Fan Bingbing doit 129M$ au fisc chinois

Posté par redaction, le 3 octobre 2018

Une semaine après les inquiétudes parues dans la presse internationale sur l'étrange disparition de l'a star chinoise Fan Bingbing, celle-ci est réapparue. Ce mercredi 3 octobre l'actrice a présenté ses excuses à ses fans comme au Parti communiste. On sait très bien comme ce genre d'acte de contrition est piloté par les autorités politiques. Un mélange de confessions sous contraintes et de propagande téléguidée, diffusé sur le réseau Weibo, implorant ses fans de lui pardonner ses erreur: "Sans les bonnes politiques du Parti et du pays, sans l'attention pleine d'amour des masses, il n'y aurait pas de Fan Bingbing". A côté les excuses publiques de Hugh Grant ou George Michael quand ils ont été surpris dans des relations sexuelles clandestines paraissent bien mièvres.

On apprend ainsi que le fisc chinois lui réclame 112 millions d'euros d'impôts, amendes et pénalités. Cette somme serait liée à la politique du double contrat (un officiel pas trop imposé et un officieux où elle est rémunérée de manière bien plus importante). Elle peut éviter les poursuites si elle règle la note dans le délai imparti. Ce qui n'empêchera pas certaines arrestations.

En révélant le litige réel entre le pouvoir chinois et l'actrice, le fisc dissipe le mystère autour de la disparition de la star, alors que les rumeurs s'emballaient. L'agence officielle Chine nouvelle a servi de relais et a confirmé qu'une personne a déjà été arrêtée dans le cadre de cette enquête pour dissimulation et destruction de documents comptables.

Depuis l'enquête sur Fan Bingbing, le fisc a décidé de procéder à une grande investigation dans les industries du spectacle.  Rappelons que l'actrice n'a jamais été citée nommément: ce sont les entreprises qu'elle possède qui étaient dans le viseur. Les intermédiaires (comptables, avocats, ...) seraient tous inquiétés actuellement.

Mise à jour le 4 octobre: L'actrice Fan Bingbing a été libérée aujourd'hui selon le South China Morning Post de Hong Kong. Ce qui prouve bien qu'elle était en détention, a priori dans une résidence de luxe près de Wuxi.

La disparition de l’actrice Fan Bing Bing en six étapes

Posté par vincy, le 21 septembre 2018

Les faits. A 37 ans. Fan Bing Bing est la plus grande star du cinéma chinois, la mieux payée de Chine (notamment en étant le visage de L'Oréal pour l'Asie) et la plus connue (membre du jury du Festival de Cannes). Lundi dernier, la chaîne thaïlandaise de duty-free King Power a annoncé qu'elle rompait son contrat d'ambassadrice globale de la marque. Mardi c'est une université chinoise qui publiait un palmarès de la " responsabilité sociale "  et elle a décroché la note de zéro. Cette descente aux enfers a commencé fin mai, quand l'animateur TV Cui Yongyuan a érévélé sur Weibo (le Twitter chinois) un extrait d'un contrat de la star où elle demande 1,25 million d'euros pour quatre jours de tournage. Puis il dévoile un autre contrat, pour la même prestation, établi à 6,2 millions d'euros. On appelle ça les contrat "yin et yang " où la partie la plus modeste est déclaré au fisc, mais pas l'autre.

Le soupçon. Depuis trois mois ce scandale de fraude fiscale a entraîné la perte de l'actrice. Le 6 septembre, le Securities Daily, journal financier chinois, annonce qu'elle est " placée sous contrôle " (une sorte de détention) et qu'elle "accepterait les décisions de justice". Ses cachets truqués ne sont ne serait que "la partie émergée de l'iceberg" puisque le média évoque des opérations de prêts illégaux et autres formes de corruption.

Pour l'exemple: Le gouvernement chinois, depuis quelques années, emprisonne et condamne les élites, politiques ou économiques, qui sont soupçonnées de corruption, pour l'exemple. Ils vont plus loin en arrêtant, kidnappant,  séquestrant des intellectuels, sans passer par la case justice, et en soutirant des aveux douteux. Le département de la propagande du parti a une aversion pour l'industrie du cinéma jugée cupide (alors même que le box office chinois explose et rapporte énormément de recettes au pays). Huayi Brothers, producteur de la plupart de ses films, a vu son cours de bourse chuter (32% en un jour). Le réalisateur de Cell 2, qui devait être son prochain film, Feng Xiaogang, a aussi été ciblé par les pouvoirs publics pour fraude fiscale.

Lynchage: Pour l'instant, il y a peu de réactions. Ce n'est pas la première fois qu'une vedette chinoise est l'objet de boycott ou de litiges avec le pouvoir. Beaucoup de chinois, par zèle ou patriotisme, la conspuent sur les réseaux, critiquant son jeu comme son mode de vie.

La disparition: L'actrice, dans un premier temps, choisit la défense en lançant ses avocats contre l'animateur TV à l'origine du scandale. Celui-ci s'excuse et accuse finalement son entourage. Début juillet, Fan Bingbing se rend aux Etats-Unis, à Londres, et  en Australie.  Depuis elle est revenue en Chine mi-juillet, mais son passeport a été confisqué. Son agent aurait lui aussi été arrêt. Finalement Fan Bing Bing est arrêtée, sans qu'on sache à quelle date. Et selon les sources chinoises, ce n'est que le début...

Le bannissement: Son nom a été retiré de l'affiche d'un film à venir. La série dans laquelle elle joue ne sera pas diffusée.  Finalement c'est un effacement de l'actrice qui se prépare. Le projet annoncé à Cannes, 355, avec Jessica Chastain, Marion Cotillard, Penelope Cruz, et Lupita Nyong’o, se fera finalement sans elle. Ce qui impacte Huayi Brothers une fois de plus, qui avait acquis les droits de distribution en Chine pour 20M$. Cell 2, suite de son succès de 2003 qui l'a fait décoller, ne verra sans doute pas le jour. Dans la version chinoise de Ash is Purest White, le dernier Jia Zhangke, elle a été coupée au montage. Le film L.O.R.D.: Lord of Ravaging Dynasties 2, qui devait sortir le 6 juillet, n'a finalement plus de date de sortie. The Perfect Blue, tournage achevé en mai, va être retourné avec un autre casting pour la remplacer. Quant à Air Strike, avec Bruce Willis, la sortie a été décalée du 17 août au 26 octobre, et son nom sur l'affiche effacé. Certains pensent que le film est retourné au montage pour la supprimer de l'écran.

