Haïti, les tremblements de terre et le cinéma

Posté par vincy, le 15 janvier 2010

haiti1.jpgLe séisme de 7.3 qui a frappé Haïti, et dans une moindre mesure la République Dominicaine et Cuba restera parmi l'un des plus violents de ces dernières décennies. Je vous invite à suivre l'actualité de cette tragédie dans l'excellent dossier de Courrier International. Cela montre bien qu'une image est vecteur d'émotion, vaut 1000 discours. Ainsi est notre époque: l'image est le premier témoignage. Et là, d'images, il n'y en avait point durant les premières heures. Nous, consommateurs avides de sensations visuelles fortes, étions aveugles.

Alors on s'imaginait. Un tremblement de terre, nous savons ce que c'est. Dans 2012, dans Volcano, dans autant de films catastrophes, on "voit" bien à quoi cela peut ressembler en matière de dévastation. De San Francisco à Tremblement de terre, la Californie en a bavé au cinéma. Sans parler du cinéma japonais, très friand de secousses et de bétron friable. Produire des images terrifiantes pour évacuer nos peurs... Les immeubles s'écroulent, les routes se fissurent puis se déchirent, le mobilier tombe, le feu s'embrase, ... les morts, les blessés s'accumulent.

Le cinéma en a fait sa catastrophe naturelle préférée.

Mais on ne s'imaginait pas Haïti. Que conaît-on de ce pays, l'un des plus pauvres du monde? Qui sait qu'Anthony Kavanagh, Garcelle Beauvais et Sidney Poitier sont originaires de là-bas? Michelange Quay, Raoul Peck, Lise Constantin sont parmi les rares cinéastes haïtiens, mais ils tournent (à l'étranger). N'oublions pas le peintre Jean-Michel Basquiat ou l'écrivain Dany Laferrière (qui réalisa Comment conquérir l'Amérique, comédie canadienne sur un jeune immigré haitien).

On connaît Haïti, mais avec des images de bidonvilles, de pauvreté, de cocotiers. Ironiquement, l'un des premiers films montrant le pays, est un reportage sur un incendie qui ravageait la Place Pétion à Port-au-Prince, "Dernier incendie du 15 décembre 1899 à Port-au-Prince", qui fut diffusé le 30 décembre.

haiti2.jpgUne île isolée de la planète 7e art ou presque

Peu de cinéastes eurent l'occasion ou l'inspiration de tourner sur place. Et la production locale est presqu'inexistente (à l'exception de l'art vidéaste), malgré la présence d'institutions éveillant aux arts visuels. Le régime du dictateur Duvalier a coupé la population du 7e art qui devait se contenter de westerns ou de films avec Bruce Lee. Les haïtiens disposent de quelques complexes de cinéma qui appartiennent quasiment toutes au même groupe local.

Cela a conduit de nombreux artistes à l'exil. Personne ne voulait filmer Haïti, dont les besoins appelaient à d'autres priorités. C'est donc un cinéma de diaspora dont la figure historique s'appelle Arnold Antonin, documentariste et cinéaste, et le plus connu Raoul Peck, récemment nommé Président de la Fémis.

Haiti était pourtant mentionné dans Quantum of Solace, le plus récent James Bond. Mais Panama a fait l'affaire en matière de décors. Territoire du vaudou, quelques films y ont planté leur scénario, mais pas forcément leurs caméras. On mentionnera The Comedians (1967) avec Liz Taylor et Richard Burton , tourné au Bénin!, ou Vers le Sud  (2005) de Laurent Cantet (tourné entre Haïti et son voisin la République Dominicaine). L'horreur a souvent été comblée avec une telle île, de White Zombie en 1932 à un Wes Craven (L'emprise des ténèbres) en 1988, qui faisait d'Haïti le cadre du script à défaut d'en faire le décor.

haiti3.jpgDes célébrités se mobilisent

Deux jours après le séisme, Port-au-Prince est, vue du ciel, blessée de toutes parts, cicatrices béantes, urbanistiquement amputée. 50 000 morts selon les dernières estimations. D'inombrables blessés, des centaines de milliers de personnes sans toits, sans rien. Il est inutile de parler de cinéma : il y a un besoin de vivres, de médicaments et de soins, d'eau potable, ... La révolution twitter attendra, malgré la fascination des médias pour ces nouveaux outils qu'ils maitrisent si mal.

