sandro Petraglia, Antonio Piazza, Giuseppe Piccioni, Marco Risi, Gabriele Salvatores, Valia Santella, Stefano Sardo, Andrea Segre, Alberto Simone, Silvio Soldini, Massimo Spano, Marco Tullio Giordana, Carlo Verdone, Daniele Vicari

Latvia / Lettonie

Ieva Romanova

Lithuania / Lituanie

Arunas Matelis

Netherlands / Pays-Bas

Martijn Winkler

Norway / Norvège

Sverre Pedersen, Joachim Trier

Poland / Pologne

Karolina Bielawska, Jacek Bromski, Agnieszka Holland, Malgorzata Szumowska

Romania / Roumanie

Catalin Mitulescu, Cristian Mungiu, Corneliu Porumboiu

Slovenia / Slovénie

Klemen Dvornik

Spain / Espagne

Juan Antonio Bayona, Pablo Berger, Isabel Coixet, José-Luis Cuerda, José Luís García Sánchez, Manuel Gutierrez Aragón, Javier Rebollo, Emilio Ruiz Barrachina, David Trueba, Fernando Trueba, Felipe Vega

Sweden / Suède

Elisabet Gustafsson, Christina Olofson

Switzerland / Suisse

Ursula Meier

United-Kingdom / Royaume-Uni

John Boorman, Simon Brook, Dan Clifton, Stephen Frears, Ken Loach, Rebecca O’Brien, Sir Alan Parker, Paul Powell, Charles Sturridge, Carole Tongue, Susanna White

Didier Lockwood pose son violon (1956-2018)

Posté par vincy, le 19 février 2018

Le jazzman et compositeur Didier Lockwood est mort à l'âge de 62 ans dimanche 18 février. Ce violonniste virtuose, Victoire de la musique en 1985, avait composé plusieurs musiques de films: Jour après jour d'Alain Attal (1989), Lune Froide de Patrick Bouchitey (1991), Les enfants de la pluie et La reine soleil, films d'animation de Philippe Leclerc (2003 et 2007), un segment de Cinévaradaphoto, documentaire d'Agnès Varda (2004), la série télévisée Terre de lumière (2008), La frontière de l'aube de Philippe Garrel (2008), Victor Young Perez de Jacques Ouaniche (2013) et L'orchestre des aveugles de Mohamed Mouftakir (2015).

Il interprétait parfois lui-même ses morceaux. Mais en tant que musicien, il est aussi apparu aux génériques de Hiver 54, l'abbé Pierre, Max & Jérémie, Petits désordres amoureux et Asterix & Obélix contre César. Claude Lelouch a fait appel à lui pour jouer son propre personnage dans Les Parisiens (2004). Il jouait du violon dans le film du réalisateur, Courage d'aimer (2005).

En avril dernier, il était sur la scène du Théâtre de l'œuvre pour un spectacle d'improvisation "Les impromptus de Didier Lockwood", avec en invités Richard Bohringer, Didier Sandre et Mathilda May.

L'aisance avec laquelle il maîtrisait son instrument et ses mélodies cherchant toujours la juste émotion, en ont fait un musicien hors-pair. Passé par les big bands, le jazz rock de Magma, créant sa propre formation, en quête de métissages et et d'exploration musicales (de l'électro à l'Inde), il animait aussi un festival dédié aux violons. Didier Lockwood était mariée à Caroline Casadesus, chanteuse lyrique, petite-fille de la comédienne Gisèle Casadesus, récemment disparue.

Berlin 2018 : le cinéma français discret mais bien présent

Posté par MpM, le 18 février 2018

Nous relevions dernièrement la faible place accordée au cinéma français à Berlin cette année. Et c’est vrai que les deux seuls  films sélectionnés en compétition, Eva de Benoît Jacquot (remake du film du même nom de Joseph Losey et adapté de James Hadley Chase) et La prière de Cédric Kahn, semblent les représentants du versant le plus académique de notre cinématographie nationale. Ici, peu de recherche formelle, des intrigues relativement classiques (un thriller, un récit initiatique), et surtout des films qui auraient tout aussi bien pu être tournés il y a dix ou vingt ans. Même le choix des cinéastes dénote un certain manque de curiosité à l’égard d’un cinéma français plus contemporain, plus novateur, ou en tout cas d’une absence de risque de la part d’un festival qui a pourtant l’habitude d’en prendre.

