L’instant court : rencontre avec le réalisateur Edouardo Williams

Posté par MpM, le 21 juin 2013

eduardo williamsA Ecran Noir, on aime vous faire partager nos découvertes. Alors après Time Doesn’t Stand Still, réalisé par Benjamin Millepied et Asa Mader, voici l’instant Court n° 112.

Rares sont les jeunes réalisateurs qui peuvent se targuer d'être sélectionnés deux années de suite au Festival de Cannes comme c'est le cas d'Eduardo Williams, Argentin de 26 ans dont le court métrage Puede ver un puma figurait parmi la sélection de la Cinéfondation en 2012 et qui, un an plus tard, était de retour avec son nouveau film, Que je tombe tout le temps ?, cette fois à la Quinzaine des Réalisateurs.

Mais si le jeune homme (désormais étudiant au studio national du Fresnoy) devient un habitué de la Croisette, ce n'est ni un hasard ni une coïncidence. Son cinéma épuré, elliptique et purement sensoriel frappe dès la première vision. A mille lieues des courts métrages "traditionnels", souvent très narratifs, très resserrés autour d'une intrigue immédiatement identifiable (comme ceux auxquels Que je tombe tout le temps ? était confronté cette année à la Quinzaine), il laisse une grande part d'interprétation au spectateur, avec des personnages, des situations et des récits qui se font écho d'un film à l'autre.

Radical, Eduardo Williams ? Pas volontairement, en tout cas. "J'essaye avant tout d'être très sincère avec ce que je voudrais voir, avec ce que je voudrais partager avec les spectateurs. Je n'y pense pas beaucoup quand je travaille, ce sont des choses qui viennent comme ça. Le fait d'être très sincère avec moi-même, ça crée un peu de radicalité, peut-être. Je n'y pense pas en ces termes : je fais ce qui me semble bien, ce que j'aimerais, moi, regarder et après je le partage. Bien sûr, on ne sait jamais ce qui va être reçu par le spectateur. Mais s'il y a une forme de radicalité, elle vient de là, pas d'une volonté d'être radical pour être radical."

En quelques courts métrages, le jeune cinéaste a ainsi réussi à créer un univers cohérent et personnel qui s'appuie sur une recherche formelle extrêmement rigoureuse pour parler de relations humaines, de quêtes personnelles, de communications brouillées et d'incommunicabilité latente. Du monde actuel, tout simplement.

Démonstration faite à nouveau avec Que je tombe tout le temps, qui se concentre plus particulièrement sur un personnage à la recherche d'une mystérieuse graine. Ce héros dont on ne saura rien traverse différents lieux à la fois familiers et déroutants, comme pris dans un labyrinthe cosmique qui relierait les uns aux autres tous les endroits du monde.

Après la projection cannoise, Eduardo Williams s'est confié à Ecran Noir, sur ses thèmes de prédilection et sa vision du cinéma :

Et en bonus, le trailer de Que je tombe tout le temps ? :

Festival Lumière 2013 : Tarantino, Mexico, Bergman et Pierre Richard au menu

Posté par Morgane, le 20 juin 2013

tarantino prix lumiere 2013

Aujourd'hui se tenait à Lyon, dans le Hangar du Premier Film de l'Institut Lumière, la présentation de la 5e édition du Festival Lumière (Grand Lyon Film Festival) qui aura lieu du 14 au 20 octobre. Thierry Frémaux a donc fait un grand nombre d'annonces pour aiguiser nos appétits en vue de la future orgie.

Il faut tout d'abord souligner que l'Institut Lumière fête cette année ses 30 ans! Pour célébrer cet anniversaire, le cinéma re-tournera la Sortie des usines Lumière, rue du Premier film. C'est aussi l'occasion pour l'Institut de restaurer les films Lumières en 4K.

Concernant le Festival en lui-même voici quelques annonces pêle-mêle qui mettent l'eau à la bouche.

Côté rétrospectives, l'une sera consacrée à Ingmar Bergman avec ses films en copies restaurées et l'autre, Noir & Blanc, à Henri Verneuil.

Le Festival est aussi un temps des hommages. L'édition 2013 ne coupera pas à la règle et rendra hommage à Christine Pascal, actrice, réalisatrice et scénariste lyonnaise, au producteur Daniel Toscan du Plantier, à Charles Vanel, réalisateur du dernier film français muet, Dans la nuit, et acteur dans plus de 170 films (!), à James B. Harris, en sa présence, réalisateur, acteur mais aussi producteur de trois films de Stanley Kubrick, L'ultime razzia, Les sentiers de la gloire et Lolita ainsi qu'à Pierre Richard qui sera également présent pour l'occasion. Un hommage lui sera également rendu à la Cinémathèque française.

Les Grandes Projections, qui avaient vues le jour en 2012, reviennent cette année avec Les Dix commandements (de Cecil B. DeMille), Fanny et Alexandre (d'Ingmar Bergman), Le dernier empereur (de Bernardo Bertolucci, en 3D) et Exodus (d'Otto Preminger).

Cette année, on pourra aussi découvrir un cycle "Mexico années 50", assister à un ciné-concert accompagné par l'Orchestre National de Lyon mais dont le film n'a pas encore dévoilé et voir ou revoir les hilarants films des Monty Python lors de la nuit qui leur sera consacrée à la Halle Tony Garnier. Dans son cadre consacré à l'histoire des femmes au cinéma, Germaine Dulac, réalisatrice française, sera mise en lumière. L'édition 2013 verra aussi la création du Premier Marché du film classique mondial.

