2013 : 12 adaptations, 9 suites, 6 films d’animation, 3 films français dans le Top 20 français

Posté par vincy, le 3 janvier 2014
Moi Moche et méchant, publicité

Moi, Moche et Méchant

Le box office français provisoire de l'année 2013 (au 31 décembre) révèle une situation inédite depuis des lustres : la relative absence du cinéma français. Avec seulement 3 films classés parmi les 20 films les plus vus (avec un 4e qui a manqué d'y être de très peu, 9 mois ferme), cela reflète la faible part de marché annuelle du cinéma nationale (autour de 33% seulement, soit une baisse de 7 points par rapport à l'an dernier).

On incriminera sans doute le nombre d'insuccès incalculables, l'absence de grosses productions offertes au programme, des films populaires médiocres, une carence de films de genre (action, animation, aventures) et une surdose de comédies moyennes... Eyjafjallajökull avec Dany Boon illustre parfaitement cette tendance. On peut toujours se réjouir que des films comme ceux de Kechiche, d'Ozon, de Farhadi, de Jaoui ou de Tavernier aient pu rencontrer leur public : mais le cinéma d'auteur ne lutte pas dans la même catégorie. Le cinéma français a capitulé dans le segment familial, celui qui attire aussi bien les enfants que les parents (Belle & Sébastien devrait prouver en rentrant dans le Top 20 définitif de l'année qu'il y a de la place pour ce genre de films), mais aussi dans le segment ados (là où les Américains triomphent).

Hollywood a donc dominé le marché (les 5 premiers distributeurs de l'année sont tous des branches de studios américains, Warner en tête). Avec des suites (9 sur 20 quand même!), des films d'animation (6 au total, dont le leader annuel). Surtout on remarque qu'il y a 12 adaptations de BD/Comics (dont 3 BD francophones), de romans et de pièce de théâtre dans ce Top 20 ; c'est un record! Quelques films singuliers signés Tarantino et Cuaron (tous deux au dessus des 4 millions d'entrées!) se glissent parmi toutes ces suites, reboots, et autres adaptations. C'est dire leur exploit, soutenus par la critique comme par le bouche à oreille.

L'année 2013 ne fut donc pas très bonne avec une fréquentation estimée à 192,8 millions de spectateurs (en baisse de 5,3% par rapport à 2012 selon les premiers chiffres) : depuis 2009, c'est la première que la fréquentation est en dessous des 200 millions de spectateurs. On notera qu'aucun film n'a dépassé les 5 millions d'entrées, une première en 10 ans. Certes 6 seront (à terme) au dessus des 4 millions (tous américains). Mais pas un n'a vraiment fédéré le public. C'est cette fragmentation, cette absence de locomotives qui est inquiétante. Car sans offre, point de demande.

1. Moi, moche et méchant 2 : 4 640 852 entrées
2. Iron Man 3 : 4 386 028 entrées
3. Django Unchained : 4 303 569 entrées
4. Gravity : 4 059 993 entrées
5. Les Profs : 3 955 113 entrées
6. Le Hobbit: la désolation de Smaug : 3 771 570 entrées
7. La Reine des neiges : 3 738 385 entrées
8. Insaisissables : 3 005 837 entrées
9. Fast and Furious 6 : 2 994 362 entrées
10. Hunger Games: l'embrasement : 2 914 790 entrées
11. World War Z : 2 444 735 entrées
12. Turbo : 2 441 519 entrées
13. Les Croods : 2 350 349 entrées
14. Man of Steel : 2 303 132 entrées
15. Thor: le monde des ténèbres : 2 293 323 entrées
16. Les Schtroumpfs 2 : 2.263.030 entrées
17. Les Garçons et Guillaume, à table! : 2 155 940 entrées
18. Monstres Academy : 2 130 894 entrées
19. Boule et Bill : 2 006 408 entrées
20. Wolverine: le combat de l'immortel : 1 984 254 entrées

Fruitvale Station : rencontre avec le réalisateur Ryan Coogler

Posté par kristofy, le 2 janvier 2014

ryan coogler fruitvale station cannes 2013Fruitvale Station est un film dont on connaît d’avance la fin mais dont on ignore le début, et c’est cette histoire qui est racontée. Dès le début il y a les images d’un fait divers tragique enregistrées avec un téléphone portable. Sur le quai de cette gare à Oakland en Californie le 1er janvier 2009 à 2h15 du matin, un contrôle de police dégénère : le jeune Oscar Grant de 22 ans reçoit une balle dans le dos tirée par un policier. Bavure banale? Oui mais la victime est noire, le policier est blanc. Et le premier ne menaçait pas le second.

