Venise 2017 : Abdellatif Kechiche, amours et marivaudage avec « Mektoub, my love »

Posté par kristofy, le 8 septembre 2017

C’était en mai 2013 : Abdellatif Kechiche gagne une Palme d’or au festival de Cannes avec La Vie d'Adèle - Chapitres 1 et 2, d’ailleurs presque une triple palme puisque les actrices Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos remportent aussi chacune ce prix. Puis quelques semaines avant la sortie du film en octobre un curieuse polémique survient au travers d'une interview des actrices: Léa Seydoux aurait dit que le tournage a été horrible et qu’elle ne souhaitait pas refaire un film avec lui. Kechiche piqué dans son ego réplique en disant que Seydoux est une privilégiée d’un système, bref le genre de clash ridicule qui fait le sel des news sur le web, avide de répercuter une polémique. Sachant qu’il filme des longues prises à répétition et qu’il y avait du sexe et des larmes, c’est pourtant assez compréhensible d'imaginer que le tournage était peut-être pénible…

L’orgueil de Kéchiche qui ne supporte peu la critique à propos de son tournage (accompagné des protestations de techniciens…) est blessé. Il va même estimer le film sali, alors que personne n’a désavoué la qualité de cette Palme amplement méritée. Mais le mal est fait. Un seul César (pour Exarchopoulos): sa grande œuvre va se faire humilier à la cérémonie glorifiante du cinéma français par Les garçons et Guillaume à table!, pas vraiment du même niveau.

Mai 2017 : Le nouveau film de Abdellatif Kechiche ne sera pas sélectionné à Cannes, pour cause de problème juridique avec un partenaire financier. Le contrat était de livrer un film mais au final, le cinéaste décide en salle de montage d'en faire plusieurs.

Mektoub, my love (chant 1) vient donc d’être présenté en compétition à Venise.

Est-ce qu’il y a matière à une quelconque polémique? Non, comme pour le film précédent.

Est-ce que Abdellatif Kechiche a toujours le même défaut de parfois trop étirer des séquences sans couper et d’être toujours un excellent directeur d’acteurs ? Oui, le film dure 180 minutes (!) et il aurait sans doute gagné à être raccourci, peut-être d’une vingtaine de minutes. Mais il lui faut vraiment cette longue durée de trois heures pour dérouler toute son amplitude.

Les acteurs, et surtout les actrices, sont encore une fois formidables : en particulier les nouvelles têtes de Shaïn Boumedine, Ophélie Bau, Lou Luttiau, Alexia Chardard, et aussi les déjà connus Salim Kechiouche et Hafsia Herzi (leur deuxième film avec lui).

Est-ce que ce film peut prétendre à un Lion d’or où une autre récompense ? Oui, la fin ouverte de Mektoub, my love (chant 1) constitue bien un film entier et solide, sans suite. Une nouvelle fois Abdellatif Kechiche s’inspire d’un livre, La Blessure, la vraie de François Bégaudeau, qu’il a adapté très librement en changeant les âges, les lieux, l’époque.

Ici, le film débute en 1994 dans la ville de Sète le temps d’un été. Amine arrive de Paris pour des vacances avec sa famille, il surprend Ophélie et Tony en train de faire l’amour, il reste derrière une fenêtre à les regarder avant de sonner pour parler à Ophélie, après le départ de Tony. Alors qu’il y a éventuel projet de mariage avec un militaire, celle-ci avoue qu’elle le voit depuis longtemps. Puis Tony et Amine iront à la plage, ils draguent Charlotte et Céline. Celles-ci vont alors sortir avec eux et leurs amis, Charlotte s’amourache de Tony qui lui va de fille en fille, Céline papillonne entre plusieurs garçons et filles, Amine attire plusieurs filles sans rien faire car il semble aimer quelqu'un en secret… Le film se déroule principalement entre plage, restaurant et boite de nuit. A la bande de jeunes se mélange la génération précédente (mère, oncle, tante…). Abdellatif Kechiche reprend quelques motifs typiques de ses films précédents, par exemple une longue scène de sexe, certains corps sont filmés de manière érotisée (en particulier Ophélie Bau et Lou Luttiau). Comme souvent dans son cinéma, il filme aussi une très longue séquence où les jeunes dansent. Mektoub, my love (chant 1) se révèle être autant un marivaudage de dialogues et de corps qu’un épisode de la chronique d’une famille.