Et, comme on dit, the las but ont least, la cerise sur le gâteau, Thierry Frémaux a révélé le nom de celui qui recevra cette année le Prix Lumière. Après Clint Eastwood, Milos Forman, Gérard Depardieu et Ken Loach, c'est au tour du culte Quentin Tarantino d'être à l'honneur de ce Festival! Ce qui ravira certainement un très grand nombre de festivaliers...

Festroia 2013 : femmes, violence et stéréotypes

Posté par MpM, le 20 juin 2013

festroiaParmi les thèmes abordés par les films en compétition lors de cette 29e édition de Festroia, la violence faite aux femmes semble avoir été le plus récurrent. Une violence physique, souvent associée à des sévices sexuels, et émanant dans la plupart des cas du cadre familial.

Dans 90 minutes de la Norvégienne Eva Sørhaug, trois histoires distinctes mettent en scène un personnage féminin aux prises avec une forme particulière de violence conjugale.

La première (dont on ne verra pas le visage) est empoisonnée par son mari, par ailleurs prévenant et attentionné. La deuxième est assassinée par son ex-mari qui ne supporte pas d’avoir été remplacé par un autre homme. La troisième est battue et violée par son compagnon hystérique. Dans ce volet, la réalisatrice choisit de montrer frontalement les sévices (coups, humiliation, viol) dans des scènes par ailleurs à la photographie ultra-soignée et au découpage sophistiqué.

Des séquences quasi insoutenables qui décortiquent de manière implacable le mécanisme de maltraitance, dans lequel la victime est accusée d’être responsable de ce qui lui arrive et où le bourreau trouve une justification "punitive" à ses actes. Un point commun avec Halima’s path d’Arsen Anton Ostojic (Croatie), qui se déroule dans la Yougoslavie de la fin des années 70, et dans lequel un père (musulman) bat sa fille, coupable d’avoir entretenu une relation amoureuse avec un chrétien. Au nom de la sacro-sainte tradition du patriarcat, il se sent autorisé à la punir, voire à la tuer, sans que personne n’ait son mot à dire. Pourtant, plus tard dans le film, c’est elle qui aura besoin d’être pardonnée (pour avoir épousé un homme d’une autre religion), et non lui. La jeune femme est ainsi cantonnée par le scénario à son rôle de victime "volontaire",  ayant mérité ce qui lui est arrivé, et finissant par reconnaître ses "erreurs".

Trois autres films présentés en compétition 8 ballabordent également la violence exercée sur des femmes par leurs compagnons. Circles de Srdan Golubovic (Serbie), où une jeune femme d’origine serbe, battue par son mari, tente de recommencer sa vie à zéro. 8 ball d’Aku Louhimies (Finlande) dans lequel un dealer se déchaîne contre sa petite amie qui a osé s’élever contre lui. The girl and death de Jos Stelling (Pays Bas) qui présente la figure traditionnelle du protecteur jaloux n’hésitant pas à "corriger" sa maîtresse lorsqu’elle tombe amoureuse d’un autre.

L'amour comme sentiment de propriété

Il est frappant de constater que souvent, ces personnages masculins prétendent aimer celles qu’ils maltraitent. Un "amour" qui, chez eux, va de pair avec un fort sentiment de propriété. Comme si ces femmes aimées étaient des objets qu’on possède et traite à sa guise. Même chose d’ailleurs pour les personnages certes non violents, mais tout aussi possessifs de Brasserie romantique de Joel Vanhoebrouck (Belgique) et Halima’s path d’Arsen Anton Ostojic qui reviennent après une longue absence et attendent de leur petite amie qu’elle soit toujours disponible et prête à les suivre en un instant.

La plupart des réalisateurs portent un regard pessimiste sur ces relations amoureuses conflictuelles dans lesquelles les femmes sont toujours les victimes, prises au piège inextricable du chantage affectif et de la manipulation. Pour elles, il n’y a guère de moyens d’échapper à ce qui présenté comme leur destin : soit elles se soumettent en silence, soit elles sont condamnées à la fuite et l’errance. Plusieurs films insistent en effet sur le fait que leurs bourreaux (miraculeusement tout puissants) pourront les retrouver n’importe où.

viva belarusLa vraie libération de cette emprise malsaine ne peut alors venir que du recours à la violence. Ce renversement des rôles, qui transforme les victimes en bourreaux, les condamne (en un sens) à devenir exactement comme ceux qu’elles combattent. Ultime victoire de ces individus ne connaissant que la brutalité comme langage, et surtout curieuse manière de diviser la société entre victimes et bourreaux, sans troisième voie possible. Surtout lorsque l’on compare aux personnages masculins eux aussi confrontés à des actes de violence, et qui s’en sortent généralement par l’intelligence et la ruse, comme dans Viva Belarus! de Krzysztof Lukaszewicz (un jeune Biélorusse maltraité durant son service militaire ouvre un blog engagé pour critiquer le système) ou The girls and death de Jos Stelling (le jeune médecin prend sa revanche en jouant aux cartes).