Le film nous fait le portrait de qui était Oscar Grant durant les 24 heures qui ont précédées ce drame. Il sort en France le jour de la date anniversaire du 1er janvier. Le film avait déjà été récompensé au Festival de Sundance, à Cannes et au dernier Festival américain de Deauville où nous y avions rencontré son réalisateur Ryan Coogler :

Ecran Noir : Fruitvale Station montre à différents moments de la journée des instants de la vie de Oscar Grant devant nos yeux…
Ryan Coogler : Je voulais trouver le moyen que les acteurs se surprennent entre eux, et qu’il y ait une fraîcheur de jeu. On avait un planning de tournage très serré, je me suis basé avant tout sur le scénario pour les plans prévus dans le planning de tournage, et après ça on pouvait respirer et essayer des choses. Pour moi il s’agissait d’abord de rendre compte des faits en s’attachant à l’humanité des personnes impliquées. L’histoire du film est avant tout celle de ces gens.

EN : Qu’est ce qui était le plus difficile à recréer comme scène de vie : la tension entre policiers et jeunes dans le train où l’intimité familiale entre Oscar, sa femme et sa fille ?
Ryan Coogler : Ce sont deux choses qui ont été difficiles à tourner pour différentes raisons. En premier lieu c’est  la contrainte du planning, très serré. Pour ce qui des séquences avec les policiers, on avait le quai de la gare à disposition seulement pour 4 heures de tournage ! Pour les scènes domestiques avec la famille, il y avait beaucoup d’émotions différentes à capturer à travers les disputes ou les coups de téléphones. Et là aussi il a fallu composer avec le facteur temps en ce qui concerne la jeune actrice qui joue leur petite fille : puisque c’est une enfant il y a des limitations spécifiques du nombre d’heures consécutives de tournage. Par exemple on ne pouvait pas la faire tourner après minuit. C’est la gestion du temps de tournage qui était la principale difficulté.

EN : Pensez-vous qu'une fiction réaliste est un témoignage plus puissant qu’un reportage aux informations de la télévision ?
Ryan Coogler : Oui je pense que cela peut être le cas. Je pense qu’un film peut rendre le public beaucoup plus proche des personnages. Pour ce qui de la télévision, cela dépend comment le reportage est monté. Pour le cas d’Oscar, le drame a été enregistré par des téléphones. Voir ce genre d’enregistrement des faits nous fait devenir témoin de ce qui c’est passé, mais d’autres incidents arrivent sans qu’on puisse en voir des images. Ils ne sont que racontés. Un film apporte beaucoup de proximité, voir même de l’intimité, et peut apporter d’autres éléments à mettre en perspective. Fruitvale Station a eu une certaine répercussion dans le milieu de la police, à propos des procédures de certains agents. J’espère que ce genre d’incident ne se reproduira plus.

Pour les moins de 14 ans, le ticket de cinéma est à 4€

Posté par vincy, le 2 janvier 2014

Au 1er janvier 2014, la TVA sur les billets de cinéma a été réduite à 5,5%, comme pour les livres ou les billets de spectacle. Cette baisse de la TVA ne devrait pas se faire ressentir sur le prix du ticket. Au mieux cela conduirait à une baisse de 9 centimes par ticket.

Par conséquent, la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) a préféré lancer une opération ciblée vers le jeune public et donc les familles. Depuis hier, un spectateur né dans les années 2000 ne paiera que 4 euros sa place de cinéma.

Cette opération a pour but de relancer la fréquentation des salles. Certes, elle est restée à un haut niveau en 2013 (195 millions de spectateurs), mais elle recule. Il s'agit aussi de promouvoir le cinéma auprès des futures générations de spectateurs, de fidéliser les gamins pour qu'ils continuent d'aller dans les salles quand ils seront plus grands. Les moins de 14 ans représenteraient 8 à 9% des entrées et, en moyenne, le billet de cinéma valait 5,5€ pour eux jusqu'à présent.

Une mesure qui pourrait fragiliser de nombreux films

Pour les parents, c'est une aubaine financière. Pour la profession, ça l'est moins. Cette opération ne sera réussie que si le volume de nouveaux spectateurs compense la perte financière qu'enregistreront les producteurs et les distributeurs.