160 cinéastes européens demandent une politique européenne ambitieuse pour le 7e art

Posté par vincy, le 19 février 2018

Droits d’auteur, piratage, territorialité, financement, fiscalité, diffusion : à l'occasion de l'intervention de la Commissaire européenne Mariya Gabriel au Festival de Berlin, plus de 160 cinéastes européens listent dans une tribune trilingue publiée sur le site de l'ARP (Société civile des auteurs réalisateurs-producteurs) leurs priorités à l’heure où la Commission de Bruxelles doit rendre des arbitrages sur sa politique médias.

"La culture européenne est la mise en commun de toutes les singularités, façons d’être et de voir, traditions, langues et histoires propres à chaque pays. A l’heure du Brexit et des nationalismes montants, l’Europe doit comprendre que sa force demeure dans sa capacité de dialogue entre union et identités spécifiques. C’est notre force et non pas notre faiblesse : ne pas comprendre cette dualité nous mènera à notre perte" rappelle cette tribune en préambule

"Cinéastes, nous portons le projet d’une véritable Europe de la création, guidée par l’Exception culturelle. Nous sommes convaincus que le numérique est une chance immense pour la création et la circulation des œuvres : la diversité peut ainsi être exposée dans chaque Etat-Membre, auprès de tous les spectateurs. Il n’y a pas de petit ou grand état européen de la création ; il y a une formidable richesse de regards" expliquent les signataires, parmi lesquels les frères Dardenne, Costa Gavras, Claude Lelouch, Abderrahmane Sissako, Agnès Joaui, Cédric Klapisch, Euzhan Palcy, Michel Ocelot, Bertrand Tavernier, Fatih Akin, Joachim Trier, Bela Tarr, Cristian Mungiu, Isabel Coixet, Ursula Meier, John Boorman, Ken Loach...

Ils affirment qu'"Une grande Europe de la Création est possible si nous affirmons, au cœur de l’économie numérique, la défense de droits fondamentaux, et un partage de valeurs équilibré entre tous les acteurs de la chaîne."

Droit d'auteur et piratage

Pour eux, "le projet de directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique est une occasion unique d’assurer aux auteurs une rémunération juste, proportionnelle et inaliénable lorsque leurs films et œuvres audiovisuelles sont regardés sur des plateformes numériques. Il est temps de mettre en place un mécanisme européen qui garantisse aux auteurs une juste rémunération pour l’exploitation à la demande de leurs œuvres partout en Europe."

"Une plateforme ou un diffuseur qui tire profit de la diffusion d’une œuvre ne peut en aucun cas s’exonérer de contribuer au financement de la création. Dans le cadre de la directive sur les Services de Médias Audiovisuels (SMA), assurons-nous que chaque acteur qui diffuse des œuvres pour les spectateurs d’un Etat-Membre, par quelque mode que ce soit (plateforme, télévision payante ou en clair, hertzien ou numérique, etc.), obéisse impérativement aux règles de ce pays" exigent-ils, réaffirmant par la même occasion que "le principe du pays de destination permettra à chaque Etat-Membre de définir librement l’investissement de tous les acteurs (y compris les plateformes) dans la production d’œuvres nationales, et de conduire ainsi sa politique culturelle au service de la diversité des œuvres. Par ailleurs, le taux de 30% d’œuvres européennes dans les catalogues des plateformes numériques – inscrit dans cette révision de la directive, reste un plancher, laissant aux Etats-Membres toute la latitude de fixer un seuil plus élevé."

Signes inquiétants

"Nous défendons par ailleurs l’idée d’une Europe respectueuse du principe de territorialité, qui refuse qu’une œuvre soit diffusée sur des territoires pour lesquels les droits n’ont pas été acquis. Dans le cadre du règlement Câble-Satellite, garantissons aux créateurs, et aux cinématographies les plus fragiles, les moyens nécessaires au financement de leurs œuvres et combattons toute stratégie de contournement" attendent les producteurs, cinéastes et comédiens auteurs de ce texte.

Ils rappellent, en matière de financement que le programme de financement européen Media "est déjà un des plus petits programmes financés par la Commission européenne et le seul consacré à notre secteur" et "pourraient être encore réduits". "Conscients de son soutien déterminant, tant pour les films que pour les publics qui les découvrent, renforçons et pérennisons ce programme emblématique de l’attachement européen au cinéma" demandent-ils.

Dans le même temps, ils remarquent que les GAFAN (Google, Amazon, Facebook, Apple, Netflix) et certains acteurs globaux accentuent "la concurrence déloyale entre acteurs vertueux et non vertueux". Ils réclament que "L’Europe, si elle veut garder une place majeure dans l’avenir, se doit d’inventer des lois adaptées au monde numérique d’aujourd’hui, afin d’imposer des règles équitables : dans le cas contraire, cela reviendrait à créer, au sein même de l’Union, des « paradis anti-culturels », chevaux de Troie d’une culture dominante."

La quadrature du cercle de la diffusion

Enfin, pour que "Le cinéma, dans toute sa diversité, (irriguent) l’ensemble des territoires", ils proposent d'inventer "un outil européen de référencement des œuvres" qui "encouragerait la circulation des films dans les Etats-Membres où ils seraient encore indisponibles plusieurs années après la sortie initiale." "Travaillons avec les plateformes. Encourageons-les à éditorialiser le cinéma européen et à le valoriser auprès des millions de spectateurs des Etats-Membres. Sur ces services, lors des transpositions en lois nationales, soyons ambitieux et allons, pays par pays, au-delà du plancher de 30% d’œuvres européennes bientôt imposé par la réglementation européenne".