Abdellatif Kechiche laisse paraître une certaine sérénité pour ce nouveau chapitre de sa filmographie : "On a tourné 2 volets, et j’envisage de tourner une 3ème partie après Venise. Dans le prochain film des nœuds dramatiques noués dans celui-ci vont se dénouer. Je suis le producteur de mon film, c’est moi qui décide de sa durée. Mektoub c’est le destin, le destin est souvent lié à l’amour. A part Hafsia et Salim, pour les autres acteurs c’est leur première fois à l’écran. Il y a eu un long processus pour chercher les meilleures actrices pour ce film, et je suis fasciné par leur don. Le tournage a été agréable, fluide, léger. Pour ce qui est de la représentation du corps féminin il n’y a rien de machiste dans mon approche, je montre des femmes fortes, puissantes et libres. Le roman a été une source d’inspiration, et le processus d’écriture a duré très longtemps, j’ai changé des choses mais il n’y a rien d’autobiographique. Les années 90 représentent la fin d’un siècle, pour comprendre le présent c’est important de comprendre le passé. Dans les années 80 et 90 je crois que les gens vivaient de manière plus harmonieuse. J’ai essayé de diluer le discours, si discours il y a. Le film se déroule de manière impressionniste, je préfère qu’on reçoive ce film plutôt que le raisonner."

Edito: Combat épique

Posté par redaction, le 20 juillet 2017

C'est finalement le grand conflit de l'année: Netflix face au cinéma. Christopher Nolan, dont le film Dunkerque semble être un chant du cygne pour le 70mm, a donné son avis sur le sujet lors d'une interview à Indiewire.

"Netflix a une étrange répugnance à soutenir la sortie de films au cinéma. Ils ont cette politique insensée de rendre tout simultanément disponible en ligne lors de la sortie, ce qui est un modèle évidemment intenable pour des sorties au cinéma. Du coup, ils ne sont même pas dans le jeu, et je pense qu’ils ratent une énorme opportunité." Il prend l'exemple d'Amazon: "On peut remarquer qu’Amazon est très satisfait de ne pas faire la même erreur:lLes cinémas ont une fenêtre de tir de 90 jours avant de passer en streaming . C'est un modèle parfaitement viable." Pour lui, "l'investissement que Netflix met dans des réalisateurs et des projets intéressants serait plus admirable si ce n'était pas utilisé comme un étrange moyen d'influence pour écarter les salles de cinéma. C'est vain."

Pourtant Netflix continue de grandir avec son modèle. Le cap des 100 millions d'abonnés dans le monde a été dépassé. Martin Scorsese est l'une de leurs dernières grosses prises, avec The Irishman qui réunit Al Pacino, Robert de Niro, Harvey Keitel et Joe Pesci. Dernière gros coup qui date d'hier: Sandra Bullock avec son projet Bird Box, réalisé par Susanne Bier. Deux projets auxquels s'ajoutent Bright avec Will Smith, Outlaw King avec Chris Pine et le prochain Dan Gilroy avec Jake Gyllenhaal.

La technique de carnet de chèque semble fonctionner. Même sans l'attrait des salles de cinéma (et donc des Oscars, du box office, etc...).

En France, face à un Canal + affaiblit, Orange a décidé de passer à la vitesse supérieure. En créant la semaine dernière Orange Content, qui rassemble Orange Studio et les chaînes OCS, le groupe cherche à investir davantage dans le cinéma et les séries (100 millions d'euros sur 5 ans pour les séries tout de même), que ce soit en coproduisant ou en acquérant les droits de distribution. Pour ça Orange va renforcer son partenariat avec Canal +, mais aussi signer un accord exclusif avec UGC Images. Par ailleurs, Orange Studio ouvrira à la rentrée 2017 un nouveau département de ventes internationales et UGC Images lui confiera la commercialisation internationale de l’ensemble de ses films dès l’an prochain.

Cela suffira-t-il? Tout est question d'offre. Si les films et les séries sont à la hauteur, le consommateur aura le choix entre une offre européenne et la plateforme Netflix plutôt américaine. Netflix a juste une longueur d'avance (mais un cash-flow en berne). Et avec tous ces concurrents, le téléspectateurs s'y perd (et ne peut pas forcément payer plusieurs abonnements). Ce qui séduit chez Netflix, malgré son obsession de l'exclusivité qui sort les films du circuit classique, c'est bien de choisir les plus grands auteurs, les plus grandes stars. Et ça fonctionne: Netflix comme l'un de ses films, Okja, étaient parmi les 10 films et sujets les plus mentionnés sur les réseaux sociaux durant le Festival de Cannes.