La mesure a été prise sans concertation réelle, de façon unilatérale même. Et si, en nombre d'entrées, on verra peut-être un effet significatif sur les films familiaux et d'animation, en recettes, le résultat sera très différent et pourrait s'avérer périlleux pour la rentabilité de certains films. Certains films font en effet la moitié de leurs entrées avec des moins de 14 ans. Autant de billets moins chers qui pèseront sur la profitabilité d'une sortie et réduiront les marges des distributeurs et les royalties des ayant-droits.

Dans l'immédiat, les dépenses marketing vont sans doute en souffrir, y compris pour les blockbusters américains, si un distributeur veut rentrer dans ses frais. Ce n'est pas la même chose d'espérer un film réalisant 15 millions d'euros de recettes (La Reine des neiges par exemple) et au final de n'en recevoir que 12 millions. Des films de type Les profs, les Marvel, Belle & Sébastien qui attirent les enfants comme les pré-ados seront fragilisés financièrement. Rien ne dit que les producteurs ne prendront pas en compte cette donnée pour encadrer davantage, en amont, les budgets de production d'un film.

Pour l'instant, on attendra les rapports d'étape pour voir si cette mesure est viable économiquement. Mais le doute est permis. Le blllet à 4 euros ne pourrait vivre qu'un an. Et on pourrait regretter que la FNCF n'ait pas imaginé une mesure forte pour les films art et essais, plus vulnérables et indispensables à la diversité cinématographique. Car, ne nous leurrons pas, ce ticket "low cost" pour les jeunes profitera avant tout à des films populaires, qui n'avaient pas forcément besoin ni de ce coup de pouce en termes de fréquentation, ni de ce coup de couteau en termes de recettes.

L’instant Court : l’année 2013 en images

Posté par kristofy, le 1 janvier 2014

bestof2013Comme à Ecran Noir on aime vous faire partager nos découvertes, alors après Ivresse réalisé par Guillaume Canet et une carte blanche au réalisateur Sébastien Betbeder à l'occasion du Jour le plus Court, voici l’instant Court n° 125.

C'est l'heure de se remémorer les évènements qui ont marqué l'année 2013 au cinéma, avec en premier lieu le film La Vie d'Adèle - Chapitres 1 et 2 qui gagné la Palme d'or à Cannes (également pour ses deux actrices) puis le Prix Louis Delluc, et qui a aussi été récompensé par les critiques de New-York tandis que la révélation Adèle Exarchopoulos est primée par les critiques de Los Angeles... en attendant les Césars voir même les Oscars.

La star de l'année 2013, c'est Leonardo DiCaprio avec Django unchained, Gatsby le Magnifique et Le Loup de Wall Street, et on connaît déjà un état des films qui ont été des échecs en n'ayant pas trouvé assez de spectateurs...

Avant d'autres bilans à venir, il faut remarquer aussi que certains des films les plus ambitieux à vouloir s'imposer aux Etats-Unis et ailleurs sont réalisés par le Mexicain Alfonso Cuaron, le Danois Nicolas Winding Refn et le Coréen Bong Joon-ho ; et que les femmes ont brillé elles-aussi comme la Canadienne Sarah Polley, Greta Gerwig, et Clio Barnard qui elle est la révélation britannique autant que Ben Drew...

Voici une sélection éclectique de films qui figurent parmi les plus belles surprises de l'année écoulée :

Django Unchained - Quentin Tarantino
Stories We Tell - Sarah Polley
Ill Manors - Ben Drew
Only God Forgives - Nicolas Winding Refn
La grande Bellezza - Paolo Sorrentino
Michael Kohlhaas - Arnaud Des Pallières
Frances Ha - Noah Baumbach & Greta Gerwig
Leviathan - Véréna Paravel et Lucien Castaing-Taylor
La Vie d'Adèle, Chapitres 1 et 2 - Abdellatif Kechiche)
Gravity - Alfonso Cuaron
Le Transperceneige (Snowpiercer) - Bong Joon-ho
Il était temps (About Time) - Richard Curtis
Le Géant égoïste (The Selfish Giant) - Clio Barnard
Suzanne - Katell Quillévéré
Deux automnes, trois hivers - Sébastien Betbeder