Ils souhaiteraient aussi la création d'un "Festival des cinéastes européens présentant les œuvres primées de chaque pays, et voyageant d’une capitale européenne à l’autre, faisons la promotion de nos plus belles créations. Invitons le public à plébisciter la diversité européenne."

Cette mobilisation n'est pas nouvelle. Régulièrement, à Berlin, Cannes (la dernière date de mai dernier, avec une grande partie de signataires en commun et de nombreuses revendications similaires), ou Venise, les professionnels lancent des appels, des pistes de réflexions, des tribunes pour faire pression sur une Europe relativement absente sur le plan des idées et souvent soumises à des acteurs transnationaux. Le programme Europe Créative ne pèse que 1,46 milliard d'euros pour la période 2014-2020. Rappelons que Netflix va investir 8 milliards de dollars cette année pour la création de contenus originaux.

Austria / Autriche

Barbara Albert

Belgium / Belgique

Dominique Abel, Lucas Belvaux, Jean-Pierre Dardenne, Luc Dardenne, Fiona Gordon, Frédéric Sojcher, Felix Van Groeningen

Bulgaria / Bulgarie

Vera Chandelle, Kristina Grozeva, Tonislav Hristov, Kamen Kalev, Vesela Kazakova, Veselka Kiryakova, Stefan Komandarev, Dimitar Kotsev-Shosho, Milko Lazarov, Tsvetodar Markov, Ilian Metev, Mina Mileva, Elitsa Petkova, Ralitsa Petrova, Mila Turajlic, Vania Rainova, Mira Staleva, Petar Valchanov, Pavel Vesnakov, Maya Vitkova-Kosev, Rositsa Vulkanova

Croatia / Croatie

Hrvoje Hribar, Danilo Šerbedžija

Cyprus / Chypre

Tonia Mishiali

Denmark / Danemark

Ole Christian Madsen, Annette K. Olesen, Christina Rosendahl, Birgitte Stærmose

Finland / Finlande

Saara Saarela

France

Jean Achache, Jérémy Banster, Patricia Bardon, Luc Béraud, Charles Berling, Julie Bertuccelli, Gérard Bitton, Sophie Blondy, Bertrand Bonello, Patrick Braoudé, Catherine Breillat, Dominique Cabrera, Christian Carion, Jean-Michel Carré, Olivier Casas, Elie Chouraqui, Etienne Comar, Catherine Corsini, Dominique Crèvecoeur, Audrey Dana, Edouard Deluc, Claire Denis, Dante Desarthe, Léon Desclozeaux, Jérôme Diamant-Berger, Evelyne Dress, Jacques Fansten, Joël Farges, Frédéric Fonteyne, Philippe Garrel, Costa Gavras, Jacques-Rémy Girerd, Eugène Green, Robert Guédiguian, Agnès Jaoui, Thomas Jenkoe, Lou Jeunet, Arthur Joffé, Pierre Jolivet, Cédric Klapisch, Gérard Krawczyk, Jeanne Labrune, Eric Lartigau, Michel Leclerc, Philippe Le Guay, Claude Lelouch, Jean Marboeuf, Nathalie Marchak, Tonie Marshall, Radu Mihaileanu, Jonathan Millet, Steve Moreau, Philippe Muyl, Olivier Nakache, Michel Ocelot, Euzhan Palcy, Martin Provost, Raphaël Rebibo, Christophe Ruggia, Céline Sallette, Jean-Paul Salomé, Tessa-Louise Salomé, Pierre Salvadori, Manuel Sanchez, Jean-Pierre Sauné, Pierre Schoeller, Arnaud Sélignac, Joël Séria, Charlotte Silvera, Abderrahmane Sissako, Bertrand Tavernier, Cécile Telerman, Danièle Thompson, Eric Tolédano, Arnaud Viard

Germany / Allemagne

Fatih Akin, Emily Atef, Reza Bahar, Peter Carpentier, Nicole Gerhard, Jochen Greve, Brita Knöller, Fabian Massah, Hans-Christian Schmid, Tobias Siebert

Greece / Grèce

Elina Psykou

Hungary / Hongrie

Bela Tarr

Iceland / Islande

Benedikt Erlingsson, Fridrik Thor Fridriksson

Italy / Italie

Giovanni Amelio, Francesca Archibugi, Marco Bellocchio, Cristina Comencini , Emanuele Crialese, Matteo Garrone, Fabio Grassadonia, Luca Guadagnino, Daniele Luchetti, Francesca Marciano, Mario Martone, Ivano de Matteo, Sandro Petraglia, Antonio Piazza, Giuseppe Piccioni, Marco Risi, Gabriele Salvatores, Valia Santella, Stefano Sardo, Andrea Segre, Alberto Simone, Silvio Soldini, Massimo Spano, Marco Tullio Giordana, Carlo Verdone, Daniele Vicari

Latvia / Lettonie

Ieva Romanova

Lithuania / Lituanie

Arunas Matelis

Netherlands / Pays-Bas

Martijn Winkler

Norway / Norvège

Sverre Pedersen, Joachim Trier

Poland / Pologne

Karolina Bielawska, Jacek Bromski, Agnieszka Holland, Malgorzata Szumowska

Romania / Roumanie

Catalin Mitulescu, Cristian Mungiu, Corneliu Porumboiu

Slovenia / Slovénie

Klemen Dvornik

Spain / Espagne

Juan Antonio Bayona, Pablo Berger, Isabel Coixet, José-Luis Cuerda, José Luís García Sánchez, Manuel Gutierrez Aragón, Javier Rebollo, Emilio Ruiz Barrachina, David Trueba, Fernando Trueba, Felipe Vega

Sweden / Suède

Elisabet Gustafsson, Christina Olofson

Switzerland / Suisse

Ursula Meier

United-Kingdom / Royaume-Uni

John Boorman, Simon Brook, Dan Clifton, Stephen Frears, Ken Loach, Rebecca O’Brien, Sir Alan Parker, Paul Powell, Charles Sturridge, Carole Tongue, Susanna White

Jean-Jacques Annaud piégé par les « Paradise Papers »

Posté par vincy, le 8 novembre 2017

Un an et demi après les Panama Papers qui avait démontré l'évasion fiscale des frères Almodovar (malgré eux), les Paradise Papers ont révélé ce mercredi 8 novembre que le réalisateur français Jean-Jacques Annaud avait utilisé durant vingt ans un processus d'optimisation fiscale en plaçant plus d'1,2 million d'euros dans divers pays (des îles anglo-normandes à Hong Kong en passant par les Caraïbes). La situation serait régularisée depuis un mois, au moment où les médias se sont ouvertement intéressés à son cas, avant la révélation publique de ce dossier international qui touche aussi bien Shakira que la Reine d'Angleterre, un proche de Justin Trudeau qu'un ministre de Donald Trump, Bono de U2 que des multinationales comme Apple ou Nike.

