Cannes 2016: les films hors-compétition et en séances spéciales

Posté par vincy, le 14 avril 2016

Un Spielberg, on attendait ça depuis E.T. en 1982. Jodie Foster, on en rêvait depuis 1976 (Taxi Driver). Pas de Pixar ou de DreamWorks ni de X-Men, mais une bonne fournée pour ces films présentés sans pression autre que celles des photographes (qui exigent des stars) et des médias (qui ont besoin de stars). Entre les docus, les productions hollywoodiennes et les films un peu plus radicaux, la Sélection s'offre quand même quelques grands noms, assez rares sur la Croisette, de Serra à Vecchiali, aux côtés d'habitués comme Rithy Panh ou Mahamat-Saleh Haroun. Notons aussi qu'avec un docu sur Iggy Pop, Jim Jarmusch se permet d'être doublement représenté (il a aussi un film en compétition).

Hors compétition
Ouverture: Café Society de Woody Allen
Le bon gros géant (The BFG) de Steven Spielberg
Money Monster de Jodie Foster
The Nice Guys de Shane Black
Goksung de Na Hong-jin

Séances de minuit
Gimme Danger de Jimmy Jarmusch (documentaire)
Le train pour Pusan de Yeaon Sang-ho

Séances spéciales
L'ultima Spiaggia de Thanos Anastopoulos et Davide del degan
Hissein Habré, une tragédie tchadienne de Mahamat-Saleh Haroun
La mort de Louis XIV d'Albert Serra
Exil de Rithy Panh
Le cancre de Paul Vecchiali

Cannes 2016 : 10 courts métrages et 18 films d’école en compétition

Posté par MpM, le 13 avril 2016

cinefondation et courts métrages 2016

Courts métrages

Comme chaque année, c'est la compétition officielle de courts métrages qui lance la grande semaine d'annonce des sélections cannoises. Tandis que l'on attend la conférence de presse qui dévoilera ce jeudi les noms des concurrents 2016 pour la Palme d'or et les films sélectionnés en section Un certain regard, avant l'annonce de la Semaine de la Critique lundi 18 et celle de la Quinzaine des Réalisateurs mardi 19, on connaît désormais les dix films qui concourront pour la palme d'or du court métrage.

Choisis parmi les 5008 œuvres reçues par le comité de sélection (ce qui représente 458 films de plus qu'en 2015), ceux-ci viennent majoritairement d’Europe et d'Amérique centrale et du Sud, avec un représentant pour l’Asie et un pour l’Afrique. C'est la réalisatrice japonaise Naomi Kawase qui présidera le jury chargé de les départager. On connaîtra le 22 mai prochain le nom de celui qui succédera à Waves'98 de Ely Dagher.

La laine sur le dos de Lofti Achour (Tunisie)
Dreamlands de Sara Dunlop (Royaume-Uni)
Timecode de Juanjo Gimenez (Espagne)
Imago de Raymund Gutierrez (Philippines)
Madre de Simon Mesa Soto (Colombie)
A moça que dançou com o diablo de João Paulo Miranda Maria (Brésil)
Après Suzanne de Félix Moati (France)
4:15 P.M. Sfarsitul Lumii de Catalin Rotaru et Gabi Virginia Sarga (Roumanie)
Il silenzio de Farnoosh Samadi Frooshan et Ali Asgari (Italie)
Fight on a swedish beach de Simon Vahlne (Suède)

Cinéfondation

La Cinéfondation a de son côté retenu dix-huit films (14 fictions et 4 animations) parmi les 2300 proposés par les écoles de cinéma. Quinze pays venus de trois continents y sont représentés, et sept films sont issus d’écoles qui participent pour la toute première fois. C'est également la première fois que des écoles de Bosnie-Herzégovine et du Venezuela voient l'un de leurs films retenu en Sélection. A noter par ailleurs que dix parmi les 18 ont été réalisés par des femmes.

Les trois Prix de la Cinéfondation seront remis par le jury présidé par Naomi Kawase lors d'une cérémonie précédant la projection des films primés le vendredi 20 mai.