Aux Etats-Unis, comme nous vous l'annoncions sur Facebook hier, George Clooney a lancé l'idée d'un téléthon dès mercredi soir lors d'une soirée en l'honneur d' In the Air. MTV diffusera la collecte de fonds, présentée par Clooney lui-même, vendredi prochain. Son copain Brad Pitt et sa femme, Angelina Jolie, ont déjà versé un million de dollars en faveurs des secours. Charles Aznavour , ainsi que Stomy Bugsy, Grand Corps Malade, Princess Erika et une quarnataine d'artistes, vont enregistrer une chanson "Un geste pour Haïti chérie". Le clip incitera à faire un don pour la Croix Rouge et Médecins sans frontières. Le comédien et humoriste Anthony Kavanagh a lancé un appel ce matin sur une radio nationale pour que les chaînes télévisées organisent " une levée de fonds ou faire un Téléthon pour aider Haïti." Robert Hossein a indiqué que l'intégralité de la recette du 24 janvier de son spectacle Seznec sera reversée à Médecins du Monde.

 _____
haiti4.jpg Pour les dons, cette très bonne intiative du Monde : Haïti : à qui donner?

Actuellement, plus de 6 millions d'euros de dons ont été récoltés en France par les organisations humanitaires en France, dont 1 500 000 euros pour la Fondation de France (actions et projets postérieurs pour la reconstruction), 700 000 euros pour Terre Solidiaire, 650 000 euros pour Action contre la famin. Médecins du Monde et MsF ont chacun reçu 400 000 euros.

Spider-Man 4 se fait doubler par Thor… et met la franchise en péril

Posté par vincy, le 14 janvier 2010

sam raimi spidermanDepuis quelques semaines, les rumeurs n'étaient pas rassurantes. Kirsten Dunst avait laissé filtrer que Spider-Man 4 serait son dernier film, sous entendu qu'elle y mourrait. Et Sony, pour mieux le confirmer, avait commencé à négocier avec Anna Hathaway pour les épisodes 5 et 6. Puis, Sam Raimi ne cachait plus sa mésentente avec le studio. Le choix du méchant semblait un désaccord clivant. Sony voulant John Malkovich.

Tant de désaccords ont conduit à une rupture. Tobey Maguire ne sera pas Spider-Man dans le quatrième épisode. Et Sam Raimi a abandonné le projet. Pour Sony, le coup est rude. Déjà, il avait fallut annoncé le report du tournage, et donc du scénario. Le scénario ne convenait à aucune des parties. Celui de James Vanderbilt, qui parait-il reprendrait l'histoire à son origine (Peter Parker au lycée) a été préféré à celui de Sam Raimi (qui avait le soutien de Maguire) qui faisait évoluer le personnage. Derrière ces choix, il y a sans doute la volonté des producteurs de consolider sa franchise la plus profitable, alors que Marvel appartient désormais à son concurrent Walt Disney. Désormais, aucun héros de Marvel n'ira ailleurs que chez Disney. Autant capitaliser sur celui qui reste dans les murs.

Du coup Marvel et la Columbia avait remplacé Spider-Man 4 par Thor sur créneau du 5 mai 2011. Reléguant Spider-Man 4 aux calendes grecques, officiellement en 2012. Il faut trouver un casting complètement neuf, et un cinéaste. Sony a pour ambition de réussir ce qu'a fait la Warner avec la résurrection de Batman. Une nouvelle direction, donc, mais aussi une voie périlleuse. Contrairement à Batman, Spider-Man ne s'essoufflait pas et la génération de fans reste encore dans la cible.