"Contacté début octobre pour répondre aux interrogations du Monde et de Radio France, le cinéaste a rapidement demandé à ses nouveaux avocats fiscalistes de régulariser sa situation : les avoirs, qui ont fait le tour du monde, auraient finalement été déclarés au fisc français le 12 octobre, « afin d’éviter toute discussion et d’être dans la plus totale transparence ». Les avocats plaident la méconnaissance de leur client vis-à-vis de la fiscalité, sans nier que Jean-Jacques Annaud était informé du montage et de ses conséquences fiscales" expliquent les deux médias. Maître Eric Delloye résume: "Jean-Jacques Annaud est un bon cinéaste mais ce n'est pas un fiscaliste."

"Les Paradise Papers sont une nouvelle enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses 96 médias partenaires, dont Le Monde. Ces révélations s’appuient sur une fuite de documents initialement transmis, en 2016, au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung par une source anonyme. Cette nouvelle enquête permet de lever le voile sur les mécanismes sophistiqués d’optimisation fiscale dont profitent les multinationales et les grandes fortunes mondiales" soit 13,5 millions de documents du cabinet international d’avocats Appleby, basé aux Bermudes, 566 000 documents internes du cabinet Asiaciti Trust, installé à Singapour et 6,2 millions de documents issus des registres confidentiels des sociétés de dix-neuf paradis fiscaux aux Caraïbes, à Malte, au Liban et dans les îles de l'Océan Pacifique.

Il faut remonter à 1997. Ecran Noir était né depuis un an. Jean-Jacques Annaud avenait de tourner Sept ans au Tibet, avec Brad Pitt, en Argentine. Le 30 septembre de cette année-là, le réalisateur, dix jours avant la sortie américaine du film, créé  un trust discrétionnaire baptisé Los Condores Trust, sur l’île anglo-normande de Guernesey. Le nom provient de l'unique hôtel de la ville argentine où se tournait la super-production.

Le salaire du cinéaste non imposé

Cette structure, très opaque et "ouverte par la Royal Bank of Scotland", "abrite une société écran nommée Uspallata Limited". "La singulière concordance des noms et des dates laisse à penser que l’argent du trust provient de la rémunération du réalisateur. Ses avocats ont bien affirmé que l’argent « a été versé sur ce compte (…) non pas à l’initiative de M. Annaud, mais à l’initiative du studio de cinéma »" détaille le quotidien français. À France Inter, l'avocat se fait plus précis. "À partir des années 1995, Monsieur Annaud a été lié à un studio de cinéma qui dépend du Groupe Sony, et notamment de Columbia. Ce studio lui a versé une rémunération, en lui indiquant qu'il devait la percevoir à travers une structure montée par l'avocat-conseil du studio. L'argent a donc été versé sur ce compte détenu par l'intermédiaire d'un trust, qui n'était donc pas créé à l'initiative de Monsieur Annaud, mais à la demande du studio, qui souhaitait le rémunérer de cette manière. Je ne pense pas qu'il y ait eu d'autres rémunérations, je n'ai pas d'informations précises sur ce point."

En 2003, la société Uspallata se délocalise aux îles Vierges britanniqueset son compte en banque est transféré à Ansbacher, banque privée située aux Bahamas. Le trust Los Condores se délocalise aux îles Caïmans en juillet 2007. "La firme Appleby en prend alors la gestion" précise Le Monde. Soit 1,2 million d’euros dans le portefeuille.

Alors qu'il tourne Le dernier Loup en Chine, avec des coproducteurs chinois, Jean-Jacques Annaud ouvre en 2014 une nouvelle société à Hongkong, Rising Dragon, qui sera renommée plus tard Ginkgo Holdings Limited. "Un an plus tard, le trust Los Condores est dissous ; puis c’est au tour de la société Uspallata, en février 2017".

La peur d'être pris en flagrant délit

Le cinéaste a, entre temps, vidé le compte en banque et transféré 1,15 million d'euros vers le compte hongkongais de la société Ginkgo Holdings. "Le reste des fonds atterrit sur les comptes de Calico Entertainment LLC, une société californienne de Jean-Jacques Annaud, succursale d’une autre société installée dans l’Etat américain du Delaware, connu pour ses largesses fiscales" révèle l'enquête.

Pour le quotidien français, cette réorganisation du patrimoine coïncide "avec l’avalanche des scandales offshore qui déferlent sur la place publique (« Offshore Leaks », « SwissLeaks »…)" et par la mise en place "d’un échange automatique des données entre les banques et les Etats pour lutter contre l’évasion fiscale". Autrement dit, les gestionnaires prennent peur.

Car avec le courrier du Monde et de France Inter, le réalisateur, qui tourne actuellement l'adaptation de L'affaire Harry Québert au Canada, demande une régularisation. "Saisi de votre courrier, Monsieur Annaud a souhaité que nous étudiions précisément ses obligations fiscales, afin de vérifier la conformité de sa situation fiscale vis-à-vis de l'administration fiscale française. Afin d'éviter toute discussion, nous avons, au cours du mois d'octobre 2017, transmis l'ensemble des informations à l'administration fiscale. Nous leur avons dit que nous étions en train de procéder à un audit de la situation fiscale de Monsieur Annaud, et que nous voulions, en toute transparence, signaler l'existence de ces structures et de ce compte bancaire détenu à l'étranger" avoue son avocat.