In the hills de Hamid Ahmadi (Royaume-Uni)
Submarine de Mounia Akl (États-Unis)
A nyalintas nesze de Nadja Andrasev (Hongrie)
Toate Fluviile curg în mare d'Alexandru Badea (Roumanie)
Ailleurs de Mélody Boulissière (France)
Gabber lover d'Anna Cazenave Cambet (France)
The Alan dimension de Jac Clinch (Royaume-Uni)
Poubelle d'Alexandre Gilmet (Belgique)
Dobro de Marta Hernaiz Pidal (Bosnie-Herzégovine)
La culpa, probablemente de Michael Labarca (Venezuela)
Las razones del mundo d'Ernesto Martinez Bucio (Mexique)
1 kilogram de Park Young-ju (Corée du Sud)
Aram de Fereshteh Parnian (France)
Gudh de Saurav Rai (Inde)
La santa che dorme de Laura Samani (Italie)
Bei Wind und Wetter de Remo Scherrer (Suisse)
Anna de Or Sinai (Israël)
Business de Malena Vain (Argentine)

Steven Spielberg enchaîne les projets (et ne peut plus se passer de Mark Rylance)

Posté par vincy, le 12 avril 2016

Le Pont des espions est sorti en décembre. Le Bon gros Géant est prévu sur les écrans en juillet (et pourrait faire son avant-première à Cannes le mois prochain). Reader Player One va commencer son tournage cet été. Steven Spielberg ne chôme pas. Et pour mieux remplir son agenda avant de filmer la cinquième aventure d'Indiana Jones, programmée dans les salles, pour l'été 2019, il vient de confirmer qu'il tournerait The Kidnapping of Edgardo Mortata durant l'hiver 2017 pour une sortie pour la fin de cette même année.

Le projet était dans les cartons du réalisateur depuis un an. mais jusque là, il s'agissait d'un script parmi d'autres sur la table du cinéaste. Scénarisée par Tony Kushner (Munich, Lincoln), l'adaptation de l'essai de David Kertzer, Pie IX et l'enfant juif : l'enlèvement d'Edgardo Mortara, paru en France en 2001, raconte à l'histoire vraie d'un jeune juif qui fut secrètement baptisé catholique avant d'être retiré à sa famille pour être élevé par des Chrétiens. Les faits se déroulent au XIXe siècle. Les parents se sont battus et l'affaire, rendue publique, a été récupérée dans un conflit politique entre le Vatican et l'Italie, tout juste unifiée et démocratique.

Mark Rylance, Oscar du meilleur second rôle masculin pour Le pont des espions et incarnant le bon gros géant (de synthèse) dans The BFG, aurait déj) enrôlé pour l'un des rôles principaux. Auparavant, il tournera en France Dunkirk, le nouveau film de Christopher Nolan qui commence ses prises en mai.

Cannes 2016: le prix du documentaire l’Oeil d’or révèle son jury

Posté par vincy, le 12 avril 2016

Pour sa deuxième édition, le Prix du documentaire L'Oeil d'or, initié par la Scam et la réalisatrice Julie Bertuccelli, s'offre un jury en ... or. Remis à Cannes et récompensant les documentaires issus de toutes les sélections, L'Oeil d'or, bénéficie du soutien du Festival et d'un partenariat avec l'INA.

Cette année, le jury sera présidé par le cinéaste italien Gianfranco Rosi, Ours d'or à la dernière berlinale pour Fuocommare et Lion d'or à Venise en 2013 pour Sacro Gra. Autour de lui, on retrouvera la réalisatrice Anne Aghion (Au Rwanda on dit la famille qui ne parle pas meurt, Mon voisin le tueur-, la comédienne Natacha Régnier (Le fils de Joseph, La vie rêvée des anges), l'ancien directeur des documentaires d'Arte, Thierry Garrel (commissaire et conseiller artistique) et le critique et fondateur du festival de docus It's All True / É Tudo Verdade à Sao Paulo et Rio de Janeiro, Amir Labaki.