Plus pragmatiquement, il peut s'agir aussi d'un impact  de la crise financière. Déjà la production de la comédie musicale Spider-Man Turn Off the Dark, mise en scène par Julie "Le Roi Lion" Taymor avec la musique de Bono (U2), a été reportée de quelques mois face au budget pharaonique. Les exigences de Raimi, Maguire et Dunst étaient sans doute énormes, notamment en matière de pourcentage sur les recettes. Or depuis quelques mois, Hollywood (et en fait les investisseurs de Wall Street) privilégient les productions sans stars. Ainsi les analystes financiers qui suivent la Fox (plus précisément son propriétaire, News Corp) ont préféré applaudir le succès d' Alvin et les Chimunks 2 que celui d' Avatar. Si les recettes mondiales n'ont rien en commun, l'un est largement plus "rentable" que l'autre : faire une suite à Avatar couterait plus cher, non pas en budget, mais en recettes à reverser à James Cameron.

Sony a été confronté au même problème. Un budget inflationniste, des recettes potentielles élevées mais stagnantes, et des stars de plus en plus gourmandes...

Le script finalement n'est que l'étincelle, ou le révélateur d'une crise plus financière qu'artistique.

Après Charlie Wilson, Hanks et Roberts font de nouveau la paire

Posté par vincy, le 13 janvier 2010

Roi et reine du box office des années 90, ne se débrouillant pas trop mal dans les années 2000, Tom Hanks et Julia Roberts vont se retrouver à l'écran. Trois ans après leur première collaboration dans La guerre selon Charlie Wilson, où il incarnait un politicien culotté et elle une milliardaire un peu réac, ils tourneront Larry Crowne. Selon Variety, il s'agira du parcours d'un homme contraint de se lancer, sur le tard, dans une nouvelle carrière. Tom Hanks a signé le scénario et devrait réaliser le film. Ce serait sa seconde fois derrière la caméra pour le grand écran (pour le petit, il a été légèrement plus prolifique dans des séries qu'il a produite), après That Thing You Do! en 1996. le film, avec Charlize Theron et Liv Tyler, entre autres, avait connu un succès modeste, mais suffisant pour être rentabilisé.

Serge Moati consacre son émission TV à Rohmer

Posté par vincy, le 13 janvier 2010

Parmi les TRES rares hommages de la télévision à Eric Rohmer, notons celui-ci : Cinémas, l'émission sur France 5 de Serge Moati (samedi 16 janvier à 17h55), recevra sur son plateau les comédiens Arielle Dombasle, Marie Rivière, Pascal Greggory et Melvil Poupaud. Accompagnés de Serge Kaganski (Les Inrocks), ils retraceront la carrière du cinéaste. Marie-Christine Barrault interviendra dans un document enregistré. L'actrice était déjà présente (sur plateau ce coup-ci) hier soir dans l'émission de Frédéric Taddei, Ce soir (ou jamais), sur France 3, qui diffusait (très tardivement) Ma nuit chez Maud.

Ce n'est pas parce qu'on s'appelle Rohmer que les patrons de chaîne vont bousculer leur magnifiques programmes...

Raoul Peck, nouveau boss de la fémis

Posté par vincy, le 13 janvier 2010

Le cinéaste Raoul Peck a été nommé président de la Fémis - l'Ecole nationale supérieure des métiers de l'image et du son - et remplace ainsi Claude Miller, qui assumait cette charge depuis 2007. Ironiquement, c'est le jour où l'un des plus meurtriers tremblements de terre a frappé Haïti, que cet ancien ministre de la culture de ce pays (1995-1997), a été nommé. Réalisateur de films remarqués comme Lumumba (plusieurs fois primés dans des festivals), L'homme sur les quais (sélectionné à Cannes), ou encore le récent Sometimes in April (beau succès international), il a été nommé par décret du président de la République, sur proposition du ministre de la Culture Frédéric Mitterrand.