Claude Lelouch: « Netflix est un peu ce que fait Emmanuel Macron en politique »

Posté par vincy, le 27 juin 2017

Il n'y a pas que les cinéastes américains ou asiatiques qui sont attirés par le cash de Netflix. Dans un entretien au JDD dimanche dernier, Claude Lelouch va à rebrousse-poils de la profession en France. Pour lui, Netflix "est un peu ce que fait Emmanuel Macron en politique", précisant sa pensée: "Il a balayé les préjugés pour aller chercher les bonnes idées là où elles sont, à droite comme à gauche. Alors, si la plus belle histoire du monde est mise en scène par un gars produit par Netflix ou Amazon, il faut la voir." "D'autant que le pouvoir financier de ces plateformes est colossal»." ajoute-t-il.

"En l'occurrence, on ne peut pas dire non à la nouveauté" estime le réalisateur, qui produit ses films depuis ses débuts, jusqu'à parfois les distribuer lui-même.

Le cinéma "ne peut plus se permettre de se prendre pour une star"

Il va assez loin dans son raisonnement, constatant l'état désastreux du marché pour les films d'auteur et la difficulté à produire/financer des films non formatés. "Aujourd'hui, ce qui pourrait sauver Fellini ou Antonioni, c'est Netflix. Je le pense vraiment, explique le réalisateur Claude Lelouch.

C'est d'ailleurs ce qui est intéressant de la part du cinéaste multi-récompensé. Sa quête d'indépendance l'a conduit à être totalement libre, dépendant essentiellement et financièrement des recettes de ses succès comme de ses flops. En moyenne, un Lelouch (il y en pas loin de 50) c'est un million d'entrées en France (avec 6 films au dessus des 2 millions de spectateurs).

Le changement, c'est maintenant?

Lui qui n'est pas abonné à la plateforme, reconnaît qu'il doit "batailler pour trouver les financements" de son prochain film, après le bide de Chacun sa vie en mars (qui faisait suite à Un + Une en 2015, son plus gros succès depuis 1996). Pour Lelouch, le cinéma "doit aller chercher de l'argent ailleurs que dans les structures actuelles. Il ne peut plus se permettre de se prendre pour une star." Il n'exclut pas de travailler pour Netflix, avec plaisir: "Si je travaille en toute liberté" précise-t-il.

En clair, Claude Lelouch, 79 ans, patron des Films 13, Palme d'or, Oscar du meilleur scénario et Golden Globes du meilleur film étranger, pense qu'il est temps de changer. "La chronologie des médias est démodée" affirme-t-il et, comme toujours un peu provocateur à l'égard de ses pairs (est-ce pour ça que Lelouch n'a jamais été césarisé même pour l'honneur?), il trouve "formidable" que le festival de Cannes sélectionne deux films ne sortant pas en salles.

Ron Howard aux commandes du spin-off sur Han Solo

Posté par vincy, le 22 juin 2017

Phil Lord et Chris Miller à peine virés du spin-off de l'univers Star Wars sur la jeunesse d'Han Solo, les producteurs ont misé sur une vieille valeur sûre d'Hollywood, Ron Howard.

La productrice Kathleen Kennedy a assumé l'un des clashs les plus retentissants de ces derniers mois en renvoyant les deux cinéastes en plein tournage du film, toujours prévu dans les salles en mai 2018.

Les "différences créatives" n'ont pas pu être résolues, alors que le film avait déjà bien amorcé sa phase de production. Auteurs de Tempête de boulettes géantes, 21 Jump Street (et sa suite) et de La Grande aventure Lego, ils ont insufflé un ton frais, décalé, parfois provocateur à des films qui ont su être largement rentables. On imagine qu'ils avaient été choisis pour ça: leur insolence et leur sens de l'ironie collaient parfaitement au personnage créé par Harrison Ford dans la trilogie originelle de George Lucas.

Malheureusement, l'alchimie n'a pas fonctionné entre la productrice issue de l'écurie Spielberg et les deux jeunes cinéastes. Les personnalités ne s'accordaient pas. Kathleen Kennedy ne comprenaient pas leur manière de réaliser le film, tout simplement. Et eux ne comprenaient pas pourquoi ils n'étaient pas libres de faire du cinéma comme à leur habitude, sans le contrôle permanent de la productrice.

C'est assez rare, en tout cas depuis que les cinéastes ne sont plus des employés de studios, qu'un réalisateur (et ici une paire de cinéastes même) soit viré en plein milieu du tournage.

Ron Howard a donc du pain sur la planche. La presse professionnelle s'inquiète de dépassements budgétaires (réécritures, scènes à refaire). Car, il reste plusieurs semaines de tournage, et quelques semaines devraient être ajoutées pour refaire des prises plus tard dans l'année. Et qui, au final, sera crédité au générique? Les réalisateurs initiaux ou / et le remplaçant? La décision pourrait revenir à la Director's Guild of America.