Il le défend en renvoyant la balle dans le camp des banquiers qui "géraient ses comptes qui, ne voulant pas avoir la moindre responsabilité, ont préféré transférer ses avoirs" vers des juridictions plus conciliantes avec l'optimisation fiscale. Une forme d'aveu: responsable mais pas coupable.

Edito: Netflix, le réveil de la force

Posté par redaction, le 8 juin 2017

Il est évident que Netflix transforme le paysage cinématographique. On peut se désoler de voir que de grands cinéastes et de bons films ne soient jamais diffusés en salles. Mais après tout, cela fait longtemps que la télévision a attiré les Scorsese, Spielberg et autres Soderbergh pour produire/réaliser des séries. Et n'oublions pas le pionnier, Hitchcock. A Cannes, le débat a envahit la Croisette, au point, parfois, d'en oublier la qualité des films sélectionnés.

Est-ce si révolutionnaire que de vouloir produire des films exclusifs pour fidéliser ses abonnés et en attirer de nouveaux? HBO l'a déjà fait. Canal +, de par sa convention avec l'Etat, s'arroge le droit d'être la première fenêtre de diffusion après le passage en salles et en location vidéo. C'est de bonne guerre. Ce qui choquerait avec Netflix, c'est l'impossibilité de voir Okja, War Machine ou The Meyerowitz Stories au cinéma.  Bizarrement, on ne se pose pas la question pour toutes les séries B qui débarquent directement en vidéo à la demande (e-cinéma, c'est plus chic), sans passer par la case salles. Ces films en e-cinéma ont le droit à des projections presse. Netflix fera sans doute de même prochainement, afin d'accentuer la visibilité de ses productions "starisées".

Le débat autour de la diffusion n'est pas que français et l'intérêt pour Netflix n'est pas réservé qu'aux professionnels américains.

Ainsi, hier, Naomi Kawase s'est dite prête à travailler avec Netflix: "Si une firme comme Netflix ou toute autre société de production étrangère a des moyens pour travailler avec une réalisatrice qui a acquis une réputation internationale, ce peut être une façon pour moi d'exprimer librement ce que je veux", ajoutant qu'elle ne regretterait pas "une telle occasion" qui est, selon elle "plutôt comme un défi à relever". Pour les auteurs, les plateformes de SVàD sont une véritable aubaine alors que le marché art et essai se contracte en nombre de spectateurs dans le monde entier et que les financements sont de plus en plus difficiles à trouver pour des scénarios originaux.

La réalisatrice japonaise a commencé à réfléchir à cette possibilité quand son confrère sud-coréen Bong Joon-ho, dont Okja, en compétition à Cannes et financé par Netflix (50M$), s'est réjoui de la liberté créative qu'il a eu. "Il dit que Netflix lui donne tout l'argent dont il a besoin et n'intervient pas", explique Kawase, rappelant que le cinéma d'auteur japonais est plus que fragile et focalisé sur les productions populaires, souvent adaptées de mangas, romans ou séries TV. Hirokazu Kore-eda ne dit pas autre chose: "Plus de réalisateurs vont à l'avenir vouloir travailler avec Netflix ou Amazon. S'il reste comme il est, tout le secteur va couler." Plutôt que de constater le déclin du cinéma d'auteur japonais, les cinéastes se tournent vers l'étranger pour financer leurs œuvres.

De l'autre coté de la mer du Japon, le cinéma est florissant en Corée du sud. Il sait se protéger, se financer, s'exporter. En Corée du sud (mais aussi aux Etats-Unis et au Royaume Uni), Okja bénéficie même d'une exception: le droit d'être sorti en salles. Mais, comme pour la France, les professionnels ont décidé de se rebeller contre Netflix, producteur et diffuseur du film. Une grande chaîne sud-coréenne de salles de cinéma, CGV, premier réseau du pays avec 1000 écrans, a annoncé qu'elle ne diffuserait pas ce film très attendu si Netflix le mettait en ligne simultanément sur sa plateforme. Il y a deux ans, la suite de Tigre et Dragon avait suscité la même réaction de la part des circuits américains, qui avaient boycotté le film.

Le problème Netflix est ailleurs

Dans l'histoire, ce sont les spectateurs qui sont pris en otage: soit ils ne peuvent pas voir le film en salles, soit ils sont contraints de s'abonner à la plateforme. Cela peut faire le beau jeu des pirates. Toujours est-il qu'il va falloir rapidement revoir la chronologie des médias. Après tout, en tant que producteur, Netflix a le droit de choisir sa stratégie de distribution, quitte à exclure définitivement la salle de cinéma dans un premier temps (le cinéma serait alors une sorte de deuxième fenêtre, après le streaming exclusif). Pour le cinéphile comme le cinéaste, le "produit" reste un film de cinéma. Qu'on le voit chez soi, en salle, dans un festival ou à bord d'un avion, ça ne change pas grand chose, hormis la sensation, le plaisir que l'on peut éprouver selon le lieu (sous la couette, avec un public, avec les artistes, ou pour combler l'ennui).

Mais avant de se focaliser sur ce combat multi-supports (que les médias ont depuis longtemps intégré), peut-être faut-il mieux se concentrer sur le vrai problème qu'induit la force des plateformes de type Netflix. Il serait beaucoup plus judicieux d'obliger ces géants américains à payer leurs impôts dans le pays où ils sont diffusés, en fonction du chiffre d'affaires dégagé par leurs abonnements locaux. Car ce n'est pas tant le modèle économique d'un Netflix qui pose problème (en effet, s'ils investissent dans des films, on ne peut être que ravis). Mais c'est bien le contournement des règles fiscales et la distorsion de concurrence par rapport aux producteurs-diffuseurs nationaux qui pénaliseront à terme l'industrie cinématographique de pays comme la France, la Corée du sud ou l'Argentine, dont les éco-systèmes ont permis depuis des années de résister à l'hégémonie culturelle américaine.