2013 : les films préférés de nos lecteurs

Posté par vincy, le 31 décembre 2013

Les mieux notés

1. Hijacking
2. Djeca, Enfants de Sarajevo
3. Elefante Blanco
4. Mud
5. Frances Ha
6. Grand Central
7. Un château en Italie
8. Les garçons et Guillaume, à table!
9. La vie d'Adèle
10. Inside Llewyn Davis

__________

Les plus consultés

1. La vie d'Adèle
2. Iron Man 3
3. Frances Ha
4. Moi, moche et méchant 2
5. Man of Steel
6. Oh boy
7. World War Z
8. Cloud Atlas
9. Before Midnight
10. Au bout du conte

6 films parmi les 100 meilleures audiences TV de l’année 2013

Posté par vincy, le 30 décembre 2013

benoit poelvoorde dany boon rien à déclarerLe cinéma reste une valeur sûre sur le petit écran : il fédère. Les chaînes de la TNT cartonne avec des blockbusters des années 80 et 90, mais pas seulement. Ainsi Seven et Arrête-moi si tu peux ont dépassé les 2 millions de téléspectateurs et Moi, moche et méchant a même atteint les 2,2 millions de téléphiles sur TMC. Sur France 4, Thor est la meilleure audience de l'année, et NRJ 12 avec Fast & Furious 4, NT1 avec X-Men : l'affrontement final ont dragué plus de 1,2 millions de "couch-potatoes". Arte a réalisé quelques une de ses meilleures audiences avec des films d'auteur grand public comme Sleepy Hollow de Tim Burton (1,9 million de téléspectateurs).  N'oublions pas France 2 qui a réalisé sa meilleure audience cinéma avec la énième reprise des Tontons flingueurs, en hommage à Georges Lautner tout juste décédé. Les James Bond font aussi recette sur la chaîne publique.

Globalement, évidemment, le sport et surtout les séries TV sont bien plus fédératrices. Pas étonnant que TF1 domine le classement annuel avec 99 des 100 meilleures audiences. Malgré la concurrence des nouvelles chaînes et malgré une part de marché inférieure à 25%, la première chaîne reste leader du petit écran. Et ce n'est pas étonnant que parmi ces 100 meilleures audiences 2013, les six films les plus vus (seulement 6 pourrait-on dire) soient tous diffusés sur TF1. Dany Boon reste la star incontestable de la France cathodique puisque son film Rien à déclarer est la 4e meilleure audience de l'année, tous formats confondus!

1. Rien à déclarer (France). 10 millions/37,4%

2. Avatar (USA). 9,7 millions/39,1%

3. Shrek 4, Il était une fin (USA). 8,3 millions/29,3%

4. Sans identité (R.Uni/Allemagne/France). 8,3 millions/31,5%

5. L'agence tous risques (USA). 7,7 millions/29,5%

6. La guerre des boutons (France). 7,5 millions/30,2%

Marilyn, l’icône en héritage : haines, fric et beauté

Posté par vincy, le 29 décembre 2013

marilyn monroe chanel n°5Plus de 41 ans après son suicide, Marilyn Monroe reste l'icône emblématique du cinéma hollywoodien. Chanel le prouve en la ressuscitant dans sa dernière publicité pour le parfum culte N°5, où des archives de la star et une interview d'elle en voix off suffisent à en faire un spot sublime, quand d'autres déploient des moyens grandiloquents pour des films pompeux.

Mais Marilyn c'est aussi une histoire d'héritage, au sens financier du terme. Et pour que Chanel puisse faire son spot publicitaire, il en a fallu des rebondissements. Pour que Marilyn redevienne une icône légendaire, il en fallu des haines, des batailles juridiques et des histoires de fric.

L'actrice avait rédigé son testament au pire moment de sa carrière, en janvier 1961. Elle vient de divorcer d'Arthur Miller. Elle sort d'un flop au box office (Le milliardaire) et d'un tournage éprouvant (Les désaxés). On évoque déjà son déclin.

Le testament de Marilyn, hors cash (pour ses proches, sa demi-soeur et pour le soutien financier à sa mère, internée), est étrange : 50% de son patrimoine revient à son pygmalion, son professeur, Lee Strasberg. Sans lui, elle ne "travaillerait" plus. 25% de ses biens reviennent à Marianne Kris, sa psy, épouse d'Ernst Kris, amie de Sigmund Freud. Sans la psychanalyse, elle aurait "sombré". Et le reste va à sa secrétaire, May Reys.