Ron Howard a déjà travaillé pour LucasFilm (Willow, 1988). Mais son dernier succès date de 2009... Aux commandes d'un film qu'il réalise sur commande, le réalisateur devrait être un simple chef de projet chargé de mettre en images le scénario de Lawrence Kasdan. Ce qui conviendra parfaitement à Kathleen Kennedy qui veut être seule à décider.

Dans ce film, Alden Ehrenreich incarne le personnage, jeune, créé par Harrison Ford il y a 40 ans. Donald Glover, Thandie Newton, Woody Harrelson, Michael K. Williams et Emilia Clarke complètent le casting.

Daily Cannes: Des proies et pas de régime

Posté par cynthia, le 24 mai 2017

Si mardi la croisette était en fête pour ses 70 ans, le Festival a repris sa compétition avec le film de la discorde: Les Proies de Coppola. L'attaque est un peu provocatrice car cette année, aucun film ne fait vraiment l'unanimité si on en croit les étoiles ou les émojis des critiques. Et puis on préfère la discorde sur un film comme celui-là qu'un gros ennui devant un autre ou un #WTF! à la fin du suivant.

La conférence de presse: Les Proies de Sofia Coppola

Comme le dit si bien l'un de nos twettos favoris: "Les français ont détesté et les anglais ont adoré..." A Ecran Noir nous devons être anglais (je le savais!), car nous avons plutôt apprécié ce drame sudiste signée Sofia Coppola. De mon côté, j'ai aussi adoré revoir Sofia et Kirsten (Dunst), ensemble de nouveau.

Depuis Virgin Suicides, présenté en 1999 à la Quinzaine, elles ont tourné Marie-Antoinette (en compétition à Cannes), elles sont incontestablement liées. "Sofia me demanderait de faire un film sur l'annuaire, je le ferais!" explique Kirsten Dunst à la conférence de presse du film.

Accessoirement nous avons une fois de plus bavé sur Colin Farrell... Deuxième film en compétition avec l'acteur (et deuxième film avec Kidman comme partenaire). On se retrouve un peu dans la peau du personnage d'Elle Fanning dans le film. "Mon personnage est obsédé par lui" confie l'actrice de The Neon Demon avec humour. On la comprend.

Focus: Kirsten Dunst

Parce qu'elle nous avait bien manquée, parce qu'elle s'est mise à pleurer sur le tapis rouge (émotion de remonter les marches), notre focus est consacré à la belle Américaine.

Chouchoute de l'Amérique dans les années 1990 et 2000, Kirsten Dunst a su allier les grosses productions telles que Spider-man (la version de Sam Raimi), Entretien avec un vampire (elle a eu son premier baiser avec Brad Pitt..., oui il y a pire) et les films d'auteurs comme Melancolia de Lars Van Trier. Habituée des marches cannoises, Kirsten Dunst a une nouvelle fois brillé au festival avec son mentor Sofia Coppola. Ingénue et religieuse dans le film Les Proies, l'actrice a su imposer son jeu entre la star montante et fraîche (Elle Fanning) et la diva de nouveau en vogue (Nicole Kidman).

Le poids des régimes

Elle a su aussi tenir tête à la cinéaste. De là est née la polémique autour de son poids. La réalisatrice souhaitait que son actrice fétiche perde du poids pour le film et l'actrice dernière refusa. Kirsten montre l'exemple, celui de ne pas satisfaire le diktat des tailles de guêpe. Si beaucoup de comédiennes se plaignent qu'à la moindre ride, les projets se raréfient, le problème du poids des actrices n'est jamais ouvertement abordé. Si elles ne sont pas dans les mensurations de mannequin, elles ne seraient bonnes que pour la comédie.

Or, on constate qu'hormis la jeune comédienne d'Okja et l'épouse de Rodin, quasiment toutes les actrices sont très minces, voire maigres. Et le constat est le même sur le tapis rouge...

Mais bon, tout ça pour dire qu'on ne voit pas quels kilos doit perdre Kirsten Dunst, en la regardant dans sa robe bleue sur les marches.

Le tweet du jour

Celui là il nous a fait sourire. C'est le tweet un peu méchant, un peu injuste. Mais quand on sort de 2h23 de film russe pas vraiment convaincant, après une semaine de projections, il donne envie de lire Voici. Le Monde diplo, désolé, mais nos cerveaux sont trop bouillis.

Daily Cannes: Netflix, Tilda, incident technique et polémiques

Posté par cynthia, le 19 mai 2017

Troisième jour sur la croisette, et alors que le week-end pointe son nez et que le soleil s'installe, Cannes continue de briller.