Le prix sera décerné le 21 mai. Il est doté de 5000 euros. L'an dernier, le jury de Rithy Panh avait primé Allende, mi Abuelo Allende de Marcia Tambutti Allende.

Almodovar: les malheurs de Julieta

Posté par vincy, le 12 avril 2016

Pauvre Pedro Almodovar. Cette semaine sera sans doute la pire de sa carrière. Outre que son nom apparaît dans les #PanamaPapers, son vingtième film, Julieta, a fait un bide au box office espagnol ce week-end lors de sa sortie. Selon Rentrak Spain, le film a récolté 585 000 € pour son premier week-end (79 000 entrées) et se fait même battre par Kiki, el amor se hace, qui est sorti la semaine précédente.

Il est ainsi loin des Amants passagers (1,9M€), des Etreintes brisées (912K€), de Volver (1,8M€), de Parle avec elle (1,74M€) et de La piel que habito (1,2M€). Certes la plupart de ces film a eu le droit à une distribution un peu plus massives. Julieta n'est sorti que dans 185 salles quand les autres films cités avaient eu accès à plus de 220 écrans. Paradoxalement, cela lui permet d'avoir la meilleure moyenne par copie de la semaine. Mais au final, Almodovar ne battra pas son trio de tête (Femmes au bord de la crise de nerfs, 3,3M d'entrées, Tout sur ma mère, 2,6M d'entrées et Talons Aiguilles, 2M d'entrées).

Agustin protège Pedro

Julieta a sans doute souffert du souvenir mitigé des Amants passagers et de critiques divisées à son encontre. Mais c'est surtout les révélations autour de la présence de son nom dans les Panama Papers qui ont perturbé le marketing du film. Suite à cette révélation, le cinéaste a annulé sa présence à l'avant-première du film, à la conférence de presse et à ses interviews promotionnelles. Pedro et son frère Agustin, qui gère leur société de production, El Deseo (El Clan, Les nouveaux sauvages), sont en effet mentionnés parmi les noms de possesseurs de comptes offshore gérés par la firme panaméenne Mossack Fonseca. Durant trois ans, entre 1911 et 1994, alors que les films de Pedro Almodovar ont commencé à avoir un succès mondial, El Deseo détenait ne société offshore domiciliée dans les îles Vierges britanniques et gérée par Mossack Fonseca, Glen Valley Corporation. Ça la fout mal pour un cinéaste de gauche qui a toujours vilipendé la corruption et le manque d'argent dans la culture.

On ne sait pas combien d'argent a transité par cette société échappant aux impôts, ni à quoi a pu servir ces sommes. Agustin Almodovar a compris l'impact de ces révélations sur l'image de son frère, la carrière de son film et bien sûr la psychologie du cinéaste, atteint de plein fouet. Après un premier communiqué laconique et clinique, à la manière d'un David Cameron, Agustin a donc rédigé un second communiqué pour endosser toute la responsabilité de l'affaire: "Dès les premiers moments de la constitution d’El Deseo, (…) j’ai pris en charge la gestion de l’entreprise et lui s’est dédié aux aspects créatifs." En 1991, sous la recommandation de ses conseillers, "face à une possible expansion internationale de l’entreprise", il a créé cette société offshore. "Cependant, on a laissé mourir la société sans activité car elle ne collait pas avec notre manière de travailler", précise-t-il, en assurant être en règle "avec toutes les obligations fiscales."

Julieta sort en France le 18 mai. Mais le rayon de soleil pour Almodovar pourrait arriver dès jeudi, avec sa présence dans la compétition du Festival de Cannes.