Ce n'est pas simplement défendre notre exception culturelle que de réclamer des droits et des devoirs à un géant transnational au-dessus des Lois, mais il s'agit bien de protéger notre modèle culturel, qui passe par une solidarité fiscale. Canal + a l'obligation de financer des productions françaises. Pour toucher des aides du CNC, il faut être installé en France. Il n'y a aucune raison que Netflix profite du marché français sans contreparties bénéficiant à tout le secteur.

Edito: Clair de lune

Posté par redaction, le 2 février 2017

Il est clair que l'actualité n'est pas focalisée sur le cinéma ces temps-ci. Les feuilletons palpitants sont ailleurs, du côté de la Maison-Blanche où un milliardaire joue les Dr Folamour, de la course présidentielle française où on assiste à une sorte de télé-réalité éliminant presque tous les quinze jours tel ou tel candidat, ou encore sur les terrains de handball ou de tennis où des vétérans réalisent des exploits spectaculaires comme dans un bon feel-good movie qui fait triompher les outsiders.

Il est clair aussi que le cinéma d'auteur retrouve de la vigueur en cet hiver tempêtueux et capricieux. Les fans de blockbusters devront un peu patienter. Entre comédies françaises et films d'animation tous publics, les cartons critiques sont aussi des succès publics. La valeur Oscar a encore la cote. La La Land, qui a fait sombrer certains dans l'ennui (on l'avait dit, le scénario est le talon d'Achille de ce gracieux drame musical) et enchanter les autres, est un triomphe en salles. Manchester by the Sea continue de drainer suffisamment de spectateurs sur la longueur pour espérer atteindre les 500000 entrées en France, malgré un sujet - le deuil - pas franchement joyeux. Cette semaine, le cinéma américain nous offre deux œuvres plus que marquantes. D'abord un film puissant et prégnant, Moonlight. Ce portrait de l'autre Amérique, celle des minorités, qui commence comme un Spike Lee pour s'achever, bouleversant sur un film à la Ang Lee (qui sort cette semaine Billy Lynn, nous y reviendrons ce week-end), est bouleversant par sa pudeur et sa justesse. Un film audacieux qui n'aura pas l'Oscar. On ne compte plus le nombre de films excellents, récompensés un peu partout, qui n'ont pas eu la statuette simplement parce qu'il s'agissait d'une histoire d'amour entre deux personnes du même sexe. Moonlight a davantage d'intensité dramatique que La La Land, mais Hollywood préfèrera la glorification de son miroir. Another Day in the Sun.

Entre ombres et lumières, l'autre film de la semaine est Jackie. Filmé par un cinéaste chilien, d'ores et déjà dans la cour des grands, ce portrait de femme-épouse-mère-veuve-first lady n'est pas vraiment américain même si son sujet l'est, même si son financement l'est aussi en partie. Outre le style singulier de ce non-biopic, il s'agit d'une véritable réflexion entre le réel et la représentation, ce que l'on vit et ce que l'on montre. Jackie est incarné par une israélo-américaine, réalisé par un sud-américain, coproduit par des sociétés françaises (Wild Bunch et Why Not), et tourné aux deux tiers en France, dans la Cité du cinéma de Luc Besson.

Car il est tout aussi clair que la réforme du crédit d'impôt international a multiplié les tournages en France, rapportant 152M€ l'an dernier (trois fois plus qu'en 2015) et bénéficiant à 36 projets (au lieu de 22 en 2015). Christopher Nolan, Bollywood, les studios illumination, Cinquante nuances..., et peut-être le sixième Mission:Impossible: la France devient sexy pour tourner. Il était moins cher de reconstituer la Maison-Blanche de l'époque JFK à Saint-Denis qu'à Londres, Prague, Los Angeles ou Montréal.

En cette période un peu chaotique et assombrie, ce genre de nouvelles apporte un rayon de lune salvateur.

Almodovar: les malheurs de Julieta

Posté par vincy, le 12 avril 2016

Pauvre Pedro Almodovar. Cette semaine sera sans doute la pire de sa carrière. Outre que son nom apparaît dans les #PanamaPapers, son vingtième film, Julieta, a fait un bide au box office espagnol ce week-end lors de sa sortie. Selon Rentrak Spain, le film a récolté 585 000 € pour son premier week-end (79 000 entrées) et se fait même battre par Kiki, el amor se hace, qui est sorti la semaine précédente.

Il est ainsi loin des Amants passagers (1,9M€), des Etreintes brisées (912K€), de Volver (1,8M€), de Parle avec elle (1,74M€) et de La piel que habito (1,2M€). Certes la plupart de ces film a eu le droit à une distribution un peu plus massives. Julieta n'est sorti que dans 185 salles quand les autres films cités avaient eu accès à plus de 220 écrans. Paradoxalement, cela lui permet d'avoir la meilleure moyenne par copie de la semaine. Mais au final, Almodovar ne battra pas son trio de tête (Femmes au bord de la crise de nerfs, 3,3M d'entrées, Tout sur ma mère, 2,6M d'entrées et Talons Aiguilles, 2M d'entrées).

Agustin protège Pedro

Julieta a sans doute souffert du souvenir mitigé des Amants passagers et de critiques divisées à son encontre. Mais c'est surtout les révélations autour de la présence de son nom dans les Panama Papers qui ont perturbé le marketing du film. Suite à cette révélation, le cinéaste a annulé sa présence à l'avant-première du film, à la conférence de presse et à ses interviews promotionnelles. Pedro et son frère Agustin, qui gère leur société de production, El Deseo (El Clan, Les nouveaux sauvages), sont en effet mentionnés parmi les noms de possesseurs de comptes offshore gérés par la firme panaméenne Mossack Fonseca. Durant trois ans, entre 1911 et 1994, alors que les films de Pedro Almodovar ont commencé à avoir un succès mondial, El Deseo détenait ne société offshore domiciliée dans les îles Vierges britanniques et gérée par Mossack Fonseca, Glen Valley Corporation. Ça la fout mal pour un cinéaste de gauche qui a toujours vilipendé la corruption et le manque d'argent dans la culture.