Le film événement de la journée est Okja de Bong Joon-Ho avec Tilda Swinton, Paul Dano, Lily Collins, Shirley Henderson et Jake Gyllenhaal entre autres. Produit par Netflix, le film du réalisateur de Snowpiercer a fait couler beaucoup d'encre sur la croisette. Tout d'abord, le film s'est fait huer tel un boucher sur un marché végétarien, non pas à cause de son contenu (le film est juste magnifique) mais à cause d'un gros souci technique pendant la projection de presse! Le Festival a du s'excuser. C'était la deuxième fois en deux jours que la séance du matin commençait avec beaucoup de retard (la veille, la lenteur de la sécurité avait contraint les organisateurs à projeter le film avec 15 minutes de retard). Pour rappel, le géant Netflix refuse de sortir le film en salle et prévoit de le mettre à la disposition des abonnés dès le 28 juin. ce qui provoque depuis un mois une polémique à la française.

La Conférence de presse du jour: Okja de Bong Joon-ho

"Nous ne sommes pas là pour remporter des prix!" s'est écriée Tilda Swinton lors de la conférence de presse. L'actrice et coproductrice du film s'est empressée de défendre la politique de Netflix, suivie par le reste de l'équipe.
"À Cannes, il y a de la place pour tout le monde!": Tilda Swinton annonce la couleur. Face à la polémique autour de Netflix, la conférence de presse était tournée sur le fait que vous verrez ce film sur vos petits écrans et pas sur les grands.

Un journaliste a démarré sur les chapeaux de roues en demandant quelles liberté la plateforme américaine avait laissé au réalisateur sud-coréen (et bim, let's go!). "Ils m'ont soutenu, c'était un budget très important et j'ai eu une liberté totale […] je pouvais mettre autant de sang que je voulais!"

Concernant le discours du président du jury, aka Almodovar, le réalisateur du controversé (malgré lui) Okja explique sa joie de savoir que Pedro Almodovar voit son film: "Je suis un très grand fan de son œuvre. Alors le fait qu'il parle de Okja, que ce soit en bien ou en mal, je suis très honoré!" Bong Joon-Ho a ajouté sur cette fameuse polémique que "Netflix a ses propres règles et que dès le début dans les négociations [...]" le réalisateur "a voulu qu'il soit présenté sur grand écran en Corée du Sud et également dans quelques pays et je remercie cette flexibilité de Netflix ainsi que le festival de Cannes d'accepter de montrer ce long-métrage."

La grande Tilda a ajouté qu'il 'y a "plein de films très beaux, très réussis qui ne sont jamais vus en salle, des milliers de productions projetées à Cannes, qui ne sont jamais vues sur un grand écran." Elle a ajouté que "Netflix a donné à Bong Joon-Ho la possibilité de faire en sorte que sa vision devienne réalité!".

Le focus du jour : Tilda Swinton

Du haut de son 1m79, cette actrice, productrice, artiste et ex-mannequin britannique a fait chavirer la croisette une nouvelle fois (elle faisait même partie du jury en 2015) ce vendredi soir. Elle a enflammé la Croisette. Loin des bimbos hollywoodiennes, Swinton a cette capacité qu'ont les grandes du septième art (Cate Blanchett ou Glenn Close) à se métamorphoser mentalement et physiquement pour un rôle. Véritable caméléon, Tilda excelle dans les rôles de bad woman, qu'on adore détester!! C'est en Cruella, dans un double-rôle, qu'elle épate dans Okja.

Le tweet du jour

Nous le devons à Films de lover qui nous rassure avec les supers films (sarcasme) qui nous attendent en salles le jour où les abonnés Netflix découvriront Okja. #OnRigole

Daily Cannes: Sécurité, Marion, Monica, Pedro et un tweet

Posté par cynthia, le 17 mai 2017

Des caméras partout, un système de sécurité renforcé, Cannes est non seulement sous le signe du soleil mais aussi sous le signe de la protection cette année. 10 mois après les attentats de Nice, la ville aux mille étoiles a fortement investi dans sa protection afin d’accueillir comme il se doit les célébrités et autres fans présents tous les ans sur la croisette.

Cette 70e édition du festival démarre sous surveillance et sous le signe du glamour avec Monica Bellucci qui préside les festivités en tant que maîtresse de cérémonie et l'équipe du nouvel Arnaud Desplechin qui illumine le premier tapis rouge.

La conférence de presse du jour: Les fantômes d' Ismaël d'Arnaud Desplechin.