BIFFF 2016 : Corbeau d’or pour le japonais I am a hero de Shinsuke Sato

Posté par kristofy, le 11 avril 2016

Le 34e BIFFF, le Bruxelles International Fantastic Film Festival, s’est déroulé comme les autres années dans une joyeuse ambiance : plus d’une centaines de films au programme, et environ 53 000 spectateurs ont été de nouveau fidèles au rendez-vous (dont l'Entarteur Noël Godin et la réalisatrice Axelle Carolyn). Les attentats du 22 mars en Belgique la semaine précédant le début du festival n’auront eu aucune incidence sur le cinéma, à l'exception de l’absence de Kevin Smith, et c’est tant mieux ! Même la zombie-parade s’est traînée dans les rues.

Une centaine de films donc, certains en avant-première mondiale ou européenne, avec de la fantasy, du thriller, de la science-fiction, des fantômes, des psychopathes divers et des zombies affamés… Les trois nouvelles répliques cultes de cette année (peut-être reprises par les Bifffeurs l’année prochaine ?) auront été “Nimus” (une petite fille qui cherche son lapin, que ses parents sont en train de manger dans What we become de Bo Mikkelsen), “la la la” (trois notes à chanter pour reconnaître la personne qui va nous aimer dans The virgin psychotics de Sono Sion) et “wunderbar” (la satisfaction des petites créatures dans Yoga hosers de Kevin Smith).

Grand prix pour I am a hero


La plupart des films ont été vus par différents jurés dans le cadre de la Compétition internationale, la Compétition européenne, la Compétition 7e Orbit, la Compétition Thriller… Cette année, l'Asie est particulièrement à l'honneur avec le Corbeau d'or pour le film japonais I am a hero de Shinsuke Sato,adaptation d'un manga.Dans un pays qui sacralise la bande-dessinée (un musée, des sculptures et des illustrations de BD sont partout dans la ville), voilà une récompense assez symbolique de la grande proximité entre 9e art et 7e art.

Ont aussi été distingués deux films coréens tandis qu'une mention était attribuée à un chinois. En revanche, Yoga hosers de Kevin Smith est une petite déception et seuls deux gros favoris ont véritablement émergé et logiquement été récompensés : I am a hero, grand prix donc, et Anacleto, agent secret, prix du public.

Les autres titres forts du BIFFF comme par exemple 31Hardcore Henry, Green room, The survivalist, Summer camp, Veteran, Memories of the sword, Scherzo Diabolico, Le cadavre de Anna Fritz... ne figuraient pas dans la compétition internationale, mais ils ont bien fait sensation. Même le très très romantique The beauty inside en provenance de Corée a laissé les Bifffeurs muets d'émotion, eux qui d'habitude n'hésitent pas à partager leur joie (quand c'est bien sanglant) ou leur désapprobation (quand c'est ennuyeux).

Tout le palmarès

Le palmarès de la Compétition Internationale, avec autour du président du jury Jaume Balaguero, les actrices Bai Ling et Jasna Kohoutova, et Marc Caro et Luigi Cozzi :

- Corbeau d’Or, Grand Prix : I am a hero, réalisé par Shinsuke Sato (le dernier film présenté en compétition aura été le meilleur, un film de zombies spectaculaire, jouissif), sortie le 23 avril au Japon.
Corbeau d’Argent ex aequoThe Phone réalisé par Kim Bong-joo (polar où un homme essaye d'empêcher sa femme de mourir un an après son assassinat)
Corbeau d’Argent ex aequoSeoul station réalisé par Yeon Sang-ho (une classique histoire de zombies sans relief mais en film d'animation, par l'auteur de The king of pigs passé par Cannes)
- Mention spéciale : The arti : the adventure begins de Huang Wen Chang (film d'animation avec des marionnettes)

Le palmarès des autres sections :

Méliès d’Argent : Demon, réalisé par Marcin Wrona (en effet une belle surprise, revoir ici)
Prix ThrillerThe Photographer, réalisé par Waldemar Krzystek
Prix du 7e Parallèle : Traders, réalisé par Rachael Moriarty et Peter Murphy (l'irrévérence british ou plutôt irlandaise frappante, des désespérés organisent des duels à mort avec à la prime les économies du vaincu)
- Prix du Public : Anacleto, agent secret (Spy time), réalisé par Javier Ruiz Caldera (son deuxième prix du public après son film précédent Ghost Graduation en 2013, il était d'ailleurs favori, à revoir ici)