Stéréotypes à gogo

Mais curieusement, force est de constater que dans les films de cette sélection, les personnages masculins sont très rarement présentés comme des victimes. Le rôle, surtout dans le cas de violence gratuite, est spécialement dévolu aux femmes, qui n’existent presque que dans cette optique. Et lorsque ce n’est pas le cas, les personnages véhiculent tous les stéréotypes traditionnels liés aux femmes : sujet de conversation qui unit les hommes (Into the white du Norvégien Petter Naess), bigotes crédules (The passion of Michel Angelo d’Esteban Larrain, Chili), épouse à reconquérir (Road north de Mika Kaurismaki, Finlande)…

Même le personnage de "femme forte" est une forme de stéréotype décliné avec plus ou moins de succès à travers le personnage d’Halima, mère courage yougoslave et seule protectrice de sa nièce (Halima’s path) ou celui d’Alice, dans Tango libre de Frédéric Fonteyne (Belgique), qui s’épanouit joyeusement dans un trio amoureux atypique. Même la restauratrice sûre d’elle de Brasserie romantique passe son temps à se sacrifier pour les autres, qu’il s’agisse de son frère ou de sa nièce.

Au final, seuls trois personnages alabama monroe féminins de la sélection semblent échapper aux stéréotypes traditionnels. Mieux écrits, plus développés, ils donnent enfin une image subtile de personnages qui, au lieu d’être des femmes, sont tout simplement des êtres humains, avec leur propre sensibilité et personnalité, et surtout qui ne se définissent pas uniquement par leur rapport à un homme (femme de, mère de). L’héroïne de Broken circle breakdown de Felix van Groeningen (Belgique) travaille dans le monde du tatouage et chante dans un groupe de bluegrass. Elle n’est pas dépendante de son compagnon (qu’elle refuse d’épouser) et sait reprendre sa liberté quand elle le souhaite.

Même chose avec la jeune journaliste engagée de Viva Belarus!, qui est sans cesse dans l’action, prête à se battre pour ses idées, et surtout à prendre des risques. Elle ne suit pas un homme qui serait son mentor, mais au contraire tente de convaincre son petit ami de la nécessité de militer.

baby bluesEnfin, la jeune fille haute en couleur de Baby blues (Kasia Roslaniec, Pologne) prend sa propre vie en mains. Elle est certes irresponsable et égoïste, mais elle poursuit son rêve (travailler dans la mode) et ne se laisse dicter aucun choix.

Sa personnalité multiple et créative se reflète dans ses tenues vestimentaires, originales et décalées. C’est une vraie adolescente d’aujourd’hui, bourrée de contradictions et de failles, qui surprend sans cesse le spectateur.

Des personnages enfin capables de rivaliser avec leurs homologues masculins pour dresser le portrait, tantôt émouvant, tantôt édifiant, d’êtres humains aux prises avec la vie. Preuve qu’il est possible, et surtout profitable, de s’extraire des éternels clichés sur ce qu’une femme est censée être pour se concentrer sur des personnalités et des destins particuliers.

James Gandolfini le magnifique (1961-2013)

Posté par vincy, le 20 juin 2013

james gandolfiniJames Gandolfini est mort mercredi soir d'une crise cardiaque à l'âge de 51 ans en Italie, où il était en vacances avant de participer à une table ronde avec le réalisateur Gabriele Muccino au festival du film de Taormina en Sicile.

Evidemment, dès qu'on évoque Gandolfini, on voit Tony Soprano, le mythique parrain dépressif de la série d'HBO, Les Sopranos, classée récemment comme meilleure série de tous les temps par la Writers Guild Association.

Ce serait oublié quel immense acteur il était, capable d'endosser des rôles décalés. Il en imposait physiquement, pouvait jouer des tueurs à la douceur insoupçonnée ou un militaire obtus. Son charisme, sa capacité à être violent et drôle, dépressif et humain, en ont fait un comédien souvent sous exploité, toujours attachant.

Né le 18 septembre 1961, issu d'une famille italo-américaine du New Jersey, James Gandolfini avait commencé sa carrière à Broadway en 1992 dans Un tramway nommé désir de Tennessee Williams, avec Jessica Lange et Alex Baldwin. Il sera sur les planches avec d'autres grandes pièces comme Sur les quais (1995) ou Les Dieux du carnage (2009). Il enchaîne avec le cinéma (voir sa filmographie sélective), dans des seconds rôles. Dans True Romance (1993), scénario de Tarantino (il a faillit être Vincent Vega dans Pulp Fiction), il se fait remarqué en tueur sanguinaire. Il devient lieutenant dans USS Alabama (1995), braqueur dans Get Shorty (1995), voisin violeur et violent dans She's so lovely (1997)... Gandolfini joue aux côtés des plus grandes stars hollywoodiennes. Dans Le Mexicain (2001), il s'offre des scènes exquises avec Julia Roberts et l'an dernier avec Cogan - Killing them softly, présenté à Cannes, il interprète avec justesse une partition précise avec Brad Pitt. Toujours tueur à gage, homo ou homme à putes. Quand il n'était pas flingueur, il était militaire, ou politicien. Les producteurs ont peu d'imagination, mais au moins, lui, variait son jeu par de multiples nuances. Il avait ce petit sourire qui pouvait nous attendrir... C'était un homme timide, pas très à l'aise avec la célébrité, presque névrosé de son propre aveu.

De 1999 à 2006, les Sporanos l'éloigne du cinéma (un Golden Globes et de multiples prix au passage). Cela ne l'empêche pas de tourner avec les Coen (The Barber, 2001) - sans doute sa meilleure performance au cinéma -, dans des films comme Le dernier château, Les fous du roi, Romance & Cigarettes. Lorsque la série prend fin, son personnage de Tony Soprano est si envahissant qu'il met du temps à revenir au premier plan. Excellent en général pas très correct dans In The Loop (2009) ou grandiose directeur de la CIA pas plus correct dans Zero Dark Thirty (2012), on sentait malgré tout qu'il peinait à trouver sa place dans le système.