On ne sait pas combien d'argent a transité par cette société échappant aux impôts, ni à quoi a pu servir ces sommes. Agustin Almodovar a compris l'impact de ces révélations sur l'image de son frère, la carrière de son film et bien sûr la psychologie du cinéaste, atteint de plein fouet. Après un premier communiqué laconique et clinique, à la manière d'un David Cameron, Agustin a donc rédigé un second communiqué pour endosser toute la responsabilité de l'affaire: "Dès les premiers moments de la constitution d’El Deseo, (…) j’ai pris en charge la gestion de l’entreprise et lui s’est dédié aux aspects créatifs." En 1991, sous la recommandation de ses conseillers, "face à une possible expansion internationale de l’entreprise", il a créé cette société offshore. "Cependant, on a laissé mourir la société sans activité car elle ne collait pas avec notre manière de travailler", précise-t-il, en assurant être en règle "avec toutes les obligations fiscales."

Julieta sort en France le 18 mai. Mais le rayon de soleil pour Almodovar pourrait arriver dès jeudi, avec sa présence dans la compétition du Festival de Cannes.

26 cinéastes réclament des moyens pour mieux diffuser leurs films en Europe

Posté par redaction, le 9 avril 2015

À Rome, aujourd'hui, à l'occasion d'une table ronde organisée en marge du festival du Nouveau cinéma français, des cinéastes européens ont lancé un appel pour favoriser la diffusion de leurs oeuvres dans toute l'Europe. ils réclament, notamment, la taxation des acteurs d'internet qu'ils considèrent désormais comme des acteurs majeurs de l'industrie du cinéma, principalement pour la diffusion des films. Ils reprennent l'idée de la ministre de la Culture et de la Communication française Fleur Pellerin de taxer la bande passante ou le débit sur le réseau pour ces diffuseurs. Ils souhaitent également une meilleure protection des salles de cinéma existantes et des moyens pour en créer de nouvelles. Ils veulent aussi la création d'une charte de meilleure diffusion des oeuvres sur les chaînes de télévision publique.

"Il n'est pas normal que toutes les cinématographies d'Europe peinent à être accessibles pour tous les publics", écrivent ces 26 cinéastes, dont le Français Michel Hazanavicius, les Belges Jean-Pierre et Luc Dardenne, le Britannique Ken Loach, l'Italien Paolo Sorrentino, l'israélien Amos Gitaï, le hongrois éla Tarr, le norvégien Joachim Trer ou encore l'Allemand Wim Wenders.

Selon eux, il est urgent de prendre des mesures "afin que l'Europe soit irriguée de tout son cinéma".

"L'espoir d'une plateforme de diffusion du cinéma indépendant européen doit être un objectif crédible" peut-on lire dans ce texte. Ils estiment qu'il est urgent de favoriser l'émergence d'acteurs européens capables de concurrencer les géants mondiaux en matière de diffusion de films à la demande (VOD), pointant du doigt Amazon, Apple, Netflix....  A ce titre, ils n'ont pas tort de s'inquiéter de la dépendance du cinéma européen à des groupes américains dorénavant transnationaux.

Pour cela, les cinéastes interpellent la Commission européenne qui doit ambitionner de faire pression sur ces géants mondiaux du Net pour qu'ils se soumettent à "la fiscalité et l'économie de la création" européenne.

"Nous devons d'urgence imaginer une fiscalité culturelle pour les acteurs mondialisés de la diffusion" expliquent-ils.

Les premiers signataires sont Lucas Belvaux, Emanuele Crialese, Jean-Pierre Dardenne, Luc Dardenne, Dante Desarthe, Matteo Garrone, Costa Gavras, Amos Gitaï, Michel Hazanavicius, Kamen Kalev, Gérard Krawczyk, Paul Laverty, Mike Leigh, Ken Loach, Daniele Luchetti, Ursula Meier, Cristian Mungiu, Rebecca O’Brien, Jean-Paul Salomé, Volker Schlöndorff, Maurizio Sciarra, Ettore Scola, Abderrahmane Sissako, Paolo Sorrentino, Béla Tarr, Joachim Trier, Fernando Trueba, Wim Wenders.

L'intégralité du texte:

"Les discussions qui ont animé cette première Journée de Rome témoignent de la même urgence : alors que les fondations mêmes du droit d’auteur sont remises en question par ceux qui, en Europe, n’y voient à tort qu’un obstacle à la circulation des œuvres, nous voulons redessiner, en profondeur, la manière d’exposer notre cinéma et de le faire circuler entre nos pays.

Nos films témoignent, chacun à leur façon, à travers nos regards de cinéastes, de la vision à la fois la plus personnelle et la plus collective de l’Europe, dans toutes ses complexités : ses violences et ses joies, ses caricatures et ses réalités, ses conflits et ses unités, ses absurdités et ses rêves…

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Emma Thompson fait la grève de l’impôt

Posté par vincy, le 27 février 2015

emma thompsonDans la presse britannique, l'annonce a fait l'effet d'une petite bombe à fragmentation. Emma Thompson, actrice multi-oscarisée, et son époux, Greg Wise, ont déclaré ne pas vouloir payer leurs impôts tant que les personnes impliquées dans le scandale financier de la banque HSBC (#SwissLeaks) ne seront pas jugées.

"J'arrête de payer mes impôts jusqu'à ce que chacun paye les siens" a expliqué Greg Wise à l'Evening Standard, ajoutant qu'il considère les impôts comme essentiels à la vie publique. Prêt à risquer la prison, le couple, écoeuré par les révélations sur les pratiques de fraude fiscale organisées par la banque HSBC, espère que leur exemple sera suivi et que ce mouvement de rébellion fiscale conduira le gouvernement britannique à poursuivre les responsables de cette fraude mondiale.

Plus d’un millier de clients britanniques de HSBC sont soupçonnés de fraude fiscale et le gouvernement britannique n'a, pour l'instant, pris aucune disposition juridique ou administrative pour récupérer l'argent manquant.