27 millions d’euros pour agrandir le Palais des Festivals de Cannes

Posté par vincy, le 10 avril 2016

Enfin! Le conflit entre la mairie de Cannes et le Festival international du film de Cannes serait en passe d'être résolu. Le Palais des Festivals de Cannes devrait être agrandit. Aujourd'hui il souffre de son succès: pas assez de salles (8 au total), et la salle éphémère du Soixantième coûte cher entre son installation et son coût de gardiennage . A cela s'ajoute qu'il est souvent un dédale confus pour se retrouver entre les différents étages. Le Palais devenait de plus en plus inadapté pour assurer la croissance du Festival et satisfaire les attentes des organisateurs d'événements.

Le maire de Cannes, David Lisnard a officialisé le projet de refonte et d'extension du "Bunker", pour 27 millions d'euros. "Il faut continuer à faire évoluer le palais pour répondre aux attentes du Festival de Cannes et du Festival de la publicité", a déclaré le maire.

D'ici 2019, le Palais devrait donc s'agrandir de 1000 m2, avec une salle de projection de 500 places, une salle de gala et de concert pouvant contenir 1500 personnes (qui remplacerait la salle du Soixantième), et une salle d'exposition. Sont également envisagés: la rénovation du Salon des Ambassadeurs, qui accueille de nombreux événements institutionnels durant le Festival, et la Rue intérieure. Cette dernière, qui relie l'auditorium Louis Lumière, le Théâtre Claude Debussy, une des salles de presse et l'espace Nespresso (où l'on sert des cafés aux accrédités) est un lieu parfois impraticable qui peut rappeler un carrefour de Tokyo en heure de pointe.

Le Palais a déjà fait l'objet de liftings récents, achevés l'été dernier: nouveaux fauteuils dans Lumière, façadisme (le béton triste s'est paré de dallettes blanches), etc... L'architecte Jean-Michel Wilmotte a aussi rénové le parvis qui surplombe les marches, créé un nouvel étage côté parvis, avec une salle supplémentaire de 280 m² au 4e étage, remplacement tous les escalators et les escaliers intérieurs d’entrée et de sortie du Grand Auditorium et remplacé les portes d’entrée en haut des Marches.

L'opération est vitale alors que la concurrence des villes de congrès devient vive en Europe (Vienne, Barcelone...) et dans le monde. Deuxième destination française de salons professionnels d’affaires après Paris, Cannes reçoit plus de 800 millions d’euros d’impact économique total, avec 275 900 congressistes accrédités et 17 000 emplois généré. Rien que pour le Festival de Cannes, l’impact économique primaire généré sur le territoire de Cannes et des 31 communes alentours est estimé à 72 millions d’euros (2014).

BIFFF 2016 : les films dont vous êtes le héros

Posté par kristofy, le 9 avril 2016

Cette année, la programmation du BIFFF comporte trois films qui exploitent le principe dit de la caméra subjective : ce que vous voyez à l’écran est la vision du personnage via ses yeux. Le spectateur se retrouve à la place du héros, ou presque. Le procédé est surtout utilisé dans les jeux-vidéo puisque le joueur avec sa manette doit conduire une voiture ou tirer sur des ennemis en étant actif sur l’action. Le processus d’immersion fonctionne alors à plein.