Il est attendu dans deux films Animal Rescue, avec Tom Hardy et Noomi Rapace, et All About Albert (Enough Said), une comédie romantique de Nicole Holofcener, avec Julia Lois-Dreyfus, Toni Collette et Catherine Keener. Mais surtout il avait commencé à développer une série pour HBO, Criminal Justice et débutait une carrière de producteur de documentaires et de séries avec sa société Attaboy Films. Ainsi il avait piloté le téléfilm Hemingway & Gellhorn, avec Clive Owen et Nicole Kidman, présenté hors-compétition au Festival de Cannes.

Marié en secondes noces avec la jolie Deborah Lin depuis 2008, James Gandolfini achève ce parcours tragiquement, comme coupé dans son envol. Il disait souvent de lui qu'il était un Woody Allen qui pesait 130 kilos. Cela ne l'empêchait pas d'avoir une grâce qui nous séduisait à chacune de ses apparitions, nous faisant regretter cette disparition brutale.

James Franco cherche 500 000$ sur un site de crowdfunding

Posté par vincy, le 20 juin 2013

james franco palo alto storiesJames Franco recherche 500 000 $ par l'intermédiaire du site de "crowdfunding" Indiegogo. La somme récoltée servira à produire Palo Alto Stories, adaptation de son recueil de nouvelles sur sa jeunesse dans cette ville nord-californienne. L'acteur-réalisateur-professeur (et grand exhibitionniste en ligne) a enrôlé les jeunes cinéastes Nina Ljeti et Vladimir Bourdeau de Fontenay (pour Memoria), Bruce Thierry Cheung (pour Killing Animals) et Gabrielle Demeestere (pour Yosemite). Tous les détails sur ces films et les réalisateurs sont sur le site Indiegogo.

Les trois films sont déjà en cours de développement. « Je mets de l'argent dans ces projets parce que je crois en eux, je crois au talent des réalisateurs. Ces histoires sont très importantes pour moi, très personnelles » explique la star dans une vidéo de présentation/justification.
Tous les profits réalisés par ces films seront reversés à une association The Art of Elysium qui offre des rencontres avec des artistes et des ateliers créatifs à des enfants malades. Manière d'anticiper les critiques sur ces méthodes de financement : après tout James Franco est riche (il l'assume) et pourrait financer de façon complètement autonome son projet ; mais il explique aussi que « les gens croient souvent que c'est facile pour [lui] de trouver des investisseurs et des distributeurs pour [ses] films. Malheureusement, les choses ne sont pas si simples. La plupart du temps [il investit son] propre argent pour pouvoir faire [ses] films. Pourtant cette fois c'est différent ; nous avons besoins de plus de fonds.» Et d'ajouter : « Tourner trois films à la suite demande plus d'argent que je ne peux en donner. » Il a déjà réalisé et produit 6 longs métrages ces dernières années.

Les fans ont donc jusqu'au 17 juillet pour verser de l'argent contre une photo carte postale dédicacée (100$), un message de l'acteur sur sa boîte vocale (450$), une projection privée (500$), ou un tableau peint par le touche-à-tout (7000$). Et pour un petit rôle dans un des films, il faut débourser 5000$. Vous misez le double et vous avez le droit à un diner VIP et le titre de producteur exécutif!

Franco a choisi Indiegogo.com, concurrent du plus célèbre Kickstarter.com, car si l'acteur ne parvient à amasser les 500 000$ le 17 juillet, il pourra conserver la somme versée par les internautes. Sur Kickstarter, la campagne s'annule et les internautes retrouvent leurs mises. Pour l'instant, il a récolté 50 000$.

Paru en 2011, Palo Alto est disponible en français chez Michel Lafon. Le livre trace le portrait d'une jeunesse dorée et désorientée à travers plusieurs personnages qui se croisent dans cette petite ville huppée de Californie.

Sa dernière réalisation, As I Lay Dying, a été projetée au dernier festival de Cannes dans la section Un certain regard.

Cinquante nuances de Grey a trouvé son cinéaste

Posté par vincy, le 19 juin 2013

sam taylor johnson aaron taylor johnsonOn évoquait Gus Van Sant, Joe Wright et Bret Easton Ellis était volontaire. C'est finalement une réalisatrice, Sam Taylor-Johnson qui filmera l'adaptation du phénomène littéraire Fifty Shades of Grey (Cinquante nuances de Grey) - le premier tome s'est vendu à plus de 800 000 exemplaires en France.

Produit par Michael De Luca (The Social Network), scénarisé par Kelly Marcel (la série Terra Nova et le film à venir Saving Mr. Banks), il s'agit d'un des projets hollywoodiens les plus attendus : la trilogie de E.L. James s'est vendue à 70 millions d'exemplaires dans le monde. Il y a de quoi espérer un large public dans les salles, pour trois films..

Sam Taylor-Johnson, 46 ans, n'a réalisé qu'un seul long métrage jusqu'à présent, le très remarqué Nowhere Boy (sous le nom de Sam Taylor-Wood), avec Aaron Taylor-Johnson et Kristin Scott Thomas. Le film, qui évoquait la jeunesse de John Lennon a été 4 fois nommé aux BAFTA.