Mais peut-être est-ce cette vision du cinéma français que l’on a à l’international, entre classicisme et héritage du passé, et qu'il est plus facile de donner aux spectateurs ce qu'ils attendent que de forcer leur curiosité. Le cahier des charges est d'ailleurs plutôt rempli par les deux films en compétition, chacun à sa manière.

Eva de Benoît Jacquot (un habitué de la Potsdamer Platz, venu en compétition en 2012 pour Les adieux à la reine, et en 2015 pour Le journal d'une femme de chambre) est un thriller figé et scolaire qui ne parvient jamais à nous faire croire à ce qu’il raconte. C’est dû, peut-être, à la présence carnassière d’Isabelle Huppert, dont il nous est impossible de croire une seconde qu’elle puisse être manipulée par le falot personnage interprété par Gaspard Ulliel.

C’est d’ailleurs la comédienne qui tire toute la couverture à elle, piquante, entière et ironique, mais également touchante lorsqu'il s'agit de la relation qu'elle a avec son mari. Une femme indépendante et forte dont on peut certes acheter le corps, mais pas la liberté. La mise en scène très classique et le scénario approximatif (qui abandonne des personnages en chemin, et ne sait comment conclure) empêchent certes le venin d’infuser, et le suspense de prendre. Mais il y a l’ombre de Losey sur le film, et cet ancrage dans l’histoire du cinéma français n’est sans doute pas étranger à sa présence en compétition.

Cédric Kahn, lui, nous emmène dans un tout autre univers avec La prière, qui se déroule dans une communauté isolée qui lutte contre toutes les formes de dépendance à travers la religion. On découvre avec son jeune personnage principal, interprété par Anthony Bajon, les règles de cet endroit très strict où les journées sont rythmées par le travail manuel et les horaires des prières. Les « compagnons » n’ont droit à aucune intimité, aucun contact avec l’extérieur, et n’ont pour se libérer de leurs accoutumances que leur foi, et l’amitié vigilante de ceux qui sont déjà passés par là.

Ce qui est étrange, c’est le contraste entre l’ambivalence de la situation (ce lieu de refuge qui devient comme une prison dont les personnages n’osent plus sortir, cette gentillesse permanente qui donne l’impression que les « compagnons » ont subi un lavage de cerveau, l’aide réelle apportée qui exclut pourtant tout traitement ou suivi psychologique, l’omniprésence de la religion et l’injonction à croire) et l’absence de point de vue du réalisateur sur cette ambivalence. Plus le film avance, plus on a la sensation d’être face à une communauté sectaire, et plus le film reste premier degré, se contentant de montrer les bienfaits du Centre sur ceux qui y vivent.

Le scénario est par ailleurs maladroit, souvent au service de la démonstration, quitte à quelques invraisemblances, ou raccourcis dramatiques. La mise en scène, heureusement, apporte un vrai cadre narratif au récit. Les plans sont précis, les scènes sont efficaces et bien découpées, à l’exception de l’embarrassante scène d’amour (filmée in extenso) qui montre donc toujours en 2018 une femme tomber dans les bras d’un homme et avoir une relation sexuelle intense avec lui (sans préservatif, hein, on n’est pas dans un film sur le sida) en trois minutes chrono.

Certes, on saisit le message (pulsion de vie contre pulsion de mort, alternative profane à la vocation religieuse, espoir d’une vie dans le monde réel), mais on peut vous assurer qu’il aurait au moins aussi bien marché avec un personnage féminin plus finement écrit. Il faut avouer à la décharge de Cédric Kahn que ce n’est pas un traitement de faveur réservé à ce personnage féminin, puisque quasiment tous les autres protagonistes du film manquent eux-aussi de consistance, quand ils ne sont pas juste des silhouettes à peine entr’aperçues. Reste malgré tout un film de bonne facture qui fait bien meilleure figure que certains de ses concurrents dans la course à l'ours d'or.