Evidemment, le testament sera contesté. Par sa conseillère financière d'abord, oubliée dans le document, et qui estime que Marilyn Monroe était sous l'influence des Strasberg et de sa psy. Par ses cousins ensuite, qui dénoncent une manipulation de la part de ses proches alors qu'elle était en dépression.

Un testament très contesté

D'autant qu'un mois après la rédaction de son testament, Rain, le projet pour la télévision concocté par Lee Strasberg afin de la maintenir "en vie" dans le métier, tombe à l'eau. Surdose de barbituriques. Marianne Kris l'interne alors pour qu'elle ne se suicide pas. Malgré ses appels, Lee Strasberg ne la délivrera pas de cette prison. Découvrant la double trahison de Strasberg-Kris, Marilyn, selon tous ses biographes, souhaitait changer son testament. C'est ironiquement son deuxième mari, le joueur de baseball Joe DiMaggio, qui la fera libérer.

Marilyn Monroe ne reverra plus Marianne Kris, qui est pourtant la bénéficiaire d'un quart de sa fortune. Elle avait donc parlé à son avocat pour pouvoir modifier son testament. C'est là le premier problème de l'héritage de la star. Logiquement DiMaggio, qui était revenu dans sa vie quotidienne, aurait du être parmi la liste des héritiers. Pourquoi léguer sa fortune à des gens qui la manipulaient, selon ses propres mots?

Elle décède en août 1962. Sa fortune s'élève à un peu moins de 93 000$, hors royalties, soit 718 000$ aujourd'hui. Ses effets personnels sont gardés par les Strasberg en vue de les donner un jour à un musée du cinéma.

marilyn monroe lee strasbergL'entrée de la cupide Anna Strasberg

Mais il faut attendre 1982 - quand Lee Strasberg meurt - pour que la "marque" Marilyn soit alors exploitée comme un produit de merchandising. La seconde femme de Strasberg, Anna, qui n'a jamais croisé Norma Jean Baker de sa vie, hérite de la marque, de l'image et de tout ce qu'a légué Marilyn à son mentor. Anna Strasberg lance alors une entreprise de licences et de publicité. De quoi faire fortune, de manière posthume, sans avoir un seul lien direct avec la star.

Le droit à l'image, jusque là inexistant, avait permis à de grands artistes (Warhol, Hamilton, Dali...), d'utiliser le visage ou la silhouette de l'actrice sans se soucier des royalties. Désormais, Marilyn devient une égérie aussi contemporaine que les mannequins des années 80. D'après le Wall Street Journal, la marque "Marilyn Monroe" rapporte 7,6 millions de dollars à Anna Strasberg entre 1983 et 1993. Les revenus seront exponentiels : en s'associant à CMG Worldwide, Anna Strasberg se voit garantir 1,1 millions de $ de revenus annuels rien qu'en licences (elle en gagnera 7,5 millions entre 1996 et 2000!). Cupide jusqu'au bout, elle cherche à récupérer les droits qui lui manquent, et notamment les 25 % légués à Marianne Kris, qui les a transmis à l'Anna Freud Centre de Londres, clinique psychiatrique qui a créé l'unité thérapeutique "Marilyn Monroe" pour enfants en difficulté.

Marilyn, produit de grande consommation

Cela n'empêche pas l'héritage de Marilyn de se multiplier en centaines de produits dérivés très variés, y compris du vin ou des vêtements pour animaux! Elle a du se retourner dans sa tombe. L'image est dégradée et l'obscénité commerciale à son summum. Au fil des ans, à force d'être vendue en couteaux, en mugs ou autres accessoires touristiques, Marilyn a subit une forte décote sur le marché publicitaire.

Cela n'empêche pas Anna Strasberg de vendre aux enchères les affaires personnelles de l'actrice, que son défunt mari aurait plutôt vu au musée. 13,4 millions de dollars récoltés par Christie's pour 1 000 objets. Le mythe ne meurt jamais. Mais Strasberg est de plus en contestée. En utilisant des photos à des fins publicitaires, elle viole de droit d'auteur le plus élémentaire en s'octroyant quasiment l'intégralité des dividendes : les photographes de Marilyn se rebiffent, exigent que les images soient créditées et réclament une part du pactole. Cela finit au tribunal, et il y a 5 ans, la cour de district de New York donne raison aux photographes lésés. Les titulaires de licence(s) peuvent négocier en direct avec les auteurs des photos, sans passer par Strasberg et CMG. La perte est si lourde que Starsberg fait appel, et termine la tête dans la boue avec des dépenses d'avocats démesurées et une condamnation à 200 000 dollars d'amende pour "manigances inacceptables".

anna strasberg marilyn monroeDe la défaite juridique de Strasberg à la renaissance de Marilyn

Anna Strasberg, comédienne ratée, qui a tout fait pour régner sur l'empire de son mari, jusqu'à évincer la première famille de celui-ci, subit depuis 30 ans une réputation terrible. Lorsque le testament de Strasberg est ouvert, on apprend ainsi que ses deux enfants de son premier mariage sont déshérités. Anna a tout récupéré, y compris les archives de l'Actors Studio, une autre mine d'or.