Reste à trouver les acteurs pour incarner le jeune milliardaire, Christian Grey, et l'étudiante universitaire Anastasia Steele. Déjà Hollywood s'interroge sur la possible présence du mari de la réalisatrice, Aaron Taylor-Johnson. A 23 ans, le comédien de Kick-Ass et Savages est attendu dans Godzilla et The Avengers 2 : de quoi augmenter son statut "bankable". Angelina Jolie le convoite aussi pour le rôle principal de sa prochaine réalisation, Unbroken.

Festroia 2013 : The Broken Circle Breakdown (Alabama Monroe) met tout le monde d’accord

Posté par MpM, le 19 juin 2013

alabama monroeTriplé gagnant pour The broken circle breakdown de Felix van Groeningen, qui sortira en France le 28 août prochain sous le titre Alabama Monroe. Cette émouvante histoire d'amour et de deuil rythmée par la musique Bluegrass country a en effet séduit trois jurys lors du 29e festival Festroia et repart avec le Dauphin d'or du meilleur film, le prix Signis et le prix Fipresci.

Ces récompenses font suite aux deux récoltées à Berlin (Label Europa Cinéma du meilleur film européen et Prix du Public) alors que le film était sélectionné dans la section Panorama.

Trois autres films en compétition à Festroia ont réussi le doublé : Baby Blues de Kasia Roslaniec (ours de cristal du meilleur film dans la section  Generation à Berlin en 2013) qui a reçu le prix CICAE et la mention spéciale du jury Signis ; La passion de Michelangelo d'Esteban Larrain qui cumule prix spécial du jury et meilleur scénario ; Circles de Srdan Golubovic qui remporte le prix du meilleur réalisateur et celui de la meilleure photographie.

Si le choix est logique dans le premier cas (Baby blues est une œuvre non conventionnelle et bourrée d'énergie qui se distingue par son style et son ton décalé), il l'est moins pour La passion de Michelangelo, film poussif et à la fin complétement ratée, et surtout pour Circles, énième variation sur le thème de la guerre en ex-Yougoslavie, avec des personnages caricaturaux, un scénario formaté et une mise en scène académique.

Halima’s Path d'Arsen Anton Ostojic et Road North de Mika Kaurismäki, qui ne pouvaient guère prétendre à un grand prix, récoltent quant à eux des prix d'interprétation plus justifiés : Alma Prica et Olga Pakalovic incarnent à la perfection des femmes touchées par l'horreur de la guerre tandis que Vesa-Matti Loiri compose un personnage de père envahissant et directif à la fois attachant et drôle.

A noter que le cinéma belge est le grand vainqueur du festival, toutes sections confondues, avec pas moins de six prix sur les quinze distribués.

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Le palmarès complet

Dauphin d'or du meilleur film
The broken circle breakdown de Felix van Groeningen

Prix spécial du jury
La passion de Michelangelo d'Esteban Larrain

Meilleur réalisateur
Srdan Golubovic pour Circles

Meilleure actrice
Alma Prica et Olga Pakalovic pour Halima’s Path d'Arsen Anton Ostojic

Meilleur acteur
Vesa-Matti Loiri pour Road North de Mika Kaurismäki

Meilleur scénario
Esteban Larrain pour La passion de Michelangelo

Meilleure photographie
Alexsander Ilic pour Circles

Meilleur premier film
Offline de Peter Monsaert

Prix dans la section L'homme et son environnement
The Journey de Nadim Güç

Mention spéciale dans la section L'homme et son environnement
Kinshasa Kids de Marc-Henri Wajnberg

Prix CICAE
Baby Blues de Kasia Roslaniec

Prix SIGNIS
The Broken Circle Breakdown de Felix van Groeningen

Mention spéciale SIGNIS
Baby Blues de Kasia Roslaniec

Prix Mário Ventura du meilleur court métrage
Dura Lex d'Anke Blondé

Prix du public
Brasserie Romantique de Joël Vabhoebrouck

Les sorties cinéma du 19 juin 2013

Posté par vincy, le 19 juin 2013

fanny ardant les beaux jours affiche- Les Beaux jours *** de Marion Vernoux (France, 1H34) avec Fanny Ardant, Laurent Lafitte, Patrick Chesnais. Festival de Cabourg 2013.

- Bambi *** de Sébastien Lifshitz (France, 58 minutes, documentaire). Teddy Award du meilleur documentaire au Festival de Berlin 2013.

- A Very Englishman *** de Michael Winterbottom (Grande-Bretagne, 1H41, Interdit aux moins de 12 ans) avec Steve Coogan, Anna Friel, Imogen Poots. Festival de Berlin 2013.

- People Mountain People Sea *** de Shangjun Cai (Chine/Hong-Kong, 1H31) avec Jian Bin Chen, Xiubo Wu. Lion d'argent de la mise en scène à Venise 2011.

- Man of Steel ** de Zack Snyder (USA/Canada/Grande-Bretagne, 2H20) avec Henry Cavill, Amy Adams, Michael Shannon.

- Room 237 ** de Rodney Ascher (USA, 1H42, documentaire) avec Jay Weidner, Buffy Visick, Scatman Crothers.

- Joséphine ** d'Agnès Obadia (France, 1H28) avec Marilou Berry, Mehdi Nebbou, Berengère Krief.