Mais si la compétition est évidemment le lieu vers lequel se tournent tous les regards, la France est heureusement présente sous d’autres formes dans les sections parallèles, donnant une vision élargie du dynamisme, et des singularités, de notre cinématographie nationale. On peut ainsi relever la présence de Stéphane Demoustiers avec Allons enfants (Generation Kplus), Claire Simon (Premières solitudes, au Panorama), Julien Faraut (L’empire de la perfection, Panorama), Jean-Paul Civeyrac (Mes provinciales, Panorama), Clément Pinteaux Des jeunes filles disparaissent, Berlinale Shorts) ou encore Arash Nassiri (City of tales, Berlinale Shorts).

Mais ce qui devrait rester comme le plus beau film français présenté à Berlin cette année, on l’a déjà vu, c’est Le tigre de Tasmanie de Vergine Keaton, un court métrage de la sélection officielle (en lice pour l’ours d’or, donc) qui montre en parallèle des images d’un thylacine (également connu sous l’appellation Tigre de Tasmanie) et d'un glacier en train de fondre, reconstitué en animation. La musique envoûtante et puissante signée Les Marquises est en parfaite harmonie avec les images hypnotiques de la glace, puis de sa fusion avec la lave, et du déchaînement de la nature, ainsi qu’avec les allers et retours du tigre qui semble littéralement danser en rythme dans sa cage, avant de se coucher, comme abattu.

On est à la fois bouleversé et sidéré par l’absolue beauté de la nature en action, qui déconstruit tout sur son passage, avant de recombiner ses différents éléments en une autre forme de paysage. La lave en fusion se mue en une nuée d’étoiles, de nouvelles splendeurs apparaissent, et le tigre peut se remettre à danser. Comme s'il avait survécu à sa propre extinction (le dernier représentant de l'espèce a disparu en 1936), l'animal se multiplie même à l'écran, et laisse alors entrevoir un avenir possible à inventer. Même pas besoin d'extrapoler pour y voir en parallèle un signe du renouveau palpable du cinéma français.

BAFTAs 2018 : Three Billboards Outside Ebbing, Missouri et The Shape of Water tirent leur épingle du jeu

Posté par wyzman, le 18 février 2018

A deux semaines des Oscars, les jeux sont loin d'être faits. En effet, c'est ce soir qu'avait lieu la 71e cérémonie des British Academy Film Awards. Bien que les résultats des BAFTAs n'aient aucune incidence sur ceux des Oscars, il n'est pas rare d'y voir les mêmes films récompensés. Lors des nominations, il était impossible de ne pas être frappé par la présence de La forme de l'eau, le dernier film de Guillermo Del Toro qui a été cité pas moins de 12 fois. Derrière lui, Les heures sombres et Three Billboards Outside Ebbing, Missouri recevaient chacun 9 nominations. Sans oublier les blockbusters Dunkerque et Blade Runner 2049, nommés chacun 8 fois - principalement dans les catégories techniques. Comme c'est souvent le cas (et à l'inverse des Oscars), les votants des BAFTAs ont fait le choix de récompenser le plus de films possible.

On notera la présence de quelques français ou productions françaises au palmarès (Alexandre Desplats à la musique, le documentaire I am not your Negro de Raoul Peck), le triomphe de Daniel Kaluuya en espoir et de Mademoiselle, en compétition à Cannes en 2016 pour le film en langue étrangère.

Voici le palmarès :

• MEILLEUR FILM

CALL ME BY YOUR NAME
DARKEST HOUR
DUNKIRK
THE SHAPE OF WATER
THREE BILLBOARDS OUTSIDE EBBING, MISSOURI

• MEILLEUR REALISATEUR

BLADE RUNNER 2049 Denis Villeneuve
CALL ME BY YOUR NAME Luca Guadagnino
DUNKIRK Christopher Nolan
THE SHAPE OF WATER Guillermo del Toro
THREE BILLBOARDS OUTSIDE EBBING, MISSOURI Martin McDonagh