L'équipe du film a illuminé le photocall et la conférence de presse. Si Marion brille, Charlotte Gainsbourg nous a scotchés dans sa tenue sublime mais "casual" ou comment l'actrice/chanteuse a su allier le naturel à la croisette. La star, c'est évidemment Marion Cotillard, qui, bonne joueuse est également admirative de Charlotte Gainsbourg. "Les actrices de ma génération sont toutes sous le charme de Charlotte Gainsbourg".
Côté boulot, l'ancienne Môme affirme ne pas avoir de méthode de travail et qu'elle a su interpréter son personnage en ayant appris sa respiration. Un peu psychédélique comme réponse. Connaître le corps pour pénétrer l'âme, jolie formule.
Lors de cette conférence, la question "femme" a été abordée: "J'ai rencontré plus d'hommes que de femmes dans ma carrière... J'aimerais bien que ça change d'ailleurs (rires) même si j'ai tourné avec des acteurs merveilleux, j'aimerais beaucoup tourner avec plus de femmes".

Focus: Marion Cotillard et Monica Bellucci

L'une est italienne, l'autre est française, chacune n'est plus à présenter et connaît Cannes par cœur. Ces deux brunettes arpentent la Croisette avec glamour depuis longtemps: Monica huit fois, Marion sept. Les deux actrices font limite parties du décor.
Maîtresse de cérémonie pour la seconde fois, Monica Bellucci confie à la télévision française que cette année nous allons beaucoup parler de femmes grâce aux 12 réalisatrices en sélection officielle en ajoutant que le réalisateur Almodovar, président du jury est "un amoureux des femmes". Vous l'aurez compris, la femme est à l'honneur cette année (et tant mieux).
L'actrice italienne confie même son attachement en tant que professionnelle à Cannes: "Mon parcours cinématographique ne serait pas le même sans Cannes."
Côté Cotillard: elle confie la pression qu'elle ressent à chaque fois qu'elle monte les marches: "J'ai trouvé mes marques dans l'exercice du red carpet comme on l'appelle, mais à Cannes c'est particulier...à chaque fois j'ai le trac."

Deux films en moins pour la Palme d'or?

"Ce serait un énorme paradoxe que la Palme d'or ou un autre prix à un film ne puisse pas être vu en salles" a déclaré Pedro Almodovar lors de la conférence de presse du jury, pointant du doigt The Meyerowitz Stories de l'Américain Noah Baumbach et Okja du Sud-Coréen Bong Joon-Ho, tous deux en compétition et qui ne sont prévus que pour une diffusion sur Netflix. Le cinéaste a ajouté: "Tout ça ne signifie pas que je ne suis pas ouvert aux nouvelles technologies ou à tout ce que ces technologies nous apportent". "A mon sens, ce qui est déterminant lorsqu'on voit un film pour la première fois, c'est la taille de l'écran: la taille ne devrait pas être plus petite que la chaise sur laquelle vous êtes assis. Il faut vraiment avoir le sentiment d'être humble et petit par rapport au grand écran". Il épaissit la couche en précisant:"La seule solution est que les nouvelles plateformes acceptent les règles en place (...) et notamment aussi toutes les règles financières ou fiscales".

L'instant tweet

Parce que sur Twitter on trouve des perles rares, on a décidé en ce 70e festival de Cannes de vous faire partager un tweet pertinent, drôle (ou les deux) par jour.

Aujourd'hui c'est @CliveTwo qui mélange politique et cinéma en taclant Manuel Walls et son extrême dévotion à vouloir être partout.

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Cannes 2017: deux versions des « Fantômes d’Ismaël »

Posté par vincy, le 17 mai 2017

Les Fantômes d’Ismaël est le film d'ouverture du Festival de Cannes. Il sort simultanément en salles en France. Etrangement, le film d'Arnaud Desplechin sort dans deux versions. L'une, officielle, présentée à Cannes et dans les cinémas, qui dure 1h54. L'autre de 2h10 qui sera distribué dans une dizaine de salles françaises, dont le cinéma du Panthéon à Paris, qui appartient au producteur, Why Not, et à l'étranger (même si le distributeur américain n'a pas encore choisi quelle version il diffusera). Sans aucun doute, on découvrira cette version allongée en DVD/VàD/Blue Ray.

C'est étrange car Arnaud Desplechin n'a jamais mégoté sur la durée de ses films, qui peuvent s'étirer de 2h15 à 3h. Et quand on voit la durée des blockbusters hollywoodiens, souvent au dessus des 2h voire des 2h30, on ne peut pas dire que le nombre de minutes cause un échec populaire.

C'est aussi étrange parce que les deux versions sont assumées par le réalisateur. La "version longue" donnerait des clefs aux nombreuses intrigues du film, et notamment au film dans le film (avec Louis Garrel). Il y a déjà eu des précédents, y compris à Cannes avec Grace de Monaco.

Arnaud Desplechin a confié que c'était une proposition de son producteur. Pour lui il n'y a pas deux films, mais une version originale, la plus logue, et une version en salles, l'une plus intellectuelle, l'autre plus sentimentale.