Devant un film, c’est plus difficile de se croire dedans : il faut déjà s’identifier au personnage principal (La femme défendue de Philippe Harel avec sa voix d’homme qui tombe amoureux de Isabelle Carré fonctionne mieux pour les spectateurs masculins), il faut s'imaginer agir comme lui (dans le remake de Maniac par Franck Khalfoun le spectateur est donc le tueur), il faut ne pas être trop attaché à ce qui est crédible dans la réalité (dans Enter the void de Gaspar Noé vous êtes un esprit entre la mort et la vie)... Le fantastique en général offre un fabuleux terrain de jeu d'expérimentations, en voici trois en particulier au BIFFF :

Jeruzalem, réalisé par Doron et Yoav Paz : tout ce qui se passe est vu à travers des smartglasses, une paire de lunettes connectée au web qui peut à la fois enregistrer des images photo ou vidéo, faire apparaître dans un coin le profil facebook de la personne devant soi, voire communiquer avec quelqu’un d’autre via skype. Le point de vue est celui d’une jeune femme qui fait du tourisme en Israël. Avec une amie, elle découvre Jérusalem : visite de la ville, arrivée à hôtel, repas entre amis…

Environ un tiers du film montre des choses anodines, longtemps après le début on attend encore qu’il se passe quelque chose avec les créatures infernales que l’on pressent. Enfin, une alerte dans la ville, des gens courent dans la panique, il faut s’enfuir ou se cacher. Comme tout le film est raconté via des lunettes électroniques, il va donc y avoir du mouvement : images saccadées, un endroit sans lumière, une chute, on pourrait presque s’y croire face ces immenses bestioles qui nous attaquent... C'est du found-footage (connecté au web), l'immersion fonctionne donc plutôt bien, mais au fond seule l'utilisation de ce procédé rend le film original.

Pandemic, réalisé par John Suits : tout ce qui se passe est vu à travers une petite caméra située dans le casque d’une combinaison de protection contre un virus. Une petite équipe qui porte ce type de combinaison a pour mission de retrouver des personnes qui ne seraient pas infectées par le virus Fila qui transforme tout le pays en zombies… Ici, il y a surtout le point de vue subjectif de quatre personnages qui sont presque toujours ensemble, le principe de caméra subjective ne fonctionne pas vraiment puisque en fait il y a des champs contre-champs comme dans n’importe quel autre film, même des transitions via des images de surveillance vidéo et même quelques plans où des personnages sont filmés de face alors qu’il n’y a personne devant eux.

Au début, cela ressemble à beaucoup d’autres histoires du même genre, cependant au fil des rebondissements, le scénario est assez malin pour se distinguer des autres films du même acabit. Mieux, ce procédé de point de vue subjectif qui donc ne fonctionne pas se révèle pour plusieurs séquences un moyen original de filmer l’action (par exemple lors d'un combat façon fps dans une école, ou lorsqu'on est à la place d’un personnage qui se fait dévorer les boyaux…). L'immersion fonctionne moyennement, il aurait mieux valu ne garder ce procédé que pour certaines séquences, mais le film est plutôt vraiment bien.

Hardore Henry, réalisé par Ilya Naishuller : tout ce qui se passe est vu à travers les yeux de Henry (pas de caméra), dès le début du film Henry se réveille sans presque aucun souvenir et sans pouvoir parler, Henry (et donc le spectateur lui-aussi) découvre où il est et ce qui lui est arrivé : vous avez été sérieusement blessé et on vous greffe des prothèses. Soudain un commando arrive et il vous faut fuir : vous êtes alors lancé dans une folle course-poursuite pendant environ 90 minutes en Russie. Vous allez chuter de haut, courir au dessus d'un fleuve, être dans un bus en flammes; et surtout taper et tuer beaucoup d'ennemis dans la rue, dans un club libertin, dans une forêt...

L'immersion fonctionne très bien, le film est une succession de séquences complètement dingues rien que vos yeux. Pour qui n'est pas allergique aux films de genre cyberpunk et surtout pour qui aime être époustouflé par de l'action quasi non-stop dans tout les sens : rendez-vous pour découvrir cette folie en salles de cinéma le 13 avril !

15 films avec Pierre Richard à voir à la Cinémathèque

Posté par vincy, le 9 avril 2016

En avril, découvre des films. Pierre Richard appartient à notre mémoire cinéphilique collective. On le voit gamin, au premier degré, en maladroit burlesque, plus Harold Lloyd que Chaplin. Et puis, en revoyant ses films, cet anti-héros lunaire apparaît comme étrangement subversif, rebelle même dans des comédies qui dénonçaient les individualismes, le consumérisme, ou même le repli sur soi. La poésie se mêle au rire, l'absurde compromet les tenants de l'ordre. Il est un grain de sable, à la Chaplin, dans les Temps modernes.