• MEILLEURE ACTRICE

ANNETTE BENING Film Stars Don’t Die in Liverpool
FRANCES McDORMAND Three Billboards Outside Ebbing, Missouri
MARGOT ROBBIE I, Tonya
SALLY HAWKINS The Shape of Water
SAOIRSE RONAN Lady Bird

• MEILLEUR ACTEUR

DANIEL DAY-LEWIS Phantom Thread
DANIEL KALUUYA Get Out
GARY OLDMAN Darkest Hour
JAMIE BELL Film Stars Don’t Die in Liverpool
TIMOTHÉE CHALAMET Call Me by Your Name

• MEILLEURE ACTRICE DANS UN SECOND ROLE

ALLISON JANNEY I, Tonya
KRISTIN SCOTT THOMAS Darkest Hour
LAURIE METCALF Lady Bird
LESLEY MANVILLE Phantom Thread
OCTAVIA SPENCER The Shape of Water

• MEILLEUR ACTEUR DANS UN SECOND ROLE

CHRISTOPHER PLUMMER All the Money in the World
HUGH GRANT Paddington 2
SAM ROCKWELL Three Billboards Outside Ebbing, Missouri
WILLEM DAFOE The Florida Project
WOODY HARRELSON Three Billboards Outside Ebbing, Missouri

• MEILLEUR FILM BRITANNIQUE

DARKEST HOUR
THE DEATH OF STALIN
GOD’S OWN COUNTRY
LADY MACBETH
PADDINGTON 2
THREE BILLBOARDS OUTSIDE EBBING, MISSOURI

• MEILLEUR FILM PAR UN NOUVEAU SCÉNARISTE, RÉALISATEUR OU PRODUCTEUR BRITANNIQUE

THE GHOUL Gareth Tunley (Scénariste/Réalisateur/Producteur), Jack Healy Guttman & Tom Meeten (Producteurs)
I AM NOT A WITCH Rungano Nyoni (Scénariste/Réalisateur), Emily Morgan (Producteur)
JAWBONE Johnny Harris (Scénariste/Producteur), Thomas Napper (Réalisateur)
KINGDOM OF US Lucy Cohen (Réalisateur)
LADY MACBETH Alice Birch (Scénariste), William Oldroyd (Réalisateur), Fodhla Cronin O’Reilly (Producteur)

• MEILLEUR FILM EN LANGUE ÉTRANGÈRE

ELLE
FIRST THEY KILLED MY FATHER
MADEMOISELLE (THE HANDMAIDEN)
FAUTE D'AMOUR (LOVELESS)
LE CLIENT (THE SALESMAN)


• MEILLEUR DOCUMENTAIRE
CITY OF GHOSTS
I AM NOT YOUR NEGRO
ICARUS
AN INCONVENIENT SEQUEL
JANE

• MEILLEUR FILM D'ANIMATION

COCO
LOVING VINCENT
MY LIFE AS A COURGETTE

• MEILLEUR SCÉNARIO ORIGINAL

GET OUT Jordan Peele
I, TONYA Steven Rogers
LADY BIRD Greta Gerwig
THE SHAPE OF WATER Guillermo del Toro, Vanessa Taylor
THREE BILLBOARDS OUTSIDE EBBING, MISSOURI Martin McDonagh

• MEILLEUR SCÉNARIO ADAPTE

CALL ME BY YOUR NAME James Ivory
THE DEATH OF STALIN Armando Iannucci, Ian Martin, David Schneider
FILM STARS DON’T DIE IN LIVERPOOL Matt Greenhalgh
MOLLY’S GAME Aaron Sorkin
PADDINGTON 2 Simon Farnaby, Paul King

• MEILLEUR MUSIQUE DE FILM

BLADE RUNNER 2049 Benjamin Wallfisch, Hans Zimmer
DARKEST HOUR Dario Marianelli
DUNKIRK Hans Zimmer
PHANTOM THREAD Jonny Greenwood
THE SHAPE OF WATER Alexandre Desplat