Evidemment, cette femme érudite et élégante n'est pas qu'un monstre : elle a aussi subit cet héritage coûteux (incluant des assurances exorbitantes), ces responsabilités énormes (la formation de dizaines de comédiens), et a tout fait pour le préserver, quitte à pactiser avecc le diable consumériste.

Il y a deux ans Anna Strasberg, alors âgée de 73 ans, rompt son contrat avec CMG et revend presque tous les droits sur Marilyn à Authentic Brand Group pour une somme comprise entre 25 et 50 millions de $. Le choix n'est pas que financier, il est aussi stratégique. Désormais, Marilyn incarnera l'élégance. L'affiche de Cannes en 2012 a marqué les esprits. Joaillerie avec Chopard, Tee-shirts et haute couture avec Dolce & Gabbana, cosmétiques ... Le luxe, rien que le luxe. Et une page Facebook (9,5 millions de fans, un compte Twitter, une présence sur Pinterest et Instagram. Sans oublier les films, les livres, les émissions de télévision... De quoi faire durer longtemps l'héritage de Norma Jean Baker, la plus célèbre blonde du 7e art.

47 Ronin et Angélique s’ajoutent aux plus gros fiascos de l’année 2013

Posté par vincy, le 28 décembre 2013

keanu reeves 47 ronin

L'année 2013 a été marquée par des flops financiers retentissants. Au point que certains experts et grands cinéastes ont prédit la fin du modèle hollywoodien tel qu'on le connaît depuis une quarantaine d'années (lire notre actualité du 8 juillet). Au point aussi que la polémique lancée il y a un an par Maraval en France sur la surévaluation des cachets des stars a perduré tout au long de l'année.

Si tout cela est un peu alarmiste - de nombreux films ont été largement rentables et le box office ne se porte pas si mal, globalement - l'ampleur des échecs souligne, notamment en temps de crise, une fragilité du marché. Les conséquences de ces fiascos ont été redoutables, avec, par exemple des licenciements chez des producteurs qu'on croyait intouchables (Pathé en France, Pixar aux Etats-Unis) ou des têtes qui sautent en haut de la hiérarchie.

9 désastres à plus de 8 chiffres

Dernier en date : 47 Ronin, du studio Universal. Avec 7 millions de $ mercredi, son premier jour aux USA, après un désastre au Japon il y a deux semaines, ce devrait être le pire démarrage nord-américain de l'année pour un film de plus de 150 millions de $ : Hollywood estime son B.O. à 20 millions seulement sur 5 jours. C'est la deuxième fois que Universal se plante cette année, après R.I.P.D. Brigade fantôme, qui aura finalement couté au minimum 60 millions de $ au studio.

D'ores et déjà, Universal va faire passer le film dans ses pertes, qui seront compensées par les cartons de Fast & Furious 6 et Moi, moche et méchant 2. Le studio finit quand même 3e de l'année en Amérique du nord, derrière Disney et Warner (ces deux là sont aussi leader en France).

Aucun studio n'a échappé à un fiasco mondial. Walt Disney a enregistré des pertes colossales (200 millions de $ selon les estimations) avec The Lone Ranger. Lionsgate n'a pas pu recouper le coût de Ender's Game (150 millions de $ avec le marketing) qui n'a rapporté que 90 millions de $ dans le monde. DreamWorks a subit une forte déconvenue avec Le Cinquième pouvoir : à peine 8 millions de $ de recettes pour 40 millions de $ de budgets et autres frais. Dans le même ordre de grandeur, le dernier Spike Lee, Oldboy, a encaissé une perte de 30 millions de $ au petit distributeur Filmdistrict. Warner Bros n'a pas eu de chance avec Jack le chasseur de géants (90 millions de $ de pertes) ou avec le Stallone, Du plomb dans la tête (10 millions de $ de recettes mondiales, 55 millions de $ de budget de production, hors marketing). Et last but not least, Machete Kills, malgré un budget "moyen" de 33 millions de $ n'aura même rapporté la moitié de son coût de production.