Claude Miller avait eu la lourde responsabilité de trouver de nouvelles voies pour adapter la Fémis au monde audiovisuel actuel. Peck pourra les appliquer et surtout, sans doute, tisser des liens avec l'Allemagne, où il a longtemps étudié et travaillé, européanisant ainsi l'école.

Black Dynamite : le justicier le plus funky

Posté par kristofy, le 12 janvier 2010

blackdynamite.jpg"Can you dig it, bro’ ?"

L’histoire : Black Dynamite est le type le plus redoutable et le plus cool de toute la ville.
Avec un 44 Magnum dans une main et un nunchaku dans l'autre, il fait régner la peur des deux côtés de la loi. Fier de sa couleur, Black Dynamite est aussi le chéri des dames avec son style trop classe. Lorsque son frère est mystérieusement assassiné, Black Dynamite se retrouve au milieu d'un vaste complot

Notre avis : Black Dynamite peut-être vu soit comme une grosse farce qui tache ou comme une joviale comédie qui déteint, en tout cas on en voit de toutes les couleurs et sans répit. Le film nous rappelle surtout ce que l’on avait pu aimer dans les vieux films blaxploitation, une exagération de tout ce qui était cool qu’on ne voit plus guère. Black Dynamite est un pastiche du meilleur et du pire de cette époque, un revival ironique qui pourrait relancer un genre.

Black Dynamite en a dans le pantalon, gonflé à bloc : non seulement les filles sont à ses genoux mais en plus les méchants vont être à sa botte. Quand un brother se retrouve engrainé dans un mauvais biz alors il va l’aider, mais quand c’est son propre frère qui est retrouvé mort dans une sombre histoire de drogue alors il va exploser. Entre une succession de gags durant toute l’histoire, il va alors découvrir les dessous d’une conspiration contre sa communauté...

Black Dynamite réussit le tour de force d’être à la fois une parodie irrévérencieuse et un hommage nostalgique. C’est survitaminé et ça part dans tout les sens, vraiment jouissif. Le film joue autant avec les préjugés et la politique, tout en nous montrant des courses poursuites et des bagarres comme on n’en voit plus. Black Dynamite enfile les clichés blaxploitation comme des perles et se double en même temps d’une certaine déclaration d’amour au cinéma avec quelques trucages cheap et des faux raccords. C’est de la bombe, ce héros c’est de l’or en barre et le film c’est des barres de rires.

L’équipe était venue au dernier Festival Américian de Deauville montrer le film en avant-première avec l’acteur Michael Jai White, et Charmane Star. Le réalisateur Scott Sanders avait pris sa voix la plus grave pour chauffer la salle : « Hey vous, les chaudasses, les sales types, c’est finit les vacances, faites place au mec le plus cool que vous ayez jamais vu sur grand écran, il va vous faire frissonner…de plaisir, son nom c’est Black Dynamite, et il frappe déjà à votre porte, livraison spéciale, il va vous mettre le paquet ! »

Almodovar snobé par les Goyas

Posté par vincy, le 12 janvier 2010

Les Oscars espagnols ont révélé leurs nominations. Grand favori, sans trop de surprise, Cellule 211 qui cumule 16 nominations dans à peu près toutes les catégories. Le 4e film de Daniel Monzon, qui sortira en mai en France, a été l'un des trois gros succès nationaux au box office espagnol. Agora, champion local du B.O., d'Alejandro Amenabar, est aussi en très bonne position, y compris avec Rachel Weisz dans la catégorie de la meilleure actrice, avec 11 nominations. L'autre candidat cumulard c'est le film argentin Le secret de tes yeux, avec 9 nominations.

On constate surtout que les Goyas ont complètement snobbé Pedro Almodovar malgré la beauté entêtante d'Etreintes brisées. Il a été retenu dans les catégories meilleure actrice (Cruz), meilleurs costumes, meilleure musique, et meilleur scénario original.