- Belle du seigneur * de Glenio Bonder (France/Belgique/Luxembourg, 1H34) avec Jonathan Rhys Meyers, Natalia Vodianova, Marianne Faithfull. Premier film inspiré du roman d'Albert Cohen.

Ressortie :
- Les Parapluies de Cherbourg ***** de Jacques Demy (France, 1H31, version restaurée et numérisée, son Dolby, Palme d'or 1964) avec Catherine Deneuve, Nino Castelnuovo, Anne Vernon.

Et aussi :

- Né quelque part de Mohamed Hamidi (France, 1H27) avec Jamel Debbouze, Tewfik Jallab, Malik Bentalha - Farid, 26 ans, étudiant en droit, doit se rendre en Algérie pour sauver la maison de son père. Il va découvrir ce pays qu'il ne connaît pas et rencontrer des personnages hauts en couleur, parmi lesquels son cousin un peu magouilleur qui porte le même nom que lui et rêve de venir en France. Mais Farid va se faire voler ses papiers par son cousin et se retrouve bloqué en Algérie, où il apprend à connaître l'histoire de sa famille.

- Struck de Brian Dannelly (USA, 1H20) avec Chris Colfer, Rebel Wilson, Allison Janney plus - Carson, lycéen geek, malin et sarcastique, rêve de devenir un talentueux journaliste. La conseillère pédagogique de son lycée lui suggère de créer un club littéraire pour sortir du lot. Mais comment motiver des lycéens plus intéressés par le foot, la drague, les bimbos et la fête ? Sa seule amie, Malerie, lui propose une méthode imbattable pour convertir les irréductibles à la littérature.

- The Bay de Barry Levinson (USA, 1H28, film d'épouvante interdit aux moins de douze ans) avec Kristen Connolly, Christopher Denham, Nansi Aluka - Dans la baie du Maryland, une bactérie non identifiée contamine le lac et ceux qui s'en approchent.

- My Movie Project de Steven Brill, Peter Farrelly et Steve Carr (USA, 1H30, film interdit aux moins de douze ans) - Un célèbre acteur d'Hollywood approche un grand studio de cinéma avec une idée de scénario qui, selon lui, a le potentiel de devenir le film le plus rentable au monde.

- Eat Sleep Die de Gabriela Pichler (Suède, 1H44) avec Nermina Lukac, Milan Dragisi, Jonathan Lampinen - Rasa, une jeune immigrante d'Europe de l'Est devenue ouvrière en Suède, se retrouve licenciée malgré son dévouement et sa rigueur. Elle doit alors faire face à un système qui ne lui convient pas, celui du chômage.

- 5 Danses de Alan Brown (USA, 1H23) avec Ryan Steele, Reed Luplau, Catherine Miller - Chip est danseur et n'a qu'un seul but dans la vie : réussir à vivre de sa passion. Fraîchement débarqué à New York, il intègre une troupe de danse moderne à Soho et est vite confronté aux rites de passage d'un danseur à New York rythmés par la discipline, le travail acharné, la camaraderie, la compétitivité, la peur de ne pas être à la hauteur et la satisfaction personnelle. Durant sa dure initiation, il va trouver réconfort auprès de Théo, un autre danseur.

- Offline de Peter Monsaert (Belgique, 1H55) avec Wim Willaert, Anemone Valcke, Patricia Goemaere - Après une longue peine de prison, Rudy a en vue un objectif bien précis : retrouver du travail et, plus important, se rapprocher de la famille qu'il a laissée derrière lui. Malgré le soutien de Denise, une coiffeuse à la retraite, et de son ami Rachid, aucun de ces projets ne rencontre un franc succès. Juste au moment où des retrouvailles semblent tout de même se profiler à l'horizon, le passé reprend le dessus.

- Mammas de Isabella Rossellini (France, documentaire) avec Isabella Rossellini - A travers des portraits ludiques de plusieurs espèces, Isabella Rossellini aborde les idées reçues sur la maternité en général.

Room 237 : un hommage gonflé à The Shining

Posté par geoffroy, le 18 juin 2013

room 237 the shiningL'histoire : En 1980, Stanley Kubrick signe Shining, qui deviendra un classique du cinéma d'horreur. A la fois admiré et vilipendé, le film est considéré comme une oeuvre marquante du genre par de nombreux experts, tandis que d'autres estiment qu'il est le résultat du travail bâclé d'un cinéaste de légende se fourvoyant totalement. Entre ces deux extrêmes, on trouve cependant les théories du complot de fans acharnés du film, convaincus d'avoir décrypté les messages secrets de Shining.
Room 237 mêle les faits et la fiction à travers les interviews des fans et des experts qui adhèrent à ce type de théories, et propose sa relecture du film grâce à un montage très personnel. Room 237 ne parle pas seulement de fans d'un film mythique – il évoque les intentions de départ du réalisateur, l'analyse et la critique du film.

Notre avis : Le principe inhérent à Room 237 est remarquable mais dangereux. Unique, même, dans le monde balisé du documentaire. Car il ne s’agit pas pour Rodney Ascher, réalisateur du film, de décortiquer les raisons qui font de Shining un film culte, référence du genre (épouvante), souvent copié, presque jamais égalé. Tout part d’une trituration excessive, mais amoureuse, pour le film et son univers, ses multiples interprétations et réinterprétations, entre réalité et fantasme. Le tout au détour d’angles d’analyse variés, souvent farfelus, un brin exagérés, parfois saisissants. La forme, osée, restructure l’œuvre de Kubrick dans une suite de superposition d’images issues du film, d’autres films du cinéaste américain ou encore de quelques films étrangers à l’univers du réalisateur.