angelique marquise des angesMoyens et gros budgets boudés par le public en France

En France aussi tout le monde est touché, y compris les "films du milieu" et donc les distributeurs indépendants. Rezo films avec La confrérie des larmes (33 000 entrées, 5,5 millions d'euros de budget), Océan films avec Victor Young Perez (46 000 entrées, 4,3 millions d'euros de budget), SND avec Denis (49 000 entrées, 5 millions d'euros de budget), Le Pacte avec Le jour attendra (90 000 entrées, 2,6 millions d'euros de budget)...

Dernier en date, Angélique, avec 15 millions d'euros hors marketing, qui s'écroule à 70 000 entrées pour sa première semaine, n'entrant même pas dans le Top 10. Car les plus gros distributeurs souffrent aussi : Grand départ et Hotel Normandy chez StudioCanal, Intersections chez Europacorp, Cookie chez UGC, Pop Redemption chez Gaumont n'ont pas dépassé les 100 000 spectateurs ou difficilement comme La marque des anges, qui enregistre 150 000 entrées pour 15 millions d'euros de budget. On peut s'appeler Guillaume Canet et avoir du succès avec Jappeloup comme se planter avec Blood Ties. Le star-système n'est qu'un système médiatique.

Ajoutons ceux qui n'ont vraiment pas rentabilisé l'investissement initial, et de très loin, comme Une chanson pour ma mère, Des gens qui s'embrassent (160 000 entrées pour près de 18 millions d'euros de budget!), La marche, Eyjafjallajökull, Les Reines du ring, L'écume des jours, 100% cachemire, Au bonheur des ogres...

Mais il y a aussi des films très rentables, et c'est plutôt réjouissants. De La vie d'Adèle à L'inconnu du lac, de Guillaume et les garçons à table! à La cage dorée, des Profs à 9 mois ferme en France. Des Flingueuses aux Miller, une famille en herbe, de Conjuring aux Insaisissables, du Majordome à C'est la fin aux Etats-Unis.

Il n'y a pas de recettes pour faire des recettes. Si ce n'est qu'investir lourdement dans un film est peut-être un risque trop grand actuellement. A moins de s'appeler Cuaron, Cameron ou Jackson.

Un B.O. Concert pour rendre hommage à la musique de film

Posté par vincy, le 27 décembre 2013

Pour le 10e anniversaire, l’Union des Compositeurs de Musiques de Films organise un événement unique, le B.O CONCERT. Ce concert n'aura lieu qu'une seule fois, le 10 janvier, à 20h.

Pour l'occasion, les compositeurs césarisés, oscarisés et légendaires seront derrière le pupitre : Alexandre Desplat (5 nominations aux Oscars, un Golden Globe, 3 Césars), Eric Serra (un César), Gabriel Yared (un Oscar, un Golden Globe, 2 Césars), Claude Bolling (2 nominations aux Césars), Ludovic Bource (un Oscar, un Golden Globe, un César), Vladimir Cosma (2 Césars), Francis Lai (un Oscar, un Golden Globe, un César), Jean-Claude Petit (un César), Michel Portal (trois Césars), mais aussi Jean-Michel Bernard, Antoine Duhamel (5 nominations aux Césars), Cyril Morin et Philippe Rombi (2 nominations aux Césars). Avec en guest-star, le britannique Patrick Doyle (2 nominations aux Césars, Oscars et Golden Globes). Desplat, Yared et Doyle ont également été primés plusieurs fois aux World Soundtrack Awards.

Un orchestre philarmonique, composé de 65 musiciens, 3 solistes et 20 choristes, qui rejouera 25 partitions de bandes originales de films. Au programme les musiques de La jeune fille et la perle, Full Frontal, La Science des Rêves, Borsalino, The Artist, Ridicule, Love Story, Le Hussard sur le toit, Cyrano de Bergerac, Samsara, Arthur et les Minimoys, Camille Claudel et Indochine, entre autres.

_______

Réservations des tickets en ligne sur le site de la Fnac

Wall Street : 7 films pour comprendre la folie boursière

Posté par vincy, le 26 décembre 2013

Michael Douglas Leonardo DiCaprio Kevin Spacey

Si Le Loup de Wall Street a un défaut majeur, c'est bien celui d'une impression de déjà vu. Pas seulement parce que le film de Martin Scorsese est une sorte de réplique de Casino, mais aussi parce que l'univers des traders à Wall Street a déjà inspiré des films qui nous ont donné de véritables leçons de finances.