• MEILLEURE PHOTOGRAPHIE

BLADE RUNNER 2049

DARKEST HOUR
DUNKIRK
THE SHAPE OF WATER
THREE BILLBOARDS OUTSIDE EBBING, MISSOURI

• MEILLEUR MONTAGE
BABY DRIVER
BLADE RUNNER 2049
DUNKIRK
THE SHAPE OF WATER
THREE BILLBOARDS OUTSIDE EBBING, MISSOURI

• MEILLEURS COSTUMES

BEAUTY AND THE BEAST
DARKEST HOUR
I, TONYA
PHANTOM THREAD
THE SHAPE OF WATER

• MEILLEURS DECORS

BEAUTY AND THE BEAST
BLADE RUNNER 2049
DARKEST HOUR
DUNKIRK
THE SHAPE OF WATER


• MEILLEURS MAQUILLAGE ET COIFFURE

BLADE RUNNER 2049
DARKEST HOUR
I, TONYA
VICTORIA & ABDUL
WONDER

• MEILLEUR SON
BABY DRIVER
BLADE RUNNER 2049
DUNKIRK
THE SHAPE OF WATER
STAR WARS: THE LAST JEDI

• MEILLEURS EFFETS SPECIAUX

BLADE RUNNER 2049
DUNKIRK
THE SHAPE OF WATER
STAR WARS: THE LAST JEDI
WAR FOR THE PLANET OF THE APES

• MEILLEUR COURT-METRAGE D'ANIMATION BRITANNIQUE

HAVE HEART
MAMOON
POLES APART

• MEILLEUR COURT-METRAGE BRITANNIQUE

AAMIR
COWBOY DAVE
A DROWNING MAN
WORK
WREN BOYS

• EE RISING STAR AWARD (nouveau talent élu par le public)
DANIEL KALUUYA
FLORENCE PUGH
JOSH O’CONNOR
TESSA THOMPSON
TIMOTHÉE CHALAMET

Décès d’Idrissa Ouédraogo (1954-2018): Ouagadougou en deuil

Posté par vincy, le 18 février 2018

Un des grands cinéastes africains est mort dimanche 18 février. Le réalisateur et producteur Idrissa Ouédraogo avait 64 ans, a annoncé l'Union nationale des cinéastes du Burkina dans un communiqué transmis à l'AFP. Réalisateur de dix longs métrages et d'une vingtaine de courts métrages, segments, séries télévisées documentaires, Idrissa Ouédraogo a été récompensé du Prix du meilleur court-métrage au FESPACO (Poko, 1981), du Prix Georges Sadoul (Yam daabo, 1986), d'un Prix FIPRESCI (Yaaba, 1989) et d'un Grand prix du jury au Festival de Cannes (Tilaï, 1990) et d'un Ours d'argent au Festival de Berlin (Samba Traoré, 1992) parmi ses multiples récompenses reçus de Tokyo à Melbourne en passant par Venise ou Milan. Tilai avait aussi été couronné par le Grand prix du Fespaco en 1991.

"Dans les années 90, j'avais montré deux de ses films : Yaaba et Titaï, pas parce qu'il était burkinabé mais parce qu'ils étaient beaux. Hier, Idrissa Ouedraogo a fermé les yeux pour de bon, au moment où se couchait le soleil qui a illuminé son oeuvre" a tweeté Gilles Jacob, ancien Président du Festival de Cannes.

Né le 21 janvier 1954 à Banfora (à l'époque en Haute Volta), et après ses études à l'université de Ouagadougou et à l'Institut africain d'études cinématographiques, Idrissa Ouédraogo a lancé en 1981 sa propre structure de production (Les films de l'Avenir) et entre à la Direction de la Production Cinématographique du Burkina-Faso.

Il poursuit sa formation en Russie puis à l'Idhec (ancienne Fémis) et à la Sorbonne en France. Après plusieurs courts et documentaires, il réalise son premier long, Yam Daabo (Le choix), récit sur l'exil d'un paysan du région pauvre du Sahel et sa part de sacrifices. Il a déjà posé les bases de son cinéma-vérité, mélange de documentaire et d'intimité, où les drames semblent être naturellement intégrés au quotidien. A cette époque, il expliquait: "Je déplore que l'image du tiers monde et de l'Afrique en particulier, véhiculée au cinema, à l'étranger et même par certains cinéastes africains, soit trop souvent exclusivement liée a la misère des hommes. La joie, l'amour, la haine, le combat optimiste qui sont des éléments universels, ne doivent pas être exclus."