Côté meilleur film étranger, la France oppose sa Palme d'or (Entre les murs) et son plus gros succès populaire (Bienvenue chez les Ch'tis) au multi-oscarisé Slumdog Millionaire et au film fantastique le plus primé de ces dernières années, Morse.

Eric Rohmer ou l’écume des amours (1920-2010)

Posté par christophe, le 11 janvier 2010

Eric RohmerC'est comme critique qu'il a fait ses premières armes. Son érudition et son acuité de jugement font référence. Cinéaste du théâtre des sentiments et de la morale, Eric Rohmer emprunte aux textes de Marivaux et de Musset leur causticité souvent cruelle qu'il mêle à un questionnement métaphysique. Ses Contes moraux et ses Comédies et proverbes épinglent les contradictions de ses héros et surtout de ses héroïnes post-adolescentes dans leur quête un peu narcissique de l'idéal amoureux. Oscillant entre un système parfois trop distant avec ses personnages et un sens aigu des tendances du comportement et des sentiments. Rohmer nous a livré régulièrement d'essentielles chroniques sur le libertinage d'aujourd'hui et l'éternelle difficulté d'aimer.

Réservé, secret, Jean-Marie Maurice Scherer a été professeur de lettres avant de se consacrer au cinéma. A partir de 1948, il écrit dans diverses revues dont Les Cahiers du Cinéma où il se lie avec les Jeunes-Turcs de la critique, les Truffaut, Godard et autres Chabrol. L'un d'eux, le romancier et bientôt scénariste Paul Gégauff le décrit avec humour: "Rohmer, c'est un honnête, un intègre, très prof". Rohmer a fait son apprentissage par des courts métrages amateur, en 16 mm muet, avant même d'écrire pour les Cahiers du cinéma. Certains de ces premiers essais n'ont apparemment jamais été répertoriés, et Journal d'un scélérat (1950), Bérénice (d'après Poe, 1954) et La Sonate à Kreutzer (d'après Tolstoï, 1956), sonorisés sur magnétophone, sont depuis longtemps invisibles.

En outre, il rate le départ de la "Nouvelle Vague": Le Signe du lion, avec Jess Hahn et Stéphane Audran, tourné en 1959 mais sorti en 1962, demeure confidentiel. Eric Rohmer doit attendre 1967 et le succès, public et critique, de La Collectionneuse pour connaître la notoriété de ses cadets. Devenu célèbre, il reste toujours aussi discret. A l'évidence, l'homme entend s'effacer derrière le cinéaste et laisser son oeuvre s'exprimer pour lui: "Au fond, je ne dis pas, je montre, je montre des gens qui agissent et qui parlent. C'est tout ce que je sais faire, mais là est mon vrai propos".

Contes moraux
Présenté au festival de Cannes en 1969, Ma nuit chez Maud, dont le premier titre était La Fille à bicyclette, est le quatrième des contes moraux réalisés par Eric Rohmer, et le troisième selon la numérotation que le cinéaste leur attribue. Jean-Louis Trintignant y est un ingénieur, catholique pratiquant, à la morale parfois ambiguë, nouvellement installé à Clermont-Ferrand. Un ami lui présente Maud, une jeune divorcée qui revendique sa liberté et qu'incarne Françoise Fabian. Au cours d'une discussion qui oppose évidemment leurs principes respectifs, Maud en arrive à accuser son interlocuteur d'être "un chrétien honteux, doublé d'un don Juan honteux". Cela n'entame absolument pas la fermeté ni la résolution du narrateur : il ne cède pas au charme de Maud et se décide même à aborder Françoise (Marie-Christine Barrault), la jeune fille qu'il s'est promis d'épouser.