Heureuse initiative, donc, de voir la Cinémathèque française lui rendre hommage, depuis mercredi et jusqu'au 27 avril.

15. La Course à l'échalote de Claude Zidi (1975), avec Jane Birkin, Michel Aumont.
Les banques coupables de malversations? Le film est une aimable comédie où le patronat est pourri jusqu'à la moelle.

14. Un nuage entre les dents de Marco Pico (1973), avec Claude Piéplu, Philippe Noiret.
Film très méconnu autour de deux journalistes de faits-divers qui démontre, notamment, la manipulation des médias, avides de scoops.

13. Le Retour du grand blond d'Yves Robert (1974), avec Mireille Darc, Jean Rochefort.
La suite du Grand Blond est moins percutante mais pas moins drôle. La séquence finale empruntée à L'homme qui en savait trop d'Alfred Hitchcock vaut à elle seule le détour.

12. Essaye-moi de Pierre-François Martin-Laval (2005), avec Pierre-François Martin-Laval, Julie Depardieu.
L'ex Robin des Bois rend hommage à Richard avec son personnage de rêveur romantique. La comédie se laisse regarder pour ceux qui doutent encore qu'il faut garder son âme d'enfant.

11. On aura tout vu de George Lautner (1976), avec Miou-Miou, Jean-Pierre Marielle.
Satire sur le monde du cinéma, avec en toile de fond, l'avènement et la puissance du film porno. On reconnaît là le goût de Pierre Richard pour les sujets de société, où l'idéal et le rêve se fracassent à une réalité cynique.

10. En attendant le déluge de Damien Odoul (2003), avec Anna Mouglalis, Damien Odoul.
Peut-être l'un des plus beaux personnages incarné par le comédien. Dans ce délire entre hurluberlus, où la mort se confronte à la vie, il y a une envie jouissive, à la Tati, de profiter du présent. Pierre Richard y est impérial.

9. Le Coup du parapluie de Gérard Oury (1980), avec Gert Froebe, Valérie Mairesse.
Entre potacherie et jamesbonderie, cette comédie policière sous le soleil de Saint-Tropez est un enchaînement de gags à la Blake Edwards, avec, en moment culte, une publicité pour de la nourriture pour chiens.

8. Juliette et Juliette de Remo Forlani (1973), avec Annie Girardot, Marlène Jobert.
Richard est entouré de deux des plus grandes actrices de l'époque. Entre portrait d'une société où la précarité est déjà là et féminisme affirmé, ce film oublié, qui passe parfois à côté de ses sujets, révèle déjà la vulnérabilité des mâles.

7. Je suis timide mais je me soigne de Pierre Richard (1978), avec Aldo Maccione, Mimi Coutelier.
Impossible de vivre quand on est timide à l'extrême. De ce constat, Pierre Richard va créer des situations rocambolesques et parfois de grands moments de cinéma comique (notamment la scène du resto et celle des pompiers).

6. Le Jouet de Francis Veber (1976), avec Michel Bouquet, Fabrice Greco.
Sans doute l'un de ses films les plus noirs, sous ses apparences très colorées. Véritable cri de révolte contre un monde trop cadré et critique du pouvoir sans âme, le film "s'amuse" avec perversité d'une relation masochiste entre un patron et un chômeur.

5. Les Malheurs d'Alfred de Pierre Richard (1971), Anny Duperey, Pierre Mondy.
Tout commence avec un suicide et tout finira avec un carnage. Se moquant de l'élite parisienne, de la télévision, de ses jeux débiles et de ceux qui se prennent trop au sérieux, cette comédie des petits contre les forts reste étrangement actuelle.