Avec Yaaba (Grand-mère), il fait le lien entre un enfant joyeux et une vieille femme rejetée par les siens. Il fait le portrait des us et coutumes de sa région natale. Cette histoire initiatique est là encore l'occasion de montrer ce qui fait l'homme: son courage et sa lâcheté, sa bonté et ses conflits, une forme de bonheur toujours encadrée par un environnement violent.

Mais c'est avec Tilaï qu'il acquiert ses lettres noblesses et devient un cinéaste majeur. Il filme un dilemme tragique: un fils revient dans son village et apprend que son père a pris pour deuxième femme celle qui lui était promise. Entre traditions ancestrales et sentiments éternels, le réalisateur brise plusieurs tabous: le fils va avoir une liaison "incestueuse" avec cette deuxième épouse, autrefois sa fiancée. Le déshonneur atteint toute la famille et le père met fin à ses jours, tandis que l'un des frères est chargé de tuer le "maudit". La transgression est au cœur de ce beau film dont le titre signifie La Loi. Entre silences, soupirs, cris, honneurs et désirs, avec simplicité, Idrissa Ouédraogo continue d'explorer les liens flous qui unissent l'amour et la haine. Les paysages du Nord du Burkina Faso, aussi beaux qu'aride, brutaux que fascinants, étaient le parfait cadre de ses histoires, parlées dans la langue mooré du peuple Mossi. Le réalisateur aimait conserver et transmettre cette authenticité.

C'est ce qui, finalement, est en commun à travers toutes ses œuvres. "C'est un baobab qui s'est effondré", a réagi le comédien burkinabè Gérard Sanou, repris par l'AFP. "Il a raconté la vie de gens ordinaires, plantant sa caméra dans les zones rurales plutôt que dans les villes, il a su rendre la beauté des zones sahéliennes", explique Abdoulaye Dragoss Ouédraogo, cinéaste et professeur d'ethnologie visuelle à l'université de Bordeaux.

"C'était le maestro du cinéma burkinabè. C'est douloureux, une perte inestimable pour nous et pour l'Afrique toute entière", a déploré Rasmané Ouédraogo, l'un des principaux acteurs du film Tilaï. Pour le cinéaste et documentariste burkinabè Michel Zongo, "il a inspiré toute une génération de jeunes cinéastes africains. Il a réussi à partager nos histoires avec le monde".

Samba Traoré, sorti en 1993, coscénarisé avec Santiago Almigorena, s'aventure dans le film noir, où le héros à qui tout semble sourire, a construit son bonheur - un mariage et un bar - après un hold-up. Dès lors, le cinéaste continuera de s'ouvrir à d'autres cadres: les angoisses d'un jeune africain arrivé en France dans Le cri du cœur (avec Richard Bohringer), le rêve d'une vie meilleure pour deux amis du Zimbabwe (Kini et Adams), une fresque historique tragique dans La colère des Dieux, un drame sur les injustices et les inégalités sociales dans Kato Kato, ou encore le film collectif sur les attentats du 11 septembre avec un segment de 11'09'01.

La tragédie était sa matière, qu'elle soit signée d'un auteur antique grec ou de Césaire. Mais on se souviendra aussi de son engagement pour l'Afrique, son aspiration à l'émancipation d'un cinéma subjectif décolonisé. "Aujourd’hui le cinéma africain doit se poser beaucoup de questions sur la manière de faire des films avec les nouvelles technologies pour qu’elles soient compétitives, sur la manière de faire des films qui viennent de nous-mêmes, du fond de nous-mêmes. Quand on regarde tous les films qui sortent, je cherche ce que le continent peut apporter aux autres, surtout au sud du Sahara. Quand j’étais gamin, on me racontait plein de contes, les mythes africains, la mythologie, il y a plein de choses intéressantes que le monde ne connaît pas, et cinématographiquement qui auraient été très belles. Je sais pas si c’est par complexe, et pourquoi on n’arrive pas à donner aux autres quelque chose de vraiment propre à nous, notre passé même historique, la colonisation qui était brutale, sauvage."