Cannes 2017: Okja et The Meyerowitz Stories en compétition malgré tout

Posté par redaction, le 10 mai 2017

Cannes remet les pendules à l'heure. The Meyerowitz Stories de Noah Baumbach et Okja de Bong Joon-ho seront bien projetés en compétition, malgré leur absence de sorties en salles.

Le communiqué du Festival met les point sur les "i". "Une rumeur a récemment couru sur une possible exclusion de la Sélection officielle des films réalisés par Noah Baumbach et Bong Joon Ho, films largement financés par la société Netflix. Le Festival de Cannes tient à redire que, comme il l’a annoncé le 13 avril dernier, ces deux films seront bien présentés en Sélection officielle et en compétition."

Conscient de l'inquiétude suscitée par l’absence de sortie en France de ces films en salles (lire aussi notre article du 15 avril), le Festival de Cannes rappelle avoir "demandé en vain à Netflix d’accepter que ces deux films puissent rencontrer les spectateurs des salles françaises et pas uniquement ses seuls abonnés. De fait, il déplore qu’aucun accord n’ait pu être trouvé."

Nouveaux venus, nouvelles règles

Mais, à juste titre, Cannes s'enorgueillit "d’accueillir un nouvel opérateur ayant décidé d’investir dans le cinéma mais veut redire tout son soutien au mode d’exploitation traditionnel du cinéma en France et dans le monde."

Cela induit quand même un changement profond pour les années à venir puisque, "après consultation de ses administrateurs, le Festival de Cannes a décidé d’adapter son règlement à cette situation jusque-là inédite : dorénavant, tout film qui souhaitera concourir en compétition à Cannes devra préalablement s’engager à être distribué dans les salles françaises. Cette disposition nouvelle s’appliquera dès l’édition 2018 du Festival International du Film de Cannes."

Cannes 2017: Netflix en compétition, ça ne plaît pas à tout le monde…

Posté par vincy, le 15 avril 2017

Ce n'est pas une surprise. Est-ce une polémique? Toujours est-il que la sélection en compétition du 70e Festival de Cannes de deux films qui seront diffusés sur Netflix provoquent des grincements de dents.

The Meyerowitz Stories de Noah Baumbach a été acquis par Netflix en tant que simple diffuseur il y a une semaine, avant le dévoilement de la sélection. Okja de Bong Joon-ho est une production Netflix et prévu dès le départ un produit 5 étoiles (Tilda Swinton, Jake Gyllenhaal au casting) pour la plateforme en SVOD.

Respect des règles

La Fédération nationale des cinémas français (FNCF) a envoyé un communiqué pour exprimer son inquiétude. "Si les salles de cinémas ne remettent pas en cause la liberté de programmation du premier festival de cinéma du monde, ni le fait que de nouveaux acteurs internationaux viennent légitimement, comme Amazon, contribuer au développement et au financement du cinéma, elles contestent ce choix qui a été fait sans concertation", déclare la FNCF. En fait, à travers cette remarque, la Fédération s'interroge sur la fameuse chronologie des médias: "Si des films du Festival de Cannes contrevenaient à la réglementation en vigueur sur la chronologie des médias, par exemple en étant diffusés sur Internet simultanément à une sortie en salle, ils seraient passibles de sanctions par le CNC ! Et qu’en sera-t-il demain, si des films du Festival de Cannes ne sortaient pas en salle, remettant ainsi en cause leur nature d’œuvre cinématographique ?".

La fédération enfonce le clou avec l'argument juridico-fiscal: "Netflix, qui vient de fermer ses bureaux en France, montre qu’il contourne depuis plusieurs années la réglementation française et les règles fiscales (TVA et TSA). Ces règles fondent le cycle vertueux et le financement d’un écosystème exemplaire pour le cinéma dans notre pays, qui permet aujourd’hui à la plupart des films français et étrangers de la sélection officielle d’exister".

Autrement dit, Netflix ne joue pas le jeu, et ne respecte aucune règle du système français, qu'il soit légal ou financier. Ce que réclame la FNCF est simple: la garantie que The Meyerowitz Stories et Okja sortent bien en salles en France, avant leur diffusion sur Netflix.