4. Le Distrait de Pierre Richard (1970), avec Marie-Christine Barrault, Bernard Blier.
Ode à l'imagination et à la rêverie. La distraction comme hymne à la vie: c'est le moteur d'une succession de scènes d'anthologie où là encore le système trop cadré (ici du milieu de la publicité) se voit dynamité à coups de gaffes.

3. Les Fugitifs de Francis Veber (1986), avec Gérard Depardieu, Jean Carmet.
Dernier film de la trilogie inégalée du trio Veber-Depardieu-Richard, cet immense succès des années 1980 compose avec un scénario bien ficelé et des situations cocasses, en finissant en famille recomposée se jouant des genres sexués.

2. Le Grand blond avec une chaussure noire d'Yves Robert (1972), avec Bernard Blier, Jean Rochefort, Mireille Darc, Jean Carmet.
L'une des plus grandes comédies du cinéma français: casting, dialogues, scénario. Tout y est. Les acteurs, au jeu volontairement désaccordé, sont en totale harmonie. Mais à y réfléchir de plus près, Le grand blond est aussi un film d'anticipation sur la société de surveillance et le peu de considération de l'autorité pour la liberté et l'individu.

1. La Chèvre de Francis Veber (1981), avec Gérard Depardieu, Corynne Charbit.
Summum de l'art comique de Pierre Richard, l'alchimie avec Depardieu (il faut voir la tête du monstre face au distrait-timide-maladroit) fonctionne à merveille, entre aventures improbables, répliques cultes, humour décalé, usant aussi bien des gags du cinéma muet que de situations atemporelles. Assurément le chef d'oeuvre de la filmographie de Richard (et de Veber), parvenant à montrer que la folie douce est un moyen de trouver le bonheur et l'amour dans un monde violent.

La fin du Grand Ecran Italie

Posté par vincy, le 9 avril 2016

Depuis la fermeture du Grand Ecran Italie il y a dix ans, la guerre était ouverte entre une association (Sauvons le Grand Ecran) qui défendait l'idée d'une grande salle de cinéma dans le centre commercial du sud de la capitale, et la mairie, qui avait d'autres projets pour occuper les lieux. Un temps, cet espace a failli devenir une sorte de megastore de fringues, un musée, un club de gym et même un multiplexe.

Le Grand Ecran c'était le plus grand des écrans parisiens. Inauguré en 1992, il est alors un survivant d'une époque dont il ne reste plus que le Max Linder sur les Grands boulevards: une salle panoramique dédiée aux films spectaculaires. Finalement, il va passer sous la coupe de Juste pour rire, la société québécoise chargée de produire des festivals, des spectacles, des émissions télévisées et des programmes pour les compagnies aériennes. A deux pas du Chinatown de Paris, le groupe va installer son QG européen.

Juste pour rire va devoir gérer une salle de 900 places et une plus petite de 150 places. La métamorphose du lieu a été confiée à l'architecte Daniel Vaniche (Bercy, Pleyel). On se doute que les spectacles (musique, cabaret, humour, danse, cirque...) y seront en vedette. Mais c'en est terminé du cinéma, hormis des projections ou événements exceptionnels.

On peut se réjouir que le lieu ne devienne pas un énième magasin de fripes ou une grande enseigne de bricolage, et conserve ainsi sa vocation "culturelle". Mais on peut aussi constater que c'est un cinéma qui meurt définitivement. Ce qui ne fera pas pleurer MK2 (Bibliothèque), Pathé (Les fauvettes, Ivry), UGC (Gobelins) et les indépendants du coin (La Clef, L'Escurial, L'Epée de bois). Le quartier dispose de pas mal de salles.

La Place d'Italie et son quartier vont être complètement réhabilités à l'occasion d'une grande opération urbaine. A l'horizon 2017, le Grand Ecran se transformera en Grand Eclat de rire (ou pas). Juste pour rire a, parmi ses artistes, Franck Dubosc, Stéphane Rousseau, Arturo Brachetti, André Sauvé et Alex Vizorek. La société a été créée en 1983 par Gilbert Rozon.