"Tandis que le narrateur est à la recherche d'une femme, il en rencontre une autre qui accapare son attention jusqu'au moment où il retrouve la première". C'est ainsi que Rohmer résume le sujet de ses Contes moraux. Dans L'Amour l'après midi (1972), le narrateur, Frédéric/Bernard Verley, est plus que jamais amoureux de sa femme Hélène/Françoise Verley. Dans un contexte social et religieux où la monogamie est la règle, Frédéric se prétend comblé: "En étreignant Hélène, j'étreins toutes les femmes; je rêve que je les possède toutes". Et pourtant lorsqu'il retrouve Chloé, l'amie d'autrefois, il se prend à envisager "vivre deux vies en même temps" avec l'épouse et avec la maîtresse. "Je rêve d'une vie qui ne soit faite que de premières amours et d'amours durables; c'est dire que je veux l'impossible". Aussi Frédéric revient-il vers Hélène, au nom de principes moraux qui condamnent la polygamie. Et ainsi ont fait, avant lui, les personnages des Contes moraux. Heureux, sages ou résignés ?

Comédies et proverbes
"On continuera à parler beaucoup dans ces Comédies. On essaiera moins d'établir une attitude morale que des règles pratiques. On n'y débattra plus guère des fins, mais des moyens..." (E. Rohmer) De La Femme de l'aviateur (1981) à L'Amie de mon amie (1987), le cinéaste observe, avec l'apparent détachement du scientifique, les errances d'une jeunesse à la recherche de repères moraux sur une carte du Tendre dont la société a perdu la boussole. "Il ne faut pas chercher à connaître une époque par ce qu'on en dit. A mon avis, on la connaît d'autant plus si l'on s'attache au particulier et non au général. En prenant des gens qui vivent maintenant, ils sont forcément situés dans le présent, mais également dans l'éternité, dans l'immuable, parce qu'il y a des soucis qui ont toujours existé" (E. Rohmer)

Le rayon de la lune
De ces soucis, La Marquise d'O (1976) et Perceval le Gallois (1979) avaient dit la permanence, d'hier à aujourd'hui, au coeur du Moyen Age comme au début du XIXe siècle. Le prétexte en est "tout simplement cette chose totalement imprévisible qu'est l'amour" et dont "le feu doit prendre tout de suite, comme par surprise" (Marion/Arielle Dombasle, Pauline à la plage, 1983), ou se révéler "profond et durable parce que comme la vie [il] est dans le temps" (Pierre/Pascal Greggory, ibid) ; l'amour dans lequel entre "une part de volonté" (Sabine/Béatrice Romand, Le Beau mariage, 1982) alors que pour Louise et Rémi (Pascale Ogier et Tchéky Karyo), à l'inverse, il apparaît et disparaît Les Nuits de la pleine lune, (1984), comme si l'astre de la nuit était le seul maître du destin des hommes.

L'amour dont l'absence condamnerait Delphine (Marie Rivière) à la solitude si n'apparaissait à l'horizon de l'infini Le Rayon vert (1986), dont la fulgurante lumière impose le silence aux morales, aux certitudes, aux proverbes, à tous ces dérisoires remparts de mots qu'érige l'être humain pour se protéger de l'inconnu. Un silence semblable à celui de L'heure bleue qu'attendent la fille des champs et celle des villes (Joëlle Miquel et Jessica Forde, Quatre aventures de Reinette et Mirabelle, 1987), entre la nuit et l'aube, lorsque, dans la paix de la nature, tout paraît possible, même le bonheur.
C'est dans ces instants de plénitude et de beauté qu'Eric Rohmer s'est enfin révélé...

Du cinéma de Singapour et de Malaisie au Centre Pompidou

Posté par Claire Fayau, le 10 janvier 2010

singapourmalaisie.jpgLe Centre Pompidou , entre un beau programme sur Yoshida et une future rencontre avec Kitano, délaisse un temps le Pays du Soleil Levant pour s'intéresser à deux cinémas asiatiques moins connus, mais qui gagnent à l'être par leur inventivité : ceux de Singapour et de Malaisie. En effet ces deux petits pays producteurs de cinéma, peu habitués aux grands festivals, mélangent leurs influences chinoises thaïlandaises, bollywoodiennes et locales.