En 7 films, Hollywood a fait le tour de la folie des traders, des effets d'un crash boursier, de l'immoralité des transactions financières et autres OPA et IPO...

- Wall Street (1987). Oliver Stone. Michael Douglas aura un Oscar pour son personnage de requin, Gordon Gekko. C'est de manière indéniable le plus sensationnel et limpide des films sur la spéculation et la superficialité de ce métier. Stone n'avait pas seulement introduit le téléphone portable dans un film, il avait signé un pamphlet anti-libéral en réaction à l'idéologie économique dominante des années 80. Ironiquement, le film avait pour titre de travail Greed (Cupidité). L'un des 7 péchés capitaux.

- Wall Street : l'argent ne dort jamais (2010). Après la crise financière de 2008, Oliver Stone décide de retrouver Gekko. 23 ans après, les enjeux ont peu changé, mais les moyens ont fortement progressé pour faire du cash rapidement, par dessus la justice. Wall Street n'est que l'atome principal d'un monde qui décide de l'avenir d'un pays ou d'une entreprise dans des paradis fiscaux ou des villes comme Londres. Le film a été présenté à Cannes. Moins bon, certes, mais d'actualité hélas.

- Margin Call (2011). J.C. Chandor. Une crise financière, de l'intérieur. Comme un huis-clos où se joue l'avenir d'un monde, en l'occurrence une vénérable société de Wall Street. Paul Bettany, Kevin Spacey, Jeremy Irons, Stanley Tucci... autant de requins qui vont voir leur vie basculer en quelques heures. C'est aussi le premier film sur l'arnaque des comptes financiers de ces sociétés d'investissement. Le chateau de cartes s'écroule d'autant plus facilement que tout cela n'est que du vide. Et là encore, l'éthique n'est pas forcément la muse de ces "rois" qui restent impuissant dans la débacle. Un scénario écrit en quelques jours et qui sera nommé aux Oscars.

- Un fauteuil pour deux (1983). John landis. Eddie Murphy, dans l'un de ses premiers grands rôles, et Dan Aykroyd sont réunis pour le casse boursier de la décennie. Outre la fable sociale (la roue de la fortune tourne, le mépris des pauvres, l'impunité des riches), cette comédie est typique des années Reagan : la foi en l'argent. Mais grâce au duo de comédiens, c'est féroce et drôle. Le pire est que l'opération boursière est inspirée d'un fait réel. Au fil des ans, le film est devenu culte et reste un modèle dans le genre.

- Le bucher des vanités (1990). Brian De Palma. Tom Hanks, Bruce Willis, Melanie Griffith, et un roman de Tom Wolfe. C'était l'affiche parfaite. Ce sera le fiasco grandiose. Même si le film n'est pas réussit, ce qu'il évoque mérite qu'on s'y attarde. Il est à ranger dans la catégorie : je suis un faiseur de fric made in Wall Street, je suis invincible, et même insoupçonnable. Le bucher pour le vaniteux. De Palma s'intéresse davantage au puissant qui s'écroule pour un fait divers, et à cette impunité qu'ils ont dans leur ADN.

- American Psycho (2000). Mary Harron. Film détesté à sa sortie, sans doute parce qu'il a trahit le roman de Bret Easton Ellis, ce drame gore a surtout permis de poser un fondamental dans le cinéma : le métrosexuel lubrique, obscène, et sans morale incarné par Christian Bale. Il travaille à Wall Street (même si on ne le voit jamais bosser, parabole d'une activité professionnelle qui n'a aucun sens pour la société), il est donc dérangé. Comme DiCaprio est addict aux drogues et aux chattes, Bateman est accro au sexe et au sang.

Inside Job ( (2010). Charles Ferguson. Ce documentaire, avec Matt Damon en producteur et en guest, est un outil pédagogique incontournable pour comprendre la crise financière de 2008, dans sa globalité et dans ses effets : des millions de gens ont perdu leur job, leur maison. Des experts de plusieurs pays retracent les causes, les faits, les conséquences. C'est froid, clinique, terrifiant. Et le film a été oscarisé dans la catégorie documentaire. Dans le genre, il y a aussi Cleveland contre Wall Street.