Rodney Ascher, qu’il ait raison ou pas, enchaîne dans un flot continu parfois harassant, les hypothèses sur le/les sens à donner au film quitte à le désacraliser. Mais rien, jamais, n’est tranché. Tout juste suggéré sous la forme d’une analyse proche de l’hypotético-déduction. Chaque intervenant, au nombre de cinq – et que l’on ne verra jamais –, avance une hypothèse afin d’expliquer, non pas le film lui-même, mais la démarche intellectuelle de Kubrick qui n'aurait pas hésiter à truffer son film de références autour du génocide des Indiens, de la Shoah ou encore de la mission Apollo 11… Tout y passe, et plus encore, sans hiérarchisation précise faisant de Room 237 un documentaire patchwork aussi gonflé que ridicule, aussi visionnaire que surfait, aussi dérangeant que longuet.

S’il est vrai qu’il existera toujours des thèmes sous-jacents aux grandes œuvres cinématographiques, échappant ainsi au contrôle des cinéastes eux-mêmes, les avis de nos commentateurs, que l’on soit d’accord ou pas sur ce qu’ils développent, ne traitent que d’une seule chose : la puissance implicite de l’image dans ce qu’elle révèle en dehors de ce qu’elle tend à montrer initialement. Sauf qu'ici on y "plaque" ses fantasmes et autres lubies pour peu que cela tienne.

Les différentes approches abordées, parfois de façon hasardeuse comme ces problèmes de raccords se transformant en actes conscients ou messages subliminaux, sont égales dans leur démonstration. Ce qui discrédite la démarche visant à rendre un hommage au génie visuel qu’était Kubrick dans sa véritable complexité. Si rien n’est vraiment étayé à la manière d’un journaliste d’investigation recoupant ses sources, l’exemple par l’image s’affiche devant nous au cours d’un montage original, immersif mais aussi assez répétitif, véritable soutien aux propos tenus. La hardiesse du cinéaste est notable, jamais tape à l’œil, toujours concentré sur le leitmotiv de départ et qui consiste à laisser parler quelques « spécialistes » sur les intentions d’un cinéaste trop talentueux pour s’arrêter au livre de Stephen King.

Accéléré, ralenti, superposition… Tout est réuni pour nous faire découvrir les supposés desseins d’un film qui n’en a pas besoin puisqu’il aura su redéfinir, sous la forme d’un diamant brut, l’essence même du fantastique moderne. Là réside sans doute l’inutilité d’une démarche que l'on considèrera honnête, n’hésitant pas à s’aventurer au-delà du cadre purement informatif qu’impose, normalement, le format du documentaire.

Si, en fin de compte, Room 237 n’apporte pas grand-chose à Shining, il donne indiscutablement envie de le revoir. Et d’y découvrir, on ne sait jamais, un degré d’interprétation encore insoupçonné.

Exception culturelle : réactions en chaîne après la sortie de piste de la Commission européenne

Posté par vincy, le 18 juin 2013

josé manuel barroso Vendredi, après de longues discussions, la Culture, y compris le secteur audiovisuel, est sortie du mandat donné à la Commission européenne pour négocier un Traité de libre-échange avec les USA. Toujours critiquée par les défenseurs du libéralisme (au nom d'une lutte contre un soi-disant déclin), l'exception culturelle est sauvée.

La France était prête à imposer son véto si l'Europe incluait ces secteurs dans les négociations. La ministre de la culture et de la communication Aurélie Filippetti était parvenue à rallier 14 pays à la cause. Le parlement européen avait voté l'exclusion de la culture du mandat. Des cinéastes européens avaient signé une pétition pour soutenir la France dans son combat.

Réactionnaires

Cela n'a pas plu à José Manuel Barroso, président de la Commission européenne. A un an de la fin de son mandat, alors qu'il vise un poste prestigieux international - on parle de l'ONU - qui nécessite l'appui des Américains, Barroso mise gros. Sa réaction ne fut pas très diplomatique : "Cela fait partie d'un agenda antimondialisation que je considère comme complètement réactionnaire", a dit José Manuel Barroso dans une interview publiée lundi par l'International Herald Tribune. "Certains se disent de gauche mais en réalité, ils sont extrêmement réactionnaires" a-t-il ajouté.

Dès le week-end le torchon avait brûlé avec les propos incendiaires  du commissaire européen en charge de la négociation, le très libéral Karel De Gucht. Le commissaire au Commerce a affirmé qu'il discutera du secteur audiovisuel (y compris Internet) avec les Etats-Unis malgré le mandat donné à la Commission par les ministres européens. Pour lui, le compromis voté par les Etats membres n'est que "provisoire". Une sortie de piste peu appréciée (et illégitime).

Chiffon rouge

Or, dans les faits, s'il devait discuter du secteur audiovisuel avec les USA, il devrait demander de nouveau l'autorisation aux Etats membres, et la proposition ne pourrait être votée qu'à l'unanimité. Le Président de la république François Hollande a immédiatement répliqué : "L'exception culturelle est un principe qui a toujours été évoqué et à chaque fois écarté des négociations commerciales" conduites par l'Union européenne ces dernières décennies. Or, tant que la France reste ferme sur ses positions, il n'a aucune chance de pouvoir le faire. Et pour l'instant, les Américains ne demandent pas que la culture et l'audiovisuel soient inclus dans ce futur hypothétique Traité. Au dernier Festival de Cannes, des producteurs comme Harvey Weinstein et des cinéastes comme Steven Spielberg ont clairement défendu l'exception culturelle (autrement dit la préservation des éco-systèmes financiers pour défendre la diversité culturelle). Alors, beaucoup de bruit pour rien?