Depuis le 16 décembre 2009, le cycle "Singapour, Malaisie : le cinéma !" propose un éventail de films, pour la plupart inédits en France. Ce week-end, c'est le cinéaste singapourien Eric Khoo qui a présenté  le long métrage Mee Pok Man qui l'a "lancé" mercredi dernier, qui est en vedette. Au programme, Be With Me, une œuvre chorale sélectionnée à la Quinzaine des réalisateurs en 2005, My Magic, présenté en compétition à Cannes en 2009, et enfin 12 Storeys, une comédie douce-amère sur les habitants d'un immeuble à Singapour.

Le prochain rendez- vous est fixé le jeudi 21 janvier à 20 heures pour une séance exceptionnelle "Du côté de la Malaisie et de Singapour", présentée par Chris Chong Chan Fui (cinéaste et artiste visuel malaisien), Ming Wong (artiste de Singapour) et le curateur Tang Fu Kuen. Puis, le vendredi 22 janvier à 20h30, vous pourrez retrouver le dernier film du malaisien Chris Chong Chan Fui, Karaoke, sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs 2009. Le samedi 23 janvier, Amir Muhammad, cinéaste et écrivain, présentera son dernier film, Malaysian Gods, un documentaire inédit sur des manifestations populaires en Malaisie en 1998. Retour sur un malaise politique en Malaisie. Le lendemain, Muhammad continue sur sa lancée avec The Big Durian, une enquête mêlant documentaire et fiction sur la propagation d'une rumeur qui manqua de provoquer des émeutes raciales en Malaisie.

Le samedi 6 février,  Liew Seng Tat nous montrera son premier long métrage, Flower in the pocket, qui a reçu un Tiger Award au Festival International du Film de Rotterdam 2008, spécialisé dans les films expérimentaux, les productions indépendantes et les nouveaux talents. Puis , James Lee , sera présent pour son Call if you need et Woo Ming Jin leur succédera pour Woman on fire looks for water. Le jour d'après, dimanche 7 février, Ho Yuhang, cinéaste malaisien, vient présenter son coup de maitre Rain Dogs (2006) avec en caméo la cinéaste Yasmin Ahmad, décédée prématurément cet été.

Pete Teo, Tan Chui Mui, Liew Seng Tat, le producteur et deux des réalisateurs du film collectif  "15 Malaysia" viendront présenter ce projet unique et 100% malais. Et le lundi 8 février, place aux femmes avec Tan Chui Mui, une des rares cinéastes femmes de Malaisie, pays musulman, qui défendra son premier long métrage, Love Conquers All, sélectionné dans de nombreux festivals et primé au Festival International du Film de Rotterdam 2007.

55 films se succéderont jusqu'au 1er mars 2010. Pour plus détails sur les séances, voir le Le programme complet

Berlin 2010 : Votez pour l’Ours des Ours d’or

Posté par vincy, le 9 janvier 2010

artetv-berlinale.jpgPour ses 60 ans du festival de Berlin, la chaîne de télévision franco-allemande Arte vous propose d'élire l'Ours d'or des Ours d'or parmi les 69 (pas très érotiques) décernés dans l'histoire. Vous avez jusqu'au 11 février sur le site dédié d'Arte.Tv. Les dix premiers seront diffusés sur la chaîne télévisée.
Le site oblige à bien regarder toutes les affiches. Ce qui est intéressant c'est évidemment de constater la lente transformation du cinéma à travers ces ours. d'un cinéma européen populaire à un cinéma très confidentiel, les Ours d'or ont su se mondialiser et s'ouvrir à des films plus grand public.
Pour l'instant, sans doute à cause d'une communication assez faible, il y a peu de votes. Ce qui veut dire que le Top 10 très années 2000 n'est pas définitif.