"Le cinéma c’est un regard sur les choses, les êtres de la vie, un regard philosophique" disait-il, se désolant que la génération suivante n'ait pas pris le relais et que la sienne soit écartée des plateaux.

Berlin 2018 : Dovlatov d’Alexey German jr remet l’engagement politique au coeur de l’art

Posté par MpM, le 17 février 2018

Alexey German jr, déjà présent à la Berlinale en 2015 avec Under electric clouds, est de retour en compétition au 68e Festival de Berlin avec Dovlatov, une plongée enlevée et piquante dans le Leningrad artistique et intellectuel du début des années 70. Le film s’intéresse plus particulièrement à cinq jours dans la vie de Sergueï Dovlatov, futur grand écrivain russe de la fin du XXe siècle, qui est alors dans une impasse professionnelle. Aucun média officiel n’accepte en effet de publier ses textes, et il en est réduit à couvrir des événements patriotiques pour des journaux serviles obsédés par le fait d’être « positif » et donc conforme à la ligne du parti de l’époque.

La temporalité du film n'a bien sûr pas été choisie au hasard. Novembre, c'est le mois des commémorations de la Révolution d'octobre, qui occupent une part importante de la société civile. Alexey German jr filme ainsi un pays qui ne cesse de regarder en arrière, enlisé dans un passé dont il ne parvient pas à s'extraire. Au point mort, l'Union soviétique honore ses plus grands artistes (défunts) dans des reconstitutions de pacotille, mais délaisse les nouveaux, cantonnés à des travaux de propagande sans âme, à l'humiliation et à la faim, quand ce n'est à l'exil ou à la mort.

En parallèle, le réalisateur nous immerge dans la communauté artistique du Leningrad de l'époque, dont il fait ressortir la vitalité et la fougue vibrante. Ses portraits de groupe sont d'une étonnante fluidité, captés par une caméra aérienne qui fait oublier toute notion d'effort de mise en scène pour ne garder que cette impression de plans-séquences à la chorégraphie spontanée et naturelle. Les dialogues sont à l'unisson, aiguisés et percutants, qui révèlent à la fois l'intelligence des personnages et leur irrémédiable désespoir.

On retrouve au coeur du récit l'un des thèmes de prédilection d'Alexy German jr, celui de la droiture morale, à travers le formidable personnage de Dovlatov lui-même (magnifiquement incarné par le comédien Milan Maric), trublion cynique et désabusé qui refuse pourtant toute forme de compromission. Son combat est celui du Juste qui sait avoir raison contre tout le monde, esprit brillant persécuté par les médiocres et les faibles, et qui malgré tout continue à croire en son destin. On sent vibrer en lui  l'irrépressible nécessité d'écrire, coûte que coûte, et la douleur d'en être empêché.

Ce qui est peut-être le plus beau, dans ce biopic d'un genre très singulier, c'est qu'il pourrait aussi bien s'agir de l'histoire d'un individu lambda qui n'aurait jamais eu aucune reconnaissance. Dovlatov devient en effet la double allégorie de l'artiste maudit et de l'homme engagé, une figure éminemment symbolique de résistance à l'oppression et de persévérance obstinée. Un être prêt à tout perdre pour poursuivre le but qu'il s'est fixé, à la fois intime (s'accomplir en tant qu'écrivain) et politique (combattre le système en parlant de la réalité de son époque).

Ainsi, le film a beau être ancré dans un contexte et une période historique extrêmement particuliers, il est en réalité atemporel, et bénéficie d'une portée universelle qui le rend encore plus dense et puissant. On est tout simplement bouleversé par la vision de tant d'intelligence bafouée, comme par la démonstration sans ambiguïté de la manière dont l'art a toujours su répondre (avec panache et humour) à la bêtise et à la tyrannie. A l'image de son héros, Alexey German jr ne fait pas plus de compromis sur ses choix formels que sur ses positions idéologiques, et rappelle que si talent et succès ne vont pas forcément de pair, art et engagement politique, eux, peuvent parfois se combiner à la perfection.