Cependant, l'état d'esprit de la Commission en dit long : les Etats l'empêchent de réaliser son grand projet de libéralisation totale du marché. Qu'on soit pour ou contre,  elle méprise toute contestation, prête à jouer les marchands de tapis (la Commission rêve d'ouvrir le secteur audiovisuel en échange de l'ouverture du secteur des télécoms aux USA). Mais le mal est fait, et a obligé le porte-parole de Barroso, Olivier Bailly, de rassurer les responsables français. Selon lui, le terme "réactionnaire" ne visait pas la France. "Le président Barroso a toujours affirmé son attachement à l'exception culturelle". Il ajoute qu'"il n'y a aucune divergence sur le fond entre la Commission et le gouvernement français sur ce point".

Barroso, dangereux et cynique?

Car, dans ce jeu politique assez logique, les réactions n'ont pas tardé. Entre consternation et incompréhension, indignation et colère, politiques, artistes et sociétés d'auteurs ont taclé la Commission européenne, coupable à leurs yeux de déni démocratique (et institutionnel).

Si l'on en croit Bailly, Barroso a réagit aux attaques des artistes : "M. Barroso est un homme dangereux pour la culture européenne" avait dit Costa-Gavras. Et la lettre des cinéastes européens (Almodovar, Oliveira, Frears...) l'accusait d'être "un homme cynique, malhonnête, méprisant qui nuit aux intérêts européens".

A cela s'ajoute la pétition lancée par Bérénice Bejo, Lucas Belvaux, Luc et Jean-Pierre Dardenne, Jacques Fansten, Costa Gavras, Michel Hazanavicius, Laurent Heynemann, Pierre Jolivet, Daniele Luchetti, Radu Mihaileanu et Bertrand Tavernier, qui n'attaque personne mais vise clairement la vision de la Commission : "Notre combat n'est pas une revendication corporative, c'est l'affirmation que ce qui est l?âme des peuples ne peut pas se monnayer dans des négociations commerciale. Chaque peuple doit pouvoir soutenir et protéger sa culture : nous l'avions affirmé, c'est "un facteur d'échange et de compréhension mutuelle", c'est encore plus vital en des temps de crise. Le droit à la diversité culturelle est un droit de l'homme." Les auteurs de cette pétition se défendent d'être conservateurs : "Au contraire, nous voulons considérer que c'est un nouveau départ pour construire ensemble l'avenir, et notamment élaborer une économie durable et équitable de la Culture, à laquelle devront aussi contribuer nécessairement les géants numériques, aujourd'hui exemptés de toute responsabilité vis à vis de ce qui fait leur fortune."

Position moderne, combat d'avenir

La ministre Aurélie Filippetti y a vu "une attaque en règle contre tous ceux qui ont suivi la position française", soit "les artistes, les créateurs, et puis évidemment les peuples" en évoquant le Parlement européen. "Certains nous ont traité de réactionnaires. Ceux qui ont traité la France de réactionnaire devraient se souvenir que la France n'était pas seule dans ce combat", a-t-elle ajouté. Le Commissaire européen français Michel Barnier, malgré les contradictions de son communiqué, ménageant la chèvre et le chou a abondé en ce sens : "Quand on défend la diversité culturelle, on n'est pas réactionnaire, on est dans un combat d'avenir".

Filippetti a insisté lors de sa conférence de presse de dernière minute, hier : "Notre position, elle n'est pas défensive, elle n'est pas conservatrice et encore moins réactionnaire, c'est une position résolument moderne parce que sans exception culturelle, nous ne pourrons pas remplir le défi qui s'ouvre à nous, à savoir la transition de nos outils de régulation du secteur économique de la culture à l'ère du numérique".

Dans un an, tout sera oublié?

De son côté Eric Garandeau, président du CNC, a déploré la sortie de route de la Commission : "Si être réactionnaire, c'est de réagir à des idéologies douteuses qui ont fait tant de dégâts en Europe et dans le monde, réagir est un devoir et on veut bien être réactionnaires".

La ministre du Commerce extérieur Nicole Bricq, qui est responsable du dossier en France, a relativisé tout cela : "Si jamais on y revenait (sur l'exception culturelle), parce que les Américains nous le demandaient, ce qu'ils n'ont pas fait officiellement aujourd'hui, il faudrait revenir vers les Etats pour modifier le projet de mandat et ce serait la même règle c'est-à-dire l'unanimité, et la France dira encore une fois non".

Elle rappelle que ce Traité ne se signera pas dans dans ans. "Avec le Canada ça fait cinq ans que l'on négocie et nous n'avons toujours pas trouvé l'accord". Et elle renvoie le Commissaire dans le fossé : "Nous savons que nous avons beaucoup de sujets à régler mais en tout cas nous n'avons pas à discuter de l'exception culturelle, elle est sortie du mandat".

Et une chose est sûre, Barroso ne devrait pas être reconduit l'an prochain. Il est fort probable que les élections européennes prévues en 2014 renforce même le poids des "conservateurs" et des "réactionnaires" à la politique menée par cette Commission, de plus en plus critiquée et même défiée par les peuples éuropéens.