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Lire aussi: Le prix à payer, documentaire implacable qui dénonce les salles affaires de type #SwissLeaks

Parmi ses 80 mesures, le rapport de Pierre Lescure met fin à l’Hadopi

Posté par redaction, le 13 mai 2013

rapport mission pierre lescure80 propositions après des mois de consultations. Pierre Lescure a rendu aujourd'hui son rapport "Acte II de l'exception culturelle à l"ère du numérique". Globalement, le rapport a décidé de remettre l'usager au coeur de la réflexion, tout en actant que le numérique était un environnement évolutif mais incontournable pour la culture. "Nous avons imaginé des propositions qui visent à adapter notre système aux évolutions technologiques à 3 / 5 ans" expliquait-il en conférence de presse ce midi au Ministère de la culture. Le postulat de base est simple :"le numérique est désormais le mode principal d'exploitation des oeuvres". Lescure, ancien patron de Canal +, a par ailleurs confié que la participation des internautes au débat avait interpellé les membres de la mission et fait bousculer quelques idées.

Sans vouloir détailler les 80 propositions (vous pouvez télécharger le rapport : tome 1 et tome 2), certaines retiennent notre attention pour le cinéma. La plus symbolique est évidemment la fin attendue de la coûteuse HADOPI. Le CSA, qui doit être complètement réformé prochainement, récupérera la mission d'observation des pratiques culturelles en ligne. Les sanctions liées au piratage ne seront plus d'ordre pénal et l'amende sera forfaitaire et raisonnable (60€). Surtout, la sanction suprême (suspension de l'accès web, alors qu'il est considéré comme un droit universel) est abolie.

Une importante partie du rapport s'attache à détailler une révision complète du calcul des droits d'auteur, en évoquant le principe de rémunération équitable, et la gestion de le leur rémunération.

Mais Pierre Lescure indique bien que le piratage a d'autres causes : délais de diffusion des séries, accès opaque à la VàD, inégalité fiscale entre les géants de la diffusion (Apple, Amazon, Netflix...) et les éditeurs de contenus...

Passage en revue de quelques mesures, qui ne sont que des préconisations et non des lois. Tout cela sera discuté au Parlement d'ici les prochaines semaines :

- Oeuvres au potentiel commercial limité mais à fort intérêt patrimonial : mobiliser les ressources du compte de soutien à la transition numérique, sous la forme de subvention. Certaines oeuvres se prêtant mal à cette classification, la mission préconise un mix de subventions et d'avances remboursables, ce que fait déjà le CNC.

- Révolution dans la chronologie des médias qui incite au piratage : avancer ainsi à 3 mois (au lieu de 6) la fenêtre de la Vidéo à la demande et à 18 mois (au lieu de 36) la fenêtre de la VàDA.

- Défendre auprès de l'Union européenne l'inclusion des aides à la diffusion et à la distribution dans les aides à la promotion de la culture.

- Rétablir l'égalité fiscale entre les diffuseurs basés en France et les autres, en privilégiant l'acte de consommation sur le territoire national.

- Mobiliser les SOFICA au service du développement de la VàD.

- Assujettir à la taxe VàD les services de VàD dont le siège est installé hors de France et qui s'adressent aux publics français.

- Instaurer une taxe sur les appareils connectés permettant de stocker ou lire des contenus culturels (smartphones, tablettes, liseuses, ordinateurs...).

- Clarifier le cadre juridique applicable à la finance participative et le statut fiscal des contributions collectées par les plateformes de crowdfunding.

- Réorienter la politique de sanctions vers ceux qui profitent et s'enrichissent grâce au piratage. "Des systèmes criminels et mafieux" selon Lescure, qui parle de lutte contre la contrefaçon. Pour cela la mission propose d'étendre la compétence du service Cyberdouanes en intégrant les atteintes à la propriété intellectuelle.

- Redéfinir l'exception pédagogique pour y intégrer les usages numériques et inciter les enseignants à mettre à disposition les ressources numériques qu'ils produisent sous licence Creative Commons. Encourager plus généralement les licences libres, notamment si les projets bénéficient de d'aides publiques.

- Amender le code de la propriété intellectuelle pour permettre aux auteurs d'autoriser par avance l'adaptation de leurs oeuvres et de les verser par anticipation dans le domaine public.

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Les trois objectifs de la mission :
- Dans le souci de défendre les créateurs, la mission devait produire des conclusions sur les termes d’une lutte efficace contre les pratiques illégales, mise en place avec nos partenaires européens et qui tienne compte des attentes et des pratiques sociales.
- La régulation des flux financiers associés à la création impliquait aussi de définir les mécanismes qui garantiront un équilibre meilleur et éviteront la concentration progressive de la valeur créée par les échanges, du côté des opérateurs les plus puissants.
- La prise en compte des attentes des publics et la volonté d’offrir un accès du numérique au plus grand nombre supposaient de faire des propositions sur le financement de la numérisation, sur l’adaptation de l’offre à la demande, sur les mécanismes de financement de la création, sur les modalités de gestion des droits.

Les grandes lignes du rapport Lescure :
A. ACCES DES PUBLICS AUX ŒUVRES ET OFFRE CULTURELLE EN LIGNE
1. Dynamiser l’offre en améliorant la disponibilité numérique des oeuvres
2. Favoriser le développement d’un tissu de services culturels numériques innovants et porteurs de diversité culturelle
3. Proposer aux publics une offre abordable, ergonomique et respectueuse de leurs droits

B. REMUNERATION DES CREATEURS ET FINANCEMENT DE LA CREATION
1. Garantir la rémunération des créateurs au titre de l’exploitation numérique de leurs oeuvres
2. Renforcer la contribution des acteurs numériques au financement de la création
3. Soutenir les nouvelles formes créatives et les nouveaux modes de financement

C. PROTECTION ET ADAPTATION DES DROITS DE PROPRIETE INTELLECTUELLE
1. Réorienter la lutte contre le piratage en direction de la contrefaçon lucrative et alléger le dispositif de réponse graduée
2. Adapter le droit de la propriété intellectuelle aux usages numériques
3. Faciliter l’accès aux métadonnées