Chronologie des médias, saison 20

Cette interpellation est légitime, mais nous semble mal posée. Cette chronologie des médias, dont la directive célèbre ses 20 ans, pose problème depuis quelques années avec le surgissement de la SVOD, de la VàD et du piratage. Le modèle actuel semble déjà dépassé. D'ailleurs, le Festival de Cannes sélectionne chaque années des films qui n'ont pas l'assurance de sorties en salle (et n'ont même pas de distributeurs au moment de leur sélection voire de leur projection cannoise). Et certains de ces films connaissent des sorties en salle si réduites qu'on peut se demander si une diffusion simultanée en SVOD ou en prime-time sur Arte ne serait pas plus profitable (on ne dit pas que c'est mieux, car l'expérience d'une salle de cinéma reste irremplaçable pour voir un film). Enfin, il est arrivé par le passé que des films produits par la télévision soient en sélection officielle. Prenons trois exemples.

Elephant de Gus Van Sant, Palme d'or en 2003, était un film produit par HBO. Sans sa Palme, d'ailleurs, il ne serait jamais sorti en salles aux Etats-Unis, visant ainsi, en vain, les Oscars. Ma vie avec Liberace, de Steven Soderbergh, est aussi un téléfilm coproduit par HBO. Présenté en compétition, le téléfilm avait bien un distributeur en France (ARP) mais n'est jamais sorti sur les grands écrans américains : la chaîne payante HBO l'a même diffusé sur le petit écran américain quelques jours après sa projection cannoise. Enfin, Carlos, d'Olivier Assayas, qui avait déclenché une polémique similaire à celle d'aujourd'hui.

Initialement prévu pour la télévision, le film, sélectionné hors-compétition, était produite par Canal +, et a été présenté dans sa version intégrale, en trois parties, tout en étant diffusé simultanément sur la chaîne cryptée (fin mai/début juin). Le film sera vendu sous une version cinématographique dans les autres pays. Et finalement, cette version raccourcie à 2h45 est sortie le 7 juillet en France, dans une centaine de salles, distribué par MK2. Cette solution était d'autant plus baroque que le DVD était disponible juste après sa diffusion télé début juin. "Bizarre chronologie des médias" écrivait-on à l'époque.

Un débat sain

Par conséquent, la polémique Netflix du jour n'est qu'une nouvelle petite secousse sismique dont on a déjà ressenti les premiers effets au début des années 2000. Le Festival de Cannes a d'ailleurs une vertu sur ce registre: en anoblissant des films produits pour la télévision, il les conduit généralement dans les salles de cinéma.

La FNCF souhaite avoir les garanties que les deux films Netflix sortent en salle en France. Au nom de l'exception culturelle. Ce n'est qu'une stratégie défensive. Cela ne résoudra rien au problème de fond: dès lors que des plateformes comme Netflix entrent dans la production de films signés de grands cinéastes, il faudra sans doute revoir notre façon d'aborder la chronologie des médias et la définition même d'un film de cinéma.

Les deux films seront diffusés sur Netflix en 2017 pour les abonnés de la plate-forme dans les pays où le service est disponible. Cela touche 93 millions de personnes dans le monde. Si pour Okja, une sortie en salles n’est pas exclue, qu'en est-il de The Meyerowitz Stories? Et cela ne concernerait-il que la France, ou des pays comme la Corée du sud (pour Okja) et les Etats-Unis (pour que Meyerowitz vise les Oscars)? Ce genre de débats en tout cas n'a jamais lieu dans les autres festivals...

D'autant, Netflix ne cache pas vouloir proposer ses films simultanément en salles et en ligne. Là il s'agit d'instaurer un dialogue équitable entre la plateforme américaine qui veut faire plier un écosystème (gaulois) et un pays qui refuse le diktat d'une transnationale. Cette "uberisation" a un impact certain puisque ce ne sont pas seulement les films "Netflix" qui sont en jeu. En court-circuitant les salles qui pourraient diffuser les deux films sélectionnés à Cannes, ce ne sont pas les grands groupes de distribution qui sont menacés mais bien les exploitants indépendants, bien plus dépendant de ce genre de films, qui seraient ainsi un peu plus fragilisés.

Dans un échange de tweets passionnant entre Jean Labadie (Le Pacte) et Vincent Maraval (Wild Bunch, qui avait déjà expérimenté la projection cannoise en off d'un film qui sortait en VàD), on constate que le dialogue semble dans l'impasse. Pourtant c'est bien un autre débat qu'ils soulèvent, l'un en défendant l'exploitation et la distribution, l'autre en privilégiant la création (les deux n'étant pas incompatibles). Dans cette histoire, ce qui est en jeu c'est davantage la liberté d'accès au cinéma. La démocratisation, est-ce le fait que tous pourront voir les films dans une salle de cinéma près de chez soi ou que tous les films pourront être vus, chez soi ou en salle, par le plus grand nombre?

A la tête de Fidélité productions, Marc Missionnier préfère y voir une ouverture avec ces films et séries prévus pour le petit format. Une ouverture "en grand".